Marques Comment réussir leur internationalisation
Clés de départ d'une internationalisation réussie : le nom et les valeurs de la marque, alliés à une connaissance approfondie des consommateurs et des marchés. Mais, malgré l'apport des études marketing, bien des impondérables peuvent faire de chaque lancement de marque hors de ses frontières un véritable pari.
L'impact sur les cours de Bourse de l'enquête annuelle d'Interbrand,
cabinet américain de conseil en évaluation des marques, souligne, si besoin
était, que la mondialisation accrue des affaires est non seulement une source
de profit, mais engendre aussi une montée des risques. Les turbulences qui ont
frappé la valeur de la marque Coca-Cola en 1999 sont bien la preuve de la
difficulté de l'internationalisation et de ses effets sur la valeur d'une
marque. Coca-Cola, qui reste néanmoins, la marque la plus chère au monde en
2000, a vu sa valeur chuter en un an de 85,8 Md$ (juin 1999) à 72,5 Md$ (juin
2000). Conséquences de douze mois difficiles pour la marque : ralentissement
des ventes, suppression massive d'emplois, blocage des acquisitions de
Schweppes et d'Orangina, mise en cause de la marque pour discrimination
raciale, démission de Douglas Ivestir, son P-dg, crise de confiance due à une
intoxication de consommateurs français et belges, qui a provoqué le retrait des
produits des linéaires pendant un temps... Une récente enquête de TMO pour
l'agence Edelman a montré que 23 % des Français s'interrogeaient encore sur les
causes de la crise qu'a connue cette marque. Les souvenirs de crise restent
donc bien présents dans les mémoires. Et pourtant, malgré les difficultés,
rares sont aujourd'hui les marques qui ne se veulent pas internationales.
L'extension géographique est aujourd'hui une condition sine qua non de survie
pour une majorité d'entre elles. Pour réussir l'implantation d'une marque à
l'international, le chemin est parsemé d'embûches que les sociétés d'études
s'efforcent d'aplanir pour leurs clients.
Le nom comme point de départ
Au commencement, était le nom. Du moins, c'est ce qui
devrait se passer. « Le nom est comme un joueur dans cet ensemble qu'est le mix
produit », notent Muriel et Pierre Bessis dans "Les noms qui gagnent,
l'alchimie des noms irrésistibles" (Les Presses du Management). « Un nom
uniquement destiné au marché national n'existe pratiquement plus, souligne
Marcel Botton, P-dg de Nomen International. Aujourd'hui, quand on parle du
marché français, on devrait parler du marché local, car l'Europe est devenu
notre marché national. Peut-on aujourd'hui prendre le risque d'utiliser un nom
qui soit ridicule hors de nos frontières et ne pas le tester ? » D'autant
qu'Internet a rendu la vitrine visible du monde entier. Cristal d'Arques (dont
le nom sonne comme Dark Cristal en anglais) a dû utiliser une autre marque pour
les pays anglo-saxons : J.-G. Durand. « Un bon nom, remarque Patrick Cru, P-dg
de Market Audit. Quand vous investissez un million de francs dans un nom, vous
en récupérez trois en business. Cela peut être le début d'une success story.
Mais il ne faut pas se tromper. » Ce qui fut le cas pour la ligne de bain
Cléopatra (Colgate), vouée à l'échec dès le départ car son nom ne fut pas
étudié à l'international. Depuis quelques années, Procter & Gamble a un
principe : toute nouvelle marque porte le même nom dans le monde entier. C'est
le cas de Swifer, Fébrèze, Dryel. Pour les nouveaux produits lancés sous des
marques qui existent déjà (Ace Délicat, Ariel Essential...) le sous-nom fait
l'objet de tests pour connoter partout le bénéfice voulu. Ainsi pour Ace, dont
la marque existait dans le portefeuille de P & G en Italie, il a été décidé de
lancer le nouveau produit javel anti-tâche sous la marque Ace en lui ajoutant
un sous-nom. Ce fut Ace Gentile en Italie, Ace Délicat en France, Ace Milde
Bleich en Allemagne, Ace Gentle Bleach en Grande-Bretagne. Colgate, quant à
lui, utilise le nom Ajax partout dans le monde, ainsi que la marque Colgate
pour l'hygiène bucco-dentaire et Palmolive pour les produits d'hygiène. Tahiti,
pourtant leader en France, risque donc d'être condamnée à terme. « La politique
de la maison est de développer les "equity" », constate Dominique Esmieux,
Consumer Insight Senior Manager chez Colgate Palmolive.
Des tests de validation linguistique
Les sociétés de création de noms ont
développé différents outils de validation linguistique à l'international
(Ipsos, Nomen, Bessis...). « Nous sommes de plus en plus consultés pour
conduire en même temps ce type de test sur les cinq langues majeures
européennes, sur les langues arabes, d'Europe centrale, d'Asie et d'Amérique
latine, constate Catherine Veillé, directeur général d'Ipsos Insight Marques.
Et, de plus en plus souvent, on y ajoute des approches plus marketing, comme
Mark Identité qui interviewe les cibles concernées en quali. » Ainsi, au moment
de la fusion d'Adia et Ecco, Ipsos a testé linguistiquement le nouveau nom,
Adecco, dans un très grand nombre de pays pour s'assurer qu'il ne posait pas de
problème. Nomen a, quant à lui, testé dans plusieurs dizaines de pays le nom
Vivendi. Et, lorsque Philips a voulu lancer une gamme de téléphones mobiles,
son nom a été testé non seulement dans toutes les langues européennes et
américaines, mais aussi en mandarin et en chinois. Autre exemple : une banque a
fait tester le nom d'un nouveau produit de placement dans toutes les langues
européennes, y compris scandinaves, aux Etats-Unis mais également au Japon, en
Corée, à Singapour, à Hong-Kong et au Brésil. « En Asie, les tests de noms sont
d'autant plus difficiles que les mots sont chargés de sens, remarque à ce
propos Laurence Varga, responsable quali de Taylor Nelson Sofres France. Il est
important de bien traduire les noms des marques et de faire en sorte que les
caractères aient un sens. Le nom doit fonctionner en son et en sens et être
adapté à l'univers du produit. » Exercice d'autant plus périlleux que, par
exemple, les prononciations sont différentes entre le mandarin et le shangaïen.
Peugeot l'a d'ailleurs appris à ses dépens.
Capitaliser sur les marques fortes
« Nous sommes entrés dans une nouvelle époque pour
les marques », constate Chantal André, directeur associé RI Marques et
Communication. Alors qu'il y a quelques années, on parlait de problématique de
rationalisation de portefeuille de marques, avec pour conséquence la
disparition de certaines, pourtant très connues localement, on se trouve
désormais à une époque où les grands groupes, après avoir fait le ménage,
capitalisent au maximum sur des marques phares qu'ils essayent de décliner au
maximum par des extensions sur d'autres territoires (Taillefine en est un
parfait exemple). L'Oréal regroupe ainsi toutes ses marques à l'étranger sous
la marque L'Oréal. Danone a lancé en Europe de l'Est des biscuits et une eau
minérale sous le nom Danone. Les études de marques ont donc évolué pour passer
des simples études de brand equity à des études d'aides à la capitalisation des
marques phares avec une attention particulière portée à la fidélisation
(Loyalty Driver de RI, Conversion Model de TNS, Loyalty Plus de GfK...).
Thomson Multimédia, par exemple, qui a pris la décision d'utiliser une marque
unique à l'international, a fait appel au Conversion Model dans 11 pays. « Il
est important de vérifier que les fondamentaux de la marque dans son pays
d'origine fonctionnent dans tous les pays où on veut l'emmener », souligne
Jérôme Simulin, directeur du développement de Novaction. Important aussi de
vérifier que la marque génère à l'étranger les mêmes codes que sur son marché
local. « Une marque, c'est un paquet de valeurs, souligne Catherine Becker,
directeur associé de Sorgem. Certaines grandes marques qui avaient des
propositions produits depuis des années à l'international, ont compris, après
coup, qu'il fallait construire des territoires de marques et de légitimité. »
Car, fait remarquer Yves Krief, P-dg de Sorgem, « la marque a une logique
interne qui se crée toute seule. C'est une entité objective qui a une vie
propre qui surprend ses propriétaires eux-mêmes ».
Le tracking de marque à l'international : une pratique qui se développe
D'où un
besoin de suivi quantitatif, véritable tracking de marque. Sorgem propose avec
Repères la "Force de Marque Système" qui permet la comparaison dans le temps et
dans l'espace et définit les indicateurs de gestion de la marque. TNS a mis en
place, en 1997 et pour L'Oréal, un outil de mesure de l'acceptation de son
slogan "Parce que je le vaux bien" afin de comprendre la légitimité de la
marque. L'étude transmarchés et transfrontières part de l'hypothèse que la
communication construit une image de L'Oréal mais que cette image peut varier
en fonction des produits achetés. L'étude est conduite annuellement sur une
dizaine de pays européens et scandinaves et tous les deux ans en Asie, à chaque
fois auprès d'un échantillon représentatif de 1 000 femmes. Cette année pour la
première fois, la Turquie a été ajoutée à la liste des pays étudiés. « J'ai
rarement vu des évolutions aussi spectaculaires, admet Chantal Lasocka,
directeur général adjoint de Taylor Nelson Sofres. Entre 1997 et 1999, le gain
en présence à l'esprit a fait un bond en avant énorme et le gain d'image sur
les dimensions de dynamisme, d'innovation et de statut prestige a été tout à
fait significatif. » Pour Axa, l'Ifop mène un baromètre d'image dans 18 pays. «
Au cours des années, nous avons ajouté quelques pays, enlevé quelques autres,
en fonction de la stratégie d'Axa à l'international », explique Olivier Boby,
directeur Gallup et directeur Grande Consommation de l'Ifop. Quand il s'est agi
de rajeunir la marque Cointreau à l'international, The Added Value a mené des
études dans 7 pays.
Tester le potentiel
Une fois le
nom testé, la valeur de la marque analysée, la marque protégée juridiquement
(une phase trop souvent négligée), il faut s'assurer de trouver les bons pays
où se lancer et comprendre les leviers des marchés et les attentes des
consommateurs. Detector de Novaction (et Detector Par pour tester le taux de
perméabilité) permet de déterminer dans quel pays le lancement peut être le
plus facile et le moins cher. Perceptor analyse les attentes du consommateur.
Autre nom pour les U & A, les études consommateurs, à l'inverse de ces
dernières, ne sont pas des études de fond très descriptives mais plutôt « des
études directement opérationnelles », comme les décrit Helen Zeitoun, directeur
général de GfK Sofema France. Evolution récente : les U&A, pendant longtemps
presque toujours locales, se font aujourd'hui à l'échelle internationale avec
pour objectif de pouvoir comparer les résultats d'un pays à l'autre tout en
restant proche du local. Mais, parfois, les clients se passent d'U&A et se
contentent de test de concepts. Ipsos New Product Development vient de lancer
Concept Evolution, un produit directement opérationnel ainsi que Market
Evolution, une version simplifiée des U&A. « Il existe chez l'annonceur un
besoin de simplicité afin de s'approprier facilement les études », constate
Marie-Christine Bardon, responsable d'Ipsos New Product Development. Quant à
Brand Evolution, qui prend les points essentiels des marques, il est greffé sur
l'analyse de segmentation ou sur des U&A. L'outil permet, par exemple, de
segmenter selon l'instant de consommation. « Selon cet instant, la marque n'a
pas la même image », souligne Marie-Christine Bardon. Parallèlement, pour mieux
comprendre et anticiper les consommateurs dans les autres pays, les entreprises
sont très friandes de suivis des styles de vie type CCA ou des courants
socioculturels de SocioVision Cofremca ou du système Risc (fort utiles
également à des fins de communication globale). Elles sont également à la
recherche d'outils de veille sur l'évolution des tendances (Trends Scouts de la
Sorgem, Observatoire des tendances de Louis Harris,...).
Sur quels pays tester ?
Comment choisit-on les pays pour les études
consommateurs quand on veut se lancer à l'international ? Pas de règles, mais
des constats. En fait, tout dépend des budgets consacrés au lancement et des
priorités stratégiques. L'étude se fera ainsi dans tous les pays phares pour la
marque. En Europe, il s'agira des cinq grands marchés, quand on a de l'argent,
et de trois quand on en a moins. Le choix des pays dépend aussi du produit. Il
ne sera pas le même s'il s'agit de café ou de fromage. Pour certains produits,
on prendra les pays scandinaves en plus des grands marchés ; pour d'autres, on
privilégiera les pays d'Europe du Sud ou les pays d'Europe de l'Est. Les
Parfums Christian Dior font d'emblée leurs études U&A, tests de produits, tests
de concept et études d'image à l'international. Ils étudient systématiquement
les Etats-Unis, le Japon et la France, ce qui est un minimum, mais couvre bien
toutes les différences culturelles et de consommation de leurs marchés. « La
plupart du temps, on cherche le pays qui représente le mieux la région, le type
de produit et, dès qu'il y a une contrainte budgétaire, on teste moins de pays
», explique Olivier Boby. La Belgique et les Pays-Bas sont souvent sacrifiés
par les entreprises, la Suisse oubliée car trop chère. Procter & Gamble a testé
Swifer en France, qui a servi de marché test pour le monde. Ace Délicat a été
testé en Italie et uniquement validé en France. Dryel a été testé aux
Etats-Unis pendant six mois puis en Irlande pour l'Europe. « Le problème des
marchés tests en Europe, c'est qu'ils sont souvent bookés à l'avance, remarque
Pascal Houdayer, directeur études et marketing de P&G France. Pour Dryel, le
premier marché test a validé les principes du lancement dans le monde, le
second a validé les éléments du marketing mix (animation magasin, offres
promotionnelles, théâtralisation en magasin, test de trois films publicitaires
différents). » Pour Ariel Tablets, P & G a fait procéder pendant un an à un
marché test en Grande-Bretagne pour l'Europe. Ce qui a permis d'affiner la
formule et le mix. Résultat : de 15e marque sur le marché, Ariel Tablets est
passé n° 2 après trois mois de campagne de publicité. Enfin, n'oublions pas
que, pour des raisons de confidentialité et quand l'enjeu l'exige, les
entreprises ont aussi recours aux marchés tests simulés : Bases, Designor...
Dans un souci d'efficacité, une politique d'homogénéisation des tests pub
Comment s'effectuent les lancements ? Pays par pays,
simultanément ? Tout dépend de l'historique de la marque. Même pour une
nouvelle marque à vocation globale, on peut constater que rares sont les
lancements simultanés dans le monde entier qui demanderaient des
investissements trop lourds. Des sociétés comme P & G, par exemple, lancent
d'abord aux Etats-Unis et un an après en Grande-Bretagne, Allemagne, Suisse et
Autriche, puis en France et en Belgique. L'Oréal commence par la France et
quelques pays européens, puis vise les autres pays européens, puis les
Etats-Unis et l'Asie. Il existe par ailleurs une clause au niveau du dépôt de
marque qui n'est pas sans conséquence sur les lancements. Si la marque déposée
n'a pas été utilisée au bout de 5 ans, elle peut être attaquée en déchéance. «
Ce délai de cinq ans interdit des développements trop lents », fait remarquer
Marcel Botton. D'où un phénomène de lancements relativement groupés dans le
temps qui a pour conséquence une forte demande de capitaux. Juste avant le
lancement se pose aussi la question des tests de publicité. L'existence de
méthodologies identiques donc comparables dans le monde est l'une des raisons
de choix d'un groupe de sociétés d'études. Ipsos-ASI vient d'ailleurs de lancer
une nouvelle génération de pré-tests publicitaires, packagés pour le monde
entier, Next TV, que Colgate, par exemple, a utilisé au Moyen-Orient. Ipsos
travaille également sur un projet d'outil, européen d'abord et à terme
international, le Marketing Brand Equity, qui mesure les leviers afin
d'optimiser la Brand Equity. Pourtant, quelles que soient les études menées,
force est de constater que les lancements internationaux n'aboutissent pas
toujours au succès escompté. Doit-on mettre alors en cause les études ? A moins
d'une erreur flagrante d'échantillonnage ou de passation de questionnaire (il
existe des sociétés d'études spécialisées dans le contrôle qualité terrain
comme OCRD qu'Elizabeth Guidicelli est en train d'internationaliser), la raison
d'un échec doit être cherchée ailleurs. Et presque toujours chez le client.
Car, même si les études ont amené à certaines réserves sur un pays,
l'entreprise peut décider d'y aller néanmoins, pour des raisons stratégiques,
pour être présente partout, pour rentabiliser une usine, pour des raisons de
concurrence... Tant pis pour les études.
Procter & Gamble : une stratégie internationale globale
INTERVIEW DE PASCAL HOUDAYER, DIRECTEUR ÉTUDES ET MARKETING DE P & G FRANCE.
« Le lancement de marques au niveau global est devenu une des réalités stratégiques de P & G Monde. Mais il faut distinguer deux types de lancements : ceux qui répondent à une attente consommateur nouvelle ou existante, mais non encore satisfaite ; et ceux de nouveaux produits qui viennent comme de nouvelles marques dans un marché existant. Fébrèze est le meilleur exemple récent du premier. La gamme Essential (Tide Essential/Ariel Essential) est un bon exemple du second. Qu'il s'agisse de Fébrèze ou d'Ariel Essential, tous les deux seront lancés simultanément, avec un tronc commun d'études et de formulation, complétés par des études spécifiques (communication, mise sur le marché, positionnement prix) selon les pays. Schématiquement, le rétro planning d'un tel lancement se présente de la façon suivante. Une fois que l'idée produit est née (venant soit de la R & D, soit des études consommateurs menées par le département Etudes et Marketing), on teste son approche conceptuelle au moyen de focus group qui servent à optimiser le concept. Des tests concept et utilisation suivent, complétés par une évaluation du potentiel au niveau local et extrapolation au niveau mondial, avec généralement pour l'Europe, un test dans un pays d'Europe du Nord et un pays d'Europe du Sud, le pays dépendant de la catégorie de produit. A ce stade, si le potentiel est déclaré suffisant, la décision de lancer est prise sans nouvelles études. Si, au contraire, le lancement représente un investissement majeur, d'autres études viennent renforcer la décision : des marchés tests (type Scannel) ou des marchés test simulés (type Bases). Complétés parfois par des tests de prix, des tests de communication (prétests ou post-tests Ipsos). Vient ensuite le monitoring du lancement avec home visit et au bout de trois mois, des études quantitatives ad hoc pour mesurer la notoriété, le taux d'essai et le réachat. Entre le lancement sur le marché et la fourniture par les sociétés de panels de leurs données, nous réalisons trois études U & A de ce type. Ce sont des procédures répétitives et coûteuses (si une méthodologie n'existe pas, nous la faisons créer) mais Procter & Gamble veut se donner les moyens de bien comprendre les marchés et les consommateurs afin que ses lancements soient des succès. »
Colgate : une approche internationale pas à pas
INTERVIEW DE DOMINIQUE ESMIEUX, CONSUMER INSIGHT SENIOR MANAGER DE COLGATE PALMOLIVE AFRIQUE DU NORD/MOYEN-ORIENT
« Chez Colgate, on dit oui à la globalisation mais à notre rythme. Quand je veux lancer un nouveau produit dans un autre pays, je commence d'abord par essayer de comprendre le comportement des individus au moyen d'études documentaires et d'études de marché pour connaître la consommation, le niveau de vie, la distribution, la concurrence, puis par des études consommateurs qui, pour moi, sont la clé pour comprendre le consommateur. Je fais faire alors des U & A sur les catégories qui m'intéressent. Dans un pays comme Madagascar, territoire où nous avons pris la décision de nous implanter en direct en 1999, trouver des fournisseurs d'études n'est pas toujours facile. Dans ce cas précis, il a fallu aller chercher une société à l'île Maurice. Le niveau d'investissement études consacré à un pays dépend de l'importance présumée du marché. Pour certains pays comme Madagascar, qui représente, certes un potentiel, mais un marché, pour nous, relativement petit, nous allons chercher dans notre catalogue de produits celui qui convient le mieux et nous nous limiterons à une mesure quantitative de la concurrence, des intentions d'achat, de la fréquentation des marques et du packaging pour obtenir une vision chiffrée des forces en présence. Nos banques de données études sont là aussi, pour conforter les informations obtenues. C'est pourquoi je privilégie la continuité des méthodes afin de pouvoir comparer dans le temps et dans l'espace. Il est fondamental de pouvoir construire une base de connaissances pour confronter ce que l'on vient d'apprendre avec ce que l'on connaît déjà d'un marché. C'est aussi une façon d'utiliser les ressources sans pour autant gonfler les budgets études. »
LeasePlan : une nouvelle stratégie de marque à l'international
Présent pourtant dans 20 pays, LeasePlan, un des leaders mondiaux dans la gestion de flotte, avait un problème de reconnaissance à l'international. A l'issue d'une compétition organisée par Vidéothèque, le brand management international de l'entreprise a confié à l'agence Munier BBN le pilotage de sa marque, tant au niveau global que local. En moins d'un an, l'agence a repositionné la marque depuis la démarche de planning stratégique jusqu'à l'expression écrite. Au coeur du dispositif, 3 étapes clés : 1) Mise en place chez le client d'une structure internationale de pilotage de la marque (Brand Champion, Brand Manager, Steering Committee, Local Brand Manager) ; 2) Audit de la marque et du marché dans 23 pays. A ce stade, toutes les études dont disposaient l'entreprise ont été re-analysées au travers du seul prisme de la marque ; 3) Elles ont été complétées par une analyse sémantique du discours de la marque et par une étude "Atmosphere Imagery Mapping", une analyse sémiologique des valeurs portées par la marque à partir de la réaction des interviewés à 80 images et 18 mots correspondant aux valeurs portées (ou non) par la marque. A partir de là, ont été définies les valeurs existantes et souhaitées de la marque et son profil pour les cinq années à venir. Un Brand Manual a été produit pour expliquer la nouvelle marque et la mise en oeuvre de son application (dont une campagne de communication corporate mondiale prévue pour 2001). Pour faire passer habilement la nouvelle stratégie en interne, l'agence Munier BBN a complété le dispositif d'un jeu, "Value Game", qui se joue à 6 ou 8 joueurs et permet de faire prendre conscience aux collaborateurs de l'entreprise partout dans le monde, de l'influence positive ou négative de leur comportement sur l'image de la marque.