#NRF2021 Comment Walmart s'adapte à la nouvelle donne économique
Ira Kalish, chief global economist au sein du cabinet Deloitte, et Janey Whiteside, executive vice president de Walmart, font le point sur l'évolution des comportements depuis le début de la crise du Covid-19 aux Etats-Unis, évolution à laquelle l'enseigne s'est adaptée en un temps record.
Je m'abonneSelon Ira Kalish, chief global economist au sein de Deloitte, le ralentissement de la croissance a disrupté le retail de manière jamais vue auparavant. La variante anglaise du virus a déjà un impact économique négatif aux États-Unis. Deloitte prévoit un trimestre à croissance du PIB très lente, ou même négative. Nous pensons que durant toute l'année 2021, l'économie croîtra lentement et nous assisterons à une destruction substantielle de la consommation. Toutefois, nous devrions constater un pic d'activité en fin d'année, lorsque les consommateurs, redevenus confiants dans la lutte contre le virus, reprendront de façon normale leurs interactions sociales. [...] Il est possible que le marché de l'emploi soit encore bouleversé. [...] Le support financier de l'Etat devra être intensifié à destination des ménages et des entreprises jusqu'à ce que la population soit largement vaccinée.
Ira Kalish: Comment Walmart s'est-il adapté à cette pandémie ? Quelles conséquences a-t-elle sur la demande des consommateurs et sur la chaîne logistique ?
Janey Whiteside: Cette année passée était inédite. Nous avons bien sûr constaté une hausse de la demande, à l'instar de tous les retailers. Cette dernière changeait quasiment chaque semaine: produits d'entretien, jeux, matériel scolaires, machines à coudre pour fabriquer ses propres masques, matériel pour faire des travaux chez soi, matériel de pêche, vélos... La chaîne logistique robuste que nous avons bâtie les années précédentes a permis de faire face à tout cela. [...] Nous avons constaté une incroyable hausse de l'intérêt pour les services tels que le click and collect et la livraison à domicile. Cette période a permis un bond d'au moins cinq ans en quelques semaines sur le développement et l'adoption de ces services. Nous avons ouvert 40% de créneaux de livraison supplémentaires par rapport à la période précédant l'épidémie. Nous avons pu rapidement mettre en place un service de livraison expresse, en deux heures, très recherché par nos clients.
Par ailleurs, nous nous sommes concentrés sur la sécurité sanitaire: Walmart a rapidement imposé le port du masque, nous avons instauré la livraison sans contact. Il s'agissait aussi d'organiser des files d'attente à l'extérieur des magasins, d'accueillir nos clients différemment, de gérer les flux à l'intérieur des magasins. Tout cela demeure une priorité pour nous, d'autant que nous entrons dans une nouvelle vague.
IK: Comment Walmart répond-il à l'insécurité financière d'une partie de la population, sachant que cette pression peut continuer à l'issue de la pandémie?
JW: La clientèle de Walmart n'est pas à l'abri du ralentissement économique. Au mois de novembre, près de 50% nos clients affirmaient être inquiets face à la situation économique et 40% n'attendaient pas d'amélioration prochaine. Il est donc crucial de rendre les produits mais aussi les services accessibles. Nous savons que nos clients veulent continuer à économiser de l'argent sur les produits de première nécessité via des promotions, des produits packagés en plus petits quantité [...] Le concept de dépenser moins pour mieux vivre est plus vrai que jamais. [...]
IK: Nous avons assisté à un véritable virage digital. Comment devez-vous procéder pour conserver leur rôle aux magasins et faire simultanément de Walmart un véritable hub digital pour les acheteurs en ligne?
JW: [...] Au premier trimestre 2020, nous avons remarqué un pic de 300% concernant l'utilisation de la livraison depuis un magasin et du click and collect. Walmart est en capacité de proposer un service de proximité, puisque 90% de la population américaine réside à moins de 16 kilomètres d'un magasin Walmart. Nous sommes capables de gérer les stocks de tous les magasins de manière unifiée, ce qui constitue un véritable avantage. [...]
IK: Êtes-vous une "data company" [entreprise dont le coeur de métier est l'exploitation de données]?
JW: Les clients réclament un service personnalisé. Par exemple, au sein d'un commerce de proximité, ils attendent d'être reconnus et appelés par leur nom. Cette attente s'est étendue au commerce en ligne. Ils ne souhaitent pas qu'un site leur présente des produits qui ne les intéressent pas. Nous possédons des services financiers, pharmaceutiques: nous devons réfléchir à toutes les données que nous collectons afin de les utiliser de façon à améliorer le service rendu. Par exemple, quelqu'un qui souffre d'une maladie coeliaque doit manger sans gluten, il est donc intéressant de croiser ses données de santé avec des recommandations alimentaires. Il faut collecter et utiliser les datas d'une façon qui soit acceptée par les consommateurs et suscite la confiance.