Le commerce face au défi sécuritaire
La consommation est un épais mystère en temps normal. Entre repli et sursaut national, quel sera le comportement des consommateurs suite aux attentats ?
Je m'abonneJeudi 19 novembre à 10h15, Martine Pinville, Secrétaire d'Etat chargée du Commerce, de l'Artisanat, de la Consommation et de l'Economie sociale et solidaire, s'est rendue, avec Michel Cadot, Préfet de police de Paris, à la rencontre des commerçants et des consommateurs parisiens Place Diaghilev (Paris 9ème), aux Galeries Lafayette et au Printemps.
Avec Agnès Vigneron, Directrice des Galeries Lafayette Paris-Haussman, Nicolas Houzé, Directeur Général et Paolo de Cesare, Président-directeur général du Printemps, la Secrétaire d'Etat a rencontré le personnel et des clients pour rappeler la mobilisation et l'engagement du Gouvernement aux cotés des commerçants pour assurer la sécurité des magasins.
La présence d'un membre du gouvernement rassurera-t-elle des consommateurs inquiets ? La consommation va t-elle s'effondrer ? Peut-on comparer l'incomparable ? Non. Aucun autre événement n'est semblable à celui du vendredi 13 novembre. Et les répercussions, tant sur le plan économique que sur le comportement des consommateurs, ne sont pas encore connues.
Ce que l'on sait
Pas de baisse constatée en une semaine sur l'essentiel : la distribution alimentaire. Les enseignes de proximité qui même vu ont vu bondir leur chiffre d'affaires : + 17% samedi 14 pour Franprix et 20% dimanche 15 (selon Le Monde). Pour le non alimentaire, c'est plus compliqué notamment pour les grands magasins parisiens.
Ainsi, les Galeries Lafayette confirment une baisse de fréquentation de l'ordre de 50% tous les jours depuis le vendredi 13 novembre. Si la comparaison n'est évidemment pas tout à fait pertinente, après le 7 janvier dernier, le grand magasin avait constaté des baisses de fréquentation pendant les 10 jours suivants, avant une reprise normale de l'activité par la suite. Le grand magasin a, en outre, renforcé ses systèmes de sécurité avec la condamnation de certaines portes et une vidéosurveillance accrue.
Pour les centres commerciaux, le CNCC (Conseil National des Centres Commerciaux), par la voix de son président Jean-Michel Silberstein, a confirmé une baisse de 17,9 % de la fréquentation le samedi 14 novembre, et de 10,5% lundi 16 sur tout le territoire. Il rappelle que les dispositifs de sécurité avaient déjà été renforcés depuis le 7 janvier dernier à la demande du Ministère de l'Intérieur (fouilles des sacs, vidéo surveillance renforcée etc.).
Concernant les réactions des enseignes, certaines ont posté des messages pour informer en premier leurs salariés, à l'instar de Sephora, ou de Michel Edouard Leclerc dans son blog De quoi je me MEL.
Message de la direction Sephora : Magasins à Paris & RP fermés. Nos équipes parisiennes n'ont pas à venir en magasin jusqu'à nouvel ordre.
- Ingrid (@Salvad0rdali) 14 Novembre 2015
Ce que l'on devine
Sans nul doute, le report des achats et particulièrement ceux de Noël devrait s'effectuer sur Internet cette saison. Le click & collect devrait également très bien fonctionner. La communication des enseignes sur leurs canaux de vente digitaux devrait s'accentuer dans les prochains jours.
Ce n'est pas encore le cas aujourd'hui et on peut le regretter. Les porteurs de cartes de fidélité ne recevant, depuis samedi 14 novembre, que des e-mailings programmés et non contextualisés... Avec le risque d'aller directement à la poubelle.
Le commentaire
" Le principe du commerce, c'est de circuler librement "
Philippe Jourdan, président de Promise Consulting, expert dans l'univers de la consommation et par ailleurs rédacteur en chef de la revue de l'ADETEM (RFM : Revue Française de Marketing) explique :
"Si les consommateurs ne sont pas dans les magasins, le coeur n'y est pas non plus. Ce sont les magasins dont le modèle est basé sur l'affluence qui souffriront le plus. Les messages rassurants disant que "tout va bien" et qu'il faut retourner consommer, passe mal auprès de consommateurs très conscients et informés de ce que signifie un état d'urgence. Non tout ne va pas bien. La consommation ne repartira pas sans un bon moral " .
Concernant les courses de Noël, l'expert anticipe "un probable, et tardif, report des intentions achats sur le Net. En outre, la période de relâchement et de hausse de la consommation généralement observée entre Noël et le Jour de l'An, risque d'être fortement mise à mal. Concernant le commerce de centre ville, modèle basé également sur l'affluence, est très difficile à sécuriser. Déambuler librement est le fondement du commerce ".