Social media : le BHV Marais à la conquête de l'international
Le BHV Marais veut attirer la clientèle internationale : entre visites guidées et social media, celle-ci représente désormais près d'un cinquième de sa clientèle totale. Illustration avec l'opération "Je suis Maraisien", présentée avec la marque Guerlain, lors de l'édition 2019 de China Connect.
Je m'abonneAh Paris ! La Tour Eiffel, l'Arc de Triomphe, Montmartre... La ville lumière attire les touristes du monde entier, au point de battre successivement en 2017 et 2018 des records de fréquentation. L'année dernière, 35 millions d'arrivées hôtelières ont été comptabilisées dans la capitale, en hausse de 3,6% par rapport à 2017. Et pour la première fois, le tourisme international dépasse le tourisme intérieur, avec 17,6 millions d'arrivées pour la clientèle étrangère. Si les Américains sont les plus nombreux avec 2,8 millions de visiteurs, suivis des Britanniques (2,06 millions, +15,7%) et des Allemands (1,2 million, +15%), puis des Chinois (1,2 million, +3,9%), ce sont les touristes italiens (+27,5%), japonais (+18,5%) et espagnols (+16,1%) qui reviennent en force selon les chiffres du Comité Régional du Tourisme Paris - Ile de France. De quoi intéresser les acteurs du tourisme, mais pas que : les grands magasins cherchent depuis des années à attirer les visiteurs étrangers.
Parmi eux, le BHV Marais (Groupe Galeries Lafayette) a adopté une approche singulière : "Nous ciblons une clientèle de visiteurs "matures" ou "repeaters", qui ont déjà été sur les principaux lieux touristiques et cherchent désormais plus à vivre "à la parisienne". Dans ce cadre, le Marais se place comme un lieu incontournable, explique Aja Barbo Gruden, à la tête de la direction clientèle internationale créée il y a deux ans par le BHV, qui a par ailleurs accolé le nom Marais à son propre nom en 2013.
Visites guidées et social media
"Notre but est de lancer de nouveaux services susceptibles d'améliorer l'accueil des touristes étrangers, de la détaxe au personnal shopping, en passant par l'ouverture de salon VIP. Nous devons aussi développer la notoriété du BHV au-delà des frontières françaises. Nous n'avons pas une image aussi forte à l'international que celle des Galeries Lafayette. En ce sens nos communications sont encore une fois fortement liées au Marais." Quant à savoir quels sont les principaux publics visés : "Les Européens sont les n°1 en matière de visiteurs, les Américains les n°1 pour le chiffre d'affaires et les Chinois les n°1 pour la croissance", ajoute la directrice du développement international.
Face à ces deux objectifs, Aja Barbo Gruden a mené des opérations variées, dont la finalité reste d'attirer les touristes amoureux de la capitale au BHV Marais. "Le secteur et les habitudes de voyage changent. Avant, la promotion à l'international était surtout assurée par les tour operators. Désormais, il faut aussi travailler une approche BtoC en plus du BtoB habituel."
L'an dernier, 60 guides freelances ont ainsi été embauchés afin de mener des visites guidées du quartier, de jour comme de nuit, de la petite boulangerie typique en passant par Lafayette Anticipations (la Fondation du Groupe Lafayette dédiée au design et à la mode ouverte en mars 2018), et en terminant bien sûr dans les salons VIP du BHV. "Ces visites, principalement à destination des anglophones, étaient gratuites tout le mois de juillet. L'idée est de faire connaître les services du BHV, tout en proposant une expérience innovante et de faire découvrir la richesse du Marais, entre culture et shopping. Et avec l'ouverture d'Eataly le 12 avril, nous ajouterons l'aspect gastronomie !"
Mais ces deux dernières années, les efforts de la directrice clientèle internationale ont notamment été tournés vers l'est et la Chine. En témoigne l'opération "Je suis Maraisien", réalisée au départ en collaboration avec Guerlain, et qui a fait l'objet d'une présentation commune lors de l'édition 2019 de China Connect. Elle consiste en un rendez-vous mensuel sur les réseaux sociaux où les vendeurs des marques distribuées au BHV partagent leurs bons plans et autres adresses du Marais.
"Nous interviewons un vendeur du magasin, et présentons à la fois la marque pour laquelle il travaille, le BHV et le quartier du Marais. Guerlain nous a vraiment aidé à déclencher une dynamique et à convaincre d'autres marques qui auraient pu être au départ plus réticentes. Nous avons ainsi bénéficié à la fois de l'aura de Guerlain, mais aussi du Marais en Chine pour nous faire connaître sur ce marché, d'autant que LVMH a partagé ces contenus sur WeChat en Chine", détaille Aja Barbo Gruden, qui explique qu'une dizaine de marques se sont depuis essayées à l'exercice. Mais le grand magasin ne joue pas que sur le terrain du social media. L'influence est aussi un relais puissant de sa stratégie à l'international.
Le marketing d'influence pour un lien durable
"Le cycle d'achat en travel est particulier, car il faut inspirer et créer l'envie en amont, mais aussi laisser un bon souvenir et garder le contact avec le visiteur en aval. Auparavant, il était commun de travailler avec des partenaires BtoB comme les agences de voyage ou les compagnies aériennes. Désormais, pour toucher les clients individuels, il faut aussi à minima être présent sur les réseaux sociaux internationaux. Les influenceurs sont un relais privilégié pour amplifier notre communication", analyse Aja Barbo Gruden. Tout en invitant de nombreux micro-influenceurs à profiter d'une expérience privilégiée au BHV, l'enseigne essaye aussi chaque année d'attirer un ou deux macro-influenceurs.
"Nous travaillons tout au long de l'année nos relations avec les micro-influenceurs. Dire qu'il faut toujours un budget conséquent est faux : il est souvent plus intéressant d'entretenir un contact humain et de soigner cette relation, avance la directrice de la clientèle internationale. C'est un travail de longue haleine qui se fait en équipe : notre responsable digital Asie est quasiment tous les jours en contact avec nos influenceurs. C'est lui qui a aussi inventé le concept "Je suis Maraisien". Par ailleurs, des opportunités peuvent parfois se présenter : l'an passé, Jam Hsiao, un chanteur taïwanais devait tourner un clip à Paris, et nous connaissions quelqu'un dans son équipe. Nous lui avons proposé de venir sur au Perchoir, la terrasse aménagée au-dessus du BHV Marais. Il a tellement apprécié l'endroit qu'il a aussi tourné une partie du clip devant la façade, avec le nom de l'enseigne en grand !" 160 millions de vues plus tard, le BHV avait réalisé une belle opération, assez inattendue.
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Et avec quels résultats ? "Il est difficile de mesurer l'impact drive-to-store précis de ce type d'opérations. "Je suis Maraisien" nous a cependant permis d'ajouter plusieurs milliers de fans chinois à nos réseaux sociaux. Il est arrivé que des clients demandent à rencontrer les vendeurs concernés une fois qu'ils sont au BHV, raconte Aja Barbo Gruden. Mais il faut rappeler qu'il y a deux ans, il était rare de trouver du contenu autre que francophone sur le BHV. Nous avons alors lancé Weibo, WeChat et notre Facebook anglophone."
Alors qu'elle était anecdotique il y a quelques années, l'affluence de visiteurs internationaux représente désormais entre 15 et 20% de la clientèle du BHV Marais selon la saison. "Notre objectif est d'atteindre les 25% dans 2 à 3 ans. Une partie de ce chiffre dépend aussi de la croissance organique du nombre de touristes dans le quartier et plus généralement à Paris, ajoute Aja Bardo Gruden, qui explique vouloir fidéliser ces touristes amoureux de la capitale et qui y reviennent plusieurs fois. Nous n'avons pas de programme spécifique pour les étrangers, mais nous nous sommes aperçus que certains d'entre-eux avaient intégré le programme de fidélité, et qu'ils venaient parfois plusieurs fois par an au BHV !" En ce sens, les publics japonais et coréens étaient par exemple particulièrement visés fin 2018.