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eSport : Adidas, Kia et la Société Générale décryptent leur stratégie

Publié par Clément Fages le

À l'heure où le gaming et l'eSport s'imposent chez les annonceurs, Sporsora et Hurrah Group organisaient ce 6 juillet la conférence GameOn, à l'occasion de laquelle Adidas, Kia et la Société Générale ont détaillé leur vision de l'eSport comme levier de business, d'image et de communication interne.

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Adidas : l'eSport pour explorer de nouveaux marchés et séduire les plus jeunes

Dans l'eSport, Adidas est notamment l'équipementier de la Team Vitality, équipe française qui compte parmi les plus performantes d'Europe. "Notre ADN est d'encourager la pratique du sport. Il ne faut pas opposer le sport et l'eSport, mais créer des passerelles entre ces deux écosystèmes. L'eSport est un formidable moyen de toucher les nouvelles générations, et de les amener à pratiquer d'autres sports, à l'image de ce que nous avons fait en ce début juillet sur notre nouveau "playground" Paul Pogba à Roissy-en-Brie : des joueurs de foot et des eSportifs se sont affrontés sur le terrain, puis derrière les manettes !", indique Sylvain Bouchès, VP Marketing pour Adidas France.


Idem quand la marque, par l'intermédiaire de l'eSportif et influenceur Domingo, qui a appelé sa communauté à participer à notre challenge Run For The Oceans, où chaque kilomètre parcouru par les participants permet de financer la récupération de bouteilles plastiques dans l'océan, qui sont recyclées et utilisées par la marque pour confectionner de nouveaux produits. L'opération, diffusée sur Twitch, a rassemblé 100 000 viewers, pour un temps d'engagement moyen de trente minutes, tandis que 19 260 kilomètres étaient parcourus par les membres de la communauté.



"Il s'agit en quelque sorte de tirer un fil : de l'équipe, on touche les joueurs, puis leur communauté", indique Sylvain Bouchès, qui revient sur la genèse de la collaboration avec Team Vitality : "en interne, la France a été l'un des premiers marchés à se lancer dans l'eSport dès 2016. On s'est vite rendu compte qu'il serait difficile d'aller chercher l'équipe qui nous accueille aujourd'hui (l'événement se déroulait au Parc des Princes, ndlr) ou celle qui sera Championne du monde en 2018. Pour innover, nous avons donc décidé de nous pencher sur l'eSport, dans une approche test & learn, en devenant notamment équipementier de la Team Vitality." Une initiative qui s'avère payante aujourd'hui : "Les ventes des maillots Team Vitality sont équivalentes à celles d'un club de football situé à la 6e ou la 7e place en Ligue 1. La différence est que la fan base est ici très réduite : 80% du volume de vente se fait via l'eshop de l'équipe. C'est rassurant, car on se dit que plus l'eSport prend de l'ampleur, plus cette base de fans va prendre de l'ampleur et s'ouvrir à de nouveaux publics et nous accompagnons cette évolution en élargissant la gamme de merchandising." Ainsi, après les t-shirts, les maillots, les survêtements et les sweatshirts logotés, Adidas développe un maillot extérieur ou encore des maillots exceptionnels en fonction des événements de la saison. "Dès que nous mettons une nouvelle pièce en vente, il y a très rapidement 5 à 7000 ventes", indique le VP Marketing, qui insiste néanmoins sur la volonté de l'équipementier de rester dans le domaine sportif. "Il n'y aura pas dans l'immédiat de collaboration sur Origins hors opération événementielle."

Kia : l'eSport pour dépoussiérer l'image auprès des clients de demain

En tant que marque sud-coréenne, s'associer à l'eSport, qui est historiquement bien plus développé dans le pays qu'en France, était logique pour Kia. Pourtant, la première initiative du constructeur automobile en la matière a été de sponsoriser la finale d'été du League of Legends European Championship en 2019, avant de renouveler le partenariat en 2020 et 2021. "Au départ, cette idée nous a semblé intrigante, tant le coeur de cible de l'eSport semble bien plus jeune que l'âge moyen de l'acheteur automobile. C'est en allant voir un événement eSport à l'Accor Arena que j'ai compris le potentiel de ce dispositif. Quand on voit une marque comme Louis Vuitton devenir le malletier officiel d'une compétition eSport et faire des skins, ça encourage", explique Muhammad Al Nimer, sponsorship manager de Kia France, qui détaille les objectifs du constructeur : "Sur le court et moyen terme, nous avons un objectif d'image. Cela fait déjà plus d'une quinzaine d'années que nous sommes sur le marché français, et nous avons depuis recruté de nouveaux designers, mais aussi changé notre logo et notre nom début 2021, en passant de Kia Motors à Kia, afin de nous ancrer de manière plus générale sur les nouvelles mobilités. Avant, nous avions ciblé un public assez large via des actions de sponsoring dans le football ou le tennis. Désormais, il s'agit de toucher des early adopters, qui seront sensibles aux innovations déployées par la marque. Et nous pensons que les gamers entre totalement dans cette catégorie. Enfin, sur le long terme, l'objectif est de fidéliser aujourd'hui les usagers de demain."


Alors que la plateforme d'échange de crypto-monnaies FTX a signé récemment le plus gros contrat de naming de l'eSport, Kia a également adopté cette approche avec l'équipe sud-coréenne BWG. "L'idée est de gagner en crédibilité auprès de la communauté, et de faire de la visibilité. On a tous en tête le succès de la Jeep Elite en basket...Alors quand on réalise une activation avec l'Équipe eSport et que l'on constate que les internautes citent naturellement BWG Kia dans le chat, on se dit qu'on est sur la bonne voie", indique Muhammad Al Nimer, qui détaille les initiatives spécifiques à la France : "Après avoir repris les éléments de l'international, nous avons décidé l'an dernier de nous associer à l'équipe de streamers Solary afin de développer un axe de communication décalé, tout en continuant à nous imposer comme un acteur légitime. Ce n'était pas un gros investissement, et nous n'avons pas fait de paid, pourtant, le reach et le taux d'engagement étaient bons et nous ont poussés à investir plus, en devenant notamment l'annonceur exclusif des contenus eSport de l'Équipe", indique le responsable du sponsoring. Cet accord, qui concerne autant les contenus diffusés par le média sportif sur Twitch que ses ses propres assets, vaut jusqu'en décembre 2021. Enfin, Muhammad Al Nimer annonce un "scoop" : Kia va prochainement annoncer un partenariat avec la Team Vitality.

Société Générale : l'eSport pour renforcer son écosystème et l'ADN de sa marque employeur

"S'engager dans l'eSport semble une évidence aujourd'hui, mais c'était loin d'être le cas il y a quatre ou cinq ans. Nous avions l'envie, mais nous ne savions pas comment aborder le sujet, à la différence du marketing sportif classique : nous sommes engagés sur le rugby depuis trente ans, et sur l'handisport depuis 2002. La clé a été un concours de startup en interne. Des salariés, passionnés de jeux vidéo, voulaient lancer une entreprise de consulting en eSport, pour aider les annonceurs à franchir le pas. Nous avons été les premiers à bénéficier de leurs conseils ! Il est vraiment primordial d'aller chercher ces compétences en interne, et de s'adresser à de vrais joueurs, qui nous ont aidés à avoir une approche plus authentique par rapport à des publicitaires ou des communicants", explique Sebastien de Cagny, chargé de communication et de publicité pour la Société Générale, qui cherche elle aussi grâce à ces initiatives à rajeunir son image, notamment auprès de la cible 15-25 ans. "Il est essentiel de construire sa légitimité en construisant de la valeur pour l'écosystème, le tout en respectant notre ADN. C'est ce que nous avons fait en suivant les conseils de nos consultants internes en juin 2018, qui nous ont poussés à soutenir l'équipe GamersOrigin. Nous avons apprécié le projet autant que les valeurs de l'équipe, et les avons accompagnés de deux manières : en organisant leur levée de fonds et en les sponsorisant. Au départ, c'était un test, avec un petit budget. L'intérêt était surtout de voir la réaction de la communauté. Cela a été plutôt une réussite, et l'année suivante, nous avons été contactés par l'équipe Fnatic. Nous avons décidé de poursuivre avec GamersOrigin, mais c'était le signal que nous pouvions continuer à nous emparer du sujet et à nous diversifier", indique Sebastien de Cagny.


De là, la Société Générale avait par exemple la légitimité pour lancer une opération commerciale sous la forme d'une carte bancaire dédiée aux gamers, en partenariat avec League of Legend et Mastercard : "Pour 14 euros par an, nous proposons à nos clients des réductions sur l'achat de matériel de gaming, mais aussi des séances de coaching avec des eSportifs ou encore des places pour certaines compétitions." Enfin, pour faire valoir son rôle de banque qui accompagne le développement personnel et professionnel de ses clients, la Société Générale a décidé de s'associer à nouveau à Mastercard pour promouvoir les joueuses eSport, ou encore a décidé de créer un tournoi de détection avec l'influenceur Doigby, dont le but est de sélectionner les futures stars du jeu Fortnite : "#LaDétectionBySG a permis de rassembler 10 000 participants, parmi 40 000 inscrits, et de faire signer des contrats professionnels à quatre joueurs amateurs. Mais l'intérêt de l'approche de la Société Générale réside dans l'utilisation de l'eSport au service de la marque employeur. Régulièrement, les collaborateurs ont l'occasion de s'essayer aux jeux vidéo, comme lors de la TechWeek 2019, en présence des joueurs professionnels de GamersOrigin. Depuis, le tournoi interne de Fortnite pour les enfants des collaborateurs remplace la traditionnelle sortie au Parc Astérix ! Nous avions même diffusé la finale sur notre chaîne YouTube", ajoute Sebastien de Cagny, selon qui de tels événements internes permettent de faire rayonner la stratégie eSport de l'entreprise au sein de ses filiales à l'étranger.


Mais aussi...

Stoppé dans sa croissance par la pandémie mondiale, le secteur de l'eSport, dont les événements physiques autour des compétitions drainent en temps normal des dizaines de milliers de spectateurs, peut néanmoins miser sur la poursuite des compétitions en ligne pour attirer des centaines de milliers de viewers online. Dans le monde, ce marché pèse près de 3 milliards d'euros selon les chiffres de Goldman Sachs cités lors de GameOn. En France, le chiffre d'affaires du secteur avoisine les 50 millions d'euros, alors qu'avec 1,3 million de pratiquants, l'eSport serait l'équivalent du troisième sport hexagonal en nombre de licenciés.

Pour retrouver nos précédents articles sur le sujet :

Futur : bientôt tous réunis dans le metaverse ?

eSport : comment en profiter pendant le confinement ?

eSport : comment choisir sur quel jeu investir ?

eSport : comment l'intégrer à son mix-marketing ?


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