Saga : Buzzman, du digital au productising
Alors que Buzzman fête ses 10 ans le mois prochain, retour sur l'histoire d'une agence singulière qui, du digital au "productising", est parvenue à se faire une place de choix au sein du marché ultra-concurrentiel des agences de publicité.
Novembre 2006. Une nouvelle agence voit le jour sous le nom de Buzzman. Son positionnement : mettre le digital et le social média au coeur des campagnes publicitaires et creuser le sillon de la créativité technologique. Dix ans plus tard, l'agence qui a raflé pas moins de 150 trophées lors de compétitions publicitaires, et qui compte désormais plus de 100 salariés, ouvre un nouveau chapitre de son histoire en lançant Productman, un "spin-off" dédié à la création et à la commercialisation de produits et de services innovants. Retour sur ce qu'il est convenu d'appeler une "success-story".
Garder un temps d'avance
Avoir un coup d'avance pour damer le pion aux majors du marché et tirer son épingle d'un positionnement avant-gardiste. C'est le pari que fait il y a dix ans Georges-Mohammed Chérif, président-fondateur et directeur de création de l'agence Buzzman. Sa conviction ? Bien plus qu'un canal ou support supplémentaire, le Web 2.0 annonce une nouvelle manière de communiquer, plus horizontale, directe et décomplexée. Le patron s'engouffre dans la brèche : quand les agences traditionnelles bottent en touche sur le digital, faute de blé investi, Buzzman en fait son terrain de jeu créatif. Au départ avec des queues de budget, l'agence se fait remarquer par ses coups et son art du marketing viral.
Des "coups" viraux
A l'image de son nom, l'agence vend du concept digital efficace et malin, et s'appuie sur l'effet de surprise associé au pouvoir viral du Web pour imaginer des "coups" et créer le buzz. Avec le site parodique promouvant le hot-dog de Quick (www.ilovehotdog.com), qui met en scène un toutou rappeur surfant sur les codes bling bling du rap américain, l'agence signe sa première campagne (170 000 visiteurs et 3 millions de pages vues en deux semaines).
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De coups d'essais en coups de maître, l'agence enchaîne les campagnes qui font mouche. En 2008, pour Orange qui souhaite valoriser son offre foot, Buzzman orchestre une campagne de recrutement en ligne sous la forme d'un site de " call-back " endossé par le rugbyman Sébastien Chabal, "Chabal, le duel". S'improvisant footballeur, celui-ci contacte les internautes directement sur leur portable pour leur demander de l'aider à tirer un penalty. A la clé : une campagne drôle, décalée, innovante qui a permis à l'opérateur de se construire une base de données d'abonnés potentiels.
Pour Axe en 2009, " Muchas et Maracas " donne un tube avec 1,5 million de vues et génère un puissant earned média.
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Case study Muchas Maracas from Bill Kalagan on Vimeo.
Digital & ROI
Associant créativité, gamification et technologie, la "Tipp-Ex expérience" marque un tournant : affichant 1 million de vues en 36 heures et plus de 40 millions en 100 jours avec une exposition à la marque de plus de 5 minutes, la campagne est un carton planétaire et booste les ventes du produit correcteur qui voit son chiffre d'affaires progresser de +30% sur le dernier trimestre 2010.
Tipp-Ex - cas d'étude from Bill Kalagan on Vimeo.
Cette culture digitale et ROIste plaît aux annonceurs. " La publicité doit servir le business, c'est ce qu'exige à raison nos clients annonceurs ", rapporte le vice-président Thomas Granger, ex-DDB Paris qui rejoint l'agence en 2009. Et de citer la campagne "SOS Condoms" réalisée pour Durex au Moyen-Orient en 2011. " La campagne a généré +20% des ventes sur la région et nous avons ouvert un bureau à Dubaï en 2013 qui collabore notamment avec HSBC, Beiersdorf, Pantène et Head and Shoulders (groupe P&G). "
Ikea, Meetic, Burger King
" C'est en gagnant de belles campagnes qu'on attire des clients comme des talents ", appuie le vice-président. La petite agence qui monte a pignon sur rue et gagne les faveurs du marché : après Mondelez et l'opération du "Carré manquant", l'agence rafle Meetic et Burger King qui la font définitivement entrer dans la cour des grands. D'une agence de coups, Buzzman s'affirme peu à peu comme une structure de publicité intégrée et multiplie les gains de budget. L'agence rentre des marques challengers comme Huawei ou la start-up Ouibus rachetée par la SNCF et pilote la communication de grands comptes comme Ikea ou CanalPlay.
La double force de l'agence ? S'appuyer sur un fort planning stratégique pour être au plus près des attentes et des usages, et proposer des axes créatifs qui utilisent les codes et la grammaire du digital comme l'authenticité (la campagne pour Meetic "I love your imperfections") ou l'effet de surprise et la gratification (l'opération "Angry Tweets" où les tweets des fans de Burger King sont repris en affichage local sur les bâches des chantiers des restaurants de la marque).
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Création de Productman
2016, année de la mutation ? Après avoir déménagé dans un nouvel espace de 1500 mètres carrés dans le 9e arrondissement de Paris, Buzzman annonce le lancement de Productman, une entité indépendante qui se définit comme un laboratoire dédié à la création de produits et de services voués à être commercialisés. Pour l'agence, c'est l'opportunité de trouver de nouvelles sources de business tout en creusant le sillon de ce qui fait sa marque de fabrique : créer l'adhésion grâce à des dispositifs drôles, innovants et expérientiels.
Cette démarche dite de "productising", qui consiste à utiliser le produit pour faire vivre la promesse de la marque, n'est pas neuve. Tirant le fil de cette tendance lourde sur le marché publicitaire - que l'on pense par exemple au bracelet "Nike Fuel" ou à l'application de maquillage augmentée "Make up genius" de L'Oréal -, le "productising" irrigue les recos de l'agence qui en a tiré des campagnes singulières : le "Carré manquant" de Milka, la "Love Kit" d'Ikea, l' "Insomny Coffee" de CanalPlay.
Hacker la marque
En se positionnant comme une agence de conception en innovation de produits et de services et en adoptant le mode de fonctionnement d'une start-up, Productman va un cran plus loin. Après avoir identifié une attente précise sur un marché, les équipes de Productman, composées de créatifs, mais aussi de designers industriels, de datas scientist, d'ingénieurs hardware et software, et de chimistes se donnent cinq semaines pour, sur un mode hackaton, créer, développer, prototyper et tester des produits et des services prêts à être industrialisés ou distribués auprès des consommateurs. Quitte à disrupter le business-model de leur client en proposant un produit concurrent du leur : " C'est là où ça devient intéressant car si un annonceur n'est pas en mesure de se réinventer, quelqu'un d'autre le fera à sa place ", explique Thomas Granger.
Ubisoft offre à la nouvelle entité un premier terrain d'expérimentation : en août dernier, Productman propose une expérience aussi décalée qu'inédite avec le "Nosulus Rift", un masque à réalité virtuelle olfactive au service du jeu vidéo "South ParkTM : L'annale du destin", dont le héros est doté d'un super pouvoir pour combattre ses ennemis, l'odeur de ses pets.
Réinventer la pub
L'agence fait-elle sa révolution, dix ans après sa création et une année en forme de consécration avec un Lion d'Or remporté dans la catégorie promotion et activation pour l'opération #Whoistheking pour Burger King(1) ? En développant ce nouveau modèle d'agence, Buzzman semble plutôt creuser le sillon qui a fait son succès : être le premier entrant sur un marché publicitaire en pleine réinvention, dans ses offres mixant data, digital et créa' comme dans ses territoires d'expression (filtres de Snapchat, carrousel vidéo de Facebook, etc). Si l'agence a été une des premières en France à occuper le créneau alors encore largement inexploré du digital et du social média, elle souhaite désormais étendre son champ d'action à l'innovation produit dont l'iOt, cette alliance entre le hardware et le software, laisse entrevoir de belles opportunités d'affaire. Un chemin de traverse pour une ambition intacte : garder un temps d'avance.
(1) La campagne #Whoistheking de Buzzman a également reçu un Lion d'argent en Direct et un Lion de bronze en PR lors des Cannes Lions en juin 2016.
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