Pourquoi les Français portent moins d'intérêt à l'alimentation responsable ?
Occurrence et Sociovision (groupe Ifop) ont publié la 3e édition de leur baromètre sur la communication de la transition alimentaire. Selon elle, à cause de l'inflation et de la communication des annonceurs, les consommateurs hexagonaux sont plus préoccupés par le prix que par l'enjeu environnemental.
Dans un secteur bouleversé par la crise, les Français sont-ils toujours prêts à agir pour la transition alimentaire ? De même, quels sont les enjeux et les défis d'une communication responsable dans ce domaine ? L'institut d'études et de conseil Occurrence et Sociovision - une autre filiale du groupe Ifop - ont souhaité répondre à ces questions en menant la 3e vague du baromètre sur la communication de la transition alimentaire, dont les résultats ont été dévoilés le 24 avril.
Premier enseignement : À cause de la hausse des prix, les consommateurs français sont moins enclins à faire évoluer de manière vertueuse leur façon de consommer. En effet, la consommation responsable est en recul depuis l'inflation. Selon l'étude, 31 % des Français achètent systématiquement des produits bio (soit 10 % de moins par rapport à 2020). De même, tandis que 29 % achètent directement chez le producteur (- 9 % en 3 ans), 61 % consomment de préférence les produits issus de l'agriculture locale (-10 %). Un peu plus de la moitié disent vérifier systématiquement la provenance des produits qu'ils achètent (- 5 %).
À l'inverse, la hiérarchie des préoccupations des Français est désormais largement dominée par l'attachement au prix. Au regard des résultats du baromètre, 62 % des répondants qui ont modifié leurs habitudes de consommation l'ont fait à cause de l'inflation. Dans le même esprit, un Français sur deux (49 %) déclare qu'il lui arrive souvent de ne pas manger comme il le voudrait parce que l'alimentation est devenue trop chère. Un chiffre en très forte progression : + 16 % par rapport à 2019.
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Les annonceurs également responsables ?
Selon Occurrence et Sociovision, la communication des marques alimentaires - qui se réoriente considérablement vers le prix - tend à amplifier ce phénomène. "Cette étude montre combien l'argument "prix" est en train de cannibaliser toute chance d'exister à l'avenir sur la transition alimentaire pour les acteurs qui le déclinent sans discernement", affirme Pierre Gomez, DGA développement d'Occurrence.
Alors que les messages sur le pouvoir d'achat sont ceux qui marquent le plus les esprits des Français (53 %, soit 19 % de plus qu'en 2020), loin devant l'alimentation et la santé (42 %), l'environnement (28 %) ou encore le bien-être animal (22 %), la transition et ses enjeux responsables passent au second plan.
Et pourtant, l'enjeu environnemental reste primordial pour ces mêmes Français : plus de trois quarts d'entre eux estiment que la France est en retard, et qu'elle doit accélérer sa transition écologique. Ils sont aussi 46 % à accorder de plus en plus d'importance à la transition alimentaire, 47 % autant d'importance et seulement 7 % à lui en attribuer moins. Un autre signe du caractère paradoxal des consommateurs hexagonaux...
Dans leur baromètre, Occurrence et Sociovision ont identifié cinq catégories de consommateurs à la sensibilité écologique bien diverses. Tout d'abord, "les engagés" (23 % de la population française), sont convaincus de la nécessité de la transition alimentaire et de son urgence. Ensuite, tandis que les "Bourgeois patriotes" (15 %) sont attachés à la production locale et sont soucieux de leur santé, "les consommateurs conscients" (19 %) sont sensibilisés aux réflexes écologiques émergents et sont en quête d'une alimentation plus durable.
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Les deux autres familles de Français portent, quant à elles, moins d'importance à ces différents enjeux. Ainsi, alors que "les pragmatiques" (11 %), sont davantage soucieux de leur plaisir plutôt que de l'impact écologique des produits qu'ils consomment, "les réticents" (32 % !) sont surtout préoccupés par leur pouvoir d'achat et ne portent pas d'intérêt à la transition écologique.
Naturellement, les consommateurs accordent une attention plus marquée à certaines marques et enseignes en fonction de la catégorie à laquelle ils appartiennent. Ainsi, "les engagés" feront davantage confiance aux acteurs indépendants, "les Bourgeois patriotes" aux producteurs, "les consommateurs conscients" aux grandes marques et marques distributeurs, "les pragmatiques" aux institutions et "les réticents" à la grande distribution.
Une responsabilité qui incombe principalement à la grande distribution
Malgré tout, les grandes enseignes restent les principaux lieux d'achat alimentaire en France (47 % des achats sont effectués en grande surface libre-service, 16 % en grande surface rayon coupe/traditionnel et 13 % en grande surface de frais). La grande distribution a donc une responsabilité´ majeure dans le domaine de la transition alimentaire. Toutefois, selon les deux instituts, elle continue à axer principalement sa communication sur les prix. "Cela fait peser une vraie menace sur le nécessaire équilibre des filières engagées dans la transition et, in fine, sur la capacité du secteur de la distribution de réaliser sa transition alimentaire", notent Occurrence et Sociovision dans un communiqué.
Selon le baromètre, les filières engagées défendent, de leur côté, leurs engagements et leurs efforts pour la transition. Toutefois, même si elles sont jugées crédibles, elles n'ont évidemment pas la force de frappe de la grande distribution.
Méthodologie :
Date de recueil : Novembre-décembre 2023
Baromètre communication de la transition alimentaire Occurrence 3ème vague : Etude réalisée auprès d'un échantillon représentatif de 1 000 Français de 18 à 75 ans.
Baromètre Microcosme de SocioVison : Étude annuelle menée auprès d'un échantillon de 6 000 Français de 18 à 75 ans. Étude basée sur la quantification de plus 150 indicateurs.
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