Pub : "Je t'aime encore un peu"
Les français l'aiment moins ... Et pourtant ils en attendent encore quelque chose. Jugée aujourd'hui banale et envahissante, les publiphiles regrettent la créativité "d'antan". Voir le [Slide Share]
Aimer moins c'est aimer encore. C'est un résumé très rapide mais fidèle des résultats du 10 ème baromètre Publicité & Société (1) créé à l'initiative de l'agence Australie et réalisé par TNS Sofres. " Ces 10 ans n'ont pas été de tout repos, ni pour les Français qui ont affronté une situation économique et sociale difficile, altérant leur moral et leur confiance dans l'avenir, ni pour la publicité qui est plus sévèrement jugée aujourd'hui qu'au début de la décennie. Les raisons de ce désamour tiennent d'abord à l'impact des nouvelles technologies qui ont profondément changé les façons d'acheter et de consommer des Français, ainsi que leur relation aux marques." explique Edouard Lecerf directeur général de TNS Sofres. "Désamour qui s'explique également par la perte du caractère divertissant et novateur de la publicité. Démultipliée sur un grand nombre de supports, elle est désormais perçue comme banale et envahissante. Pour autant, les Français ne condamnent pas la publicité en soi : ils marquent leur désapprobation vis-à-vis de ce qu'elle est devenue, regrettant sa créativité passée, et attendent qu'elle présente de nouveau de l'intérêt, tant sur son fond que sur sa forme".
Alors c'est pour bientôt la reprise de la créativité dans la publicité ? "La question est celle de la prise de risques" confesse Jérôme Leclabart directeur général de l'agence Australie "les annonceurs qui se contentent de répliquer certains schémas de publicité usés s'exposent dangereusement à ce sentiment de lassitude qui s'exprime ici." Et Fabien Biasutti, directeur des stratégies d'Australie de rajouter "mais pour peu qu'une marque fasse preuve d'audace créative, elle est tout de suite saluée par le public et cela fait du bien à l'ensemble de la publicité en réalité."
La récente campagne controversée du feuilleton "Un Village français" sur France 3 avec le claim " En 1943, il y avait déjà du réseau " illustre assez bien cette prise de risque.
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Les principaux enseignements (extraits)
En 2004, 51% des Français étaient optimistes quant à l'évolution de leur niveau de vie et de leur pouvoir d'achat dans leur foyer, contre 29% aujourd'hui. Une chute vertigineuse de 22 points qui s'est effectuée au fil des événements économiques et politiques de la décennie : la courbe d'optimisme tombe à 32% dès 2005, remonte fortement (50%) sous l'effet de la campagne présidentielle de 2007, puis rechute avec la crise économique de 2008 (24%) pour remonter une fois le plus dur de la crise passé (45% en 2009), puis redescend (23% en 2011) et " reprend des couleurs " avec la campagne présidentielle de 2012 (32%). Le pessimisme des Français sur la situation économique de la France suit la même tendance : 32% seulement en 2004 pour arriver à 18% en 2013. Les courses hebdomadaires deviennent une corvée pour 62% des répondants, (+ 8 points sur la décennie) du fait de la baisse de leur pouvoir d'achat et du changement des habitudes d'achat induit par Internet et le Drive.
L'envie de dépenser s'est fortement amoindrie en 10 ans (68% en 2004 vs 57% en 2013). Symétriquement, l'envie de " ne pas dépenser " passe de 30% en 2004 à 42% en 2013. Cette évolution est liée à la baisse du pouvoir d'achat, mais pas seulement. Elle révèle surtout la maturité du rapport à la consommation des Français : ceux qui déclarent avoir les moyens de dépenser avouent aussi ne plus en avoir envie.
La note moyenne attribuée aux grandes marques reste stable sur la décennie (6.0 sur 10 en 2004, 5.9 en 2013). Mais les Français y sont de plus en plus indifférents (59% vs 69%). Ils ont moins de " marques préférées " (63% en 2013 contre 49% en 2004). Les Français sont de plus en plus sélectifs avec les marques qu'ils aiment, et ceci pour 2 raisons :
- La valeur des grandes marques n'est plus perçue comme clairement supérieure à celles des MDD, dont la qualité s'est beaucoup accrue.
- Les consommateurs n'ont plus l'impression que les marques s'adressent à eux de manière respectueuse et intelligente (seuls 46% disent qu'elles leur parlent comme à quelqu'un d'important (-5), 45% comme à quelqu'un qui fait attention à ce qu'on lui raconte (-11), 41% comme à un adulte (-15) et 30% comme à quelqu'un d'intelligent (-14)).
L'image de la pub se dégrade davantage que celle des grandes marques : elle passe de 4.7 sur 10 en 2004 à 4.2 en 2013. Le nombre de publiphiles diminue (de 20% à 14%) au profit des publiphobes (de 25% à 33%). La publicité intéresse moins que les JT, la vie politique ou les programmes TV car, contrairement à eux, elle ne s'est pas renouvelée :
La publicité était une source d'intérêt à 32% en 2004 contre seulement 23% aujourd'hui.
Au contraire, l'intérêt pour la vie politique a augmenté de 34% à 52% (avec un pic à 67% lors de la campagne présidentielle de 2007). L'intérêt pour les programmes de la télévision aussi (il est passé de 46% en 2004 à 65% en 2008, avant de redescendre à 54% en 2013). Avec la démultiplication des canaux d'exposition, la pub est perçue comme plus banale (selon 57% des Français contre 64% aujourd'hui), envahissante (73% contre 79%) et intrusive (85% contre 78%). Plus frileuse, moins provocante, la publicité distrait moins (de 54% à 48%) et convainc moins (de 54% à 47%).
Pourtant, les Français aiment encore la pub. En 2013, 71% la jugent utile et/ou agréable et 52% utile. Elle joue pour eux un vrai rôle d'information et d'accès à l'acte d'achat. Les Français jugent sévèrement la pub parce qu'ils regrettent sa créativité d'antan. Ils ne veulent plus d'un message unique exprimé sous une forme banale. Ils sont exigeants car ils attendent de la publicité qu'elle se renouvelle et les fasse rêver à nouveau. Surtout en période de crise économique et de morosité ambiante, les consommateurs sont demandeurs de divertissements et d'informations nouvelles. Pour répondre à cette demande, les marques doivent créer et à ne pas se replier sur elles mêmes.
Nous l'avons constaté : celles qui innovent, prennent des risques et interagissent avec les consommateurs sont celles qui tirent le mieux leur épingle du jeu. C'est un vrai défi qui est lancé aux annonceurs. La publicité a été et peut redevenir un centre d'intérêt pour les Français.
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(1) Publicité & Société
Publicité & Société est réalisée tous les ans à la même date auprès d'un échantillon national de 1 000 personnes, représentatif de l'ensemble de la population âgée de 15 ans et plus. Voir la méthodologie en page 2 du Slide Share
L'étude 2013 en Slide Share
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