Jean-Pierre Crouzet, nouveau président de l'UPA, veut repenser l'apprentissage
Jean-Pierre Crouzet, nouveau président de l'Union professionnelle artisanale (UPA), prend ses fonctions dans une conjoncture économique difficile. Il dévoile les sujets phares sur lesquels son organisation travaille.
Trois questions à Jean-Pierre Crouzet, nouveau président de l'Union Professionnelle Artisanale (UPA).
Vous prenez la présidence de l'UPA pour trois ans. Quels sont vos projets pour défendre les intérêts des artisans ?
J-P Crouzet : En tant que président de l'UPA, je suis au service d'une ambition collective. Nous allons continuer les chantiers entamés ces dernières années, mais surtout nous devons faire davantage connaître nos entreprises, leurs métiers, leurs savoir-faire, leurs valeurs. Nous représentons tout de même 400 milliards d'euros de chiffre d'affaires et près de 4 millions d'actifs.
L'image de l'artisan doit évoluer. Il faut que nos concitoyens identifient mieux qui nous sommes et ce que nous représentons. Nous devons arrêter d'être modestes. Nous appuyer sur nos forces, nos compétences et surtout notre capacité à créer des emplois. Il faut réfléchir à une communication globale pour mieux identifier ce qu'est l'artisanat.
Cette reconnaissance du secteur passera forcément par les jeunes. Quelles seront vos actions en matière de formation ?
J-P Crouzet : Nous devrons développer l'appétence des jeunes pour l'artisanat. Il en va de la spécificité de nos entreprises qui sont fondées sur les moyens humains. Pour cela, il faut repenser l'apprentissage. Nous devons notamment nous interroger sur le statut même d'apprenti. Est-il le plus approprié ? De fait, l'apprenti est considéré comme un salarié lambda, mais il est encore jeune et doit acquérir de nombreuses compétences auprès de ses pairs. Je ne dis pas qu'il doit être considéré comme un stagiaire, mais son statut doit être repensé.
Nous ne devons pas oublier que la nouvelle génération est différente de la nôtre. Les jeunes ne sont pas non plus des machines. Alors, prenons le temps de les former en misant sur leurs aptitudes pour développer leurs compétences. Il faut adapter la formation initiale. Il faut, en quelque sorte, réorienter l'orientation. Les jeunes doivent mieux connaître le monde de l'entreprise. Aujourd'hui, nous sommes chaque jour confrontés à leur ignorance. La formation d'un apprenti coûte cher. Il faut donc mettre toutes les chances de notre côté, et du leur, pour que cela se passe le mieux possible.
Outre une réadaptation de la formation professionnelle, quels sont les leviers de l'UPA face aux hausses de TVA ou au statut d'auto-entrepreneur ?
J-P Crouzet : Nous représentons 55 organisations professionnelles. Nous sommes donc nombreux pour faire entendre la voix des artisans. Nous l'avons encore constaté récemment avec l'accord sur la sécurisation de l'emploi. Le travail de concertation entre le gouvernement et les signataires a porté ses fruits, par exemple sur la complémentaire santé. Si elle est nécessaire pour tous les salariés, le fait qu'elle puisse être organisée de façon mutualisée par branche professionnelle est une victoire pour notre organisation.
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A propos de l'augmentation de la TVA dans le bâtiment, je dis simplement que les artisans ne doivent pas être uniquement des collecteurs d'impôts. En deux ans, le taux de TVA réduit, en passant de 5,5 à 10%, va presque doublé. Beaucoup de professionnels dans le secteur du bâtiment rognent déjà sur leurs marges pour compenser le passage de la TVA à 7%. Les 10% prévus pour 2014 risquent de leur être fatal.
De façon plus générale, l'artisanat doit rester dans une démarche de compétitivité, mais les règles doivent être les mêmes pour tous. Je pense notamment à la concurrence déloyale des auto-entrepreneurs. Il ne doit pas y avoir deux catégories d'entreprises. Autre exemple, les entreprises artisanales qui n'ont pas de salariés ne bénéficieront pas des aides annoncées par le gouvernement (Cice), tandis que leurs cotisations sociales et fiscales augmentent. Notre pétition pour les travailleurs indépendants a d'ailleurs recueilli plus de 10 000 signatures. Et nous ne lâcherons pas sur le sujet.
Enfin, il faudra réfléchir au statut même d'artisan, dans sa globalité. Développer la performance, mais pas l'assistanat. Notre salut passera par la confiance que nous saurons redonner aux clients. Si nous sommes inquiets, cela s'en ressentira. Par exemple, les boulangers servent plus de 10 millions de personnes chaque jour. Nous avons un vrai rôle à jouer sur l'ambiance générale" de la France... Au gouvernement de nous prouver que nous avons raison d'avoir confiance. A nous, ensuite, de l'induire dans la qualité de notre service.
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