Comment moderniser son image de marque : le cas Skoda
Au travers de campagnes humoristiques et centrées sur la qualité de ses véhicules, Skoda a dépoussiéré son image et rajeuni sa cible, pour devenir une marque premium. De son engagement sur le Tour de France aux ambitions pour l'avenir, tour d'horizon de la stratégie du constructeur auto à l'avenir.
Je m'abonne« Qui n'a pas connu le fameux fléau du coup de portière... » demandent Skoda et Rosapark dans le communiqué présentant « Epic Option », la dernière campagne TV de la marque tchèque. Vous savez, ce coup qui raye à coup sûr la voiture garée à côté de la vôtre ? D'où l'intérêt des trop souvent sous-estimées arêtes de portières, qui sont les vedettes de ce nouveau spot, aussi inattendu qu'en totale cohérence avec les autres prises de parole du constructeur rattaché au groupe Volkswagen. Souvenez-vous : mis à part les campagnes plusieurs fois primées comme « Moche dans les années 90 » ou « L'hésitation », Rosapark n'a eu de cesse de mettre en lumière de manière humoristique les USP (unique selling proposition) imaginées par les ingénieurs de Skoda pour leurs clients, de la ceinture pour chien aux clés intelligentes en passant par le porte-parapluie intégré à la portière, l'attache-ceinture rétroéclairée ou le « pack sommeil » des appuie-tête. « Cela montre que la marque est vraiment tournée vers ses clients en multipliant les petites attentions », avance Romain Bruneau, directeur conseil chez Rosapark, pour qui la force de Skoda est « d'accepter son héritage en toute transparence » et même avec autodérision. « Depuis cinq ans, nous essayons de représenter cet état d'esprit, mais aussi le dynamisme de la marque, qui s'est doté d'une berline compacte (Scala), d'une gamme de SUV (Karoq, Kamiq ou Kodiaq) et bientôt d'un SUV 100 % électrique (Enyaq). Cela passe autant par une campagne comme "Moche dans les années 90" qui est, à l'origine, une activation social media à succès, que par des activations comme "Fight for goodies" sur le Tour de France ou "Station with a view" dans le métro parisien. Elles permettent, petit à petit, de changer la perception de la marque. »
Moderniser l'image de la marque
Moderniser son identité de marque ? Un constat partagé par Paul Barrocas, directeur marketing de Skoda France. Il mesure le chemin accompli en cinq ans : « Nous avons un fort enjeu d'émergence, sur un marché français particulièrement difficile, puisque trusté par les constructeurs nationaux qui, avec leurs filiales, pèsent deux tiers du marché. Par ailleurs, Skoda a été pendant un demi-siècle distribué avec la marque russe Lada... Il fallait renverser notre image, surprendre et interpeller grâce à un nouveau storytelling ! » Une stratégie payante, la marque gagnant 0,2 % de part de marché, chaque année, depuis trois ans, pour atteindre 1,8 % du marché français en 2020. « L'an passé, nous avons souffert comme tous les acteurs du secteur, mais nos ventes n'ont baissé que de 18 %, contre 25,5 % pour l'ensemble du marché français. Nous pensons que nous avons le potentiel pour doubler notre part de marché et atteindre 3,6 % d'ici à quatre ans. ». L'image de marque a été ainsi modernisée avec succès.
Paul Barrocas cite ainsi les objectifs du plan de croissance Go All 2025, déployé par la marque en France. En 2021, Skoda vise un taux de pénétration de 2,2 %, avec la vente de 40 000 véhicules dans l'Hexagone. Et l'année commence bien, avec une hausse des ventes, en janvier 2021, de 50 % par rapport à la même période l'an passé, corrélée à une hausse du trafic du nouveau site web de + 20 % à + 40 % par rapport à la version précédente, remaniée fin 2020. Au-delà des campagnes publicitaires ou de l'accroissement du réseau physique, avec le passage de 156 points de vente, en 2020, à 200 d'ici à 2025, la marque peut également compter sur la taille de son parc de véhicules roulant, qui devrait grossir de plus de 50 % ces quatre prochaines années, passant de 284 000 à 481 000 véhicules. Pour Paul Barrocas, l'origine de cette croissance réside autant dans l'amélioration de la désirabilité des modèles de la marque et leur premiumisation, que dans la volonté de Skoda d'offrir le meilleur rapport qualité-prix possible, comme en témoignent les USP précédemment cités. « Historiquement, nous avons un taux de fidélité, lors du renouvellement du véhicule, très élevé, à hauteur de 67 % ! Cette promesse de qualité, fiabilité et sécurité à prix accessible explique notre succès au sein des flottes BtoB, mais aussi auprès d'une population de conducteurs pragmatiques. En 2016, le revenu moyen des foyers roulant en Skoda était de 3 000 euros par mois. Cinq ans plus tard, nous sommes à 4 200 euros par mois. »
Soit le résultat d'une stratégie de montée en gamme progressive : « Nous avons d'abord travaillé le design. Le tournant est la sortie du SUV Kodiaq, qui nous a permis d'intéresser ceux qui voulaient se faire plaisir avec une belle voiture, tout en ayant les moyens de voyager avec et de s'offrir des loisirs d'extérieur. Avec nos derniers modèles, nous touchons également ceux qui recherchent une approche pratique, fonctionnelle et confortable, tant dans leurs véhicules qu'à leur domicile, ou même dans leur manière de s'habiller ! Mais nous avons deux ans d'avance sur la roadmap que nous avions établie en 2016 ! D'où nos fortes ambitions pour les prochaines années. » Désormais, Skoda veut profiter de son image moderne pour cibler un public attiré par l'innovation et le progrès, via notamment la quatrième génération de l'Octavia ou l'arrivée, en mai, du Enyaq 100 % électrique. Le constructeur a aussi rajeuni son audience, avec une moyenne d'âge de 52,5 ans chez ses acheteurs, contre 57 ans, en moyenne, en France. « Nous sommes très contents d'être considérés comme la marque la plus cool chez les moins de 30 ans. Même s'ils ne sont pas encore acheteurs, cela viendra !»
Le Tour de France, allié de la premiumisation
Comme souvent dans la vie, il faut un peu de chance. C'est ainsi que Paul Barrocas voit le partenariat qui unit Skoda à Amaury Sport Organisation depuis 2004. Une association alors logique pour la marque tchèque qui s'est lancée il y a 125 ans en tant que producteur de cycles. Mais une association particulièrement appropriée compte tenu de l'évolution de l'image de l'ensemble des sports cyclistes ces dernières années : "En 2004, nous recherchions de la notoriété et nous avons saisi cette opportunité de devenir partenaire du Tour de France. Aujourd'hui, c'est un événement sportif d'envergure mondiale, et aussi une magnifique vitrine pour notre activité. En 2021, nous voulons équiper la caravane en véhicules 100% électriques. De manière plus générale, le cyclisme est un formidable moyen de parler des nouvelles mobilités. Par ailleurs, nous sommes aussi associés au VTT par exemple, sans oublier les autres courses du groupe ASO. La marque est très reconnue dans le monde du cyclisme. C'est un sport qui touche énormément de monde et qui est de plus en voie de premiumisation."
Pour aller plus loin :
La sinueuse route de la conquête automobile
Lire aussi : Toyota remet à plat son expérience client
Pub TV : un ROI de 6,4 pour les acteurs du secteur auto selon le SNPTV