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6 enseignements à retenir du neuromarketing

Publié par Salomé Kourdouli le

À l'occasion de la journée TinyWorld, organisée par la solution TinyClues, la neuroscientifique Dr Tali Sharot a détaillé plusieurs notions du neuromarketing. Pour s'adresser aux consommateurs, il faut avant tout comprendre les comportements humains.

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L'importance du storytelling

Les histoires et les expériences "vécues" nous affectent bien plus que les chiffres, et parviennent davantage à nous persuader, cela même si elles ne sont pas fondées sur des faits vérifiés. La neuroscientifique Dr Tali Sharot prend l'exemple du débat opposant Donald Trump à Ben Carson, neurochirurgien et homme politique, en 2016. Le premier affirmait que la vaccination peut provoquer l'autisme, prenant en exemple l'histoire d'un enfant précis. Le second soutenait le contraire, qu'aucun lien n'existe entre les vaccins et l'autisme, en appuyant son propos avec des chiffres. " Malgré les chiffres de Ben Carson, l'histoire de Donald Trump a eu beaucoup plus d'impact ", commente la neuroscientifique.

À l'heure des fake news et de la remise en cause du système, le vécu nous importe bien plus que les faits, car plus concret : nous nous identifions à l'expérience. Nous tirons des enseignements des conséquences de nos actions plus que nous croyons la data, sans doute à tort. Les statistiques sont formelles : pas de baleine volante à l'horizon ! D'où l'importance des avis clients aujourd'hui, dont la consultation est ancrée dans le processus d'achat des consommateurs. Un bon avis assure la qualité d'un produit/service, un mauvais nous pousse à l'abandon, malgré les promesses de la marque.

Pour aller plus loin : Peut-on (encore) se fier aux avis clients en ligne ?

Nos capacités analytiques biaisées par nos opinions

Notre rapport aux chiffres est également influencé par nos propres opinions. " Si les chiffres confirment notre opinion, nous sommes capables de les analyser et les prendre en compte dans notre raisonnement, au contraire, si les chiffres infirment notre opinion, nous refusons de les croire et cherchons à prouver que les chiffres sont faux ", explique la Dr Tali Sharot, en évoquant les débats récurrents qui agitent la société américaine autour du contrôle des armes à feu, et la façon dont les chiffres sont alors déformés pour servir les opinions.

La neuroscientifique relate ensuite une expérience réalisée sur ce sujet : une population qui a 70% de risques d'être victime d'une fraude à la carte bancaire a été interrogée. Sans connaître ce chiffre, il a été demandé aux individus d'évaluer leur risque d'en être victimes. Après avoir appris le véritable chiffre, ceux qui ont répondu 90% réévaluent le risque à 75%, et ceux qui ont répondu 30% ont réévalué à 32%. Nous apprenons et prenons en compte les bonnes nouvelles et refusons de croire les mauvaises. La neuroscientifique conseille alors aux marketeurs de communiquer sur un sujet qui met tout le monde d'accord plutôt qu'éveiller un débat.

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La récompense immédiate, moteur d'action efficace

"Dans un hôpital en Inde seulement 10% du personnel médical se lavait les mains systématiquement avant et après être entré dans une chambre. Un panneau numérique, relié à des caméras, a été installé au-dessus de chaque porte de chambre et indiquait le pourcentage du personnel se lavant les mains avant et après être entré dans cette chambre. Le pourcentage était mis à jour en temps réel, et suite à cette expérience 90% du personnel médical respectait les règles d'hygiène", raconte la Dr Tali Sharot. Ainsi, souligner le progrès de chacun, et le porter en exemple, renforce l'engagement et pousse à agir pour y contribuer. La récompense immédiate incite chaque individu à agir car il peut constater les effets de son action, voire même tirer profit de celle-ci. Principe de base des programmes de fidélité, la récompense immédiate est, selon la neuroscientifique, le plus puissant des moteurs d'action.

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Social incentive, ou la motivation sociale

L'être humain est social, et est influencé par son entourage. L'importance des avis clients ou les conclusions de l'expérience précédente traduisent aussi l'influence que nous subissons involontairement. Nous avons tendance à reproduire les actions de nos pairs. Et pour preuve : à la sortie du film américain Sideways en 2004, avec un personnage qui adore le Pinot et déteste le Merlot, les ventes du premier ont augmenté de 16%, celles du second ont chuté de 2%. " Lorsque nous connaissons le comportement des personnes qui nous entourent, nous changeons notre comportement voire même notre opinion pour être semblables ", souligne la Dr Tali Sharot, donnant l'exemple de son fournisseur d'électricité, qui l'incite à optimiser sa consommation et la comparant avec celle du voisinage.

C'est sur ce constat qu'une simple phrase comme " les utilisateurs ont aussi aimé ", peut inciter un client à l'achat de produits complémentaires. Nous sommes de toute façon influencés par les autres, qu'on le veuille ou non.

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Les choix, un peu, beaucoup, pas du tout

"Personne n'aime payer ses taxes, car on ne choisit ni le moment, ni le montant, etc. Le manque de contrôle déplaît, et peut même entraîner de la peur : nombreux sont ceux qui ont peur en avion, tout simplement parce qu'ils n'ont pas la situation en main, explique la neuroscientifique. C'est pourquoi proposer un choix à une personne la pousse à agir. " Elle met toutefois en garde : trop de choix peut produire l'effet inverse chez un consommateur. En effet, si de nombreuses d'options sont proposées, il finira par se désister et ne rien choisir. La Dr Tali Sharot prend pour exemple une expérimentation menée autour de l'impôt : quand on propose aux contribuables de choisir si les fonds seront alloués en priorité à l'éducation, à la police ou encore aux routes, on constate que ces derniers payent plus facilement et sont même heureux de payer. Ils le sont même plus que si on leur demande directement : à quoi voulez-vous que servent vos impôts, sans leur laisser le choix ! Enfin, si l'on propose à une personne de choisir entre Londres ou New York pour ses vacances, la personne se persuadera par la suite d'avoir fait le bon choix, et se sentira valorisée. Pourtant, la personne n'était pas complètement libre dans sa sélection, seules deux options étaient présentées. Avoir une voix lui permet de se sentir importante et la motive.


Plus heureux dans l'anticipation ?

L'anticipation d'un quelconque événement nous rend plus heureux que l'événement en lui-même. " Plusieurs sondages ont été menés et révèlent que nous sommes plus heureux le vendredi que les jours du week-end, que nous sommes plus heureux avant un départ en vacances que pendant les vacances ", souligne la Dr Tali Sharot. Le cerveau humain est conçu pour imaginer et anticiper les situations, et ainsi de nous rendre heureux pendant cette attente. La neuroscientifique a également réalisé une expérience en demandant à plusieurs personnes de choisir quand elles préféreraient embrasser une célébrité si elles en avaient l'opportunité : tout de suite, le lendemain, dans 3 jours, dans une semaine ou dans un mois. La majorité a répondu 3 jours, preuve que nous préférons l'attente à l'immédiateté.

Et pourtant, aujourd'hui les sites s'attachent tous à la livraison en 48h, en 24h, ou même immédiate. Avec ces délais de livraison, notre imagination est coupée court et ne laisse aucune place à l'anticipation, et la joie ressentie pendant cette attente. Faut-il alors réinventer une nouvelle expérience d'achat en ligne ?

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