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#Transmarketing : Comment l'IA fait alliance avec les marketeurs ?

Publié par Barbara Haddad le

L'intelligence artificielle est utilisée en marketing pour de nombreux usages : quels sont-ils, et comment l'IA fait-elle désormais binôme avec l'intelligence humaine pour servir et renforcer le lien marque-client ?

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Intelligence Artificielle et Data : où en sommes- nous en 2021 ?

L'intelligence artificielle permet de traiter de grands volumes de données (big data), rapidement et de façon automatisée. "Elle fonctionne de façon apprenante, que ce soit de façon supervisée ou non, on parle alors de machine learning ou de deep learning pour désigner la capacité de l'IA à "apprendre à partir de données", explique Géraldine Frappier, directrice marketing sciences Europe de l'Ouest chez GfK."Mais, ce qui fait le niveau d'utilisation de l'IA en entreprise c'est avant tout son niveau de maturité concernant la gouvernance et l'utilisation de ses données : origine et fraîcheur de la data, vision client unique etc.", explique Thomas Husson, VP, Principal Analyst chez Forrester. S'assurer d'une bonne qualité des données (fiabilité, mise à jour récente etc.) utilisées par les algorithmes d'IA est donc primordial pour les entreprises, ce que confirme Mick Levy, auteur du livre "Sortez vos données du frigo" (Editions Dunod) : "Les données constituent une matière première, que les entreprises peuvent générer à profusion et fac?onner selon leurs besoins. Le cercle vertueux qu'elles forment avec le numérique et l'iA doit motiver à adopter une démarche volontariste, créatrice d'une forte valeur". "On parle de Transmarketing pour désigner cette alliance entre l'homme et la machine", résume Bertrand Espitalier, CEO d'EngageX, agence spécialisée dans l'engagement client. Quels sont alors les différents usages marketing ?

1. L'identification de nouvelles tendances et de communautés

Le web et social listening permettent d'identifier les signaux faibles et parmi eux, ceux qui se transformeront en de réelles tendances dans lesquelles il est stratégique pour une marque d'investir (selon son secteur d'activité, sa cible etc). Ainsi, Almanac est une intelligence artificielle développée au Royaume-Uni par la société Olvin, qui prévoit les comportements des consommateurs en traitant chaque jour des milliards de données afin d'aider les petits commerçants à s'adapter à leurs clients (source : Observatoire Netexplo). "L'IA est en mesure d'analyser ce qui est dit mais aussi ce qui est posté : photo, vidéo etc. ce qui donne des indications de contexte dans lequel est consommé un produit. C'est ainsi qu'une marque de whisky a identifié qu'elle était particulièrement appréciée des rappeurs américains et a donc entrepris de communiquer auprès de cette cible, avec des codes de communication spécifiques", ajoute Thomas Husson. Grâce à ce mix de données sémantiques et non structurées, les marques peuvent identifier des insights inspirants pour leurs prochaines actions marketing mais aussi les communautés auprès desquelles tisser du lien, ce que confirme Vanessa Moreno, Research Director chez Dynvibe : " Dans un web de plus en plus social, la 'social media intelligence' est un moyen d'identifier l'émergence spontanée de communautés d'individus, fédérés autour de comportements, de valeurs ou de centres d'intérêt communs".

2. L'optimisation du ciblage publicitaire

" L'IA est en mesure d'automatiser des tâches simples mais aussi de prendre en charge des tâches complexes, impossibles pour l'intelligence humaine, au vu de la taille des données à traiter. Elle a alors pour avantage d'ouvrir le champ des possibles, en empruntant des chemins auxquels nous n'aurions pas pensé", poursuit Arnault Chatel, évangéliste sur les notions de transformation numérique. C'est ce que confirme la nouvelle approche de ciblage publicitaire proposée par Facebook : fini le temps où l'on testait un à un des segments d'audience avec plusieurs créations, les annonceurs peuvent désormais confier cette phase de test and learn à l'algorithme de la plateforme sociale : "Vous définissez un budget global pour votre campagne et c'est l'IA qui va, de façon automatique, itérer sur plusieurs segments, avec plusieurs créations pour trouver les combinaisons les plus rentables et y allouer ensuite la majorité du budget", explique Guillaume Cavaroc, Business Director retail & e-commerce de Facebook. Une nouvelle démarche qui semble faire ces preuves selon le témoignage des équipes de ManoMano lors de la Marketing Week 2021 : " En utilisant une méthode indépendante, fondée sur le concept de jumeau synthétique - qui ne se base pas sur les modèles d'attribution - nous avons pu constater les bonnes performances de l'IA de ciblage de Facebook. Grâce à ce ciblage intelligent, nous avons diversifié nos canaux d'acquisition sans perdre en performance globale", déclare Jérémie Jakubowicz, VP Data chez ManoMano.

3. L'hyper personnalisation des communications

Fini aussi les segmentations traditionnelles, définies en one shot et mises à jour une fois par an : les clients ou visiteurs d'un site web peuvent être, grâce à l'IA, segmentés en temps réel en fonction de leur comportement (achat, navigation web, contact service client etc.). L'adoption d'un outil de marketing automation permettra de créer et mettre à jour à la volée ces segments d'audience et de déclencher de façon automatique des actions marketing, en fonction de workflow prédéfinis : wellcom pack, relance panier ... L'enjeu est de proposer des contenus de plus en plus personnalisés, affinitaires et adaptés au cycle de vie du client ou prospect pour avoir plus de chance de capter l'attention. Le risque néanmoins est de paraître trop intrusif, d'où l'importance de s'assurer que les données utilisées soient bien "RGPD friendly". Autre point de vigilance, celui de ne pas laisser assez de place au libre arbitre et à la découverte spontanée, comme certains peuvent le reprocher à des plateformes comme Netflix. La bonne pratique peut être de mixer informations personnalisées et d'autres plus globales : top des ventes, nouveautés etc. pour laisser une chance à la sérendipité d'opérer !

4. La prédiction des futurs comportements

L'étape suivante est d'utiliser l'IA à des fins de prédiction pour adopter une posture proactive, que ce soit auprès de clients qui ont une forte probabilité d'effectuer un achat ou au contraire de se désabonner. "Grâce à l'hybridation des données, c'est-à-dire la prise en compte de données de natures différentes - comportementale, météorologique, disponibilité des stocks etc.- il est aujourd'hui possible d'adapter son message en identifiant les signaux faibles qui prédisent des intentions d'achat ou au contraire d'attrition", explique Sophie Dionnet, General Manager Business Solutions chez Dataiku. C'est aussi l'approche qu'ont mis en place les instituts d'étude, dès le début de la crise sanitaire, pour être en capacité d'identifier des tendances malgré la volatilité des comportements : "L'IA peut apporter une réponse dans un contexte changeant, grâce à un mix de jeux de données déclaratives, implicites, CRM, open data etc. On pourra alors être en mesure de déterminer des prévisions de ventes sur les prochaines semaines pour une marque ou un secteur d'activité", confirme Géraldine Frappier.

5. La conversation en support client

L'intelligence artificielle vient également en support du service client, via un chatbot ou un callbot pour décharger les centres d'appels mais aussi, en soutien du conseiller lors du traitement d'une demande d'un client ou d'un prospect. "Dans le premier cas, le bot va permettre d'apporter un premier niveau de réponse, rapidement et à toute heure de la journée. Chez City-Drop, spécialiste de la location d'utilitaire en aller simple, cela a permis par exemple de diminuer d'un tiers les appels entrants en moins d'un an", déclare les équipes de Dydu, spécialiste du marketing conversationnel. Dans le second, des solutions d'Agent Virtuel comme celle que propose Avaya, accompagnent les agents de centre de contact dans la résolution des demandes au fil de la conversation : informations sur le client, suggestions de réponses, déclenchement d'actions en fonction de l'identification d'un mot-clé spécifique ou encore d'une intonation de la voix particulière (identification d'agacement).

6. L'approche servicielle du diagnostic et de la recommandation

Plusieurs marques ont développé des moteurs de recommandation sur leur site web ou application mobile afin d'apporter de l'information contextualisée en fonction d'un besoin spécifique. Cela va d'un générateur d'idées de cadeaux pour Noël comme a pu le mettre en place Blissim, spécialiste de la box beauté, il y a quelques années à un diagnostic complet en fonction de questions posées ou du scan d'une photo afin de fournir une routine de soins personnalisée. NIVEA propose ainsi le Skin Guide, tandis que la start-up Abbi Paris va même jusqu'à créer une formulation de crème dédiée parmi 40 000 combinaisons de formule possibles.

Point de vigilance : l'importance du binôme IA et IH pour éviter les biais

L'utilisation de l'IA participe donc à une approche marketing plus personnalisée, en lien avec les besoins et attentes de chacun ... attention toutefois, à rester dans une démarche collaborative avec l'intelligence humaine, pour ne pas laisser s'installer de potentiels biais.

"Dans le cadre par exemple de l'utilisation de l'IA en soutien d'un recrutement, si jusqu'ici l'entreprise a principalement embauché des hommes, l'algorithme aura appris " les hommes sont plus susceptibles de devenir responsable que les femmes" et éliminera de fait, les candidatures féminines. Une discrimination fausse et qui ne serait pas acceptable dans la vie réelle, d'où l'importance que l'IA puisse faire des suggestions et que l'humain ensuite détienne la décision finale ainsi qu'un regard sur les règles de ciblage, de sélection etc.", explique Géraldine Frappier. Ce point d'explicabilité des algorithmes est primordial dans les entreprises puisqu'il invite les équipes à se responsabiliser et à éviter l'effet "black blox". Il s'agit de s'assurer régulièrement que des biais ne se sont pas introduits au fur et à mesure que l'IA apprend : on parle alors d'éthique de l'IA. Enfin, un autre biais pourrait venir du fait qu'aujourd'hui, en France seulement 12% de femmes travaillent dans le secteur de l'intelligence artificielle (si on exclut les fonctions marketing et communication) : "Plus il y aura d'hétérogénéité dans les profils qui travaillent sur les algorithmes d'IA comme sur les données qui les alimentent, plus on aura des résultats de bonne qualité et réalisés en toute objectivité", conclut Géraldine Frappier.

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