Bâtisseur international
Coups d'oeil à son agenda électronique, prises de notes rapides, regards
vers les mails qui ne cessent d'arriver (entre 60 et 70 par jour)... Tout en
répondant aux questions, de manière concise, Sylvain Forestier a l'esprit en
alerte permanente. Il l'avoue, « j'ai tendance à penser à plusieurs choses à la
fois. Et de manière générale, j'ai beaucoup de mal à me concentrer sur quelque
chose. Je touche un peu à tout, je papillonne, j'ai beaucoup de centres
d'intérêt... En sport, je suis moyen partout. » Ce qui ne veut pas dire que le
coprésident de D interactive ait l'air désorganisé pour autant. Même s'il est
souvent en retard... bien que son vécu européen - il est responsable de la
Suède et la Grande-Bretagne - l'oblige à faire davantage attention. « Je
travaille de façon assez dense et rapide. Je ne supporte pas une réunion qui
dure plus d'une heure. » Et, malgré ses "doubles journées", dues à sa
présidence depuis janvier 2000 de l'association CroissancePlus, il préserve
soigneusement ses six semaines de vacances au cours desquelles il va pratiquer
le ski, la plongée, l'escalade en Corse, la voile... et ses week-ends « pour
voir les enfants ». Des vacances ou des week-ends qu'il lui arrive fréquemment
de passer avec son associé de toujours, Jean-François Lanièce. C'est avec lui,
et Vincent Roure, - qui a quitté le trio il y a quelques années -, rencontrés
en prépa, que l'aventure démarrera en 85. A sa sortie de l'Essec. « Dès
l'école, je voulais créer une entreprise. J'avais d'ailleurs beaucoup travaillé
dans le cadre de la junior entreprise. » Au point de devenir président de la
Confédération Nationale des Junior Entreprises en 83. Première création : une
agence spécialisée dans les clubs de clientèle - « Quand vous n'avez pas
d'argent, pas de relations, il est difficile de faire autre chose que du
conseil » -, qui donnera très vite naissance à une agence purement MD,
Directement. Un « bon feeling » avec Philippe Michel leur fait vendre 45 % des
parts à CLM-BBDO. Le développement suit : de 6 MF de marge brute en 86,
l'agence passe à 50 en 96. Mais, après le décès de Philippe Michel et un
désaccord avec le groupe au niveau du positionnement de l'agence, qui voulait
s'orienter vers le CRM et la technologie, c'est le retour à l'indépendance. La
naissance de Groupe D!, devenu depuis D interactive, l'entrée en Bourse en 99
pour accélérer la croissance. 120 MF de chiffre d'affaires en 98, entre 650 et
700 prévus pour fin 2001. « La Bourse ne nous donne plus le droit à l'erreur.
Nous sommes obligés de réussir. D'avoir une gestion plus agressive. » Car
l'aventure est loin d'être terminée. « Nous avons encore un très gros potentiel
de développement. Nous voulons attaquer l'Allemagne..., construire sur les cinq
à huit ans qui viennent le groupe leader en Europe, avec une taille de l'ordre
de 2 MdF. Aujourd'hui, le groupe est encore petit et n'a pas atteint la
profitabilité que l'on souhaite. » Et si c'était à refaire ? « Je ne donnerais
pas forcément le conseil de partir de zéro, comme nous l'avons fait. Nous avons
perdu beaucoup de temps, connu des galères... Peut-être vaut-il mieux avoir
deux-trois ans d'expérience pour avoir une meilleure vision. » Des regrets ? «
Je n'aime pas tellement regarder en arrière. Je suis plus tourné vers le futur.
Je crois que dans ma vie personnelle, je n'ai pas commis trop d'erreurs. Au
niveau professionnel, nous en avons fait des tas, nous avons racheté des
sociétés trop cher ou mauvaises... Mais au final, il y a quand même beaucoup
plus de positif que de négatif. » Sylvain Forestier avouera quand même un
regret : « J'aurais beaucoup aimé faire Sup Aéro. » Car sa grande passion, et
il suffit de regarder son bureau, dont un des murs est décoré d'une superbe
hélice, pour s'en convaincre, c'est l'aviation. « Dès que j'ai pu, en 84, j'ai
piloté. J'aime bien ce milieu où il faut être super actif, car l'on est
toujours en train de décider quelque chose. On y rencontre aussi souvent des
entrepreneurs, et des gens assez caractériels. » Caractériel Sylvain Forestier
? « Non, je dois me mettre en colère une fois par an... Je suis souvent de
mauvaise humeur, mais ce n'est pas pareil », dit-il. Dans un grand sourire.
Parcours
41 ans, marié, trois enfants (2, 5 et 9 ans). Essec 84. 85 : création, avec Jean-François Lanièce et Vincent Roure de SAVE, agence spécialisée dans les clubs. 86 : création de Directement, agence de MD, qui deviendra filiale de CLM-BBDO. 96 : création de Groupe D!, devenu D interactive en 2000. Président de CroissancePlus, association réunissant des entreprises de croissance, depuis janvier 2000. Passionné d'aviation.