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Laurent Solly: "La France est le labo de Facebook"

Après la retentissante conférence annuelle F8 de Facebook, le mastodonte des réseaux sociaux, en avril dernier, Laurent Solly, son DG France, nous a révélé les projets de Facebook France et les opportunités qu'il entend offrir aux marques.

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Laurent Solly: 'La France est le labo de Facebook'

- La conférence F8 de Facebook a officialisé l'arrivée des "chat bots" au sein de Facebook Messenger. Comment cela fonctionne-t-il?

Nous entrons dans une nouvelle ère de la relation client, dont les expérimentations ont vu le jour en Asie. Il n'est plus possible de rester des heures au téléphone avec un call center. Quant aux e-mails et aux SMS, ils sont datés pour les premiers et pauvres dans leur expression pour les seconds. Après des tests réalisés aux États-Unis, en 2015, afin de trouver des solutions plus modernes pour relier les entreprises à leurs prospects et à leurs clients, l'idée de l'utilisation de Facebook Messenger pour les entreprises et des "chat bots", des robots conversationnels, a émergé. Pour les entreprises, il s'agit d'automatiser, en plus ou moins grande partie, le traitement de la relation clientèle face aux questions récurrentes, mais aussi d'entretenir la conversation avec les clients, de les informer sur les commandes et, peut-être, demain, de proposer de nouveaux produits et services.

" Le but de Facebook Messenger est de connecter une personne avec des amis mais aussi des marques. "

Le but ? Connecter une personne avec son environnement : des amis mais aussi des marques. Dans un monde devenu extrêmement mobile, les individus souhaitent retrouver dans leur fil d'actualités Facebook, mais aussi dans la messagerie (Messenger ou WhatsApp), l'ensemble des personnes qui comptent pour eux. Ils veulent également être en connexion mobile et permanente avec des entreprises par le biais du texte, des images ou des vidéos. L'ambition de Facebook Messenger est ainsi d'élargir au champ de la relation client ce que nous faisons déjà dans notre vie personnelle sur les messageries. La France est le premier pays européen à avoir effectué les tests grandeur nature de Messenger pour les entreprises, avec deux grandes marques, Voyages-sncf.com et Axa (pour des services financiers ciblant les jeunes). Les retours sont encourageants. Dans les prochaines semaines, les premiers bots Messenger seront lancés en France.

- Le consommateur ne risque-t-il pas de se sentir "envahi"?

C'est un sujet que nous avons déjà traité dans Facebook et dans Instagram, lorsque la publicité est arrivée dans les fils d'actualité. Nous avons bien maîtrisé cet équilibre entre le respect de la vie privée et la communication des marques. Pour preuve, nous avons gardé une croissance du nombre d'utilisateurs et du temps passé. Les marques ont pu sponsoriser des publications sans que cela dénature l'expérience des utilisateurs de Facebook. Et cela car le contenu est adapté, le ciblage de très grande qualité, et le volume limité : les contenus sponsorisés représentent 5 à 7 % du fil. Le respect et la richesse de l'expérience sont pour nous une priorité.

- Avec Facebook Live, la vidéo en direct arrive en force en France. De Periscope à Meerkat, en passant par Twitch, de nombreux acteurs propo­sent déjà du live streaming. Qu'apportez-vous de plus?

Facebook Live est au coeur de notre mission : connecter les personnes et leur permettre de partager des moments de vie, des émotions. Cela a été fait avec du texte et des images, et nous innovons désormais avec de la vidéo en direct, par le biais du téléphone portable. Le fonctionnement du Live est simple, souple et engageant. Son atout majeur par rapport à la concurrence est qu'il reste visible sur le profil de l'utilisateur. Sans oublier la puissance de notre réseau social, qui compte 31 millions d'utilisateurs en France. L'outil a suscité l'engouement de grandes marques, notamment des médias comme la radio RFM, dont un concert diffusé en cinq moments de live sur Facebook a réalisé plus d'un million de vues en moins de 48 heures. Nous avons également réalisé un test avec Voyages-sncf, qui a utilisé la fonctionnalité pour lancer sa campagne de vente de billets d'été. De manière générale, les marques s'intéressent à Facebook Live pour acquérir davantage de proximité et d'authenticité dans la relation avec leurs clients. C'est un succès : nous observons que le temps passé sur Live est trois fois supérieur aux autres contenus vidéo, et que les utilisateurs commentent dix fois plus les vidéos en direct que les autres.




- Les marques font-elles bon usage des médias sociaux?

J'entame ma quatrième année chez Facebook et je suis convaincu, depuis deux ans, de la prise de conscience totale, chez tous les acteurs, de l'impératif du digital au service du développement des marques et de sa puissance. Le marketing ne sera plus jamais le même. L'audience devient de plus en plus digitale et de plus en plus mobile. Les produits les plus innovants, comme la vidéo, sont issus des grandes plateformes digitales. La capacité de cibler a totalement changé... Tout comme la façon de mesurer l'impact d'une campagne : ce n'est plus seulement le nombre de vues ou de clics qui intéresse, mais davantage la valeur apportée, le ROI dégagé, les ventes générées. Une ligne de force s'impose : la personnalisation du marketing, pour toucher les bonnes personnes avec les bons contenus. À la grande différence de la télévision et des médias traditionnels, l'outil est personnel, car il existe autant de Facebook que d'utilisateurs de la plateforme. Les marques ont compris que nous faisons face à une révolution du marketing, mais nous ne sommes qu'au début de ce changement. Le rôle des plateformes sociales, en particulier de Facebook, est fondamental, car nous apportons des outils mobile first, de nouveaux produits tels que la vidéo, de nouvelles façons de créer de la relation clientèle et de nouveaux outils de mesure fondés sur le ROI. Nous vivons un moment passionnant.

"Notre rôle d'être un des leaders dans le secteur de l'intelligence artificielle."

- Comment le marketing peut-il tirer le meilleur parti de Facebook?

Nous développons de nombreux produits pour les annonceurs. Le grand succès des dernières années a été la vidéo autoplay, car celle-ci répond à un usage mobile, sans être intrusive ni interruptive. Il faut savoir que les dix premières secondes d'une vidéo sont cruciales, et plus encore, les trois premières, afin de capter l'attention de l'utilisateur et interrompre le défilement de la page. Un des plus beaux formats mobiles est le "Canvas". Très natif, immersif, il vous fait immédiatement pénétrer dans l'univers de la marque. Les marketers peuvent aussi ­s'appuyer sur la force de notre ciblage anonyme et collectif, mais de très grande qualité. Il ne faut pas oublier de mesurer ses actions. Nous avons installé, il y a un an et demi, à Paris, une équipe measurement qui a à sa disposition des outils internes, comme Atlas, lui permettant de réconcilier les parcours on line et off line. Notre measurement répond à la stratégie des 3 R : le reach - toucher les bonnes personnes -, la résonnance - l'écho dans la préférence de la marque - et le ROI - la valeur apportée dans le business de mon partenaire. Les campagnes Facebook permettent d'améliorer la préférence de la marque, mais aussi de générer des ventes.

- La Cnil a, en février 2016, accusé Facebook de manquements à la loi Informatique et Libertés, avec un délai de 3 mois pour répondre à ses exigences. Où en est la mise en conformité?

La protection de la vie privée des utilisateurs est notre priorité numéro 1 et nous avons la ferme conviction que nous respectons la loi européenne sur la protection des données. Nous continuons à discuter activement avec la Cnil. Le contenu de nos discussions reste naturellement confidentiel.

- Qui dit vidéo dit mobile... Quelle place occupe le mobile dans votre stratégie de développement?

Le mobile est devenu le premier écran de consommation du digital et, plus spécialement, de la vidéo. Le mobile est particulièrement adapté à la vidéo, et la tendance des grands écrans ne fait que renforcer ce phénomène. Actuellement, sur les 8 milliards de vidéos visionnées au quotidien sur Facebook (ce qui représente plus de 100 millions d'heures chaque jour !), les trois quarts sont vues depuis un mobile (en janvier 2016). Notre marque est la première consommée sur mobile. En France, 31 millions d'individus se connectent chaque mois à Facebook, dont 26 millions depuis leur smartphone. Nous consacrons, depuis 2012, tous nos développements au mobile, sur lequel tout est codé en priorité. L'entreprise, née sur un ordinateur, est devenue mobile first.

"Les produits les plus innovants, comme la vidéo, sont issus des grandes plateformes digitales."

- Mark Zuckerberg a annoncé la création d'une équipe dédiée à la réalité virtuelle. Est-ce l'avenir pour Facebook?

À l'occasion de l'événement F8, nous avons présenté notre ambition à trois, cinq et dix ans. À court terme, nous axons notre stratégie sur le développement d'innovations pour les marques chez Facebook, Instagram et Messenger. D'ici cinq à dix ans, nous prévoyons de franchir de nouvelles étapes : l'intelligence artificielle, la connexion de l'ensemble du monde - via le programme Internet.org, des solutions satellitaires ou des avions solaires - ainsi que la réalité virtuelle, par le biais de l'équipement Oculus, notamment. Mark Zuckerberg voit dans la réalité virtuelle une source de progrès et une nouvelle plateforme d'échange et de connexion. Nous pouvons d'ores et déjà considérer les vidéos à 360 degrés comme les premières expériences de cette réalité virtuelle.

- Le laboratoire d'intelligence artificielle de Facebook a ouvert ses portes à Paris en 2015. Quelle est sa feuille de route?

Nous allons fêter son premier anniversaire cet automne. Il est le troisième site dans le monde après San Francisco et New York. Il constitue un investissement et un engagement très forts pour ­l'entreprise. Ce qui se passe dans le secteur de l'intelligence artificielle nous semble crucial : c'est notre rôle d'en être un des leaders. Nous pensons que les outils d'IA vont nous aider, dans les prochaines années, à accomplir notre mission - connecter le monde - et à faire face à l'explosion des données. Nous allons avoir besoin d'outils puissants pour assurer la gestion des data et présenter dans les fils d'actualité les informations les plus pertinentes pour chaque utilisateur. Notre laboratoire parisien emploiera, à la fin de l'année, une vingtaine de chercheurs, pour la plupart français ou européens, qui travaillent en étroite collaboration avec les institutions du secteur telles que l'Inria (Institut national de recherche dédié au numérique, NDLR). Cette équipe de très haut niveau se consacre à plusieurs recherches, en open source : la vision par ordinateur, le traitement automatique du langage et le machine learning.

- Plus largement, quelle est l'ambition de Facebook France?

Le groupe a de grandes ambitions pour le marché français. Il existe, dans notre pays, un écosystème digital dynamique et le rôle de Facebook, qui a été une start-up il y a douze ans, est d'en être un partenaire actif. Nous sommes, par exemple, partenaires de France Digitale, The Family et de BlaBlaCar, d'ailleurs situé dans le même immeuble que nous. Notre programme dédié aux start-up françaises vise à repérer des start-up dont nous cherchons à accélérer le développement afin d'en faire des succès français, européens et, si possible, mondiaux. Nous avons également développé un lien très fort avec l'économie française. Nous travaillons avec tous les grands groupes, mais nos innovations ne sont pas réservées aux entreprises du Cac 40. Un million de TPE et de PME tricolores possèdent une page Facebook. Le digital est le fil rouge entre L'Oréal et la boulangerie du coin. C'est la source de la croissance d'aujourd'hui et de demain.

Le rôle de Facebook est d'accompagner ce mouvement et de devenir le partenaire majeur de la transformation digitale des entreprises. Compte tenu de notre nombre d'utilisateurs, nous avons aussi un rôle à jouer dans la société française. Nous prenons beaucoup d'initiatives pour l'emploi, avec la CGPME, ou dans la lutte contre les propos racistes et antisémites, via une grande campagne menée en 2015 avec la Licra, par exemple. Enfin, Facebook France devient, au sein du groupe, un laboratoire ­d'expérimentation. Dans le luxe, par exemple, de nombreuses initiatives ont été initiées en France - je pense notamment aux Journées particulières du groupe LVMH - regardées de près par les autres pays dans lesquels Facebook est implanté.




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