Communication de crise : première charte éthique
Le Syntec RP publie la première charte éthique des professionnels de la communication de crise. Détail et mise en perspective.
Syntec Conseil en Relations Publics, syndicat représentatif d'environ 65% des professionnels du secteur, a présenté lors de son Agora d'automne, à Paris, la première "Charte éthique des professionnels de la communication de crise" (à lire ici).
Réglementer la profession
À l'heure où plus aucune marque n'est à l'abri d'une crise, comme l'a brutalement expérimenté Zara à la fin de l'été dernier (lire notre article ici), cette charte s'adresse aux professionnels de la communication mais aussi à leurs clients. En une quinzaine de courts articles réunis sur deux pages, elle dresse la liste des engagements, droits et devoirs "du communicant".
Son ambition : "faire respecter les standards éthiques [...] et jeter les bases d'un référentiel commun à tous les professionnels", précise le Syntec RP, ce qui préfigure la venue "d'une formation certifiée, l'instauration du secret professionnel et à terme, la création d'un Ordre".
"De l'ombre à la lumière"
Cette charte, pleine de "dignité", "humanité"," conscience"... , ne dresse-t-elle pas en positif le portrait d'une profession qui, justement, serait dépourvue de ces attributs? Ou à l'inverse, vise-t-elle à protéger les communicants de clients indélicats qui les pousseraient aux frontières de la légalité?
«Cette initiative témoigne d'une évolution historique de notre discipline, explique Yves-Paul Robert, à la tête de la commission qui a élaboré la charte, et directeur associé d'Havas Paris. « Dans une société médiacratique, la communication joue une influence décisive sur la réputation mais aussi le business des entreprises. De plus en plus stratégique, la discipline est questionnée. Elle se devait de passer de l'ombre suspicieuse à une lumière assumée et respectée à l'égal des avocats ou des experts-comptables. »
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Un exemple récent "d'ombre suspicieuse": l'affaire Cahuzac. En avril dernier, l'ancien ministre accorde à BFM-TV une interview-confession parfaitement huilée, préparée à l'évidence avec ses conseillers en communication. Réaction, le lendemain, du journaliste et co-fondateur de Mediapart Edwy Plenel, sur i>TELE : "ces communicants, ce sont profondément un des poisons de notre démocratie. Ce sont les adversaires de ce que nous devons faire, nous journalistes. Nous devons être au service du droit de savoir des citoyens, pas de ces techniques qui essayent de cacher, de voiler, de mentir."(Voir la vidéo ici, citation d'Edwy Plenel à 10:37 minutes).
"En fait, précise Christophe Ginisty, spécialiste de la communication de crise (voir encadré ci-dessous), beaucoup d'acteurs de la gestion de crise font face à des actions un peu en dehors du droit, de la légalité". Par cette charte, le Syntec RP entend donc protéger et redorer l'image des communicants.
De quelle crise parle-t-on?
Mais pour notre expert en communication, ce qui manque à la charte, c'est une définition claire de la crise évoquée. "Une crise de communication de type industrielle, comme un toit d'usine qui s'effondre sur les ouvriers, n'a rien à voir avec l'affaire Cahuzac, qui elle-même n'a rien à voir avec un scandale alimentaire. Ce ne sont ni les mêmes enjeux, ni les mêmes pratiques".
"La charte, en fait, ne s'intéresse qu'à une sorte de crise, celle où le client est malveillant, indélicat, soit une toute petite partie de la communication de crise", poursuit Christophe Ginisty. Qui rappelle également qu'en 1965, l'IPRA (linternational Public Relations Association) avait déjà publié une charte de bonne conduite, le Code of Athenes, amendée en 1968 et plus récemment en 2009.
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Publiée en 2014, cette charte française valide le poids croissant du Web social comme générateur de crise, des crises de réputation, d'e-réputation, qui peuvent virtuellement toucher toutes les marques sur la place publique à une vitesse inégalée dans le passé.
Christophe Ginisty est le créateur de la conférence ReputationWar et un spécialiste de la communication de crise et réputation des marques. Retrouvez-le sur son blog Ginisty.com.
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