TV segmentée : quelles sont les bonnes pratiques pour 2023 ?
Cela fait deux ans que la publicité segmentée en télévision a fait son apparition, constituant une véritable innovation de rupture pour mieux contextualiser, à l'échelle des foyers, les messages publicitaires diffusés. Quels sont les premiers enseignements et bonnes pratiques à adopter ?
"Sur l'année 2022, le bilan pour la publicité en TV segmentée porte sur plus de 700 annonceurs et plus de 1000 campagnes opérées, dont une part en multi-régies. Les secteurs les plus actifs ont été l'automobile, la distribution et la restauration et le tourisme", nous confie Isabelle Vignon, déléguée générale du SNPTV - Syndicat National de la Publicité Télévisée. Environ ¼ des foyers sont désormais adressables, soit près de 7 millions, avec un objectif d'élargissement à 8 millions d'ici fin 2023, notamment avec l'arrivée attendue de Free, aux côtés d'Orange, de Bouygues Telecom et de SFR. "L'offre de publicité en TV segmentée présente un double avantage : celui de la puissance des audiences couplée à la finesse de ciblages de plus en plus pertinents, le tout au service de l'optimisation des campagnes et d'un budget maîtrisé", affirme Virginie Sappey, directrice marketing et études chez France TV Publicité. Pas étonnant donc, qu'aussi bien les grands annonceurs que les plus petits, à l'échelle locale, soient intéressés : "Chez France TV Publicité, ce sont 60% de nouveaux clients en 2022", précise Virginie Sappey, tandis que chez M6 Publicité, "40% des annonceurs actifs au 2e semestre 2022 en étaient au moins à leur seconde campagne", abonde Hortense Thomine-Desmazures, directrice générale adjointe. Il y a donc bien un double effet positif : à la fois de recrutement et de fidélisation, "D'autant que des nouveautés importantes ont été mises en place comme l'ouverture de la TV segmentée aux primes et le décrochage en multi-spots au sein d'un même écran TV", précise Laurent Bliaut, directeur marketing et R&D de TF1 PUB.
La deuxième édition du festival de courts-métrages Westfield Stories, en janvier 2023, a été soutenue par un plan média 100 % vidéo comprenant de la TV segmentée. Enjeu : cibler les consommateurs des 8 centres de shopping dans lesquels les films ont été tournés (Ile-de-France, Lille et Lyon).
Une volonté de proposer des segments d'audience communs...
Les régies publicitaires montrent une volonté d'avancer conjointement. Cela se traduit en partie par une grande transparence quant à la création des segments d'audience, qui sont calculés de façon identique : "Si la marque est au clair sur l'audience qu'elle souhaite toucher, autant se réunir entre régies pour l'aider à toucher une couverture la plus large possible. Il est donc important que des segments tels que "petits consommateurs tv" ou encore "hauts revenus" soient construits pour chaque régie de façon similaire", explique Emmanuelle Godard, digital marketing et innovation director de Canal+ Brand Solutions. Pour autant, chaque régie s'affirme aussi par la proposition de segments affinitaires spécifiques, liés aux programmes des chaînes, pour toucher par exemple les foyers qui ont regardé la Maison des Maternelles pour France TV Publicité, les fans de golf ou de Formule 1 pour Canal +, ou encore, chez Altice Media, les investisseurs immobiliers issus de la consommation de BFM Business.
7 millions de foyers sont adressables en TV segmentée, début 2023.
... Mais une plus grande sophistication des ciblages
"Nous constatons que près de la moitié des campagnes menées en 2022 en TV segmentée ont activé un ciblage par géolocalisation (49%)", indique Isabelle Vignon. Laurent Bliaut ajoute : "Parmi les segments les plus demandés, il y a les CSP+, les petits consommateurs TV, les propriétaires et les familles avec enfants". Virginie Sappey de préciser encore : "Il n'est d'ailleurs pas rare de voir des ciblages combinés qui mixent géolocalisation avec ces segments, ou d'autres". Par ailleurs, les régies continuent d'innover quant aux possibilités de ciblage : Altice Media propose désormais des critères de météosensibilité ainsi que la diffusion autour de zones de chalandises prédéfinies, tout comme France TV Publicité qui innove avec le ciblage par isochronie.
En route vers le TV CRM ?
Les prochaines innovations en termes de ciblage semblent porter sur le rapprochement des données fournies par les opérateurs télécoms avec de la donnée tierce. "Ainsi TF1 PUB a noué un partenariat avec Infinity Advertising (alliance data d'Intermarché, Casino, Géant, Franprix et Monoprix) pour proposer des campagnes plus ciblées sur le Food et les produits de grande consommation", explique Laurent Bliaut. Même démarche chez M6 Publicité : "En 2023 nous allons enrichir nos capacités de ciblage puisque nous venons d'annoncer un premier partenariat avec Sirdata, qui permet de cibler des foyers d'acheteurs/intentionnistes", poursuit Hortense Thomine-Desmazures.
D'autres perspectives peuvent être envisagées, notamment en croisant les données first party d'une marque (ses données acheteurs ou CRM) avec les données opérateurs pour permettre aux annonceurs de cibler uniquement leurs clients (dans une démarche de fidélisation) ou au contraire de les exclure (dans une démarche de recrutement), tandis que Canal+ compte bien ouvrir le ciblage auprès de ses propres abonnés en 2023 !
En 2021, McDonald's France a été le premier annonceur à activer une campagne en TV segmentée sur 3 réseaux de chaînes (TF1, FranceTV et M6).
Des débuts en programmatique très prometteurs !
C'est en 2022, également, qu'aura été ouvert l'achat des campagnes de TV segmentée en programmatique : "Pour les annonceurs habitués aux campagnes digitales, c'est l'opportunité d'un regain d'intérêt pour la publicité en télévision, dans un cadre très premium et brand safe. Cela permet aussi d'avoir une monnaie commune, le CPM, pour une plus grande facilité de comparaison dans le mix média activé", explique David Lu, Inventory Partnerships Director EMEA chez The Trade Desk, spécialiste de l'achat média en programmatique. Ainsi, "depuis le lancement de notre offre programmatique, 30% des campagnes ont été réservées via ce mode d'achat, sachant que l'année n'a pas été complète, il faudra donc attendre 2023 pour avoir un peu plus de recul", confie Hortense Thomine-Desmazures.
5 000 euros est le prix du ticket d'entrée pour une campagne en TV segmentée.
Dans cette même logique, France TV publicité a noué un partenariat avec Adcleek.com pour proposer aux réseaux de concessionnaires automobiles l'offre de publicité TV segmentée en achat programmatique. "Cela va encore évoluer dans les prochains mois, l'objectif étant d'atteindre une plus grande rapidité dans le set up des campagnes mais aussi de pouvoir mesurer l'impact des campagnes en quasi temps réel pour optimiser les segments d'audiences sélectionnés en cours de campagne et ainsi créer encore plus de valeur pour nos clients. Pour cela il faut que l'on travaille via un système d'enchères ouvertes, comme pour les campagnes digitales classiques", prédit Thomas Allemand, senior adtech & supply director chez Jellyfish, agence digitale.
En septembre 2022, la chaîne de restauration Big Fernand a orchestré sa 1ere campagne ciblée en multilocal en TV segmentée, dans une logique de drive-to-store.
Quelles sont les bonnes pratiques ?
Un des points sur lesquels il faut être vigilant, c'est celui de ne pas tomber dans des ciblages trop fins, pour ne pas perdre la force native de la télévision, qui est de toucher de gros volumes d'audience. Ensuite, même si le ticket d'entrée en TV segmentée est autour de 5 000 €, les régies observent plutôt des budgets moyens de 10 à 20K avec une exposition du spot sur 2 à 3 semaines pour laisser le temps à la campagne de toucher un maximum de personnes sans être dans une pression d'exposition trop importante. La TV segmentée peut alors être utilisée seule ou en surimpression sur certains segments d'une campagne TV nationale. A noter enfin, qu'un projet de mesure d'impact a été lancé de façon commune entre le SNPTV, les régies et les FAI pour mesurer les différents impacts d'une dizaine de campagnes : impact drive-to-store et drive-to-web, efficacité sur les ventes, ou encore, apport de couverture.
L'isochronie au service de la notoriété
Depuis deux ans, GIANT, n°1 mondial en équipement de vélo, a pour double objectif de renforcer sa notoriété en France, tant auprès du grand public que des magasins. C'est pourquoi la marque a testé dès 2021 une campagne ciblée en TV segmentée autour du Tour de France aux côtés de France TV Publicité. La marque a ainsi pu cibler les "Fans de sports", c'était la première fois qu'un annonceur se positionnait en TV segmentée pendant un événement sportif français. Satisfait des premiers bons résultats, la marque a réitéré l'expérience en 2022 avec un dispositif plus complet, composé à la fois d'une campagne TV linéaire avec un spot de 30 secondes diffusé sur France 2 et France 3 et d'une complémentarité en TV segmentée. Plusieurs ciblages ont été choisis : CSP+, foyers sensibles aux sujets santé et bien-être mais aussi, plus innovant, ciblage isochrone avec la constitution de zones de chalandises situées à 30 minutes en voiture de chacun des 90 Giant Stores; une performance de ciblage permise grâce au partenariat avec Smappen, spécialiste du géomarketing. "Nous avons ainsi créé des zones sur-mesure, une première en France. Un dispositif qui a permis de toucher avec un très haut niveau de précision la cible stratégique de GIANT avec un coût maîtrisé", résument les équipes de France TV Publicité. Au final, ce sont plus de 300 000 impressions en TV segmentée qui ont été émises sur les 90 zones, avec un taux de complétion qui a atteint plus de 97% : "Cette initiative innovante nous a permis d'acquérir une plus grande visibilité du réseau et une meilleure notoriété auprès du grand public. Le réseau a également apprécié l'effort et l'investissement ainsi que la possibilité d'être présent en télévision, un environnement premium", confie Sandra Robles, Brand Developper de GIANT.
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