François Gravet: "La mascotte constitue un différenciateur puissant"
François Gravet, consultant en stratégie marketing et ex directeur marketing de Butagaz, décrypte pour emarketing.fr le rôle d'une mascotte et les conditions de son succès.
Je m'abonneQuelles sont les caractéristiques d'une mascotte réussie et durablement ancrée dans l'esprit des consommateurs ?
Très franchement, je ne peux donner de recette toute faite car cela enlèverait le côté mystérieux et assez fascinant de ces mascottes. Trouver les points communs entre un chauve musclé, une vache rouge et un buisson vert n'est pas un exercice simple... Et ce sont pourtant trois des mascottes les plus connues en France (selon une étude OpinionWay datant de 2013). Inversement, les mascottes qui n'ont pas "pris" ne répondent pas non plus à des caractéristiques communes ou un manque de pression promotionnelle.
Néanmoins, le point commun visuel évident est le sourire. Et cet élément nous dirige vers une piste intéressante. En effet, je crois que l'alchimie fonctionnera si la mascotte réussit à provoquer un sentiment de sympathie, compris dans le sens d'une "attraction instinctive". On fera donc souvent appel à un animal, à des couleurs primaires, à un dessin, à une expression positive, comme le sourire ou le clin d'oeil, justement.
- Quelle place la mascotte tient-elle dans le dispositif de communication de la marque ?
Pour une marque, faire appel à une mascotte est un choix véritablement stratégique. Celle-ci incarne la marque, engage ses collaborateurs, porte une partie de ses valeurs et doit donc tenir une place importante dans le dispositif de communication. Cela contrarie pourtant plusieurs types de professionnels: les marketers, qui ne voient pas le rapport avec leurs produits, les vendeurs, qui la considèrent comme dévalorisante, les financiers, qui ne la trouvent pas sérieuse et donc trop chère! Une mascotte réussie se révèle néanmoins pour la marque son investissement le plus rentable. Au final, elle crée ce que peu d'autres outils marketing permettent: la proximité.
C'est enfin, de manière assez pragmatique, un différenciateur puissant, qui va permettre d'entrer en sympathie avec un consommateur de plus en plus éduqué aux codes publicitaires et sursollicité. Je crois donc que la place d'une mascotte dans tout dispositif doit être non pas centrale mais introductive.
- Peut-on changer de mascotte ?
Il y a peu d'exemples de changements de mascotte réussis. Ce n'est pas tant le changement qui pose problème que l'intention. Par exemple, le chat Mabulle de Malabar ne s'est pas franchement ancré dans l'esprit des consommateurs et la page Facebook de la marque en témoigne, avec peu d'itérations du chat déjanté. Est-ce dû au changement ou au choix du chat? Selon moi, le remplacement peut fonctionner tant que la nouvelle mascotte apporte un véritable supplément de sympathie. Changer pour être plus moderne n'est pas un bon motif et risque, au contraire, d'être contre-productif.
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Si changer de mascotte est rare, la faire évoluer arrive plus souvent. Je peux en témoigner personnellement, avec l'exemple de Butagaz qui, d'un ourson bleu en peluche, est devenu un gros ours taquin, parlant, avec un caractère, un avis, un (mauvais) esprit et même un prénom. Le succès de ce lifting, orchestré par DDB Paris, est assez phénoménal: une notoriété importante, un capital sympathie plus élevé et même un effet communautaire avec près de 160000 fans sur sa page!
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Bio expresse
Ancien directeur marketing de Butagaz, François Gravet est aujourd'hui consultant en stratégie marketing. Il est par ailleurs secrétaire général de l'Institut du développement économique éthique.