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E-réputation : quels enseignements tirer de 2016 ?

Publié par Mégane Gensous le

Customer is watching you! Avec les réseaux sociaux, les marques ne sont plus à l'abri d'un bad buzz qui peut impacter au-delà de leur image, leur santé financière. Christophe Ginisty, directeur du digital de Ketchum Benelux, revient sur 7 cas d'e-réputation qui ont agité 2016 et leurs enseignements.

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Vinci et le faux communiqué de presse

Les faits : le 21 novembre 2016, un faux communiqué de presse dont l'auteur se fait passer pour Vinci informe la presse généraliste et financière d'une révision des comptes financiers de l'entreprise de construction et du licenciement de son directeur financier à la suite d'erreurs de comptabilité. Le message malveillant, hébergé sur un faux site en usurpant l'identité du groupe français, a été relayé par l'agence de presse Bloomberg. Conséquence, le groupe du CAC 40 perdait 18% de sa valeur l'après-midi même, avant de se stabiliser suite au démenti de Vinci qui a depuis porté plainte.

Les enseignements : "La fausse information financière de Vinci soulève un énorme problème de société : celui de la vérification de l'information. A une époque où tout, y compris l'information, va très vite, les journalistes se sont laissés dupés par ce communiqué qui semblait vraisemblable. Tout comme la communauté financière qui a sanctionné Vinci en raison d'un simple communiqué réalisé sans compétences particulières en cryptographie. Pour une marque, difficile de se prévenir de ce genre d'attaques, bien qu'il soit aisé de les contrer, par exemple en prévenant dans ses guidelines que le groupe ne communiquera plus que via son site officiel."

New Balance et Trump


Les faits : New Balance est une des rares entreprises américaines qui continue à fabriquer ses chaussures aux Etats-Unis et qui en conséquence s'oppose fortement au TPP proposé par Obama. Au lendemain de l'élection de Donald Trump, le VP de New Balance Matthew LeBretton se félicite dans une interview au Wall Street Journal de cette nouvelle, le futur président étant lui aussi contre cette mesure. Twittée hors contexte par le journaliste, la phrase déclenche l'ire des réseaux sociaux qui se retrouvent submergés de photos et vidéos d'individus mettant le feu à leurs sneakers en protestation. New Balance tente de calmer le jeu mais un site néonazi américain déclare le produit "chaussures officielles des Blancs".

Les enseignements : "New Balance n'a jamais soutenu le candidat Trump mais s'est seulement félicité de l'une de ses propositions, ce qui n'a pas empêché les internautes de faire le raccourci et d'appeler au boycott en réaction. C'est pourquoi les marques doivent être extrêmement précises dans leurs déclarations pour ne pas laisser place à la liberté d'interprétation. L'autre erreur de New Balance a été de faire cette remarque juste après la campagne présidentielle. Il y a un temps pour tout et ceux de la communication et de la politique ne peuvent pas être les mêmes. Une bonne leçon pour les marques françaises pour 2017."

Toblerone et le Brexit

Les faits : le 15 octobre 2016, Toblerone avertit ses consommateurs dans un post Facebook d'une réduction de poids allant de 10 à 12% de ses barres chocolatées. L'entreprise d'origine suisse invoque la hausse du prix des matières premières qui aurait été causée par le Brexit et l'obligerait à augmenter l'espace entre les "dents" de ses biscuits pour ne pas en augmenter le prix. Cependant, le groupe Mondelez qui possède la marque a rapidement démenti en révélant que ce changement avait été acté bien avant le référendum de sortie de la Grande-Bretagne de l'Union Européenne.

Les enseignements : "Le coup de com' le plus mauvais de l'année. Toblerone veut faire de son produit le symbole de la privation entrainée par le Brexit en pénalisant une seule partie, le consommateur. Un manque de respect contre-productif pour le produit et pour ceux qui l'aiment."

Yahoo! et sa fuite de données


Les faits : le 22 septembre 2016, Yahoo! annonce que 500 millions de ses comptes utilisateurs ont été piratés par un hackeur lié à un Etat. La fuite massive concerne des informations telles que des adresses e-mail, des mots de passe, des numéros de téléphone ou encore des dates de naissance et remonterait en fait à 2014. Quelques mois plus tôt, le hackeur Peace avait déjà indiqué mettre en vente des comptes utilisateurs Yahoo! et Tumblr, propriété du géant américain depuis 2013. Pour Verizon, alors en négociations pour le rachat de la société, cette faille de sécurité serait l'occasion d'abaisser le montant de la vente conclue pour 4,8 milliards de dollars.

Les enseignements : "Yahoo!, dans une situation personnelle délicate et sur le point d'être racheté, a adopté la mauvaise réaction en n'agissant et n'informant pas immédiatement sur cette fuite de données. Il existe une règle absolue en communication de crise : la première chose à faire c'est "show you care", c'est-à-dire montrer que l'entreprise se préoccupe du problème et de sa résolution. Les consommateurs sont prêts à pardonner une société d'une erreur, mais pas une société qui ne fait pas tout pour corriger cette erreur. Cela démontre aussi que nous cédons (beaucoup) trop d'informations personnelles à des entreprises du net."

Foncia et le drapeau français


Les faits : Le 9 septembre 2016, un couple de retraités niçois reçoit un courrier de sa copropriété Foncia l'invitant à retirer le drapeau tricolore accroché dans son jardin. Le 15 septembre, la femme partage la lettre sur son compte Facebook dans un post public qui devient rapidement viral dans un contexte post-attentat. Le message prend particulièrement auprès de la communauté dite de la "fachosphère" mais aussi de personnalités politiques qui dénoncent plus ou moins violemment l'attitude jugée antipatriotique de Foncia. Ce dernier reprend rapidement le contrôle de la situation sur les réseaux sociaux en présentant ses excuses et en se désolidarisant de l'initiative isolée.

Les enseignements : "Le cas de Foncia illustre quelque chose de primordial à connaître dans la communication : rien ne demeure secret. Lorsqu'une entreprise envoie un message privé à un client, un partenaire ou même un collaborateur elle doit toujours avoir en tête qu'il pourra se retrouver sur la place publique et donc le rédiger en conséquence. Tout ce que vous direz pourra être retenu contre vous."


Samsung et sa batterie explosive

Les faits : Durant l'été 2016, plusieurs incidents relatifs au Galaxy Note 7 de Samsung ont lieu autour du monde. En cause, la batterie du dernier téléphone du constructeur coréen qui aurait une fâcheuse tendance à exploser. Des photos et des vidéos de smartphones en feu commencent à se propager sur les réseaux sociaux, jusqu'à ce que le chaebol prenne des mesures : le 12 septembre, il appelle à ne plus utiliser le produit et rappelle les téléphones pour risque d'explosion avant de suspendre leur production début octobre. Entre temps, la marque chute de 8% en bourse.

Les enseignements : "Avec la course à l'innovation que se livrent Samsung et Apple, le risque d'un accident industriel est plus exacerbé. Beaucoup d'entreprises ont tendance à rester dans le déni, à accuser les consommateurs, mais Samsung a relativement bien et rapidement réagi en reconnaissant ses torts et en rappelant les produits avec responsabilité."

Michel et Augustin et ses proximités politiques


Les faits : le 30 mai 2016, Michel et Augustin accueille François Fillon dans ses locaux à Boulogne-Billancourt dans le cadre de ses rencontres "Boire une vache avec". Si la marque de biscuit est habituée à recevoir des personnalités de tous bords, politiques ou non (le cuisinier Yannick Alléno, la ministre Ségolène Royal), le cofondateur Augustin Paluel-Marmont profite de cette soirée pour afficher son soutien au "seul homme politique à formuler un horizon politique pour la France". Portés par le soutien affiché de la Manif pour Tous pour François Fillon, des internautes ont accusé quelques mois plus tard l'entreprise française de soutenir le collectif. En cause, en vrac : distribution de cookies dans la start-up Gens de confiance, soutien de la fondation Jérôme Lejeune... Les trublions du goût, malgré leur démenti, se sont rapidement vus qualifiés d'homophobes et anti-IVG.

Les enseignements : "Michel et Augustin s'est retrouvé associé à un homme politique, or une marque doit rester neutre. Au départ le concept est intelligent : inviter des personnalités politiques à découvrir le fonctionnement d'une entreprise innovante. Cependant l'entreprise a dépassé la ligne rouge en faisant l'éloge du candidat de droite à la présidentielle. Si le problème ne vient pas spécialement de François Fillon, ce choix a néanmoins permis à certains internautes de faire le lien avec la Manif pour Tous par la suite. Le côté Vieille France, que partagent François Fillon et Michel et Augustin s'est retourné contre la marque alors que c'est ce qui a fait son succès."

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