[Dossier] Les relations marketing-commercial à l'heure de la digitalisation
Alors que marketing et commercial devraient oeuvrer dans le même sens et aller chercher le client là où il se trouve - c'est-à-dire dans la sphère digitale -, ces deux entités semblent rester encore trop hermétiques l'une à l'autre. " Le marketing mène, désormais, des actions grâce à des plateformes de marketing automation, de la récupération de data via le digital... Si cela aide le commercial dans sa prospection, cela a aussi pour effet de lui faire perdre son rôle d'évangélisateur ", analyse Clément Hurstel, VP demand strategy chez Theory Global, cabinet de conseil marketing.
L'appartenance des données
À qui appartient le client ? Une question classique qui contribue à maintenir les barrières entre commerciaux et marketeurs. D'autant que " la data ne devrait être la propriété d'aucune entité, mais rester un actif transverse et exploitable par l'ensemble des services au sein de l'entreprise", affirme Roland Koltchakian (Oracle). " À la base, le CRM est un outil forgé et utilisé pour le commercial. Mais au fur et à mesure, la brique marketing a été incorporée ", analyse Hervé Gonay, fondateur de la société Getplus, agence de retargeting B to B.
" Les applications CRM sont aujourd'hui matures et offrent une dimension de plus en plus collaborative. Chacun peut, désormais, partager des données et des processus au travers d'interfaces communes ", souligne encore Roland Koltchakian. Les données circulent librement. C'est pourquoi " les directions doivent mettre en place un lead management ", prévient Roland Koltchakian. Autrement dit, déterminer précisément qui doit prendre contact avec le client et à quel moment.
B to B vs B to C : même combat ?
" Les entreprises B to B croient qu'elles ne sont pas concernées par ce changement de lignes entre marketing et commerciaux, pensant qu'un client, qui est moins connecté, par exemple, a un comportement différent d'un consommateur ", souligne Clément Hurstel (The Theory Global). À tort ! " Le client B to B est aussi un consommateur B to C dans sa vie privée... Il va progressivement adapter ses comportements d'acheteur dans la vie courante à sa vie professionnelle. Ce n'est qu'une question de temps. Les entreprises qui ne prennent pas le virage sont condamnées à disparaître ! " affirme sans ambages Régine Vanheems (O4C).
Cependant, le changement demande sans doute davantage d'efforts à une entreprise B to B que B to C, comme l'explique Mélanie Jouglard, manager chez Capgemini Consulting : " Dans la grande consommation, les marques exigent qu'un marketeur ait expérimenté la vente terrain avant de prendre son poste. Cela n'est pas aussi simple pour l'industrie et les services, où les postes sont souvent plus complexes. " D'où, en général, une meilleure collaboration entre marketing et vente dans le B to C que dans le B to B.
2 QUESTIONS À ...
Mélanie Jouglard, directrice de Capgemini
Vous constatez une évolution du rôle du Key account manager. Qu'en est-il ?
Avec la personnalisation et la complexification des offres, le Kam endosse de plus en plus le rôle de marketeur. Certes, ce commercial était déjà multicasquettes, mais la tendance est encore plus marquée. Ainsi, a-t-il dû s'adapter en développant son écoute client et en construisant l'offre à partir des informations ainsi collectées. Une tâche qui entre traditionnellement dans le giron du marketing.
Quelle conséquence cette évolution peut-elle engendrer ?
Il faut faire attention à ne pas éloigner le Kam de son activité stratégique, de son coeur de métier : la vente ! Les frontières ne sont plus très nettes... Cela nécessite, pour l'entreprise, de prendre le temps d'une réorganisation, d'une réaffectation de certaines missions, voire la création de nouveaux métiers.
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