Pricing : quatre experts expriment leur point de vue
Philippe Moati, cofondateur de l'Observatoire société et consommation (ObSoCo) : " Le produit le moins cher n'est pas toujours le moins coûteux "
En quoi "l'obsolescence programmée" affecte-t-elle l'évolution des prix ?
Il y a plusieurs manières de faire de l'obsolescence programmée. La plus noble est la fuite en avant vers l'innovation, une innovation au compte-gouttes, mais une innovation tout de même, qui crée un désir d'achat (ou de location, comme pour les smartphones) chez le consommateur. L'autre versant de ce phénomène est lié à la mise en vente de produits au cycle de vie volontairement raccourci et qui, très rapidement, ne fonctionnent plus. Si l'on combine tous les facteurs évoqués, cela amène les gens à aller vers le moins cher pour réaliser une économie immédiate, que l'on met en rapport avec un surcroît de qualité mais que l'on découvrira plus tard.
Comment orienter le public vers une consommation plus responsable ?
Les gens sont souvent prêts à acheter plus cher, s'ils sont sûrs que la qualité est meilleure. Par ailleurs, je pense que cela passe par un allongement de la durée légale de garantie des biens durables à dix ans. Actuellement, tous les biens qui ne se consomment pas en un seul acte sont garantis deux ans, ce qui n'empêche pas certains commerçants de dire à leurs clients que la garantie ne dure qu'un an. Récemment, le Sénat a proposé que la durée légale de garantie soit portée à cinq ans, mais cela a suscité une telle levée de boucliers de la part des industriels que le projet n'a pas abouti.
Dans la même logique, comment lutter contre les "coûts cachés" et contribuer, par là même, à objectiver les prix?
Ce qui est déterminant, ce n'est pas d'acheter le produit le moins cher, mais le moins coûteux. Deux notions qui ne sont pas synonymes. On peut craindre que, parfois, le moins cher se révèle être le plus coûteux. Il y a donc matière à réfléchir sur la manière dont on objective le coût d'usage à côté du prix. Un amendement, à l'initiative des écologistes, a été déposé et adopté dans le cadre de la loi Hamon. Ainsi à partir du 1er janvier 2015, l'expérimentation d'un double affichage devrait être en place : d'un côté, le prix de vente, de l'autre, ce que la loi désigne comme étant le prix d'usage. Mais cette mesure qui, faute de moyens, n'est toujours pas entrée en application, doit faire face à une opposition farouche des industriels et des enseignes. Cela permettrait pourtant d'objectiver un certain nombre de coûts cachés et, pour le consommateur, d'optimiser son achat sur la base d'informations plus pertinentes.
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