[Enquête] Mais qui a tué le Web ?
Il n'y aurait donc - comme l'atteste Philippe Dumont- que des avantages à exploiter le potentiel du mobile: "L'utilisateur peut être ciblé nominativement, car c'est son téléphone. Le smartphone est à la fois une "réinvention" de la relation à la marque, aux produits et aux services que vous proposez". Jeff Allen, directeur marketing en charge d'Adobe Analytics, en est fasciné: "Le mobile est un média qui vous permet de faire des choses que vous ne pouviez pas imaginer auparavant. C'est la première fois que la première chose que je sais sur un consommateur c'est qui il est et où il est". Exploiter l'intimité du consommateur, comme le suggère Guillaume Lecuyer, est donc une évidence que reprennent à bon compte aussi bien Hani Ramzi, le CEO de Sofialys (voir l'encadré "L'EXPERT" ci-dessous) que Philippe Lourenço, fondateur de Mister Bell (voir l'encadré "L'EXPERT" page suivante), deux spécialistes de la publicité sur mobile. Et pour eux aussi, il faut oublier toutes les mauvaises pratiques et habitudes dues à la publicité sur le Web et ses dérives.
"4 % des dépenses sont consacrées aux mobiles tandis que 35 ou 40 % de l'audience est dessus"
De trop faibles investissements
Pourtant, ça coince. Pascal Malotti, directeur conseil chez Valtech note que "pour bon nombre d'entreprises, 70 % des investissements numériques continuent d'aller sur les sites Web". Et pour cause, ajoute-t-il: "Elles en sont encore à se demander que faire de leur présence sur les médias sociaux que tout d'un coup, le mobile déboule". Pour Philippe Dumont, "l'autre gros problème qu'il y a eu, avec les premiers balbutiements du mobile, c'est que l'on a dit : "J'ai ça sur le Web alors je le copie / colle sur le mobile". Et de s'étonner encore: "C'est absurde, pensez que 4 % des dépenses sont consacrées aux mobiles tandis que 35 ou 40 % de l'audience est dessus".
De la techno, des usages et des hommes
Pour Pascal Malotti, il n'y a pas de mystère: "Sur le mobile, c'est à la fois les bonnes technologies et les bonnes vieilles recettes du marketing qui font mouche". Toutefois, ce que Loic Dilly suggère, c'est qu'il faut un préalable: "Mettre l'utilisateur au centre" et ne pas oublier de "fournir des services complémentaires pour faire gagner du temps, identifier le fait que le client est aux portes de votre enseigne". Pour Davy Tessier, directeur général de l'agence Disko la clé serait simplement de "penser d'abord aux principaux services que peut apporter un mobile". Mais attention à l''approche que l'on doit avoir pour accompagner cette démarche marketing. Le "responsive design", l'action qui consiste à adapter son site web à un écran plus petit, n'est, pour aucun de nos interlocuteurs, une solution. C'est, tout au plus, un pis-aller. Il faut s'attaquer à des développements dits natifs, c'est-à-dire tirant pleinement partie des technologies que ces appareils embarquent [...]. Cliquez ici pour passer à la dernière page.
L'EXPERT: Hani Ramzi, CEO de Sofialys
Spécialiste de solutions de marketing direct aux opérateurs, par exemple d'une plateforme automatisée d'achat et de vente d'espaces publicitaires pour mobile au CPM temps réel (mobile Ad Exchange / SSP) en marque blanche, Hani Ramzi voit le mobile comme "un point de contact pour tous les marketeurs". Réaliste, il explique qu'un travail initial ne serait pas de trop: "DSP, SSP, Adex... Apporter de la simplicité et moins de jargon ne nuirait pas. Le mobile est "un média éminemment intime aux règles d'interactions tout aussi intimes". Dès lors, cet outil que l'on partage difficilement avec autrui requiert un minimum de conscience ou de consentement de l'utilisateur final. La publicité sur mobile doit ainsi apporter un minimum de valeur, de la pertinence et de vraies interactions avec l'utilisateur. Là résident, pour Hani Ramzi, les fondamentaux qui transforment la vision que l'on avait jusqu'ici des relations entre le Web et la publicité: "En fonction de la réaction à deux campagnes, on va, ou non, continuer d'entrer en relation avec l'utilisateur. Si la personne ne réagit pas au bout de deux tentatives, nous ne la contactons plus". Cette approche plus qualitative aurait des résultats immédiats: "Il n'est pas rare d'avoir des taux d'efficacité de l'ordre de 10 ou 20 %". Et parfois de s'en étonner : "Sur une campagne, nous avons obtenu un taux de réponse jusqu'à 55 %. À tel point que nous nous sommes demandé avec l'annonceur s'il n'y avait pas eu un problème avec la plateforme".