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Quand les instituts s'adaptent à leurs grands clients 1/2

Pour suivre les demandes de leurs clients internationaux, les sociétés d'études ont dû grandir et, elles aussi, s'internationaliser. Il leur a fallu étendre leur couverture géographique et harmoniser leur offre. Dans le même temps, les outils de recueil de l'information se sont standardisés, se renforçant avec le développement des access panels et du terrain on line. Mais, désormais, la croissance du chiffre d'affaires des instituts à l'international passe aussi par de nouvelles organisations et structures.

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«La demande est de plus en plus forte pour la réalisation simultanée d'études sur plusieurs pays. Les industries et services sont très demandeurs », remar-que Eric Dubois, directeur général de NFO Infratest France. Mais toutes les sociétés d'études, loin de là, ne disposent pas d'un réseau intégré. Toutefois, cela ne les empêche pas de réaliser et de coordonner des études multipays (Repères, Market Audit, CSA TMO, IOD...). Les réseaux informels sont légions et les annonceurs n'y trouvent rien à dire tant que la qualité est au rendez-vous. « L'important est de disposer de bons partenaires, de bien les connaître et d'être mobile », estime Eric Lombard, directeur général de Repères qui réalise plus de 30 % de son chiffre d'affaires à l'international. « L'essentiel est d'arriver à comprendre et interpréter les études de la même façon, c'est-à-dire de fournir des grilles de lecture pour comprendre et interpréter les données de manière claire », ajoute François Abiven, P-dg de Repères. « Conduire des études à l'international requiert une capacité à rendre cohérentes les méthodologies lors d'études multipays, un sens de l'adaptation aux spécificités locales de chaque pays, une forte réactivité et implication des équipes », souligne Patrick Cru, P-dg de Market Audit.

La course à la mondialisation


Une position forte sur un marché au travers d'une société filiale est toutefois la clé pour rendre plus cohérente une offre internationale globale. « Nous voulons d'abord posséder une vraie légitimité locale avant de proposer la compétence internationale », souligne Monique Bensimon, directrice du marketing et du développement d'Ipsos France. La stratégie des grands groupes de sociétés d'études dans leur course à la mondialisation a été d'abord l'expansion géographique. Celle-ci continue encore, avec pour objectif la couverture géographique maximale dans les marchés considérés comme les plus importants en matière de business études, puis la consolidation et enfin le renforcement dans les métiers considérés comme prioritaires. L'ambition du groupe Ipsos (classé 8e groupe mondial par Honomichl en 2001, voir rubrique Etudes & Recherche, p. 52) est d'être positionné dans tous les pays clés, parmi les trois premières sociétés d'études, et d'équilibrer les zones géographiques en termes de chiffre d'affaires. « Aujourd'hui, explique Jean-Michel Carlo, directeur général d'Ipsos Europe, la zone Europe, avec un chiffre d'affaires de 250 millions d'euros est à égalité avec l'Amérique du Nord. » « Nous avons désormais réussi un maillage assez complet de l'Europe et nous sommes très bien implantés en Amérique du Sud, même s'il reste encore des expertises à compléter », poursuit Carlos Harding, directeur général du groupe Ipsos en charge du développement corporate, ajoutant qu'il reste encore des choses à faire aux Etats-Unis. D'ailleurs, le groupe y a renforcé, il y a quelques mois, sa position dans le secteur de la recherche et du conseil marketing en faisant l'acquisition de Vantis, une division de ACNielsen Bases, spécialisée dans les études marketing et le conseil en développement de biens durables et de services. Les efforts de l'année écoulée ont porté sur l'Europe avec de nombreuses nouvelles acquisitions notamment en Allemagne (Sample-Inra), en Scandinavie (Eureka/Inervjubolaget) et en Europe de l'Est (F-Squared), destinées à y renforcer la position du groupe et à compléter ses spécialisations. Entre temps, Ipsos a racheté les 50 % restant du capital de la société anglaise Research in Focus, spécialisée dans les études marketing internationales à haute valeur ajoutée. Il est temps désormais de se tourner vers l'Asie.

L'Asie : nouveau terrain d'expansion


Ipsos vient d'annoncer la signature de deux accords qui prévoient des prises de participation significatives. Le premier concerne la société japonaise Lyncs Incorporated dont l'acquisition permet au groupe Ipsos de doubler sa capacité d'intervention sur le marché japonais où il disposait d'une première implantation, depuis juillet 2001, avec l'acquisition du Groupe Novaction (aujourd'hui Ipsos-Novaction). Le second accord concerne la prise de participation à hauteur de 40 % dans le capital de la société chinoise Feng & Associates Marketing Services (FAMS) qui dispose de bureaux à Beijing, Shanghai et Guangzhou et bénéficie d'une solide expérience dans les études marketing (études stratégiques sur les marques et développement de produits). Le groupe Ipsos était déjà présent sur le marché chinois à Beijing et Shanghai avec la société Ipsos-Link. Les deux activités devraient être fusionnées dans un proche avenir pour créer Ipsos China. La nouvelle société ainsi constituée fera d'Ipsos le deuxième groupe d'études par enquêtes sur le marché chinois. TNS, de son côté, a renforcé l'an dernier sa participation dans le capital de CVCS (Central Viewer Survey & Consulting Center), société d'études de marché leader en Chine, et en Inde, a pris la majorité de l'institut d'études ad hoc Mode. La poursuite du maillage est à l'ordre du jour pour les autres grands groupes de sociétés d'études : Portugal, Brésil et Grande-Bretagne pour GfK Ad hoc en 2001 ; rachat de Sifo en Suède par Research International la même année. En avril dernier, acquisition de E & L par Taylor Nelson Sofres aux Etats-Unis, une des plus importantes sociétés d'études ad hoc américaines. Pendant ce temps, se constitue un nouveau groupe de sociétés d'études : Aegis Research, qui prendra dès le 1er janvier 2003 le nom de Synovate. L'an dernier, le groupe (déjà 11e au classement Honomichl de 2001) a racheté Démoscopie en France et vient d'acquérir, en début d'année, la société germano-hollandaise Market & More implantée aux Pays-Bas, au Benelux et à Lyon. Cet été, Synovate a acquis Sample Survey en Grande-Bretagne et des négociations sont en cours dans d'autres pays européens comme l'Espagne et l'Italie. « Aujourd'hui, presque tous les pays d'Europe sont couverts, explique Yves Loué, directeur général de Démoscopie. Il y aura encore des acquisitions complémentaires, notamment en Europe du Sud et de la croissance interne. »

Harmonisation, le maître mot


La couverture géographique bien enclenchée, encore faut-il arriver à proposer partout une prestation identique avec la même qualité de rendu. « Le maître mot est la congruence des méthodes, de la qualité et du process d'analyse, fait remarquer Monique Bensimon. Les prises de décision doivent pouvoir être étalonnées en toute sécurité. » L'harmonisation est la grande attente des clients internationaux car, sans elle, il n'y a pas de comparaison possible. « Les grandes multinationales ont une préoccupation majeure : obtenir une prestation harmonisée partout en termes d'approches et de résultats », constate Denis Delmas, président du directoire de Taylor Nelson Sofres SA. Le groupe TNS consacre 3 % de son chiffre d'affaires à la R & D produit et dispose d'un organisme central, TNS Worldwide, en charge du développement mondial des produits. Chez GfK, Helen Zeitoun, Dg de GfK Sofema, a la responsabilité transversale d'un groupe "International Business", qui a pour mission de déterminer des standards internationaux de qualité. « Au-delà d'un réseau, au-delà d'une gestion informatique identique, il est important de s'intéresser au transfert de connaissance, commente-t-elle. Dans une étude internationale, il y a encore plus besoin de rigueur. » Dans chaque pays a été nommé un responsable "Expert in International Quality Standards" qui est en charge de la diffusion sur le long terme de la qualité des études internationales dans son pays. « Je ne crois pas aux seuls processus. Il faut les faire vivre, constate Helen Zeitoun. L'international est un service auprès des clients internationaux. »

Anika Michalowska

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