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Former sans formater 2/3

Le marketing constitue l'une des offres phares des sociétés spécialisées dans la formation professionnelle. Ce qui traduit immanquablement une demande. Mais ne signifie pas pour autant que l'offre réponde toujours aux exigences d'une discipline en constante et rapide évolution. Pour faire le pendant aux stages catalogues, les organismes multiplient et diversifient les programmes, en tentant de valoriser le sur-mesure.

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La personnalité des formateurs au coeur des paramètres


En inter-entreprise, on ne choisit pas le ou les formateurs. Or, plus la demande émane des directions intéressées, plus elle sera précise et plus le formateur entrera légitimement dans les paramètres d'exigence de l'acheteur. Lorsque BASF Agro a mis trois sociétés en concurrence autour d'une formation intra pour une vingtaine de personnes, c'est la personnalité du consultant (Cegos, ndlr) qui a emporté le choix. « Ma demande ne portant pas sur des contenus très originaux, les propositions étaient assez comparables en termes de contenus et de prix », remarque Vincent Gros, directeur marketing de BASF Agro. Autour de son département marketing et action commerciale, Demos s'est constitué un réseau d'une centaine de consultants (sur un millier, toutes formations confondues), tous vacataires, jamais exclusifs. « Je pourrais embaucher les 20 meilleurs », affirme Georges Nikakis. Ce serait contraire au modèle de l'entreprise et à la dimension d'opérationnalité des consultants. « Car, affirme-t-on chez Demos, les formateurs sont tous des "opérationnels"». Soit. Contacts avec les stagiaires, fréquentation des salons, lecture de la presse, préparation des contenus intra-entreprises auprès des clients marketeurs..., les consultants se forment en permanence. Sont-ils pour autant opérationnels ? Peuvent-ils y prétendre lorsqu'ils évoluent plus de deux ans hors d'une direction marketing ? « On voit tous les jours des formateurs qui n'ont pas mis les pieds en entreprise depuis plus de quinze ans, dénonce ce consultant travaillant à l'occasion pour un organisme de formation continue. Une grande partie des formateurs travaillant pour les grands noms de la place ont plus de 45 ans. » L'âge moyen des consultants est sans doute moins accessoire qu'il n'y paraît. Peut-être les organismes en question, du haut de leur soixante-quinze et trente ans d'âge respectif, n'ont pas toujours su renouveler leurs troupes. « En trois ans, j'ai renouvelé un peu plus de la moitié des équipes », rétorque Georges Nikakis. D'après ce dernier, sur les 100 consultants du département marketing-action co de Demos, 50 "tournent" régulièrement et 30 "sont acquis à la cause".

Rentabiliser le catalogue


Comme toutes les entreprises commerciales, les organismes de formation doivent satisfaire des schémas de productivité. Autrement dit rentabiliser le catalogue. « Il faut au moins quatre stagiaires pour qu'une formation inter-entreprise soit rentable. Si, par le jeu des désistements, on arrive en deçà de ce seuil, les organismes ne vont pas hésiter à intégrer les stagiaires à une autre formation, pour peu qu'elle ait lieu dans les mêmes murs au même moment et qu'elle ne soit pas trop éloignée de la première en termes de contenu », explique un consultant. Georges Nikakis ne dément pas que des réaffectations de dernière minute peuvent se produire, rappelant que de manière générale, l'assistance optimale se situe autour des 8-10 stagiaires. Bien qu'il n'y ait pas véritablement de règle. Certains stages, de par leur contenu, vont très bien supporter une équipe restreinte. D'autres ne verront leur potentiel se réveler que dans l'échange, le dialogue faisant partie intégrante du bénéfice pédagogique. Efficacité commerciale oblige, les organismes cherchent à proposer aux entreprises des formules de plus en plus courtes. « Les programmes sur deux, trois jours ont leur intérêt. Ce sont en quelque sorte des électrochocs. Avec des programmes sur au moins neuf jours, on est dans le registre de l'état de l'art et du stratégique. Non pas dans une logique d'information mais dans une logique de transforma-tion », affirme Catherine Le Roux, responsable des partenariats entreprises à Essec Management Education. Transforma-tion de ce que vivent les directeurs marketing dans l'exercice quotidien de leur métier. C'est du moins ce dont ils semblent témoigner à l'issue des stages. Et plus les programmes sont lourds, plus la logique de transformation s'avère prégnante. « Les directeurs marketing nous expliquent qu'après dix-quinze mois de formation, ils peuvent capitaliser les connaissances acquises durant deux ou trois ans », poursuit Catherine Le Roux. C'est une formule sur neuf jours qu'a choisie Alexandra Ufferte, directrice marketing de Minor Planet, société britannique spécialisée dans le suivi de flotte de véhicules par GPS. En poste au siège à Toulouse, elle se trouve face à une offre assez limitée. Elle s'inscrit au cursus proposé par Capitolis, une émanation de l'ESC Toulouse et de la chambre de commerce locale : quatre modules de deux jours sur quatre mois, à raison de 4 000 euros par module. La formation porte sur les fondamentaux, le diptyque produit/marché, le marketing opérationnel. Le P-dg donne son imprimatur. « Minor Planet est une toute jeune entreprise. Au lancement, nous étions dans un marketing très opérationnel et je me suis rendu compte que je travaillais le nez dans le guidon », souligne Alexandra Ufferte. Ce besoin de "prendre du recul", c'est celui qu'expriment devant tous les autres les marketeurs pour expliquer leur besoin individuel en formation. Pour les aider à prendre du recul, les offreurs doivent faire preuve d'une solide crédibilité. Certes, la réponse la plus radicale à apporter aux interrogations qui peuvent naître autour de ce marché de la formation professionnelle se trouve sans doute dans la bonne santé et la pérennité des acteurs qui s'y sont installés. Il n'empêche, puisqu'il n'est pas de modèle public acceptable dans la durée hors la notion de sanction, où s'opère l'arbitrage en matière de formation continue ? Dans l'éviction des stages les moins sollicités ? Logique purement économique. Dans la fiche de notation que remplissent tous les stagiaires en fin de formation ? Même au sein des organismes, on reconnaît que le système a ses limites, tant il est vrai que, pour plusieurs raisons (sympathie, détachement, souci de ne pas être le vecteur de la sanction), la propension à l'indulgence l'emporte largement sur le sens critique. Les organismes ont d'ailleurs choisi de sécuriser cette évaluation par questionnaire adressé quelques semaines après le stage aux acheteurs et bénéficiaires. « 50 % de retours », affirme Georges Nikakis chez Demos.

Taux de renouvellement des catalogues : autour de 20 %


Et la sanction positive ? Pour la troisième année consécutive, les meilleurs consultants du département marketing-action co (deux formateurs en 2002) ont été "primés", affirme-t-on chez Demos. On ne saura pas de quelle manière. La responsable des formations marketing de Cegos réunit pour sa part ses troupes deux fois par an, afin d'échanger sur les stages, leur perception par les stagiaires, les amendements nécessaires. L'occasion de faire un tour d'horizon constructif sur les contenus. Car les fournisseurs de stages inter-entreprises n'échappent pas à la règle des 20/80 : quelques formations assurent le gros de leurs revenus. Le renouvellement portera avant tout sur les offres qui n'ont pas su convaincre la clientèle ou jugées obsolètes. En 2003, Demos a intégré 7 nouveaux stages en marketing et 12 en action co. Soit 20 % du catalogue. Un ratio qui trouve écho chez la plupart des organismes : les nouveaux programmes et les refontes constituent 20 à 30 % du référencement Cegos d'une année sur l'autre. Essec Management Education revendique un ratio d'innovation de 20 %. Mais le renouvellement de l'offre catalogue se calque sur un cycle de fait : bilan, réflexion, définition, rédaction, affectation des consultants, impression des catalogues, diffusion auprès de la cible. Au total, et au mieux, une année. Trop, affirmeront d'aucuns, pour coller à l'évolution d'une discipline en perpétuelle et rapide transformation. D'où sans doute l'écho rencontré par le concept de coaching. « Le marketing n'est pas une science, c'est de l'artisanat », lance Michel Makiela. Là est sans doute la limite des formations catalogues. «Un marketeur opérationnel travaille dans une remise en cause permanente. On est dans le sur mesure, pas dans le prêt-à-porter », poursuit le directeur marketing d'IER. Qui préférera, tant que le budget le permet, activer son réseau et se mettre en contact avec un coach plutôt qu'un formateur. « Et les bons coaches, on ne les trouve pas forcément dans les rangs des grands cabinets », précise-t-il. On les paiera aussi plus cher. Un coach facturera la journée en intra autour de 1 500 euros. Dans les formations intra, pour peu qu'elles soient sérieuses, le coaching n'est jamais bien loin. Côté intra, chez Cegos, le coaching représente 10 % du chiffre d'affaires 2002. Au-delà du volume d'heures défini contractuellement, le consultant doit se rendre disponible pour répondre à toute sollicitation individuelle et accompagner chaque stagiaire à la demande. C'est d'ailleurs souvent à ce niveau que les écarts se creusent. Structure de "compétences associées", l'institut Assaté (qui signifie "après demain" en japonais) réunit quatre coaches "fondateurs" spécialistes en marketing, communication, psychanalyse et NTIC, et fédère aujourd'hui 35 consultants partenaires. « Il s'agit d'une association motivée par la volonté d'apporter du "concret" à une profession qui ne s'en soucie pas toujours », explique Frédéric Adida, associé. Complémentaires, les membres d'Assaté vont pouvoir fournir aux entreprises des réponses d'autant plus affinées qu'elles ne reposent sur aucun modèle pré-formaté. De l'anti-catalogue en quelque sorte. Mais même la Cegos développe au sein de son département inter-entreprises une activité de coaching. Objectif : compléter les stages, mais aussi répondre à une demande de plus en plus fréquente de formations individuelles.

Muriel Jaouën

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