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Former sans formater 1/3

Le marketing constitue l'une des offres phares des sociétés spécialisées dans la formation professionnelle. Ce qui traduit immanquablement une demande. Mais ne signifie pas pour autant que l'offre réponde toujours aux exigences d'une discipline en constante et rapide évolution. Pour faire le pendant aux stages catalogues, les organismes multiplient et diversifient les programmes, en tentant de valoriser le sur-mesure.

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«Le problème du marketeur, c'est le temps. C'est pourquoi il doit tabler sur l'auto-formation et la pratiquer comme une ligne de conduite. » En évoquant la nécessité d'une auto-discipline, Michel Makiela ne dénigre pas les opportunités des programmes et stages délivrés par les organismes ad hoc. Le directeur marketing d'IER, fabricant français de systèmes d'impression, de bornes libre service et de contrôles d'accès (1 000 salariés, 170 millions d'euros de chiffre d'affaires), veut bien plutôt rappeler que la formation continue s'inocule tous les jours, pour peu que cette instillation relève d'une politique consciente, volontariste et organisée. Il défend ainsi avec ferveur l'intérêt des contacts réguliers dans le cadre de cercles, d'associations, de séminaires : au moins deux rencontres par mois en ce qui le concerne. « C'est à la fois du lobbying et de la prise de visibilité, mais c'est aussi l'un des meilleurs moyens de se former par la confrontation des expériences et la création de réseaux personnalisés. En fait, je suis plus en recherche d'information que de formation. » Autre vecteur d'immersion dans les arcanes du métier : la presse. Lue, décryptée et diffusée en interne. Et la littérature ou, à défaut, les fiches synthétiques ven- dues par abonnement par des éditeurs spécialisés. Il n'empêche, la formation est aussi affaire de professionnels. Elle nourrit même un marché juteux, où un certain nombre d'organismes, indirectement alimentés par le législateur lui-même et son 1 % patronal, affichent de jolies croissances. Parmi les meilleures rentes de ces sociétés spécialisées, le marketing. Après les ressources humaines, l'informatique et les ventes, il figure au rang des offres structurantes pour les entreprises qui se sont construites autour de la formation professionnelle. Entreprises prospères. 150 millions d'euros de chiffre d'affaires et progression annuelle de 10 % pour la première d'entre elles, Cegos. 27,5 M€ pour la deuxième, Demos. Avec d'autres acteurs, comme l'ISM ou le CNOF, ces sociétés ont déployé un dispositif orchestré autour de deux approches : les stages inter-entreprises, ou stages "catalogue", c'est-à-dire standardisés, et les programmes "intra-entreprises", qui relèvent davantage du sur-mesure. L'intra-entreprise représenterait 50 % du chiffre d'affaires du département marketing-action commerciale de Demos. Un ratio en légère baisse par rapport aux deux dernières années.

Les effets de la crise sur le ratio inter/intra


Selon Georges Nikakis, responsable de la formation marketing et commerciale chez Demos, l'intra souffre de l'effet 35 heures (moins de temps pour la formation) et du climat économique général (en période de tension, les acheteurs se reportent sur l'inter-entreprises, plus sécurisant car entièrement formaté). Perception aux antipodes à l'Insead, où l'intra progresse plus vite que l'inter, et représente aujourd'hui 27 millions d'euros de chiffre d'affaires, soit la moitié de l'activité. « En climat de crise, les entreprises veulent contrôler et maîtriser les choses. D'où leur intérêt pour l'intra », souligne Thierry Le Métayer, directeur exécutif. Dans la même mouvance, la Cegos a créé en 2002 au sein du département marketing un pôle "Conseil et formation en entreprise", dédié à l'intra, qui fait travailler cinq consultants, et bénéficie le cas échéant du renfort des formateurs inter-entreprises. Cette activité représente aujourd'hui 1,5 million d'euros de chiffre d'affaires, partagés à 50 % par la formation, 40 % par le conseil, et 10 % par le coaching. Cegos vise les 3 millions d'euros pour 2004. A Essec Management Education, l'intra n'intercepte pas plus de 15-20 % de l'activité marketing (contre 30 %, toutes formations confondues). Un ratio qui, au demeurant, est stabilisé et où les clients de l'industrie automobile ont historiquement une bonne place. Plus de 80 % de l'activité de l'école est donc assurée par l'interentreprise, autour de trois types de programmes : des séminaires sur neuf jours (quatre stages, pour le marketing qualifié "d'opérationnel"), le "cursus un an" (diplôme homologué de niveau maîtrise) et le Master en marketing management (56 jours sur quinze mois). Trois niveaux d'offre formant respectivement chaque année 175, 50 et 25 personnes. Seuls les gros organismes, avec leur puissance de tir industrielle, leur dispositif immobilier, sont en mesure d'assurer des programmes inter-entreprises. Pour les petites structures, a fortiori les free-lance, le ticket d'entrée est inabordable, ne serait-ce qu'en matière de location de lieux d'accueil. En 2002, les 17 consultants inter-entreprises marketing de Cegos ont formé un millier de stagiaires. La Cegos a été créée il y a soixante-seize ans par de grandes entreprises réunies en une sorte de Medef de la formation continue. Bref, une coopérative tenue par des sociétés ayant besoin d'autofinancer leur formation. Aujourd'hui, Cegos appartient à ses salariés. Un schéma social intéressant, mais qui peut prêter le pas à la critique quant à une propension structurellement induite au ronronnement. Critiques qui visent d'ailleurs de manière récurrente l'ensemble des organismes spécialisés dans les formations catalogue. Distance trop marquée avec le monde de l'entreprise, absence de sanction pour les formateurs, manque de souplesse dans la construction des stages du fait d'un modèle finalement assez industriel, opportunisme commercial dans la définition des programmes... Les reproches sont connus. Et les organismes s'en défendent, qui mettent en avant la perméabilité de l'inter à l'intra, l'actualisation permanente des catalogues et la valeur opérationnelle de leurs enseignements.

Se former tout en travaillant, pas si simple...


Christine Regnault est coordinatrice marketing client final chez KLM, compagnie aérienne néerlandaise. En 2002, motivée par la volonté de parfaire sa maîtrise des arcanes marketing et de ne pas se complaire dans un parcours "linéaire", elle décide de s'engager dans une formation diplômante, tout en continuant de travailler. Sa hiérarchie soutient d'emblée son projet. Reste à trouver l'offre. Pas simple. Après avoir enquêté sur les différents établissements susceptibles de dispenser des cursus adaptés à l'exercice normal ou quasi normal d'une vie professionnelle pour un prix abordable « Les boîtes privées sont hors de prix », et devant la rareté des prétendants, elle penche pour l'ICSV, Institut commercial supérieur des arts et métiers. L'organisme rattaché au Conservatoire national des arts et métiers vient en effet d'intégrer un cursus de deux ans en "jours bloqués", soit à raison de six jours par mois. A la clé : une maîtrise en marketing. La bonne réputation de l'institution et les tarifs raisonnables (1 981 euros par année) scelleront le choix. En prenant sur son temps personnel et professionnel, en accord avec son entreprise, Christine Regnault peut suivre sa formation, en maintenant son activité professionnelle. Et en comptant sur une bonne dizaine d'heures hebdomadaires de travail à la maison : économie, compta, droit, politique de distribution, statistique pour la première année, marketing pour la seconde. Avec un sentiment très positif sur les effets de la formation à ce jour : « Les bénéfices en termes de culture générale sont autant personnels que professionnels. »

La Cegos et ses "accélérateurs pédagogiques"


Pour transgresser l'indigeste couche napolitaine théorie/cas pratique et permettre à tout moment l'illustration par l'exemple, la Cegos a développé tout récemment le concept "d'accélérateurs pédagogiques", autrement dit de supports multimédias, conjuguant vidéo, le Web, jeux de sociétés susceptibles de faire le lien, très rapidement, avec la praticité de l'enseignement. Ne nous y trompons pas, on reste dans la démonstration, mais avec un souci de rupture et de respiration dans l'approche pédagogique. Et donc une meilleure efficacité, si l'on en croit la Cegos qui affirme avoir ainsi divisé par trois le temps du stage. Pour La Poste (stage d'une journée pour 750 personnes autour du marketing direct), la Cegos a créé un dispositif de 10 vidéos de trois minutes. « Les entreprises ne veulent plus de stages de trois jours. Cette approche nous a permis de leur proposer des sessions plus courtes », affirme Yvelise Lebon, directeur du pôle marketing, responsable de l'activité intra-entreprise.

Muriel Jaouën

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