Des approches plus fines
Amélioration de leurs prestations et de leur professionnalisme, développement d'une approche plus élaborée et plus fine, meilleure connaissance de leurs clients... Les agences spécialisées dans le marketing opérationnel entendent apporter des réponses en adéquation avec les attentes des annonceurs. Mais ces derniers considèrent-ils toujours la motivation à la hauteur de ce qu'elle doit être ?
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Les années 90 ont fait la part belle au "client roi", consommateur final
dont il fallait tout connaître pour mieux le choyer. Au risque d'en oublier
parfois que le premier client de l'entreprise, c'est tout autant son réseau de
distribution. Il serait faux d'affirmer que cette réalité-là a été oubliée.
Durant ces mêmes années, la motivation a fait des progrès considérables et,
désormais, plus un annonceur ne doute de l'importance d'une bonne stimulation
de ses vendeurs et de ses réseaux de distribution. Mais accorde-t-on à la
motivation le même intérêt qu'à d'autres disciplines plus en vue ? Les
challenges de motivation bénéficient-ils, par exemple, du même soin que les
campagnes de communication ? Lorsqu'une marque investit plusieurs dizaines de
millions dans une campagne de pub, elle fera appel aux meilleures agences du
marché, mettra en place un plan médias peaufiné dans les moindres détails.
Alors qu'en stimulation, c'est encore trop souvent le règne de l'approximation.
« Des investissements considérables sont réalisés sur le client final pour
établir avec lui une relation one-to-one, estime Patrick Gendry, directeur
associé de Safari. A côté de cela, pour les distributeurs, prescripteurs et
vendeurs, on continue de mettre en place des opérations à caractère tactique,
un peu au hasard, pour booster ponctuellement les ventes. C'est une approche
beaucoup plus empirique. Et surtout, développée davantage en réaction à des
situations que dans une logique de construction de stratégie globale. » « Pour
des lancements, on a vu de grandes marques de parfumerie investir des centaines
de millions de francs en publicité, des dizaines de millions de francs dans le
packaging... et stimuler des réseaux de plusieurs milliers d'esthéticiennes,
leurs premières clientes, avec des chèques cadeaux d'un catalogue de VPC,
renchérit Philippe Florentin, directeur général de Kouro Sivo. C'est un
décalage flagrant avec l'image de la marque. Tout ce qui est afférant à la
motivation doit véhiculer et refléter la culture de l'entreprise, et non être
en décalage avec elle. On doit être fier de sa campagne de motivation comme on
est fier de sa campagne de pub. » En résumé, les annonceurs ne doivent pas
hésiter à attendre davantage de la motivation. Les agences, de leur côté,
doivent être en mesure de leur apporter des solutions à la hauteur de ces
nouveaux défis. Elles s'y attellent d'ailleurs avec assiduité. Amélioration de
leurs prestations et de leur professionnalisme, développement d'une approche
plus élaborée et plus fine de la motivation, meilleure connaissance de leurs
clients... Chacune y va de sa solution. Certains axent leur discours sur les
garanties apportées aux annonceurs. « Les investissements réalisés dans le
domaine de la motivation sont tellement stratégiques pour les entreprises que
j'ai du mal à comprendre pourquoi celles-ci ne demandent pas des garanties, des
preuves, des tests... Il y a là une vraie incohérence », estime Philippe
Florentin. Kouro Sivo, qui revendique la place de numéro un sur le marché de la
motivation (avec une marge brute de 80 MF, dont 50 MF en motivation), veut
apporter une réponse concrète à cette incohérence. Comment ? « Par la mise en
place d'un système de garanties, d'analyses, de suivi, qui fait que nous
pourrons assurer à un annonceur qui travaille avec nous une optimisation
complète de sa campagne. Cela n'existe pas aujourd'hui. » D'autres mettent en
avant une approche différente de la motivation, destinée à faire sortir cette
discipline des seuls challenges de forces de vente. « L'incentive est une
chose, mais aujourd'hui, accordons plus d'importance à la relation humaine,
analyse Anne-Dominique Chauvin, directeur associé de Ormès Incentive Marketing
(ex-Ormès Conseil). Les ressources humaines de l'entreprise, de ses
collaborateurs et de ses partenaires doivent être au coeur de nos
préoccupations. » C'est ce que l'agence Ormès Incentive Marketing a mis en
exergue à travers son nouveau credo : estime et performance. L'entreprise doit
commencer par estimer les collaborateurs qui travaillent pour elle et avec elle
afin d'améliorer leurs performances. « Dans le passé, le discours était le
suivant : "Soyez performants, on verra ensuite pour la reconnaissance",
poursuit Anne-Dominique Chauvin. Dans un contexte où les entreprises ont plus
de mal à embaucher et à trouver des distributeurs et des clients, il faut
inverser l'équation et partir de la reconnaissance pour générer de la
performance. » Et la responsable d'Ormès Incentive Marketing de prendre pour
exemple une opération réalisée pour Bouygues Telecom dont le thème, "Tous
acteurs", est symbolique de cette nouvelle approche. « Il s'agissait d'animer
et de fidéliser le personnel interne du centre d'appels, population jeune au
turn-over important, en l'intégrant davantage dans la vie de l'entreprise. Pour
la première fois, notre interlocuteur était la DRH et non une direction
commerciale ou marketing. »
Mieux connaître son réseau de distribution
Chez Safari, on a repensé différemment la
problématique de l'animation des réseaux. « Les techniques et les
problématiques relatives aux réseaux de distribution sont en général assez
négligées, estime Rémy Villebrun, directeur associé de Safari. Nous souhaitons
faire évoluer les choses sur ce terrain. Le but n'est plus de faire de façon
opportuniste un peu de communication interne, un peu de stimulation, un peu de
formation... Il est de mettre en place une réflexion amont destinée à aboutir à
des stratégies d'action en marketing opérationnel. » Point le plus marquant de
cette nouvelle approche, le "Network Relationship Management" (NRM), qui est un
peu au réseau ce que le CRM est au client final. Le NRM doit permettre une
connaissance de plus en plus précise, voire intime, des individus par le
développement de bases de données comportementales dans l'univers
professionnel. « Les hommes sont bien connus des entreprises en tant que
relation commerciale, poursuit Rémy Villebrun. En revanche, sur un plan
comportemental et humain, il y a une méconnaissance totale. Lorsque l'on sait
la force de ces informations sur la capacité à choisir des angles d'attaque,
des techniques ou des métiers plutôt que d'autres, on se dit que cette approche
est fondamentale. » Car l'objectif est bien sûr, à partir des connaissances
acquises, de proposer des offres différenciées (formation plutôt que
motivation, cadeau plutôt que voyage, etc.) correspondant le mieux à chacun.
L'évolution de ces dernières années l'a montré, la performance et la
professionnalisation des agences passent par une logique de groupe. Everest, un
géant sur ce marché, est, par exemple, composé de trois pôles d'activité
distincts : consulting (conseil), nouvelles technologies et marketing services
(récompenses). Dans un tout autre registre, Le Public Système, né dans un
univers totalement différent (événementiel et RP), a lui aussi élargi son
périmètre d'activités. « Les agences sont sans doute moins spécialisées qu'à
une époque, analyse Frédéric Bedin, directeur général du Public Système. Elles
sont plus globales, mais ont acquis des savoir-faire très poussés en interne. A
cela, une raison simple : le problème des annonceurs n'est pas de motiver, de
mettre en place une opération de marketing direct ou une convention
d'entreprise. Il est de vendre plus. L'annonceur recherche donc des agences qui
peuvent être maîtres d'oeuvre d'une stratégie en mixant différents
savoir-faire. Ainsi, les techniques du marketing opérationnel, dont la
motivation, ont tendance à se fondre dans des approches plus globales. Et nous,
responsables d'agences, devons recréer une agence "sur mesure" à partir de nos
ressources internes pour coller aux besoins de l'annonceur. »
Vraies ou fausses nouveautés ?
Dans ce grand jeu de
rapprochements et repositionnements, les départements à dominante motivation
s'en sortent assez bien. Ainsi, Le Public Système Sales Marketing (ex-Blue
Steam) affirme un nouveau positionnement "communication commerciale" et élargit
son offre vers la promotion business et le MD. « C'est Le Public Système Sales
Marketing qui est devenu la clé d'entrée sur ces différents métiers car c'est
l'entité la plus proche des directions commerciales, explique Frédéric Bedin.
L'enseigne regroupe désormais tous les métiers du groupe qui sont au service de
l'accroissement des ventes. Une problématique que nous plaçons au même niveau
que l'événementiel ou le corporate. » Reste que tous ces rapprochements et
repositionnements ne sont guère un facteur de lisibilité du marché. Nées dans
des univers différents, toutes les agences, devenues groupes, se rejoignent sur
un territoire commun. Ce faisant, elles ont tendance à avoir de moins en moins
d'aspérités et pour l'annonceur, le paysage devient flou. Autre écueil, relatif
celui-là à l'émergence de nouvelles solutions : la fausse nouveauté. Au fil des
ans, nouveaux noms et concepts révolutionnaires ont été si nombreux que
l'annonceur a de quoi être échaudé. « C'est un métier dans lequel on invente en
permanence des concepts, analyse Frédéric Boullé, directeur général d'Alista,
société qu'il a créée en 1992 (elle appartient désormais au groupe de marketing
services SPB) et qui a un savoir-faire reconnu dans l'univers de la banque et
de l'assurance. C'est normal puisque nous avons un métier d'idées. Mais tout
ça, parfois, c'est "du bidon". On se demande même si la surenchère permanente
aux nouveaux concepts ne s'apparente pas plus à une stratégie de communication
de certaines agences qu'à autre chose. Car nous faisons tous le même métier :
aller voir des clients, prendre leur brief et essayer d'y répondre le mieux
possible, par des bonnes idées, des mécanismes performants, des maquettes
créatives... » « La seule théorie marketing à laquelle je crois, c'est qu'il
n'y a que sur le terrain que les meilleurs font la différence, renchérit
Philippe Florentin. Il faut arrêter de se gorger de mots nouveaux. » Des
nouveaux concepts, de nouvelles idées, pourquoi pas, à condition que ceux qui
les inventent arrivent à leur donner du sens et du contenu.