Axa informatise ses réseaux de distribution
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«Le CRM est une invention des vendeurs de logiciels ou de bases de données
», affirme, sans détours, François Nédey, directeur du CRM chez Axa. Pour ce
spécialiste issu du monde bancaire, les éditeurs ont toujours vendu du rêve, ce
qui explique en partie les retours de bâton actuels dans certains grands
chantiers CRM. « Le triptyque infernal, consultant-éditeur-décideur, a pu
conduire à des projets surdimensionnés et éloignés de la réalité du terrain »,
analyse-t-il. Mais l'existence de quelques échecs ne peut remettre en cause la
validité de la démarche CRM, devenue indispensable avec l'augmentation du
niveau d'exigence des clients vis-à-vis des entreprises. Et, plus
spécifiquement, dans le domaine de l'assurance. Axa, par exemple, dispose de
trois réseaux de distribution de ses produits : les agents généraux, les
vendeurs salariés et les courtiers. Ce sont ces distributeurs qui maîtrisent
réellement la relation client et c'est à eux qu'il faut confier les outils de
gestion de cette relation. Ce type de distribution indirecte est aussi appelé
"B to B to C". Les 4 200 agents généraux (plus 300 agents généraux vie
spécialisés) sont des professionnels indépendants, mais exclusifs de la marque,
commissionnés au chiffre d'affaires réalisé. Les 4 500 vendeurs salariés
s'occupent presque exclusivement de placer de l'assurance vie. Itinérants, ils
sont bien insérés dans le tissu social, principalement en zone semi-rurale. Les
1 000 courtiers peuvent vendre des produits de plusieurs compagnies, mais la
grande majorité travaille en fait pour un seul assureur. Conclusion de François
Nédey : « Une démarche client dans nos métiers ne réussit que si la complexité
de la distribution a bien été prise en compte. » Lancée en 1999, après la
fusion avec l'UAP, la démarche CRM de l'assureur vise à consolider la base de
clientèle dans un secteur très volatil, où la rotation des clients est élevée
et la concurrence forte. Une équipe CRM a été constituée afin de remplir trois
missions. Un : disposer d'une vraie vision du client dans le système
d'information, précédemment organisé par produits (assurance automobile, vie,
habitation, etc.). Dans cette optique, une base de données clients a été créée
afin d'avoir une image mensuelle de tous les clients et de tous leurs contrats.
Deux : améliorer la connaissance du client, à travers trois outils principaux,
segmentation, hiérarchisation, prévision du comportement. Trois : mettre en
place un mécanisme de montée et de descente de l'information. Mais, pour ce
faire, il faut un logiciel.
Une première campagne, seulement quatre mois après l'installation
Début 2000, l'assureur choisit
Marketing Director, le produit de gestion des campagnes marketing de Chordiant,
et l'équipe CRM commence à l'implanter dans les réseaux. Le contrat est signé
début février et la première campagne a lieu en juin. Pour choisir son
programme informatique, l'assureur s'est interrogé sur le modèle de données
(est-il ouvert ? peut-il évoluer ?) et la capacité du logiciel à gérer un gros
volume d'informations (10 millions de contacts par an, 13 prévus en 2003).
Enfin, le progiciel peut-il s'adapter à une organisation compliquée comme celle
d'Axa ? « Il faut que tout soit maîtrisé », affirme François Nédey. Néanmoins,
l'introduction de ce système a eu un impact fort sur le département marketing,
dont les équipes ont dû s'adapter. Réorganisation du service, formation des
utilisateurs du logiciel, connexion des autres systèmes d'information. Au siège
parisien, une équipe dédiée d'une dizaine de personnes s'occupe de la création
des campagnes pour le compte du marketing ou des régions. Après une phase
pilote en 2000, les campagnes ont débuté en 2001, avant d'être généralisées en
2002 avec plus de 10 millions de contacts téléphoniques, mailings ou prises de
rendez-vous. Des trois réseaux de distribution, les agents généraux sont les
plus concernés, suivis des salariés, puis des courtiers. Les utilisateurs de
Marketing Director disposent d'un écran qui leur permet de valider leurs
clients, c'est-à-dire les inscrire ou non dans la campagne en cours. Ils
connaissent aussi le plan de déploiement de la campagne, élaboré en cohérence
avec un éventuel plan médias. 80 % des agents s'inscrivent aux campagnes
marketing décidées par le siège, ce que François Nédey nomme des « temps forts
». Avantages de ce dispositif : un suivi détaillé des actions commerciales, une
meilleure connaissance des clients contactés, des performances améliorées en
matière de vente de produits. Si l'assureur souhaite que le maximum de
distributeurs entrent dans ce nouveau schéma, il sait aussi que l'ensemble ne
l'utilisera pas et vise 60 % du nombre total de distributeurs. La compagnie ne
dévoile pas son budget pour ce chantier CRM, mais avoue qu'elle aurait pu
dépenser « dix fois plus ». De fait, outre le prix de la licence du logiciel,
qui varie en fonction du volume de données à traiter, ce sont les coûts
internes (constitution d'une équipe, suivi, formation) qui sont les plus
élevés. Aujourd'hui, l'équipe CRM travaille sur des modifications de produits
pour certaines niches de clientèle afin de mieux packager l'offre pour ces
segments.