Pour le meilleur et pour le pire 2/3
Ristournes, cadeaux, loteries et autres concours font partie de l'arsenal indispensable pour impulser l'acte d'achat en VAD. Mais la multiplication des offres ou la concurrence exacerbée génèrent un recours croissant aux accélérateurs de retours. A être trop utilisés, ils perdent en efficacité et finissent par devenir le coeur même de la communication. Une dérive que certains professionnels dénoncent comme un "dopage artificiel".
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Animation des ventes
Il ne s'agit pas pour autant de
décrier des techniques de promotions, de tout temps employées, mais, bien au
contraire, de les (re)positionner. « Idéalement, l'accélérateur de retours doit
être légitime et naturel par rapport à l'offre. Il vient alors renforcer la
cohérence du message. On ne doit pas penser seulement aux 3 % de gens qui
répondront mais à l'ensemble des consommateurs qui liront le message. On
protège ainsi le capital de la marque », estime Nathalie Dupas. Des ristournes
? « Pourquoi pas si elles s'inscrivent dans un cycle de vie logique : une
baisse du prix pour l'essayer ou une promotion pour le relancer », réitère
Jean-Louis Ferry. Un cadeau ? « Sans problème s'il appartient à l'univers du
produit. » C'est ce que propose, par exemple, Eveil & Jeux qui organisait un
concours pour gagner un voyage dans l'un des clubs de vacances de son
partenaire, Pierre & Vacances. « C'était un lot qui restait dans l'esprit
d'Eveil & Jeux puisque nous offrions un séjour familial avec l'opportunité
d'accéder gratuitement à une crèche pour enfants »,
relate Guillaume
Motte. Sur cette opération, le directeur du pôle enfant Fnac n'a pas vu ses
rendements démultipliés. Là n'était d'ailleurs pas son but. « Nous voulions
surprendre nos clients et bâtir une relation plus ou moins déconnectée du
commercial. » Avec, à la clef, une collecte d'adresses de prospects. « Le jeu
était en ligne sur notre site. Et nous avons constaté un très grand nombre de
participations via ce canal. Notamment de gens qui n'avaient pas commandé. »
Mais, parfois l'accélérateur supplante le message principal. Il se place alors
au coeur même de l'offre. Avec le risque de décevoir le consommateur. Que pense
un particulier si au lieu et place du sublime barbecue, tant vanté dans le
mailing, il reçoit un gadget made in Taïwan de cinq centimètres ? « A force de
manipuler le discours, il y a un effet déceptif du cadeau », note Bruno
Camelot. Mais il y a pire. Quand le mailing mise tout sur l'accélérateur, quand
s'accumulent les primes, cadeaux et autres ristournes, on perd le consommateur
dans une offre trop complexe. Et, du même coup, on ruine les rendements
escomptés. Un exemple. Celui de Fleurus Presse dont l'enveloppe du mailing
"Spécial rentrée" accumule les accélérateurs. Non content de présenter
l'abonnement aux magazines du groupe pour 24 E "seulement", le mailing propose
un doudou Papoum, un sac de voyage, une parure de stylos, un cadeau surprise
ainsi qu'un tirage au sort pour gagner des séjours au Futuroscope... « Les
cadeaux prennent le pas sur l'offre elle-même. On augmente ainsi les taux de
retour à court terme. Mais on ne fidélise pas. Et on se demande si, vu le coût
d'acquisition client, ça valait vraiment le coup »,
s'interroge Yves
Riquet. D'autant que l'on attire ainsi les fameux chasseurs de primes. Ces
accros de la ristourne constituent une cible volage, qui virevolte d'un
annonceur à l'autre sans apporter de véritables bénéfices aux sociétés. En
cause, le goût ludique des Français qui ne résistent pas à l'opportunité de
jouer. Ils seraient ainsi, selon les chiffres communiqués par la Fevad, plus de
60 % à participer aux jeux sans commander.
Tendance cadeaux
« Il y a dix ans, on utilisait les jeux de loteries à
haute dose. Aujourd'hui, les entreprises privilégient les cadeaux sans
obligation d'achat », assure Dominique du Chatelier, secrétaire général, chargé
des affaires économiques et juridiques de la Fevad. C'est le cas notamment du
pôle VAD de l'opérateur de télécommunication Orange qui dispose, outre des
promotions identiques à celles proposées chez les distributeurs, d'un cadeau
spécifique à offrir à ses clients, un ours en peluche. Pour Olivier Hélaine,
responsable ventes à distance de l'opérateur, le choix de cet objet répond a
une motivation : son aspect affectif et fortement impliquant. Pour lui, point
de secret : « Un bon accélérateur dope les ventes, il reste fidèle à l'esprit
de la marque, avec un rapport coût/rentabilité acceptable. » Et c'est bien ce à
quoi répond le nounours Orange puisque son coût est directement financé par le
consommateur ! Lors de la première vague de l'opération, Orange l'offrait
gratuitement, reversant même 1 E à une association caritative. Mais, dès la
deuxième vague, l'opérateur proposait son acquisition pour 1 E supplémentaire.
Et prévoit même de passer à 5 euros ! « La demande s'est maintenue lorsque nous
sommes passés du gratuit à 1 E. On verra pour 5 euros », précise Olivier
Hélaine.
Loteries et concours
Selon un rapport du
Conseil national de la consommation de 1997, les jeux concours représenteraient
20 % des différentes techniques promotionnelles. De fait, l'attrait des
consommateurs pour les jeux ne faiblit pas. Une nouvelle génération de loteries
dites à "instants gagnants" ou "par révélation" fait son apparition. Des jeux
de plus en plus courants sur Internet ou via un numéro Audiotel. Et c'est là
que réside le danger : voir revenir sur le devant de la scène des pratiques
plus que discutables que la profession a eu tant de peine à éradiquer. Pour le
consommateur, la démarche est simplissime. Nul besoin de bulletin. Il sait
immédiatement s'il a gagné ou non. Pour la société qui l'organise, l'avantage
est tout aussi important. Puisqu'il lui permet d'affirmer octroyer des lots
prestigieux... En étant à peu près certains de n'en distribuer aucun. A titre
d'exemple, ce spécialiste de la location de voitures sur Internet qui, songeant
à l'organisation d'un jeu avec comme lot une Porsche, affirme, sans ambages : «
Le risque, c'est que quelqu'un la gagne. Mais on peut l'assurer. » Ou ces sites
de loterie (bananalotto, lotree, lucky village...) qui, sous couvert de "Gagnez
un million d'euros tous les jours", cherchent à collecter des données
personnelles, qu'ils espèrent ensuite revendre pour de l'e-mailing. Ces
pratiques, la Fevad semble les ignorer. Le syndicat préconise, tout au plus, de
"séduire sans mentir". A ses adhérents, il demande ainsi de respecter son code
de déontologie dont l'article 19 du chapitre III prévoit que "l'organisateur
s'engage à distribuer tous les lots principaux dans le cadre de l'opération
elle-même ou à les offrir (ou leur contre-valeur monétaire) dans un délai de
trois mois après la date de clôture de l'opération, à une oeuvre de
bienfaisance reconnue, s'ils n'ont pu être remis à des participants".