Recherche

Les programmes de fidélité : services compris

Longtemps bridées par une approche strictement quantitative et technique, les politiques de fidélisation s'émancipent aujourd'hui des seuls mécanismes opérationnels pour s'inscrire de plain-pied dans la stratégie des entreprises. Et finalement s'ouvrir vers les services.

Publié par le
Lecture
25 min
  • Imprimer


C onserver ses clients, ses parts de marché, ses niveaux de revenus, de marge et de profit ; accroître la valeur des clients, notamment par des ventes croisées ou additionnelles ou par l'augmentation de la fréquence d'achat, amortir les coûts d'acquisition de la clientèle, amortir par anticipation les coûts induits par les flux transactionnels à venir, attirer de nouveaux clients… La fidélisation recouvre des objectifs très divers. On estime à 200 millions le volume d'adhésions à des programmes de fidélité en France, dont 40 millions procèdent d'affiliations “automatiques” (tous les abonnés au téléphone mobile, inscrits d'office par les opérateurs). Les programmes se sont développés dans tous les secteurs d'activité. En tout cas dans la sphère du B to C. Et, d'évidence, la fidélisation n'est en rien menacée dans ses principes. Ni dans ses perspectives de développement. « Il faut comprendre que nous sommes en train de créer un métier à part entière autour de la fidélisation », lance Jean-Michel Raicovitch, directeur général adjoint d'Accentiv en charge de la fidélisation. Le terreau de fertilisation des programmes s'enrichit d'une conjonction de paramètres. Premièrement, l'attachement des consommateurs aux programmes développés, pour peu qu'ils respectent certaines logiques en termes de mécanismes et une légitimité territoriale. Deuxièmement, une tendance marquée (malgré un infléchissement économique conjoncturel peu significatif) au développement des problématiques CRM. Troisièmement, les opportunités offertes par l'intégration maîtrisée des canaux de contacts dans la gestion des bases. Quatrièmement, l'évolution des modèles de distribution des grandes entreprises. A titre d'exemple, 6 % des réservations effectuées auprès des marques du groupe Accor passent aujourd'hui par Internet. Cinquièmement - corollaire direct du paramètre précédent -, l'évolution des comportements de consommation, des grands segments de clientèle et de leur prégnance dans le business des sociétés. Prenons encore le cas du groupe hôtelier : « Les cibles qui faisaient jusqu'à présent le gras de nos sociétés ont changé. On ne mise plus tout sur les clients fréquents à haute contribution. On s'intéresse aux clientèles moins fréquentes et moins contributives », précise Jean-Michel Raicovitch.

Viabilité économique des programmes


Enfin, last but not least, sixième levier de développement de la fidélisation : la viabilité économique des programmes. Car la fidélisation peut s'avérer probante, tant dans l'atteinte des objectifs fixés que dans les comptes d'exploitation. Ce n'est pas un hasard si le nombre de porteurs des cartes de fidélité du groupe Accor a triplé en deux ans, passant de 500 000 à plus de 1,4 million en 2003. A fortiori lorsque, parallèlement, le volume d'affaires généré par ces clients triple sur la même période, pour atteindre 495 millions d'euros, soit, avec 7 millions de nuitées, 9,2 % du business hébergement d'Accor en 2003. Reste que le principe même du système traîne derrière lui un cortège d'expériences pas toujours concluantes. Prenons l'exemple de la téléphonie mobile, où le phénomène d'attrition se confirme chaque mois davantage. Les opérateurs s'attendent à affronter des taux avoisinant les 40 % quand le marché aura complètement basculé dans le renouvellement. Ce qui ne tarit pas pour autant la débauche de programmes à laquelle ils se livrent. Mais s'agit-il de programmes de fidélité ? « Ce sont des stratégies de rétention, pas de fidé-lisation », rectifie Laurent Gibert, directeur général fidélisation de Laser, concepteur, opérateur, intégrateur de program-mes de fidélité au sein du groupe Galeries Lafayette. En matière de pro-grammes, les raisons d'échec sont multiples. « Un programme de fidélité, c'est un peu comme un mouvement d'horlogerie. Si on ne fait pas assez attention à la mécanique, l'heure donnée sera fausse », affirme Sylvain Forestier, président de D L'agence. Le déploiement d'approches fondées sur un ciblage approximatif peut ainsi très vite s'avérer ruineux. Et chacun, dans le Landerneau de la fidélisation, de rappeler cette offre lancée par un pétrolier à l'adresse de l'ensemble de ses clients, leur proposant une assistance routière gratuite contre le paiement d'un plein tous les quinze jours. A la clé : 800 000 bénéficiaires et une perte nette de plusieurs millions d'euros. Autre vecteur de dévoiement : les cartes à puce, qui peuvent coûter à l'unité autour de trois euros. On imagine l'ampleur économique de la mésaventure (frais de gestion ajoutés) lorsqu'elle est accordée à cinq millions de porteurs.

“Coller” aux cycles de vie des clients


« Un programme, ça vit. Et nous, comme d'autres, avons commis des erreurs. Il n'y a rien à voir entre le programme Points Ciels tel qu'il était il y a deux ans et ce qu'il est devenu aujourd'hui », commente Laurent Gibert. La pertinence des programmes dépend de l'aptitude de leurs concepteurs à les inscrire dans la longévité et à les faire évoluer en permanence, en fonction des cycles de vie des clients et des objectifs de l'entreprise. Un exemple : les jeunes se montrent perméables aux primes tangibles, alors que les chargés de familles réclament en priorité des services. Un programme de fidélisation doit tenir compte de ces variations dans l'adaptation de ses contenus à ses cibles. Tout un art. « Une grosse partie des programmes de fidélisation sont informatiquement gérés en interne », affirme Denys Rousseau, P-dg de Seditel (CA 2003 : 3ME). Calculer les points, les bonus, gérer les dates de validité, la recréditation des points : la gestion informatique des programmes requiert une superposition de savoir-faire. « Mettre en place et gérer un moteur à points, cela n'est pas évident. Il faut maîtriser des couches d'exploitation multiples », commente Denys Rousseau. Seditel s'est d'ailleurs toujours refusé à vendre sa licence. Mais en 2004, la société a vu le groupe Accor entrer dans son capital à hauteur de 50 %, avec un objectif de prise de participation totale à l'horizon mars 2005. Certains programmes ont été victimes de l'indigence de leur promesse. En limitant son message à des offres de réduction, une enseigne britannique de distribution a certes réussi à toucher près de 8,5 millions de clients, mais à quel prix ! Près de 30 millions de livres sur quatre ans. L'intensité de la fidélité est généralement proportionnelle au potentiel d'implication des produits. Lorsque ceux-ci ne peuvent projeter un fort niveau d'implication, les entreprises doivent travailler sur des attributs externes et notamment sur la marque ou sur le service. Les programmes agencés sur le modèle du “club” risquent pour leur part l'inadéquation entre les leviers et les objectifs, en projetant davantage la fidélisation sur l'avantage proposé que sur le produit et/ou la marque. Sans véritable élément de différenciation. D'autres entreprises vont céder à la tentation inverse, déployant des modèles cœrcitifs. Les modalités de souscription à certains forfaits de téléphonie mobile relèvent pour certains d'une complexité à la limite de l'obscurantisme. Par ailleurs, un programme s'inscrit toujours dans un terrain concurrentiel. Les marques détenant les plus fortes parts de marché fédèrent également une plus forte part de clients fidèles, mais aussi de clients à potentiel plus important en termes de chiffre d'affaires. Les programmes des leaders vont donc assez naturellement supplanter ceux des compétiteurs. A fortiori si les seconds clonent de manière éhontée les premiers. Ce qui est aussi fréquent que dommageable. Car le programme de fidélisation est un vecteur à part entière de l'identité et de l'image d'une marque ou d'une entreprise. « L'une des évolutions les plus sensibles dans la conception des programmes de fidélisation concerne la notion de légitimité territoriale, avance Florence Trouche, directeur général adjoint de MRM Partners. Aujourd'hui, Nestlé ne parle pas fidélisation comme le fait Danone, et inversement. » Danone a développé un discours pédagogique autour de la santé, Nestlé a choisi d'occuper le registre plus étendu du bien-être. « Nous avons mis en place pour Nestlé un programme sans doute moins informatif et plus pratique que celui de Danone », poursuit le D-ga. MRM a opté pour une segmentation de la clientèle par cycle de vie. Les adhérents au programme doivent remplir un questionnaire assez détaillé. En contrepartie de quoi ils recevront un e-mailing mensuel ainsi que quatre supports papier par an. « Peut-être la fidélisation fera-t-elle à terme partie du mix marketing », remarque Florence Trouche. En attendant, les grands programmes s'attachent, du moins pour certains, à soutenir une image de marque, quitte à s'éloigner des équations strictement quantitatives pour entrer dans une dimension plus structurante. En héritant, il y a quatre ans, de la gestion du programme Total créé six ans plus tôt, MRM Partners a opéré un recentrage en termes d'image. « La fidélité doit permettre de justifier une certaine différence de prix pratiquée par le pétrolier », explique Florence Trouche. Migration vers un modèle d'adhésion volontaire via questionnaire de qualification, redéfinition du référencement des dotations (davantage liées au territoire de légitimité de Total), refonte de la charte graphique du catalogue. «Total est l'un des seuls pétroliers à avoir un programme propriétaire. Le poids sur l'image de l'entreprise est énorme », affirme le directeur général adjoint de MRM Partners

Une orientation marquée vers les services


Pour véhiculer avec toute l'affirmation nécessaire l'image des marques, les programmes de fidélité doivent intégrer une dimension qualitative qui leur a longtemps fait défaut. L'orientation des stratégies de fidélisation vers le service n'est pas incompatible avec l'ampleur de leur couverture. Le programme Cléo du Crédit Lyonnais, qui fédère aujourd'hui deux millions de porteurs, a été construit autour de la notion de services . «Nous avons écarté le modèle à points, peu apprécié des cibles les plus jeunes, davantage attirées par les offres de réduction », souligne Guillaume Huser, directeur général de CIMS, filiale internationale de l'américain Cendant dédiée à la gestion des stratégies de marketing relationnel et des programmes de fidélisation. Le Crédit Lyonnais a voulu se différencier des concurrents du monde bancaire en estampillant une carte Visa de sa marque, avec l'ambition de faire migrer l'ensemble des porteurs Visa vers la carte Cléo. Les consommateurs sont prêts à payer le droit de bénéficier d'une carte. La carte Favorite Guest d'Accor est vendue 270 euros. Une source immédiate de revenus pour le groupe. La carte dernièrement lancée par Du Pareil Au Même aurait, affirme-t-on chez Accentiv et Seditel, dépassé toutes les espérances que s'étaient autorisées les patrons de l'enseigne et ce, malgré une condition tarifaire d'accès public fixée à 30 euros de dépenses. La carte Fnac a séduit 1,6 million de personnes, soit 10 % des clients de la chaîne, qui auront dépensé 30 euros pour un titre valable trois ans et 13 euros pour une carte annuelle. Et qui réalisent 60 % du CA de l'enseigne. La carte Marrionnaud, gratuite celle-ci, compte à ce jour en France et à l'étranger plus de 8 millions de porteurs. Colossal pour un programme propriétaire d'enseigne non généraliste. Chaque semaine, ce sont 200 000 messages qui partent des ateliers de routage d'Aquitem, sous-traitant choisi il y a cinq ans par le distributeur pour la gestion technique de son programme de fidélité. La hot line mise en place chez le prestataire à l'adresse des points de vente traite environ 1 500 demandes quotidiennes. Du côté des circuits de grande distribution généraliste, les approches restent plus basiques. «La grande distribution fait essentiellement de la promo. Elle oblige les consommateurs à acheter de la fid pour payer moins cher. Mais acheter de la fidélité, c'est le contraire de la fidélisation », lance Jean-Michel Chanavas Dg du pôle fidélisation contacts services points de vente de Laser. Le modèle de la carte privative est aujourd'hui adopté par la quasi-totalité des enseignes de la grande distribution. La carte Iris servirait ainsi à régler 75 % des achats effectués chez Champion. En 2002, le marché des cartes privatives était estimé selon Eurostaf à 40 millions d'unités, s'approchant en volume du marché des cartes bancaires. Pour un taux d'utilisation atteignant moins d'un quart des flux de paiement commerçants par carte bancaire. Le potentiel de croissance du marché relève aujourd'hui en grande partie de la sphère B to B, le taux d'équipement des entreprises dépassant les 10 %.

Le modèle à point, chouchou de la grande distribution


Le modèle à point, référent phare chez les enseignes de grande distribution, se décline sur leur vitrine Internet. Après telemarket.fr et auchandirect.fr, houra.fr lance son programme de fidélisation. Le cybermarché de Cora adopte un modèle classique par accumulation de points, qui se déclenche dès la deuxième commande passée. Le nombre de points est fonction du chiffre d'affaires généré. Une commande de 100 à 120 euros donne ainsi droit à cinq points. A partir de 150 points, le client se voit offrir une livraison gratuite. Les points accumulés restent valides durant six mois. Pour houra.fr, le programme de fidélisation porte deux objectifs complémentaires : le gonflement du portefeuille de clientèle et l'intensification des commandes. L'enseigne on line de Cora vient en outre d'adopter un service aujourd'hui présent chez la plupart des cybermarchés concurrents : en fin de commande, l'internaute voit apparaître une liste des principaux produits achetés lors des précédentes transactions et qu'il aurait “omis” de commander cette fois-ci. Reste que toutes les enseignes n'ont pas les moyens de développer un système de fidélisation propriétaire. Les programmes multienseigne s'adressent en priorité à des entreprises n'ayant ni les moyens, ni les ressources pour concevoir et gérer des programmes et pour assumer seules des niveaux de générosité jugés acceptables. Les annonceurs soucieux de communiquer de manière exclusive sur leur marque et pouvant financer des dotations suffisamment attractives vont s'orienter vers des programmes propriétaires. Certains ont cependant opté pour une approche duale, à l'instar d'Avis, qui conjugue son programme propriétaire Millemercis (clients à fort potentiel sur une offre internationale) et le programme multienseigne Maximiles (clients plus occasionnels). Le modèle ne trouve pas que des partisans. «Le multienseigne fidélise davantage au programme qu'aux entreprises qui le portent », affirme Florence Trouche. Pour Sylvain Forestier, « il y a toujours cannibalisation par le plus gros ». En l'espace de cinq ans, la configuration du marché des programmes de fidélisation aura radicalement changé. Notamment par le jeu de la concentration sur le terrain des offres on line multienseigne. En 2000, huit programmes on line se côtoient. En 2004, deux ans après le rachat de Webmiles au groupe Bertelsmann, Maximiles revendique le statut d'acteur unique. Le programme Maximiles compte aujourd'hui une quarantaine de partenaires, pour la plupart des sites marchands. Voyages-sncf.com reste de loin le premier générateur de chiffre d'affaires pour le portail, suivi par aquarelle.com et mistergooddeal.com. 2003 est l'année de l'équilibre pour Maximiles, dont les dirigeants revendiquent un chiffre d'affaires 2003 de 4 millions d'euros et visent les 6 millions pour 2004, avec 10 % de marge nette. Le programme enregistrerait 20 000 nouveaux inscrits par mois, pour une base constituée de 750 000 membres, dont 450 000 actifs.

Multienseigne : un modèle fragile


En multienseigne, la stratégie consiste à fédérer les enseignes les plus prestigieuses sur leur secteur d'activité. Manque notamment à Maximiles une enseigne culturelle. Pas la plus facile à conquérir. La Fnac et Amazon éditent chacune un programme propriétaire. En outre, l'octroi de primes sur l'achat de livre est légalement interdit. « Avec 40 partenaires, on peut considérer que nous avons atteint un taux très significatif de couverture au regard des secteurs représentatifs du commerce on line », note Marc Bidou, P-dg. Maximiles pourra gonfler le volant de ses partenaires à 50 ou 60 sites, mais « pas à 200 ». La société a monté en 1984 une offre de services en marque blanche, qui représente aujourd'hui 60 % de son business. La société s'est constitué un réseau d'une centaine de fournisseurs susceptibles d'alimenter un catalogue d'un millier de références. « Entre l'expertise, l'infrastructure technologique, le sourcing, le webmastering, le call center, nous pouvons mettre en place un programme complet en deux trois mois », affirme Marc Bidou. On peut cependant imaginer que le business de Maximiles reste assez largement inféodé à son partenaire SNCF, d'ailleurs actionnaire à hauteur de 20 %. Alors, lorsque la société nationale annonce qu'elle serait en passe de transférer la gestion de son programme chez S'Miles… Chez Maximiles, où l'on reconnaît le poids économiquement structurant de ce partenariat, on affirme que l'entrée du transporteur dans S'Miles ne concerne que les porteurs de cartes commerciales SNCF et que Maximiles est partenaire du site voyages-sncf.com. Ce que ne contestent pas les responsables de la fidélisation chez Laser, gestionnaire de S'Miles. «Le chantier ne porte pas sur voyages-sncf, mais sur l'ensemble des titres justificatifs de réduction estampillés SNCF, c'est-à-dire sur tous les clients identifiés de l'entreprise, “grands voyageurs” compris », explique Laurent Gibert. Reste à construire le programme. Ce qui, au vu des dimensions de l'entreprise et de la cible potentielle, prend du temps. Il s'agit d'un projet très engageant pour la société nationale. Chez Laser, on laisse d'ailleurs entendre que l'intention de l'entreprise est de faire entrer à terme la totalité de sa fidélisation dans S'Miles. Maximiles rappelle être partenaire du site voyages-sncf.com jusqu'en 2006. L'entreprise entend investir fortement dans la communication et le développement de nouveaux services en ligne.

Mouvango, premier réseau de programmes


Dans le spectre des stratégies développées par les entreprises pour fidéliser leur clientèle, Mouvango se distingue par sa couverture et par son modèle. En voulant mettre sur pied un système de fidélité lié à l'univers des loisirs et des déplacements, Accor et Total ont opté dès octobre 2002 pour un réseau de programmes. Réseau que vient de rejoindre Europcar en tant que troisième partenaire émetteur. Mouvango compte à présent trois programmes de fidélité, chacun d'eux étant associé à une carte labellisée Mouvango (Accor Mouvango, Club Total, Europcar Europoints). Les 2,3 millions de porteurs peuvent cumuler des points à chaque achat réalisé dans les seize enseignes partenaires et 7 000 points de vente du réseau en France. Une autre approche consiste à créer, derrière un programme propriétaire, un tissu d'affiliés. Le site de distribution de fleurs aunomdelarose.fr a révisé le modèle d'affiliation lancé peu de temps après son lancement en 2001, qui reposait sur une rémunération mixte, indexée d'une part sur le nombre de clics, d'autre part sur le chiffre d'affaires. Depuis mars 2004, le programme fonctionne sur le ratio nombre de ventes vs nombre de clics, autrement dit sur la transformation de la fréquentation en chiffre d'affaires. Les 400 sites partenaires d'aunomdelarose.fr sont rémunérés à hauteur de 10 % du revenu apporté. Mais le modèle est évolutif : le taux passe à 12 % à partir de 25 ventes cumulées et d'un taux de transformation (ventes/trafic) de 1 %. Puis à 15 % au-delà de 50 ventes cumulées et 2 % de transformation. Pour les sites affiliés les moins actifs, le système valorise la rémunération par le chiffre d'affaires. Pour les 20 % de partenaires qui génèrent 80 % du business en fidélisation, il signifie une augmentation de la commission. La totalité des partenaires génèreraient plus de 30 % du trafic global enregistré sur le site, soit entre 70 000 et 80 000 visites par mois. L'entreprise consacrerait près de la moitié de son budget marketing à son programme d'affiliation. Pour booster la création de trafic, aunomdelarose.fr met à disposition de ses partenaires une dizaine de formats de bannières rappelant les promotions et fêtes en cours ou à venir. Une fois les visuels créés, les affiliés n'ont plus qu'à venir faire leur marché et importer les formats qui ont été choisis. Les taux de générosité proposés avec les programmes on line dépassent sensiblement ceux autorisés par les dispositifs traditionnels. Le média électronique permet d'allouer jusqu'à 80 % des budgets à la dotation, pour seulement 20 % au frais de fonctionnement. Dans le modèle off line, ce ratio s'inverse. Les réseaux de points de vente physique étant naturellement plus friands de titres imprimés, donc coûteux. Mais pas toujours efficaces. « Le bon d'achat occasionne nécessairement un manque à gagner. Car, bon d'achat ou pas, le client reviendra en magasin », note Bruno Watine, P-dg de Golden Eyes. Le modèle du droit à remise a séduit un certain nombre d'enseignes dans la distribution de détail. Un principe d'échange simplissime : à partir d'un seuil de points accumulés, le client se voit signifier qu'il bénéficie d'une remise sur son prochain achat. Relativement peu porteur pour les émetteurs en termes de marge relative, le système ferait ses preuves, selon ses adeptes, en termes de marge absolue. « Dans les magasins qui optent pour le droit à remise, le panier des bénéficiaires est multiplié par trois, parfois décuplé », poursuit Bruno Watine. Selon le patron de Golden Eyes, le modèle enregistrerait des taux d'utilisation de l'ordre de 70 % à 80 %. Créé en 1997 à Roubaix, Golden Eyes (CA 2003 : 1,6 million d'euros) agit en maîtrise d'œuvre (en mode ASP) autour d'une offre de service dédiée aux enseignes de la distribution B to C et B to B : conseil, gestion des cartes et des programmes, data mining, statistiques… Avec, en service on line, des fonctionnalités de comptage, de statistique, de scoring. Parmi les clients de Golden Eyes : Jardiland, Weldom, Vétimarché, Virgin Interactive, Saint Maclou, Leroy Merlin… Soit au total 1 200 points de vente en gestion pour 2 millions de cartes. A mesure que s'accroîtront les volumes supportés par les programmes de fidélisation, les entreprises devront étoffer leurs approches dans l'axe de la profondeur. Et pourquoi pas en inscrivant leur stratégie dans une dimension d'enrichissement des données qui dépasseraient les frontières locales ? «Les entreprises européennes recherchent aujourd'hui des partenaires capables de conjuguer gestion performante de processus opérationnels, outils décisionnels et expertise marketing à forte valeur ajoutée », affirme Maguy Mercier, directeur marketing et développement d'Experian. Le groupe spécialisé dans de traitement de la donnée gère près de 14 millions de cartes de fidélité en Europe. Il se propose d'accompagner les entreprises dans le déploiement de programmes transnationaux, en délivrant via ses structures locales un savoir-faire en matière de connaissance de l'environnement (réglementation, habitudes des consommateurs, etc.), de données démographiques et comportementales, ainsi que de services opérationnels. Les diverses initiatives ne plaident pourtant pas en faveur de la pertinence de programmes européens. Bertelsmann a revendu son activité française, Maximiles a abandonné l'aventure espagnole. « Le programme Marrionnaud peut être considéré comme international puisque la chaîne est intégrée au niveau européen », explique Patrick Bordas, Dg d'Aquitem. Bien que présent dans de nombreux pays d'Europe, Total entretient une agrégation de programmes locaux. «Il y aura sûrement un jour fusion, mais il faudra commencer par la base de données», affirme Florence Trouche.

Nombreux freins à l'ouverture paneuropéenne


Contraintes légales, particularismes culturels, spécificités des mécanismes opérationnels… « Même lorsque les entreprises choisissent de travailler avec des réseaux internationaux d'agences, l'implémentation reste très locale », souligne Sylvain Forestier. Air France devrait procéder d'ici 2005 à la fusion de son programme et de celui de KLM. Les observateurs guettent d'ores et déjà attentivement le niveau d'intégration des deux modèles d'origine. «Même chez Amex, entreprise qui a poussé le plus loin la dimension internationale de sa fidélisation, on ne peut pas parler de programme paneuropéen », affirme Guillaume Huser, Dg de CIMS et transfuge d'American Express L'intégration transnationale des pro-grammes se trouve freinée par des paramètres économiques de gestion : quels investissements consentir localement, quels volumes de points provisionner, quels taux de générosité prévoir, dès lors que les lieux du gain et de la dépense peuvent différer ? Les grandes chaînes hôtelières nord-américaines, présentes un peu partout, et qui reposent pour la plupart sur un réseau de franchise, ont adopté une approche plus simple. Le modèle de rentabilité de leur stratégie de fidélisation procède plus d'une relation client-fournisseur : moyennant un ratio standard de son chiffre d'affaires (tournant autour de 6 % dans le secteur hôtelier), le franchisé peut s'inscrire au programme et bénéficier des avantages et services afférents. Pour l'enseigne-mère, le programme se cantonne à cette relation locative, source immédiate et directe de profit. La franchise n'empêche pas pour autant une gestion unifiée des données liées à l'exploitation du programme. A condition de déployer un parc intégré d'outils de traitement de l'information. « Nous pouvons mettre en place des modules et des terminaux de péréquation », commente Patrick Bordas. Ce qui permet notamment, dans une configuration de franchises ou de réseau à l'international, d'éviter aux mêmes points de vente de concentrer la partie “burn” (dépense) des programmes alors que d'autres points de distribution enregistraient essentiellement des conversions “earn” (gain). Dans la définition de leur business model et dans la modélisation qualitative de leurs mécanismes opérationnels, les programmes de fidélisation en sont encore à leurs débuts. « Nous avons tous couru ces cinq dernières années à la technicité, au développement du multicanal, note Florence Trouche. Aujourd'hui que nous maîtrisons cette dimension, les programmes vont pouvoir décoller. »

La stricte logique


Différents types de récompense peuvent être adjoints aux programmes : avantages immédiats (cadeaux offerts à l'achat, coupons de réduction, réduction pour l'accompagnant…) souvent calculés au prorata de la valeur du bien ou du forfait ; services réservés (caisses identifiées, systèmes de priorité, accès à une assistance ou une information spécifique…) ; bénéfices différés dans le temps. Quel que soit le modèle retenu, sa valeur globale perçue sera conditionnée à cinq paramètres : la valeur perçue de la prime éventuelle ou la valeur nette, son attrait, son accessibilité dans le temps, la liberté laissée dans le choix des options et la simplicité du programme. Les logiques essentiellement quantitatives ont cédé le pas aux approches conjuguant services et mécanismes arithmétiques de récompense. Le point n'est plus le levier central des programmes adossés aux grandes politiques de fidélisation, a fortiori vers des cibles stratégiques. La banque Fortis en Belgique a ainsi développé un système mixant avantages immédiats, apports de services intangibles (assurances voyages, par exemple) et récompenses par échange de points acquis. Le Fortis Global Club compte aujourd'hui 350 000 membres, plutôt dans le segment des clients à potentiel. Rentabilité

Les avantages de la fidélisation on line


par Fabienne Giesbert Granovsky, directeur général de VM Data et Gildas Mottais, directeur programme de Maximiles, membres du SNCD. Parce que l'augmentation de 1 % du taux de rétention d'un client génère une croissance de l'ordre de 8 % des bénéfices, la fidélisation est une nécessité, en on line comme en off line. Fidéliser car : conserver un client coûte cinq à dix fois moins cher que la conquête d'un nouveau client et sa valeur à vie couvrira ses coûts d'acquisition. Comment : reconnaître, exprimer, surprendre et récompenser en cash de préférence. Mono ou multienseigne, les programmes de fidélisation tendent vers le “on line” Le on line libère des contraintes d'identification, l'internaute navigue au gré de ses envies, sur un espace spécialement aménagé pour lui en fonction de ses profils, de ses expériences, de ses préférences. La fidélisation on line est très puissante et le tracking immédiat. Avec le on line, la mesure de l'efficacité et la rentabilité des programmes est palpable et quantifiable. Via le Web, la gestion d'un programme de fidélité est simplifiée et les réductions de coûts sont importantes... Ces avantages sont encore plus significatifs si vous ajoutez à votre programme de fidélité une “suite e-mailing”, c'est-à-dire des outils permettant l'enrichissement des données collectées via le programme de fidélité, les outils de requêtes permettant la segmentation de la base de données, les outils d'envoi d'e-mails permettant de contacter le client, et enfin les outils de statistiques nécessaires au calcul de rentabilité et à la connaissance de la base. La technologie permet d'établir une régularité des contacts à moindre coût, celui d'un e-mail sur une adresse fidélisé est plus de dix fois inférieur ou coût d'e-mail de conquête. Grâce au Web, toujours plus d'interactivité donc, et de nouveaux outils disponibles et accessibles par tous qui permettent à cette “nouvelle génération” de programme de fidélité d'entrer dans une relation client mieux "nourrie" et très personnalisée.

Micro marketing en ASP


Golden Eyes a développé une offre on line destinée aux enseignes de distribution désireuses de monter rapidement une opération de marketing direct auprès des membres de leur programme. De la mention des divers paramètres de segmentation à l'édition du bon à tirer en passant par le choix du type de message, le choix du support et le devis. « Tout se fait en deux minutes », affirme Bruno Watine, P-dg. En fait, il faudra prévoir un peu plus de deux minutes. Loué en ASP, donc sans frais fixes, le modèle autorise des micro-mailings réactifs. Golden Eyes se charge de la mise sous pli et du routage. Coût de la location : entre 30 et 50 euros par mois, pour une utilisation illimitée. Une condition toutefois pour l'enseigne : être client de Golden Eyes.

Muriel Jaouën

S'abonner
au magazine
Se connecter
Retour haut de page