Cap sur la qualité
Ils dénichent le fichier rare pour nourrir une opération de MD. Ils sondent les bases de données pour en extraire de nouveaux segments de clients. Ils traquent l'adresse erronée afin d'éviter des envois inutiles. Les spécialistes de la donnée sont des maillons indispensables dans la chaîne du marketing direct. Ces prestataires partagent tous le même objectif dans leur métier : obtenir une donnée de qualité.
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Faire rimer qualité et donnée n'est pas chose facile. Car, entrer dans le
monde de la donnée demande d'accepter de pénétrer au royaume de
l'imperfection. Qu'il s'agisse d'adresses postales, e-mails ou de numéros de
téléphone, les données clients et prospects sont, par nature, en permanente
évolution. Un déménagement, un changement dans la situation personnelle ou
professionnelle du client ou du prospect, ou simplement une erreur de saisie
suffisent pour qu'une information devienne obsolète, impossible à exploiter,
ou soudain inintéressante. Quant à scruter une base de données pour y
découvrir un nouveau segment de clients, autant chercher une aiguille dans une
botte de foin ! Du moins pour un non spécialiste, qui ne maîtrise pas les lois
multiples et contradictoires de la donnée. C'est le type d'actions que les
entreprises n'hésitent plus à sous-traiter. Le choix d'un prestataire s'impose
souvent car les métiers de la donnée sont devenus très techniques. Les
logiciels bien particuliers du traitement de l'adresse ne sont pas à la portée
de tous les informaticiens. Quant aux analyses, elles ne peuvent être
réalisées que par des statisticiens confirmés. Même dans les très grandes
entreprises, dotées de départements BDD et études conséquents, le recours à des
prestataires est fréquent, pour le traitement des adresses, par exemple, et
pour l'apport de données externes.
Un trio de prestations
On peut diviser le marché en trois types de
prestations. La commercialisation de fichiers, tout d'abord, permet d'enrichir
sa ou ses bases prospects de contacts ciblés, adresses postales, numéros de
téléphones fixes et mobiles ou adresses e-mails. Le traitement informatique
des données, ensuite, assure le nettoyage, le dédoublonnage et la mise aux
normes des adresses d'un fichier. Enfin, l'analyse statistique permet de
traiter les informations de la base de données pour répondre à un objectif
marketing précis. Si ces trois styles d'actions sur les données clients et
prospects sont aujourd'hui assurés par des prestataires bien identifiés, ils
sont nés au sein des pionniers du marketing direct, les vépécistes. « C'est en
fonction du besoin des annonceurs que ces actions sont passées dans le domaine
du service, explique Patrick Visier, président de DPV. Dans les années 80, au
moment de l'explosion du marketing direct en France, les annonceurs
recherchaient surtout auprès de leurs prestataires de l'aide pour les actions
de prospection. Dans les années 90, la fidélisation a été mise à l'honneur. »
Les entreprises clientes ont ainsi affiné leurs démarches : considérant au
départ les campagnes MD comme des machines à contacts, elles se sont
reconcentrées sur leurs propres données clients et prospects. Dans le même
temps, le marché s'est structuré. « Il y a déjà eu deux vagues de
concentration et la troisième se profile, analyse Patrick Visier. Nous sommes
dans un marché qui arrive à maturité. » Les entreprises clientes ont ainsi
aujourd'hui moins de risques de tomber sur des prestataires farfelus. Car la
professionnalisation s'est accompagnée de démarches issus d'organismes
professionnels comme le SNCD, le Syndicat national de la communication
directe. Sa charte et ses codes déontologiques sont consultables en ligne, sur
www.sncd.org.
Le langage de l'expérience
Cela ne
signifie pas pour autant qu'il est devenu aisé de choisir un prestataire. Il
faut savoir avant toute chose que les métiers de la donnée sont assurés par des
profils de personnes très diverses. Même si les formations au marketing direct,
comme celles dispensées par l'IAE de Lille, incluent bien sûr dans leur cursus
cette étape de la chaîne de prestations, les débouchés sont trop étroits pour
créer un diplôme spécifique en recherche de fichiers ou en traitement de
l'adresse. Même l'analyse de données, qui nécessite de fortes compétences
mathématiques et statistiques, doit se compléter d'une expertise terrain. « Il
y a dix ans, il n'existait rien d'écrit sur le data mining, remarque Andréa
Micheaux, directrice associée d'AID, et auteur d'un ouvrage de référence sur
l'analyse ou data mining. Aujourd'hui, il y a les cycles informatiques et
statistiques en universités, ou même en écoles de commerce. Mais, pour entrer
chez nous, il faut aussi disposer de compétences marketing.»
Expérience terrain
Les années d'expérience dans le
marché de la donnée font toujours office d'excellente carte de visite. « Les
meilleures écoles ont été souvent les entreprises, lance Patrick Visier. Bottin
a joué ce rôle à une époque. Médiaprisme aujourd'hui ou Wegener ont formé de
bons profils. Car de toute façon, les formations préparent surtout à entrer
chez les annonceurs, comme les vépécistes et non au sein des prestataires. »
Un des éléments du choix du prestataire consistera ainsi à vérifier parmi
l'équipe, non seulement le niveau des connaissances mais aussi le nombre
d'années d'expérience terrain. Pour certains métiers, comme l'analyse ou le
traitement informatique, la double compétence se repère rapidement à la
facilité ou non du prestataire à se mettre au niveau de connaissances
techniques de son client. L'une des questions clés des entreprises clientes va
ensuite être de définir leur stratégie globale en termes de prestataires :
faut-il choisir une société très spécialisée ou une entreprise cumulant les
compétences ? Sous les effets de la concentration du marché, de plus en plus de
prestataires proposent deux, voire plus rarement trois, des métiers de la
chaîne de la donnée. Seule l'analyse statistique reste réservée à un nombre
faible d'acteurs bien que les cabinets d'audit commencent à s'emparer de ce
type de service. « Nous avons en effet élargi nos adhésions au SNCD aux
cabinets d'audit. Car l'analyse de données, prestation de conseil, est
proposée par les grands cabinets conseils », note Patrick Visier. « Les trois
métiers restent encore bien distincts et c'est une bonne chose, estime pour sa
part Marie Teixeira, directrice d'Alvo Direct Conseil. Mais il est vrai que
l'on peut rencontrer, par exemple, des propriétaires de fichiers, de mégabases,
qui proposent de l'analyse. » D'une autre manière, ceux qui commercialisent
les fichiers proposent parfois le traitement. Enfin, au-delà des métiers
stricts de la donnée, d'autres prestations de services peuvent entrer en
compte dans le choix du prestataire. Par exemple, l'hébergement de la base de
données s'accompagne logiquement de services de traitement des données. Les
entreprises qui ont choisi d'externaliser leur base prospection demandent
ainsi à leur prestataire d'être en mesure de nettoyer, dédupliquer et
normaliser leurs adresses.
France ou Europe ?
Les
choix d'un ou de plusieurs acteurs du marché va d'abord dépendre de ses besoins
et de sa culture maison. Inutile de faire un tour complet du marché si la
prestation consiste juste à dédupliquer les adresses de ses prospects. En
revanche, s'il s'agit de faire héberger une partie de sa base clients pour la
gérer et l'enrichir régulièrement, tout en faisant intervenir un second
prestataire pour réaliser des études data mining complexes, autant choisir avec
soin son futur partenaire ! Il ne faut pas oublier que le monde de la donnée
reste petit et que les acteurs du marché se connaissent parfaitement. Les
contrats et partenariats entre prestataires sont monnaie courante. Il faut
ainsi vérifier auprès de son prestataire si certaines actions de son offre
seront sous-traitées, afin de s'assurer aussi des compétences de l'équipe du
sous-traitant. Le marché des prestataires reste, pour l'instant encore,
essentiellement hexagonal. Les métiers de la donnée ont du mal à devenir
européens car les demandes des clients restent attachées à des stratégies
nationales. Seul l'hébergement de bases de données peut s'opérer avec facilité
hors de France. Que les serveurs soient hébergés à Paris ou à Londres, les
compétences nécessaires pour assurer une bonne gestion technique de la base ne
varient pas. Il n'en est pas de même pour le traitement informatique des
données, par exemple, très lié aux normes postales du pays, chacune étant
spécifique et non transposable d'un pays à l'autre. « Nos outils de traitement
informatique sont modulables et on pourrait les adapter si besoin, remarque
Valérie Papaud, directrice générale de Wanadoo Data. Mais c'est une prestation
que l'on ne nous demande pas. Sur la commercialisation d'adresses non plus :
les campagnes se font dans chaque pays. » Thierry Fasolin, directeur de Sogec
Datamak Services, partage la même opinion : « Nous avons un outil qui nous
permet de normaliser l'Union Européenne mais pas de demande : c'est plutôt une
obligation dans le cas où un client international hébergé chez nous le
souhaiterait. » A terme, même si les campagnes de marketing direct, à part
peut-être des actions importantes d'e-mailings, devraient rester nationales,
les prestataires du marché pourraient cependant bien être tous européens.
C'est déjà le cas avec, par exemple, le groupe belge Wegener, présent en
France sur les prestations d'hébergement avec Sagone, de commercialisation de
données avec Appollinis et de traitement avec Altria. Pour les entreprises
clientes, une seule chose importe réellement : le niveau de qualité de leurs
données, clients et prospects. Sous le terme qualité, c'est autant la
précision des données que leur pertinence qui est exigée. L'heure est à
l'information percutante, adaptée à une stratégie marketing précise et au
service d'un objectif opérationnel. Et, seuls les métiers de la donnée,
maillons clés de la chaîne du MD, ont les moyens de le faire et de transformer
la donnée en information vivante.