Communauté de marque: quelles sont les clés du succès ?
Bien identifier ses objectifs, choisir le lieu de développement de la communauté et constituer une équipe dédiée font partie des incontournables de la mise en oeuvre d'une communauté de marque. Le point sur les bonnes pratiques.
La constitution et la fédération d'une communauté autour de ses produits ou de ses services fait partie des priorités de nombreuses marques en quête de fidélisation ou de notoriété. Et pour cause : ces forums de discussion, sur lesquels les membres échangent des idées et livrent leurs avis ou leurs conseils, constituent une mine d'or pour analyser les retours d'expérience ou mieux connaître ses fans. Prudence, néanmoins, la communauté de marque ne se décrète pas.
Avant de se lancer dans l'aventure communautaire, l'entreprise devra donc vérifier qu'il existe une communauté sur le Web qui parle d'elle ou partage des centres d'intérêt communs. "Si cette communauté existe, il est naturel que la marque nourrisse ses aficionados en contenus, explique Caroline Faillet, cofondateur et CEO du cabinet Bolero. Son objectif sera de capitaliser sur ces ambassadeurs pour faire rayonner sa marque. Pourquoi chercher à faire ce qu'ils font tellement mieux" . Mais, si la communauté n'existe pas, il y a peut-être une bonne raison ! Parmi les incontournables : bien identifier ses objectifs, choisir le lieu de développement de la communauté, sans oublier de constituer une équipe dédiée.
Trois experts font le point sur le sujet :
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Une communauté de marque, c'est...
La communauté se détecte et se fédère
La communauté de marque représente un espace de libre expression pour les prospects ou les clients d'une marque : un endroit où les individus parlent d'elle, mais sans elle. La notion de liberté est essentielle, car la communauté n'appartient pas fondamentalement à la marque - et ce, même si elle existe en son sein -, mais aux membres qui la composent. Une communauté ne se décrète pas, elle se détecte et se fédère, en s'appuyant sur des communautés captives. Un travail de cartographie préalable est donc indispensable pour vérifier le potentiel d'attraction de la marque.
Il existe plusieurs communautés, dont les fonctions diffèrent. La première est celle d'entraide, un endroit où les internautes posent des questions et trouvent des - solutions ; une aubaine pour les opérateurs télécoms qui se tournent souvent vers elle pour diminuer le nombre d'appels en direction de leurs call centers. Deuxième possibilité : une communauté plus "marketing" dont les discussions tournent autour des usages et des aspirations. Idées, inspirations et retours d'expérience composent le flux des conversations. Beauty Talk de Sephora aux Etats-Unis (et son pendant We are Sephora, en France), ou Selon vous, lancé par l'enseigne Leroy Merlin, en 2013 (voir encadré), font figure de modèles dans cette catégorie. Enfin, la communauté de co-création ambitionne d'imaginer avec la marque ce que pourrait être la prochaine génération de produits ou de services, ou même de co-concevoir une nouvelle marque.
Pour quoi faire ?
Altruiste, la démarche communautaire ? "La communauté de marque se développe pour que la marque en tire des bénéfices concrets et mesurables", rappelle Arnaud Lerondeau (Lithium). Acquérir de nouveaux clients, augmenter la fréquence d'achat, ainsi que la fidélité à la marque, sont bien sûr des objectifs centraux, mais ce ne sont pas les seuls. Ainsi, grâce aux communautés d'entraide, les opérateurs téléphoniques ou les banques aspirent à générer un maximum de déflection d'appels (appels évités) : les questions résolues par la communauté - "parfois plus de 90 % d'entre elles", argue le spécialiste de Lithium - ne tombent plus dans les oreilles du call center ou dans la boîte mail du service client. L'économie en moyens humains apparaît ici comme une évidence.
Autre intention ? Recueillir des feedbacks, "problèmes ou propositions d'amélioration, pour faire évoluer la marque ?", explique Gilles Reeb, cofondateur et directeur des stratégies de l'agence Uzful. "Le marketing communautaire sert aussi à tester des idées, évaluer une campagne de communication ou un nouveau service, sur un panel plus grand." À l'instar de Sony Ericsson qui, dès 2010, a utilisé le potentiel de sa communauté pour cocréer le nom de son smartphone Xperia Kyno. Résultat : plus de 600 participations, et la génération d'earned média, sur les blogs spécialisés notamment. "
Le contenu émane de nombreux utilisateurs, l'effet produit sur le référencement est donc très important", ajoute Arnaud Lerondeau. Et les bénéfices suivent : Migros, conglomérat d'entreprises suisses actives dans la grande distribution, affiche ainsi quelque 40 millions de francs suisses (près de 37 millions d'euros) de chiffre d'affaires générés grâce à sa communauté de marque, en août 2014. Enfin, il ne faudrait pas oublier le volet data, tant les données récoltées en ligne - analyse des verbatims, par exemple - améliorent la connaissance client.
Découvrez d'autres bonnes pratiques pour mettre en oeuvre sa communauté de marque, ici.
Quelques astuces
- Faire appel à un panel
Le conseil : démarrer sa plateforme privée et faire appel à un panel d'utilisateurs afin de vérifier que la marque est en phase avec les attentes des individus. De quoi favoriser l'accélération du développement de la communauté de marque. - Chouchouter sa communauté
Les consommateurs engagés sont aussi les plus exigeants ! C'est avec eux que naissent et se désamorcent les problèmes. Pour gérer efficacement la crise, les écouter est primordial.
Coût de la solution technique + conseils : de 400 000 à 500 000 euros
Durée : 3 ans pour constituer une communauté
LIRE LA SUITE EN PAGE 2 : Comment faire vivre sa communauté
En ligne ou sur les réseaux sociaux ?
Une fois la communauté sélectionnée, se pose la question du lieu d'animation de celle-ci. Il est bon de le rappeler : Facebook ou Twitter ne sont pas forcément la panacée. "Ce n'est pas parce qu'il est facile de recruter sur les réseaux sociaux que l'on engage les individus sur le long terme", commente Caroline Faillet (Bolero). "La vraie communauté est celle qui existe au sein de la marque, sur une plateforme communautaire associée à son site Web", indique Arnaud Lerondeau. Intégrer la communauté à son giron offre à la marque la possibilité de se différencier, d'incorporer les datas de ses clients et de tirer infiniment mieux parti des prises de parole qu'elle ne pourrait le faire via les réseaux sociaux. "Les réseaux sociaux correspondent davantage à un outil de push de contenus et d'audience", relève Arnaud Lerondeau. Gilles Reeb nuance : "C'est avant tout la communauté qui impose ses règles et le lieu des échanges. À la marque de s'y adapter !"
Le conseil : avant de lancer sa communauté de marque, il faut identifier où l'on parle de soi - forum ou réseau social, par exemple. Ainsi, beaucoup de marques ont fait l'erreur d'ouvrir une page sur Facebook, sans même savoir si leur présence était légitime. Pour résumer, l'alternative est de laisser la communauté dans son "habitat" naturel et de choisir d'y faire contribuer son community manager ; ou bien de chercher à sortir la communauté de son espace habituel pour la canaliser vers un espace officiel de la marque. Pour certaines marques, comme Isover (isolation pour la maison), qui n'ont l'occasion de vendre, en moyenne, leurs produits que deux fois dans la vie d'un particulier, il est plus pertinent et rentable d'être visible sur les forums dédiés au bâtiment que de créer une page Facebook.
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Comment la faire vivre ?
Diversité des contenus publiés ou maîtrise du langage "technique" font partie des incontournables de la fédération d'une communauté. La règle : créer des temps forts où la marque anime la communauté montre qu'elle connaît ses "ambassadeurs" et les récompense. Pour produire de l'émulation, la gamification doit être utilisée ; une gamification élaborée et variée, jouant sur plusieurs axes, temporels en particulier. Ainsi, les meilleurs éléments se voient distingués, valorisés et récompensés par des badges, par exemple, mais aussi par des droits supplémentaires, ce qui crée de la reconnaissance par rapport à la marque. Attention, la rémunération est une erreur !
Autre faux pas : l'interventionnisme. L'erreur serait de croire que la communauté créée par la marque lui appartient. Cette dernière doit, en réalité, laisser les membres interagir entre eux, en intervenant le moins possible dans les discussions. En ne lâchant pas de lest sur la communication, les entreprises mettent en oeuvre une stratégie contre-productive.
Ne pas se lancer, si...
Inutile d'initier une démarche de communauté de marque sans une organisation humaine adéquate. Si l'entreprise fait appel à une agence, cette dernière doit être connectée à tous les services de la société, dans une logique de transparence, afin de partager les valeurs de l'entreprise. La réussite de la stratégie communautaire s'explique aussi par la présence d'un community manager dédié à la plateforme, ce qu'oublient trop souvent les marques. Le poste est pourtant central, car il participe à la transformation de l'entreprise engagée dans une stratégie digitale. "Le community manager doit être le véritable stratège communautaire à tous les niveaux de l'entreprise", conclut Arnaud Lerondeau. Enfin, il ne faut pas croire que la fédération d'une communauté aille vite : trois ans sont nécessaires pour constituer une communauté pérenne. Les managers doivent avoir conscience que c'est un investissement à long terme.
Leroy Merlin, l'un des premiers retailers à avoir fédéré sa communauté de marque sur un forum, il y a dix ans, passe à la vitesse supérieure et rénove "Selon Vous", sa plateforme communautaire lancée en 2013. La communauté est morte, vive "La Communauté Leroy Merlin" ! "Nous sommes passés d'un forum d'entraide à une communauté d'intérêt et de partage de passions", explique Valérie Legat, directrice de l'agence Business Lab, qui gère l'aspect communautaire et digital du géant du bricolage et de l'aménagement de la maison depuis 8 ans.
Riche de 120 000 membres (octobre 2015), la communauté, intégrée à l'écosystème de la marque, est régulièrement sollicitée pour faire évoluer l'offre de l'enseigne, ou pour partager ses bonnes idées "déco". "L'enjeu, pour la marque, est d'adresser l'ensemble des individus qui ont un projet d'aménagement de leurs habitations et être dans le top of mind. Mais, aussi, de simplifier la vie des consommateurs, et ce, sans objectif de ventes", résume Valérie Legat.
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