Les photos sur Internet, vecteur central du "marketing de soi"
Publication des photos sur Internet : Comment partager sans se sur-exposer ? L'étude CNIL/TNS Sofres révèle le besoin des internautes de se mettre en avant et l'ambivalence des comportements et des perceptions, ainsi que des pratiques très différentes selon les âges.
Je m'abonneChaque jour plus de 300 millions de photos sont partagées sur les réseaux sociaux. Au moment où les appareils photos deviennent connectés, où les applications photos sur mobile facilitent le partage, les photos et les vidéos constituent le cœur d'activité du Web social. Quels sont les comportements, les perceptions, les stratégies des internautes en termes de partage et d'identification des photos sur Internet ? Quelle maîtrise ont-ils des outils qui permettent d'en contrôler la visibilité et la sécurité ?
La CNIL a demandé à TNS Sofres de mener une étude (*) auprès des internautes afin de comprendre quelle place occupent aujourd'hui les photos dans la vie numérique. Cette étude révèle une ambivalence des comportements et des perceptions, ainsi que des pratiques très différentes selon les âges. Enfin, elle souligne une demande sociale forte pour la simplification des paramètres de confidentialité.
Principaux enseignements
1. Les photos, vecteur central du "marketing de soi "
• 58% des internautes déclarent publier des photos sur des sites, blogs ou réseaux sociaux. Ce chiffre atteint 86% chez les 18-24 ans.
• Plus de la moitié des internautes (54%) prennent des photos d'abord dans le but de les publier.
• Plus de 40% des internautes avouent rechercher des photos d'eux ou d'autres personnes via un moteur de recherche, par curiosité ou avant un rendez-vous par exemple.
Près de 60% chez les 18-24 ans.
• 68% déclarent demander l'avis des personnes avant de les identifier mais seulement 34% le font systématiquement. L'identification de personnes semble surtout un moyen d'attirer l'attention sur ses photos publiées, d'en accroitre la notoriété.
• 41% des internautes taguent leurs photos et 50% des internautes actifs sur les réseaux sociaux disent avoir été identifiés sur une photo. Ces pratiques sont particulièrement développées chez les 18-24 ans avec 77% qui taguent et 89% qui ont déjà été tagués.
• En ce qui concerne la reconnaissance faciale, moins de 15% des internautes disent l'utiliser mais déjà 27% des 18-24 ans y recourent. Cependant, cet outil semble déjà susciter des craintes : 41% des internautes le trouvent gênant tandis que 26% le trouvent pratique.
2. Des comportements ambivalents : les internautes partagés entre le respect de l'image de l'autre et l'envie de diffuser
• 74% des internautes déclarent demander l'avis des personnes photographiées avant de publier leur photo mais seuls 44% le font systématiquement. D'ailleurs, lorsqu'on les interroge sur le type de photos qu'il ne faut pas publier sur Internet, seuls 8% citent celles où apparaissent des personnes qui n'ont pas donné leur accord.
• 88% des internautes pensent que toutes les photos ne peuvent pas être publiées mais 25% ont déjà publié une photo pour se moquer gentiment d'une personne, un chiffre qui atteint 40% chez les 18-24 ans. Au final : 43% des internautes disent avoir déjà été gênés par une photo d'eux sur Internet. Ce taux atteint 61% pour les 18-24 ans. Et, pour 27% d'entre eux, la publication de photos a déjà eu des impacts négatifs sur leur vie personnelle.
• 80% des internautes estiment que les photos resteront sur Internet. 66% pensent tout de même les supprimer plus tard. 73% estiment que cela sera difficile.
3. Paramètres de visibilité : un besoin de contrôler l'accès à ses photos mais des outils trop complexes
• 62% des internautes qui publient des photos disent contrôler avec soin les paramètres de visibilité et 66% disent restreindre l'accès à leurs photos pour certaines personnes (connaissances, membres de la famille...).
Pour autant, le doute est permis sur la maîtrise réelle de ces paramètres :
• Seuls 31% déclarent bien connaître ces paramètres,
• 38% seulement déclarent savoir exactement qui a accès aux photos ou vidéos publiées d'eux sur Internet,
• 60% pensent que les paramètres ne leur procurent pas le niveau de confidentialité souhaité.
4. Une demande de sécurité et de transparence
• 73% des internautes s'inquiètent que d'autres personnes puissent utiliser leurs photos ou vidéos.
• 75% éprouvent le besoin de mieux protéger leurs photos publiées sur Internet.
Les internautes souhaitent des paramètres plus visibles et plus faciles à utiliser ainsi que des conseils et des informations pour leur expliquer les bonnes pratiques.
5. Trois générations se distinguent avec des pratiques et des besoins différents
• 13-17 ans : le désir de s'exposer et de partager avec ses amis
Très actifs sur les réseaux sociaux, ils vont principalement publier des photos de leurs amis et d'eux-mêmes. Très préoccupés par leur image sur Internet, ils essaient prudemment de contrôler l'accès à leurs photos mais ne connaissent pas encore toutes les possibilités.
• 18-24 ans : la liberté de s'exprimer avant tout
Ce sont ceux qui jouent le plus avec le pouvoir de communication des photos : la liberté de publier et de rendre accessible ou non leurs photos prime sur le reste. Ils pensent maîtriser les outils à leur disposition. Pourtant, ils ont majoritairement déjà été gênés par une photo d'eux publiée et près d'1/3 disent même qu'une photo d'eux a déjà eu un impact négatif sur leur vie personnelle.
• 51 ans et plus : une exposition moindre mais un manque de maîtrise des paramètres
Les internautes les plus âgés publient des photos plus classiques, dans l'esprit de l'album qu'on partage en famille : des photos de lieux de vacances et de paysages. Le risque réside donc moins dans la nature des photos publiées que dans le manque de maitrise des outils qui sont peu connus. Ils disent agir une fois les photos publiées au lieu de contrôler avec soin avant la publication.
(*) Etude réalisée par TNS Sofres pour la CNIL. Les interviews ont été effectuées par Internet du 13 au 20 novembre 2012, sur un échantillon national de 1 554 personnes âgées de 13 ans et plus.