[Tribune Libre] La premiumisation ou pourquoi les marques montent-elles en gamme ?
Face à l'essor des marques de distributeur, les marques nationales ont le choix entre deux stratégies opposées : participer à la course aux prix bas ou assumer un positionnement plus qualitatif. L'enjeu pour les marques ? Premiumiser pour créer de la valeur.
Face à un risque de nivellement par le bas, de plus en plus de marques décident de faire la différence 'par le haut' en développant des produits dont la valeur ajoutée légitime un prix plus élevé. Cette stratégie, nommée " premiumisation ", se traduit la plupart du temps par le développement d'une gamme complémentaire à l'offre coeur de marché, proposant des recettes plus raffinées ou un packaging plus spécifique.
Pour une marque, la premiumisation revêt donc un enjeu à la fois tactique et d'image. Cela lui permet de contourner habilement la problématique du prix, mais également de gagner en statut en réaffirmant sa posture de référent. Lancer une offre plus qualitative c'est prouver sa capacité à challenger sa catégorie en proposant quelque chose d'unique et d'inégalable.
Conso-thérapie
La crise a induit une demande pour des offres capables de ré-enchanter un quotidien que beaucoup perçoivent comme morose voir anxiogène. Les consommateurs se tournent alors vers de 'petits luxes' : des produits de qualité supérieure, un peu chers en soi, mais qui demeurent accessibles au plus grand nombre. Un joli dessert, un jambon d'exception, un gel douche à la composition originale... autant de petites envies que l'on a les moyens de s'accorder pour compenser la sinistrose ambiante.
Parce que ce que les gens achètent, au-delà d'un produit, c'est aussi la promesse d'un moment de plaisir, d'une petite parenthèse enchantée, d'une expérience à part qui casse la routine. A l'heure de la conso-thérapie, la valeur ajoutée des produits est aussi dans l'émotion qu'ils procurent.
Culinarisation
Dans l'alimentaire, un autre phénomène a clairement participé au développement d'une offre plus premium : la multiplication tous azimuts des émissions de TV consacrées à la cuisine. Cette 'culinarisation' de la société exige désormais de chacun qu'il se préoccupe davantage de ce qu'il mange, en privilégiant bien entendu les produits de qualité. Et en linéaires, plus aucune catégorie n'échappe à cette grande mouvance : de la vinaigrette au yaourt en passant par la soupe... tous les produits, même les plus basiques, bénéficient de cet engouement pour le bien-manger. D'ailleurs, les marques ne s'y sont pas trompées et s'associent de plus en plus souvent à des chefs célèbres pour réveiller leurs classiques.
Un exercice de style auquel s'est récemment prêté Herta en lançant deux références de son célèbre Tendre Croque réinventé par le chef Serge Vieira. L'opération est un succès et deux nouvelles variétés sont attendues prochainement.
La révélation par le packaging
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Pour être crédible et révéler aux consommateurs la valeur-ajoutée de son offre premium, la marque doit bien entendu créer une charte packaging spécifique. Les choix coloriels se font alors plus tranchés, avec une palette généralement plus dense. Le registre typographique est plus cosmétique et le stylisme épuré. On abandonne donc les démarches trop narratives au profit d'une approche plus stylistique, qui esthétise le produit.
Par ailleurs, le contenant est travaillé comme un véritable écrin. On joue sur les matières (un effet soft touch, un contraste mat/brillant par exemple), on ose les touches d'or ou d'argent à chaud, on s'approprie des registres de formes plus distingués, pour renforcer la perception d'exceptionnalité... Bref, le Beau se met au service du Bon pour une expérience inoubliable.
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