N'ayez plus peur des études qualitatives online !
Si le questionnaire online avec son bouton "page suivante" a gagné ses lettres de noblesse, les études qualitatives online semblent mettre plus de temps à s'imposer.
C’est à Manhattan que commence cette histoire.
Je travaille alors dans la "Silicon Alley" au sein de l’équipe marketing d’une "Dot Com" qui va bientôt imploser avec le reste de l’allée, mais ça nous ne le savons pas encore…
En ce début d’an 2000 tout ce qui se fait sur Internet constitue forcément la panacée aux outils du monde d’hier. Dans notre "Startup" les études marketing se font dorénavant exclusivement online.
Nous organisons nos premiers groupes de discussion en ligne.
Des internautes éparpillés aux quatre coins du pays répondent en direct aux questions de notre modérateur sur l’ergonomie de la plateforme e-commerce qu’ils viennent d’essayer. Clients, nous avons les yeux rivés sur les réponses qui apparaissent au fur et à mesure. Nous abreuvons le modérateur de questions : "Que pensent-ils du service? Que faudrait-il faire pour qu’ils finissent par nous passer une commande ?...".
L’éclatement de la bulle régla définitivement ces questions et clé fut mise sous la porte. Toute approche online allait devenir suspecte pendant de nombreuses années…
L’expérience des groupes avaient été néanmoins utile. Nous étions parfois restés sur notre faim : il eût été intéressant d’approfondir certaines questions ou de soumettre aux participants des évolutions basées sur leurs retours d’expérience.
Ce qui nous avait manqué à l’époque c’était un autre outil : le bulletin board (bien que contemporain du groupe en ligne).
Ce dernier apporte deux dimensions additionnelles :
- Une dimension temporelle
Il s’agit d’un forum de discussion modéré sur la durée : de trois jours à plusieurs semaines.
- Une dimension individuelle
On peut dialoguer avec l’ensemble des membres mais aussi s’adresser directement à un participant ou encore lui présenter les réponses du groupe seulement après qu’il ait répondu.
Etonnamment, après plus de dix ans d’existence, les bulletin boards restent méconnus de bien des clients et professionnels français des études. Parfois suspects aux yeux de certains qui font obligatoirement rimer qualitatif avec rencontre physique. Pourtant, il s’agit d’une approche qui a fait ses preuves, parfois la seule porte d’entrée vers des cibles ou sujets difficiles.
Du point de vue de l’observation ethnographique la méthode n’est pas dénuée d’intérêt. Le participant est dans son contexte naturel sans intrusion extérieure, moins sensible à la pression sociale. Ses commentaires, photographies, vidéo-reportages, carnets de bord en sont souvent plus riches et plus libres.
Bien évidemment, un outil comme le bulletin-board ne peut être considéré comme un substitut systématique à des entretiens ou groupes.
Particulièrement adéquat pour une restitution d’expérience ou une interaction évolutive, il est en revanche moins adapté à des sujets nécessitant une dynamique collective ou interpersonnelle.
La bonne nouvelle pour les experts du qualitatif n’ayant toujours pas franchi le pas du online, est que leur expertise, méthode et sérieux restent indispensables à chacune des étapes. Ces "nouveaux" outils ne font qu’apporter un espace supplémentaire d’expression.
Alors entre le qualitatif 100% en ligne des premiers entreprenautes et le qualitatif 100% physique de quelques conservateurs il doit bien y avoir un juste milieu ?