DDB New York, la vérité comme insight!
Figure de proue de la révolution publicitaire des années soixante et agence historique de Volkswagen, Dane Doyle Bernbach New York continue de s'appuyer sur l'héritage publicitaire de son "B".
Je m'abonneLa Seconde Guerre mondiale terminée et le Troisième Reich disparu, que faire de la "voiture du peuple" imaginée sous le régime nazi, cette Coccinelle dont l'aspect et la taille ne séduisent personne ? Enfin, personne avant son lancement sur le sol américain notamment et l'annonce presse de 1959 devenue un cas d'école : "Lemon", soit "échec" en argot. Point de départ de l'identité de marque de Volkswagen, cette campagne a été imaginée par le publicitaire juif William Bernbach, et lancera l'agence DDB New York.
Créée dix ans plus tôt dans le quartier de Manhattan, Doyle Dane Bernbach New York (du nom de ses trois fondateurs) a incontestablement participé à la révolution des années soixante qui a transformé la réclame d'antan en publicité moderne, notamment grâce à l'essor du marketing et le développement de la télévision.
Si le réseau DDB Worldwide compte aujourd'hui 200 bureaux répartis autour du globe, " le flagship, la maison spirituelle de DDB demeure à New York ", rappelle Chris Brown, président et CEO de l'agence du 437 Madison Avenue. Les locaux ont en effet abrité durant 33 ans l'un de ses fondateurs, Bill Bernbach. Marcher dans les traces de celui qui fait partie du prestigieux et très fermé Advertising Hall of Fame " doit être un challenge au quotidien ", imagine Jean-Luc Bravi, président de l'antenne française DDB Paris. Ce n'est d'ailleurs pas un hasard si le plan stratégique de l'entreprise porte le nom de "Lemon 2020" : en revenant à ses sources, à savoir les enseignements de Bill Bernbach, le réseau de communication entend "réinterpréter la révolution créative" et ainsi peut-être retrouver de sa superbe, DDB ayant dû faire face à une concurrence de plus en plus redoutable.
S'il est cité à plusieurs reprises dans la série Mad Men qui dépeint l'industrie publicitaire new-yorkaise des années soixante, le publicitaire était pourtant, selon Jean-Luc Bravi qui n'a " malheureusement pas eu la chance de le connaître ", l'antithèse du héros, Don Draper : " Il avait beau être considéré comme un gourou de la publicité, et l'être encore aujourd'hui, c'était quelqu'un de très humble. " Un statut d'icône acquis grâce à une vision du métier et à un style qui tranchent avec la réclame de l'époque.
Bill Bernbach, back to consumer
Alors qu'outre-Atlantique, le Britannique David Ogilvy (fondateur de l'agence éponyme) déclarait " le consommateur n'est pas stupide, c'est votre femme ", Bill Bernbach a aussi fait sienne une nouvelle vision du consommateur. " Bernbach croyait ardemment que la bonne publicité ne pouvait exister qu'en engageant et en traitant les gens avec respect ", détaille Chris Brown. Le style DDB ne repose donc ni sur des artifices publicitaires ni sur des discours fallacieux mais sur " une vérité qui se trouve dans le produit ", explique le président de DDB Paris.
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C'est ainsi qu'en 1959 Volkswagen publie une annonce presse figurant uniquement sa Coccinelle et la légende "Think small", sacrée par Advertising Age meilleure campagne du XXe siècle. Le même Volkswagen qui, embarrassé face à la révélation du "diesel gate" en 2015, a choisi de supprimer sa signature de marque "Das auto" afin de faire profil bas. " Selon Bernbach, rien n'est aussi puissant qu'un insight issu de la nature humaine ", complète Chris Brown. Le style DDB est ainsi " profondément humain et émotionnel ", d'après les termes du président de l'antenne française. Le rôle central de l'humain se confirme également dans l'organisation interne, comme le rapporte Stuart Hazlewood, directeur de la stratégie de DDB New York citant Bill Bernbach : " Nous avons besoin de grands talents pour promouvoir l'activité de nos clients. Mais ils doivent également être gentils. La vie est trop courte pour travailler avec des bâtards. "
DDB, la force de l'insight
Malgré un ton franc voire abrupt, le style de DDB s'inscrit dans le courant du "soft-sell" en opposition aux ressorts grossiers de la réclame. C'est ainsi que dans les années soixante, l'entreprise de location de véhicules Avis revendique "We try harder" pour concurrencer le leader du marché, Hertz. " Bill Bernbach était persuadé que la créativité était la force la plus puissante d'une entreprise ", expose le président actuel de DDB New York.
Pour cela, le publicitaire a repensé l'organisation du travail en agence, notamment : " Pour la première fois dans l'histoire de l'industrie publicitaire, il a fait travailler ensemble concepteurs-rédacteurs et directeurs artistiques ", se remémore Stuart Hazlewood, un tandem qui fonctionne encore aujourd'hui. De même, si le poste de planneur stratégique a été créé par l'agence JWT, ce métier revêt un rôle primordial au sein du réseau DDB.
À Paris, l'agence compte ainsi une vingtaine de ces profils " qui vont chaque jour à la rencontre du consommateur afin de dénicher des insights marquants ", présente Jean-Luc Bravi. Ces insights qui servent de socle aux spots télévisés, son format de prédilection, bien que DDB " opère aujourd'hui à l'intersection de la créativité, de la data et de la technologie, à l'image du paysage de la communication dans lequel nous vivons ", détaille Icaro Doria, directeur de la création de DDB New York.
En 2016, l'agence s'est par exemple essayée à l'animation dans un spot en stop-motion pour le Wildlife Conservation Film Festival et a conçu la plateforme digitale #CoolerInCotton pour promouvoir le port de vêtements en coton l'été.
DDB Paris
En 1969, Bill Bernbach missionne Bernard Brochand (fondateur de Sup de Pub, président du PSG mais aussi maire de Cannes) et Alain Godard (scénariste de publicité et de cinéma, président d'Havas Dentsu Marsteller) pour ouvrir une antenne parisienne afin de satisfaire la volonté de gros clients de l'agence comme American Airlines
ou Volkswagen de créer un ancrage européen afin de construire un réseau mondial. Aujourd'hui présidée par Jean-Luc Bravi, DDB Paris est la troisième agence du réseau avec ses 400 salariés et ses filiales DDB Luxe, Score DDB, Blackbird et Digital University. Spécialisée dans la communication 360, elle a pour principaux budgets Volkswagen, McDonald's sur le digital, L'Équipe ou encore Givenchy.