Un terrain toujours plus fiable
Entre 40 % et plus de 60 % du budget d'une étude sont consacrés au recueil de l'information. Sachant que, de la pertinence de cette étude dépendront des prises de décision engageant l'avenir d'une entreprise, on mesure à quel point le terrain peut être stratégique. Pour les clients des études, mais aussi pour les prestataires études qui doivent assurer la qualité de la production. Les nouvelles technologies permettent une professionnalisation toujours accrue d'un métier difficile et qui demande une expertise particulière.
Sous la poussée des grands donneurs d'ordre, à l'exemple de France Télécom
ou d'EDF/GDF, les sociétés d'études et les sociétés de terrain n'ont eu de
cesse, depuis des années, d'améliorer la qualité des méthodes de collecte des
données existantes tout en réduisant les délais. L'apport de l'informatique,
désormais incontournable, a fortement contribué à cette évolution, facilitant
le travail de l'enquêteur, permettant de meilleurs contrôles, raccourcissant,
là où c'était possible et de façon efficace, les temps de transfert de
l'information. « Mais tout cela a un coût », fait remarquer Stéphane Truchi,
directeur général d'Ipsos France. Plus d'interviews téléphoniques sans CATI
aujourd'hui. Le face à face fait désormais de plus en plus souvent appel au
CAPI (voire au CAPI multimédia). Internet a donné naissance au CAWI. Une
révolution technologique qui a demandé de la part des instituts de très lourds
investissements en équipement (matériel et logiciels) et la création de
nouvelles fonctions (directeur informatique, programmeur de questionnaires CAPI
ou CATI, responsable de la maintenance, hot line enquêteurs...). Chez Research
International France, la chaîne de production appelée en interne "Operation" et
qui regroupe le terrain et l'informatique comprend 30 personnes à plein temps.
Des investissements conséquents
« La qualité d'un
terrain passe par des investissements en équipement mais également en personnes
», constate effectivement Jean Oddou, directeur général de CSA TMO. Ce groupe a
récemment créé la fonction de "directeur de la production" dont l'une des
missions est d'améliorer les process. Depuis 2002, toutes les forces
informatiques du groupe Ipsos sont regroupées chez Ipsos Interview, structure
qui emploie 70 salariés et qui a développé une task force Informatique et
Nouvelles Technologies. Chez TNS, quel que soit le mode de recueil, la rigueur
doit être au rendez-vous : équipe dédiée "plan de sondages", direction
scientifique qui va d'ailleurs se muscler, direction de la qualité. « Des
postes ont été transférés, explique Marie-Jeanne Petit, P-dg d'Action Hexagone,
qui a fait passer son terrain face à face en CAPI dès 1995 (305 000 euros
d'investissement). Nous passons désormais moins de temps sur les expéditions.
Mais, en revanche, nous avons une personne qui s'occupe à plein temps des
transmissions avec les enquêteurs. Passer au CAPI et au CATI nous a obligés à
anticiper la totalité d'une étude. » En 1999, Catherine Delannoy a investi 400
000 euros pour créer 200 postes CAPI (logiciel compris). Le Terrain a investi
près de 460 000 euros en cinq ans en bâtiment, informatique, matériels. « Et
nous allons continuer à ce rythme, indique Mustapha Smail, son directeur
général. Compte tenu de notre parc CATI, nous sommes obligés d'investir
continuellement, pour renouveler nos matériels, développer nos outils. » Action
Hexagone va faire passer cette année tout son parc CAPI en CAPI sous Windows,
ce qui représente un investissement de 100 euros par poste. « Mais cela nous
permettra de faire du multimédia », commente Marie-Jeanne Petit. De son côté,
Research International va renouveler son parc CAPI. En 2001, Ipsos a fait
passer tous ses CAPI en CAPI multimédia. « Toutes nos études omnibus CAPI se
font désormais avec des CAPI multimédias », explique Stéphane Truchi. CSA TMO
qui, pour son terrain téléphonique CATI, a investi l'an dernier dans un centre
d'appels à Nice, attend que le coût des équipements baisse pour équiper tout
son terrain face à face en CAPI.
Des réflexions à l'échelle mondiale
Autre source d'investissements terrain :
l'internationalisation croissante des études. « En dix ans, note Stéphane
Truchi, nous sommes passés d'une dimension nationale à une dimension
internationale, avec une exigence d'homogénéité : pouvoir travailler partout
avec les mêmes conditions d'enquête ; ce qui demande beaucoup
d'investissements, en systèmes et logiciels. La mise en réseau virtuel des
terrains locaux est une évolution fondamentale. Nous pouvons traiter 5 000 cas
en trois jours sur trois pays avec des conditions de réalisation homogènes. »
Research International est en train de définir la standardisation de ses
méthodes de travail et outils, ce qui passe par l'utilisation des mêmes
logiciels partout en Europe. « Nous avons la volonté de réfléchir à l'échelle
mondiale », constate Nathalie Ledur, directeur adjoint Opérations Europe de
Research International. Le groupe vient de se doter d'une organisation terrain
européenne, avec un directeur basé à Londres et un directeur adjoint à
Bruxelles. « Cela nous permet d'avoir plus de moyens, de développer certaines
expertises, de standardiser la collecte de l'information tout en respectant les
spécificités locales », souligne Raphaël Alonso, directeur terrain. Désormais,
les centres CATI de Grande-Bretagne, de Bruxelles et de France peuvent
travailler dans les mêmes conditions. « Les structures doivent pouvoir
fonctionner ensemble et venir en renfort si un terrain national est surchargé
», souligne Chantal André, directeur général adjoint de RI France. Mais cela
sous-entend non seulement des outils de gestion des études communs, mais
également des outils de gestion de paie harmonisés. « Il faut avoir des
systèmes qui permettent que des fichiers d'enquêteurs français cohabitent avec
des fichiers d'enquêteurs belges », ajoute Chantal André. Dans le cadre du
développement par croissance externe du groupe TNS, « il a fallu assurer la
diversité des choix technologiques, remarque Yannick Carriou, directeur général
adjoint de TNS France. La date de renouvellement des matériels nous permet
d'uniformiser nos méthodes et nos outils. » Les modes de collecte les plus
récents profitant le plus rapidement de la standardisation, les investissements
dans la plate-forme CAWI du groupe ont été communs à l'ensemble des sociétés.
D'autant que les grands groupes peuvent se permettre de créer leurs propres
outils. Ce fut le cas, par exemple, pour l'outil de gestion du Métascope en
access panel. « Il faut pouvoir diminuer les coûts d'un terrain, sans diminuer
la qualité », souligne Helen Zeitoun, directeur général de GfK Sofema.
Les atouts des réseaux internationaux
La puissance a
cependant ses avantages. Plus un parc est important, mieux on négocie avec les
fournisseurs de matériel. L'effet de groupe joue également comme levier
d'innovation. La multiplicité des expériences, l'échange d'information permet
et donne envie d'expérimenter. « Cela nous apporte une posture préventive par
rapport à ce qui se passe », note Yannick Carriou. Le rachat par Ipsos de
sociétés américaines lui a donné une longueur d'avance sur les études par
Internet et avec access panel. La difficulté du terrain dans un pays comme les
Pays-Bas a pour conséquence la recherche de solutions de remplacement
(utilisation d'access panel, par exemple), qui a donné des idées à d'autres
filiales de TNS. Au Japon, RI a réalisé la première étude sur Palm avec
présentation de visuels et les Hollandais ont fait une étude en utilisant le
SMS. « Nous avons la chance d'avoir un réseau mondial pour tester les
technologies », souligne Nathalie Ledur. Chez GfK, Helen Zeitoun est en charge
d'un groupe de travail, "Strategy Implementation Schemes", qui travaille sur la
mise en place de process d'optimisation des études par échange. TNS a mis en
place un outil de "workflow" qui a d'ailleurs reçu le Trophée d'Or paneuropéen
2001 décerné par le groupe Giga (cf. page 44). L'attribution d'une norme ISO
(ou Afnor) dans une filiale n'est pas sans répercussion sur les autres
filiales, des process se mettant alors en place et faisant tache d'huile. «
Pour gérer la qualité, on n'a pas trouvé mieux que le formalisme », constate
Yannick Carriou. « La discipline que cela impose ne peut qu'être bénéfique au
réseau, soutient Helen Zeitoun. Il faut considérer que le terrain est un centre
de coût, mais que l'on peut augmenter la productivité. Reste que la qualité a
un coût que l'on ne pourra pas réduire. » Les clients sont-ils prêts à payer ?
Tout dépend du client, tout dépend du type de l'étude et de l'enjeu derrière. «
Ce n'est pas un hasard s'il existe des terrains chers, souligne Helen Zeitoun.
Un terrain cher est un terrain où il y a une vraie volonté de qualité, avec un
vrai encadrement, des process, des contrôles et cela a un prix. » « Fabriquer
du chiffre est facile, mais fabriquer du chiffre fiable demande une vraie
organisation, explique Yannick Carriou. Nous, chez TNS, avons fait le choix
stratégique de la qualité. La réputation d'un terrain se construit aussi sur la
durée. » Conséquence : une segmentation des clients. Avec d'une part, des
annonceurs qui serrent les prix systématiquement et d'autre part, des
annonceurs qui sont prêts à payer pour une qualité faite à la fois de qualité
terrain, de know how et d'accompagnement de l'information. « Les clients qui
exploiteront mieux l'information seront les gagnants », affirme Helen Zeitoun.
« Il faut savoir dire non dans certains cas, quand la pression prix du client
est trop forte, n'hésite pas à dire Chantal André. Tout en étant à l'écoute du
client et en comprenant certaines contraintes. »
Assurer le volume
La viabilité d'un terrain repose sur deux grands
fondamentaux : la rigueur et la permanence. On a vu plus haut qu'il s'agit
d'une préoccupation constante (et coûteuse) des sociétés d'études et de
terrain, « qui demande encore plus de talent et d'expérience dans le cas d'un
terrain face à face, précise Jérôme Sainte Marie, directeur de BVA Opinion.
Gérer à distance des enquêteurs dispersés sur l'ensemble du territoire demande
des procédures lourdes pour assurer le contrôle. » Mais demande également de
fidéliser le réseau d'enquêteurs. Pour cela, il faut lui assurer une régularité
de travail. « La vertu première du volume est de faire tourner le terrain,
d'offrir des volumes d'activité aux enquêteurs susceptibles de les fidéliser et
de gérer la planification des charges », estime Yannick Carriou. Pour cela, il
faut des études récurrentes. L'omnibus est une solution (voir page 59 ), ce qui
explique son développement. L'international en est une autre : les sociétés
d'études "vendant" leur terrain aux autres instituts, pas nécessairement
d'ailleurs de leur groupe, dans le cadre d'une étude internationale. Un exemple
: un quart des études faites par Research International France sont des études
achetées par RI UK ou par RI dans d'autres pays. « Cela permet de rentabiliser
le terrain », explique Chantal André. C'est une partie importante du business
terrain de Démoscopie, qui veut même communiquer sur ce point : « Nous le
faisons parce que les charges terrain ne sont pas constantes dans le temps.
Phone City, la filiale terrain téléphonique de l'Ifop réalise 50 % de son
chiffre d'affaires avec des clients extérieurs, dont la moitié en réception
d'appels. Les panels prioritaires sont une autre façon d'utiliser la base
d'interviewés dont on dispose, à partir d'access panels off ou on line.
Vers un nouveau statut des enquêteurs ?
« Le travail du
"sondeur" est très dépendant du travail des enquêteurs. Il faut être très
attentif à motiver les gens, animer le réseau, leur assurer la régularité de
travail donc de rentrée d'argent à date fixe », confirme Jérôme Sainte Marie. «
Les enquêteurs sont indispensables à la survie des sociétés d'études, fait
remarquer Jean Oddou. La qualité de l'information recueillie les différencie
des consultants ou des agences de publicité. » Réussir la fidélisation des
enquêteurs est aussi une façon de garantir la qualité : un enquêteur assuré
d'une rentrée d'argent régulière n'ira pas la compromettre en se livrant à des
irrégularités... Et permet de rentabiliser les coûts de recrutement et de
formation. « Il faut un vrai management qui exige implication et considération
du terrain et des gens qui le composent », souligne Helen Zeitoun. Pour elle, «
si les directions études des clients se mettaient à la place des enquêteurs,
elles formeraient leurs chargés d'études à ne pas demander des choses
infaisables. » Encore faut-il trouver les enquêteurs, d'autant que les
nouvelles technologies demandent un nouveau profil. L'arrivée des call centers
a, de son côté, fortement réduit le nombre d'individus prêts à travailler comme
enquêteurs téléphoniques, d'autant que certains call centers payent mieux. Pour
Jean Oddou, il y a une inadéquation croissante entre la législation et le
comportement et les attitudes des enquêteurs. Il faudrait dépoussiérer les
relations sociales régissant les enquêteurs, rajeunir les accords contractuels,
« mais sans rigidité ». En France, les enquêteurs sont soumis à des contrats en
CDD à répétition. Il faudrait également réfléchir à d'autres systèmes de
rémunération, de formation. A un vrai statut. Aux Pays-Bas, le métier
d'enquêteur est reconnu ; en Grande-Bretagne, les enquêteurs ont un badge. En
Belgique, une campagne de publicité signée "La profession" a récemment voulu
motiver les gens à répondre aux enquêtes. « Nous avons éclaté nos terrains,
explique Stéphane Truchi. Parce qu'il est de plus en plus difficile de gérer de
façon frontale un grand terrain dans une ville et que cela nous permet d'avoir
des zones de recrutement d'enquêteurs plus variées. Une dispersion d'autant
plus nécessaire que l'on travaille sur des trackings ou en achats mystères. » «
Il existe une vraie difficulté à recruter, constate Mustapha Smail. Pour
recruter 100 personnes, il faut en recevoir 2 000. Notre budget d'annonces de
recrutement est passé de 4 500 euros en 1996 à plus de 18 000 en 2001. »
Offrir une palette de moyens
« Le client doit pouvoir
se voir offrir le meilleur type de contact selon son problème, avec une
garantie de qualité incontournable notamment pour les études de type
barométrique ou de tracking », observe Gérard Bon, responsable des études de
satisfaction chez Orange France. Si le face à face est toujours le mode de
collecte principal de l'information en quanti, le client peut désormais, pour
résoudre sa problématique, choisir entre plusieurs modes de recueil. « Toutes
les techniques peuvent cohabiter, estime Francine Cerf, directeur marketing et
commercial d'Ipsos Observer. Il n'y a pas plus de concurrence entre le
téléphone et le face à face, qu'entre l'omnibus et l'access panel. Tout est une
question de problématique client. » « C'est à l'institut, renchérit Helen
Zeitoun, de choisir, parmi les modes de collecte existants, la réponse
méthodologique la mieux adaptée. C'est le mix de méthodes qui créera la
pertinence de l'information. Un mix qui repose sur la théorie de ce que l'on
devrait faire et la pratique de ce qui va marcher sur le terrain. » « A
l'institut, confirme Olivier Bauby, directeur général adjoint de l'Ifop, de
proposer la méthodologie et le mode de recueil en phase avec les contraintes de
coût et de timing. » Et Yannick Carriou d'ajouter : « Notre stratégie est
d'avoir à notre disposition une palette de modes de recueil et même d'investir
en permanence sur de nouveaux modes de recueil ou des combinaisons
d'interrogation. Etre au top dans tous les moyens de collecte nous donne la
liberté de choisir la méthode la mieux adaptée. » Ainsi, pour lui, le prochain
grand pas en B to B sera le CAPI et le CAWI intégrés, ce qui revient à gérer
les deux échantillons simultanément y compris la gestion des quotas, mais ce
qui demande le développement d'outils spécifiques. « En B to B, le challenge
n'est pas le mode de collecte, mais plutôt d'inciter les gens à répondre. » Par
ailleurs, la baisse des coûts rend plus abordable l'utilisation des enquêtes
par ordinateurs à écran tactile (GfK, Ipsos). Les enquêtes au moyen de Palm
Pilot commencent (IOD, Taylor Nelson Sofres, Audirep Terrain, Research
International), avec une limite, l'ergonomie de l'écran, qui oblige à des
questionnaires courts et fermés. Les portables itinérants se font plus nombreux
(comme chez Louis Harris). Ipsos aux Etats-Unis et Market Audit en France
testent des enquêtes par Pocket PC. Des essais d'enquêtes Wap sont en cours.
Taylor Nelson Sofres a développé une réelle expertise d'enquêtes via des
téléphones portables qui demandent de vraies techniques spécifiques
d'échantillonnage. « Il est exact que cela a un coût, admet Yannick Carriou. Il
a fallu faire des investissements pour atteindre une productivité raisonnable
pour interroger des mobiles. » TNS a présenté lors du dernier Semo un nouveau
mode de recueil de l'information par TV interactive. GfK fait également des
interviews via la TV interactive au moyen d'écrans tactiles. L'objectif de Le
Terrain est d'être transversal et de ne pas exclure de méthodes de recueil. «
Le problème, souligne François Laurent, directeur des études marketing de
Thomson Multimédia, est la comparabilité des banques de données quand on passe
d'un système à un autre. » « Le premier avantage des nouvelles techniques de
recueil des données est de contraindre notre profession à se reposer des
questions avant d'en poser, fait remarquer Hugues Cazenave, président d'Opinion
Way. Il y a une nécessité absolue à pratiquer le "research on research" sur
l'outil Internet, mais aussi sur les autres modes traditionnels et de
redécouvrir l'épistémologie des sciences sociales. » Et déjà se profilent à
l'horizon des comportements et usages nouveaux qui risquent de révolutionner la
collecte de données. Face à la difficulté croissante de joindre les clients sur
leur mobile ou même leur fixe, Stetson, pour la méthodologie Scorange de mesure
de la satisfaction de la clientèle Orange, a inversé le sondage et demandé aux
clients de rappeler après leur avoir laissé un message SMS sur leur portable. «
Encore faut-il mettre au point les méthodes et techniques qui rendent la
méthodologie fiable », souligne Jean-Paul Dayan, directeur de Stetson.
L'enquêteur est ici en position d'appel entrant et non d'appel sortant.
Les incentives en question
Une certaine difficulté à
interroger les individus et le besoin de le faire toujours plus rapidement à
moindre coût ont eu pour conséquence la création d'access panels ou de bases de
sondages, off et on line (Ipsos, NFO, RI, Novatris...). Le Métascope de TNS est
passé en lecture optique en 1997 et le groupe travaille à l'amélioration de la
reconnaissance des caractères. NFO Infratest utilise, tout comme Ipsos, l'ATI
(Automated Telephone Interview ou réponse par touche de téléphone). Qui permet
de contacter simultanément, grâce à la reconnaissance digitale, plusieurs
milliers de panélistes, garantissant ainsi une meilleure interactivité. « En
quelques jours, et avec un ratio prix/délai/taille d'échantillon très
attractif, on peut pré-screener jusqu'à 20 000 consommateurs pour isoler un
coeur de cible que l'on pourra, ensuite, interroger par téléphone ou voie
postale, selon la problématique et les contraintes de temps », explique
Olivier-Henry Biabaud, Dga de NFO Infratest France. Ipsos, mais aussi NFO,
s'applique à proposer une offre access panel européenne d'abord, internationale
ensuite. « C'est un marché lourd à porter, constate Stéphane Truchi. Mais on y
croit beaucoup, même si le marché européen est encore un peu frileux. » « C'est
un marché encore émergent, utilisé par un petit nombre de très gros clients »,
renchérit Guillaume Weil, Dg d'Ipsos Access Panels Europe. L'access panel
demande des expertises particulières qui ne sont pas sans rappeler celle
acquise sur le panel postal : le coût de recrutement sur une année s'élève à 10
% du coût du panel, les deux autres tiers étant des coûts de gestion (gestion
de la base de données, outils de software de gestion, communication avec les
panélistes, incentives). Les incentives demandent une bonne connaissance des
répondants : suffisamment attractifs mais pas trop pour ne pas biaiser les
réponses, pas trop coûteux... Ils varient selon les cibles entre des points
cadeaux, des loteries, des cadeaux à obtenir dans un catalogue, etc. Mais
peuvent être aussi une partie de l'information sur l'enquête (notamment en B to
B). Les incentives, données aux personnes répondant on line ou, parfois, en
salle, soulèvent par ailleurs la question de leur impact sur les répondants
futurs. Ainsi, dans les enquêtes de rue, il n'est pas rare d'entendre la
personne interrogée demander à l'enquêteur : « Si je réponds, qu'est-ce que
vous me donnez ? » « Les gens deviennent mercantiles, constate Jean Oddou. Et
il devient de plus en plus difficile de recueillir de l'information sans payer.
» Les instituts essayent de résister, mais la tentation est là. D'ailleurs, aux
Etats-Unis, la tendance est à la rétribution "pour service rendu".
Pas mort, le postal
Quant à Internet, le mode de
collecte on line a progressé de 12,8 % en 2000 par rapport à 1999 (selon Syntec
Etudes Marketing et Opinion) et sûrement davantage en 2001. Les études via
Internet ne représentaient que 0,3 % du chiffre d'affaires études en 2000 et
probablement pas plus de 2 % en 2001. Toutefois, si l'interrogation par
Internet fait désormais partie de la palette des moyens de collecte de
l'information, ce n'est toujours que l'un des moyens. Après l'euphorie de
l'année 2000, les instituts d'études et de terrain ont aujourd'hui une attitude
plus raisonnée sur son utilisation dans la collecte de données. Là encore, tout
dépend de la problématique, de la cible. Marketing Magazine reviendra plus
avant sur le sujet dans son dossier de juin prochain. Une chose est certaine,
Internet est là et bien là. Que devient le postal dans tout cela ? Il n'est pas
mort loin de là, même si certains avaient tendance à vouloir l'enterrer. L'an
dernier, la Sofres a lancé une enquête auprès de 22 millions de clients d'EDF.
« Tout ce qui est nouveau ne vient toujours qu'en complément de ce qui est
existant. Le postal va reprendre », estime Jean Oddou. « Le postal revient, car
on veut de plus en plus expliquer tout ce qui est comportement lourd, constate
Christine Bitsch, directrice des études médias de Taylor Nelson Sofres Secodip.
Nous avons beaucoup travaillé la qualité du questionnaire de l'enquête Simm,
pour créer un document que les panélistes auront plaisir à remplir, générer une
sorte d'interactivité et éviter la lassitude et la banalisation de
l'interrogation. » « Le postal est l'essence même du permission marketing »,
remarque Yannick Carriou.
Le poids du terrain quanti
On peut estimer entre 8 et 10 millions le nombre d'interviews réalisées en France dans le cadre d'études ad hoc quanti par les instituts d'études membres de Syntec Etudes Marketing et Opinion. Nombre auquel il convient d'ajouter les enquêtes effectuées par les sociétés de terrain (Le Terrain, Action Hexagone, Catherine Delannoy & Associés, Marketing Horizon Terrain, Stas Marketing, Territorial Team, Audirep Terrain,...). Les études quantitatives ont représenté 44,1 % du chiffre d'affaires des sociétés d'études membres de Syntec, qui s'est élevé à 600 millions d'euros en 2000. A ce chiffre, il convient d'ajouter les 6,1 % de parts de marché que constituent les omnibus. « Mais, demande Yves Loué, directeur général adjoint de l'Institut français de Démoscopie, combien y a-t-il d'études ad hoc qui utilisent l'omnibus ? » Ce sont les études en salle et celles réalisées par téléphone qui ont connu la plus forte progression (respectivement + 29,8 % et + 12,8 %). Les études via Internet ne représentaient pour cette année-là que 0,3 % du chiffre d'affaires, en progression toutefois de 77 % par rapport à 1999.