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Quand l'affichage flirte avec le hors-médias

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Quand les temps sont durs, ils le sont toujours plus pour les médias classiques que pour le hors-médias. Au moment d'arbitrer, les annonceurs préfèrent d'abord faire pencher la balance vers les moyens susceptibles de leur permettre de créer rapidement du trafic vers leurs produits. Confronté comme les autres à cette situation, l'affichage tous formats accélère depuis quelque temps la cadence pour se rapprocher au plus près de l'acte d'achat et de consommation.

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«Ce n'est pas parce que ça va mal qu'il faut se recroqueviller et jouer les hérissons. »


Aux propos de Claude Duval, directeur général de Dauphin Affichage, on pourrait ajouter que la publicité extérieure est plus que jamais condamnée à faire évoluer ses cadres. Comme l'analyse Jean Minost, directeur de Géopolis, « l'affichage ne fera pas une bonne année. Il subit une baisse qui était prévue mais qui va un peu au-delà des prévisions. Il souffre un peu plus que les autres médias car les afficheurs subissent de plein fouet la loi de l'offre et de la demande et négocient plus que les autres. » La situation n'est pas vraiment nouvelle mais elle va crescendo. « On entend dire que certains réseaux se négocient jusqu'à - 80 %. Il n'y a plus de notion de prix, note Eric Trousset, directeur marketing du pôle investissements publicitaires de TNS Média Intelligence. Nous relevons une évolution positive de 1,2 % à fin juin, quand celle du plurimédia est de 1 %. Mais, comme nous mesurons du brut, c'est une évolution en trompe l'oeil. » Impossible dans ces conditions d'évaluer la réalité exacte de ce média qui génère un chiffre d'affaires de 1,060 milliard d'euros bruts. Toujours en se basant sur des données brutes, le grand format est crédité de 64 % de part de marché à + 0,6 %, le mobilier urbain, où les négociations sont moindres, de 17 % à + 5,3 %, les transports de 18 % à + 0,5 % et les autres secteurs de 2 %, en recul de 5 %. Comme les autres médias, mais peut-être un peu plus, l'affichage subit de plein fouet la concurrence accrue de tous les outils du hors-médias, sortes de valeurs refuges des annonceurs en période de crise. Pour mémoire, et selon la dernière étude France Pub, alors que le total hors-médias progressait en 2001 de 2,89 %, le chiffre d'affaires des cinq grands médias régressait de 4,81 %. Dans les agences d'achat d'espace raisonnent les mêmes leitmotiv, à savoir "Je veux parler directement à mes clients, je veux subir le moins de déperdition possible, etc". Comme le résume Albert Asseraf, directeur général de Carat Expert affichage et médias locaux, « en période de crise, les annonceurs cherchent d'abord les moyens qui vont leur permettre de créer du trafic ». Prime est ainsi donnée aux outils qui ciblent au plus près, ce que n'est pas historiquement l'affichage, mass média par excellence. Mais il est clair que cette définition est en train d'évoluer à grande vitesse.

AU PLUS PRÈS DE L'ACTE D'ACHAT


« L'affichage est peut-être le seul mass média capable de toucher 70 % d'une cible en une semaine même si on peut, ensuite, discuter de la qualité des contacts, et qui, à côté de

cela, peut permettre de faire de la microchirurgie à un instant T comme, par exemple, toucher les concessionnaires automobiles d'une ville de 8 000 habitants via des panneaux situés sur des axes passant près des points de vente », affirme François Morinière, directeur général de Viacom Outdoor. Ce travail sur les outils de maillage a pour vocation de rapprocher le média au plus près de l'acte d'achat, comme le font par définition les outils du hors-médias. Un contexte dans lequel le groupe Clear Channel multiplie les initiatives avec la création de formats et de réseaux ciblés. « Pour ce qui est de Dauphin Affichage, nous nous sommes donné deux angles pour attaquer le hors-médias l'an prochain : un nouveau réseau de 261 produits et la consolidation de Clear Channel Malls », annonce Claude Duval. Le département grand format a ainsi décidé de diminuer son offre nationale, généraliste, et de créer 261 réseaux dits "territoriaux", situés au plus à vingt minutes des lieux de consommation. Il s'agit de petits réseaux de 20 à 40 panneaux que l'annonceur peut additionner librement pour construire sa campagne. « Nous vivons une période basée sur l'utilité de l'euro investi, sourit Claude Duval. Au niveau local notamment, les annonceurs en ont assez d'acheter des réseaux dont ils n'ont pas besoin. Plus largement, le but de ces réseaux territoriaux est soit d'amener les clients dans les centres commerciaux, soit de permettre aux annonceurs de faire de la surpression dans les territoires de consommation. On entre dans le champ de concurrence directe des journaux gratuits et de la distribution toutes boîtes. » Cette concurrence, pour la première fois affirmée de manière aussi forte, est également celle à laquelle s'attaque en partie Clear Channel Malls. Une entité, née l'an dernier pour honorer les contrats signés par Clear Channel avec l'enseigne Carrefour d'une part et Unibail d'autre part, contrats qui donnent au groupe l'autorisation d'implanter des panneaux de 8 m2 et 2 m2 sur les parkings d'hypermarchés et dans les centres commerciaux et centres d'affaires. A la même époque, Viacom Outdoor signait un contrat du même type pour la concession des parkings des hypermarchés de l'enseigne Géant Casino, donnant naissance au réseau Hyperformer. L'un comme l'autre mettent en avant les mêmes données de base, à savoir que 53 % des Français fréquentent des centres commerciaux et galeries marchandes au moins une fois par semaine et que 79 % s'y rendent en voiture. Mieux encore, 60 % des achats effectués dans un centre commercial sont des achats d'impulsion. Dans ce contexte, l'affichage a une nette longueur d'avance par rapport aux autres médias car il est le dernier rencontré avant l'acte d'achat (à 92 % trente minutes avant l'acte d'achat contre 36 % pour la radio, 6 % pour la télévision et 4 % pour la presse). Un net avantage dans la politique de proximité développée par les afficheurs. « Hyperformer est un produit qui intéresse deux sortes d'annonceurs, analyse François Morinière. Les habitués de l'affichage y voient un outil stratégique dans le sens où les parkings génèrent une audience énorme ; et ceux issus de l'univers de la grande consommation, pas forcément captifs de l'affichage, y voient un média de complément et sont intéressés qu'on leur offre un outil qui se situe là où ça se passe, au plus près de la bagarre. »

Du côté de Clear Channel Malls, Vincent Demay, directeur commercial, estime que « (notre) activité est à cheval entre le média et le hors-médias dans le sens où l'annonceur a également la possibilité de lier nos réseaux à une action plus tactique, événementielle. C'est pourquoi nous nous attachons à avoir deux interlocuteurs, l'agence médias et l'annonceur lui-même, ce dernier connaissant parfaitement le planning de ses actions de promo. » Et d'ajouter, « nous cherchons à exploiter le boom des opérations in store en proposant à nos clients de les médiatiser pour en optimiser l'efficacité. Les annonceurs et leurs agences médias doivent progressivement acquérir ce réflexe. » Qui pour l'heure n'est pas acquis. La première opération promotionnelle du genre a été menée au printemps dernier avec l'opérateur téléphonique Télé 2, suivie au mois d'août d'une grosse action Tiscali/Carrefour. Les sorties en vidéo et DVD de Jurassik Park, en mars, et du Seigneur des Anneaux, fin août, ont également donné lieu à un affichage sur les parkings couplés à des mises en avant spécifiques dans le point de vente. « Ce sont des produits dont les ventes se concentrent sur une ou deux semaines, il est important de diffuser au même moment un message fort, juste avant l'acte d'achat, explique Vincent Demay. On peut donc simplement relayer le message promotionnel d'une marque mais aussi utiliser notre dispositif comme un outil de trade-marketing qui aide à la relation commerciale annonceur/distributeur. » Mais les afficheurs prennent bien garde à ne pas s'immiscer plus avant dans la politique publi-promotionnelle de l'enseigne elle-même. Pas question pour eux de passer pour la régie publicitaire de Carrefour ou de Casino. « Nous sommes là pour constituer une cloison entre Carrefour et l'annonceur, pas pour que ce dernier pense que nous sommes un nouvel outil au service des acheteurs de l'enseigne, précise Vincent Demay. Il ne faut d'ailleurs pas oublier que, même si les 150 sites déjà implantés comprennent majoritairement des hypermarchés Carrefour, notre positionnement est d'abord axé sur le potentiel global de consommation des centres commerciaux environnants. » Et François Morinière d'indiquer : « Nous ne voulons surtout pas nous mêler de la politique médias des enseignes. En revanche, nous pouvons proposer aux annonceurs des actions couplées avec celles menées promotionnellement dans le point de vente. L'intérêt est d'offrir une intégration et une ligne conductrice de la création au magasin, ce qui évite toute déperdition du message. »

DES RÉSULTATS MESURÉS


Venant l'un et l'autre de fêter leur premier anniversaire, Clear Channel Malls comme Hyperformer de Viacom Outdoor ont encore fort à faire pour convaincre le marché. Comme le relève Jean-Marc Ohran, directeur général d'Optimédia Territoire, « actuellement, on peut toucher à peu près 25 % de la distribution, mais cela reste 25 % de la distribution ». Les responsables de Clear Channel Malls ont ajouté une pierre importante à leur argumentaire en mettant au point un outil de mesure d'efficacité de leurs campagnes qui analyse le différenciel des ventes entre les magasins affichés et non affichés. L'étude compare les sorties de caisses fournies par Carrefour deux semaines avant, une semaine pendant et deux semaines après la campagne d'affichage pour en mesurer la rémanence. Les premiers éléments fournis portent sur douze produits issus de l'univers de l'hygiène-beauté, de l'épicerie, des alcools et du frais. Il en résulte des résultats globaux de + 13 % pour l'hygiène-beauté, + 16 % pour le frais, + 18 % pour les alcools et + 19 % pour l'épicerie. Ce type de mesure d'efficacité est également proposé par Médiaperformances, pionnier de l'affichage au plus près de l'acte d'achat avec Affichariot. « Nous le proposions depuis quatre-cinq ans à nos clients qui ne le souhaitaient pas systématiquement, raconte Véronique Arnal, directrice marketing du service client. On constate aujourd'hui, que le besoin de mesure d'impact se systématise. » Réalisée avec IRI Secodip, celle-ci est effectuée quatre semaines avant la campagne, deux semaines pendant et quatre semaines après. La moyenne est de 18 % de volumes vendus supplémentaires pendant la campagne et de 8 % après. « Il est clair que l'on construit du réachat. On est bien dans la logique d'un média, pas d'un coup, insiste Véronique Arnal. On ne nous demande d'ailleurs plus que pour des campagnes à 100 % publicitaires et non plus promotionnelles. » L'affichage se dit à même d'emmener les consommateurs du parking au remplissage de leur chariot dans un centre commercial. Avec Médiaparc, filiale de Dauphin Adshel, il se propose aussi, par exemple, de les diriger vers La Samaritaine via la distribution de prospectus dans les parkings qui entourent le grand magasin parisien. Forte de la concession de 620 parkings, la dernière entité créée par le groupe Clear Channel met, en effet, depuis quelques semaines sur le marché 9 réseaux de centre ville bien ciblés. Son catalogue va d'un réseau spécifique aux parkings situés au Stade de France, autour des Champs-Elysées jusqu'à ceux d'agglomérations de plus de 200 000 habitants. « C'est un nouvel élément de la volonté du groupe de faire le lien entre le marché et la consommation, explique Vincent Piot, directeur général de Dauphin Adshel et de sa nouvelle filiale Médiaparc. Ici, l'objectif est de proposer des parkings remodelés, réactivés pour être de véritables espaces de service. Des espaces dont on peut également identifier, qualifier les usagers. » Aux campagnes d'affichage classiques, les équipes de Médiaparc ajoutent des propositions d'animations ciblées comme la décoration des barrières, des caisses, des murs, par des systèmes de manchons, stickers, hologrammes, etc. aux couleurs des annonceurs. Ils envisagent, par exemple, d'installer un grand écran dans les parkings des Champs-Elysées pour la sortie, en octobre, d'un film en vidéo et DVD. « Nous ne travaillons plus seulement avec les seules agences de communication mais plutôt avec les départements événementiels. On a l'avantage d'être dans des lieux clos, où la réglementation est moins lourde qu'à l'extérieur », précise Vincent Piot. « Avec ces nouveaux outils développés dans les parkings, sur les tables de bars, dans les clubs de golf, etc. (voir encadré), l'affichage bascule de l'un des derniers mass médias à du média ciblant mais cela reste des supports de niche, analyse Albert Asseraf. Pour l'instant, nous les utilisons pour renforcer un plan en répondant à des problématiques spécifiques. » On peut également se poser la question de savoir si un groupe comme Clear Channel n'élargit pas trop largement l'offre par rapport à ce que le marché peut absorber. « Il vaut mieux que l'on se cannibalise en interne que de se faire cannibaliser par les autres, rétorque Vincent Piot. Plus largement, il faut savoir appréhender ce que sera l'affichage demain, en tant que mass média mais aussi de plus en plus en tant que support permettant de réaliser des opérations coups de poing, plus proches du business. » Un raisonnement que l'on entend un peu partout, et particulièrement dans un contexte où est évoquée la prochaine ouverture de la publicité TV pour la distribution, l'édition et le cinéma. « Tout le monde attend cela avec impatience, note Albert Asseraf. Même si les choses se feront probablement doucement, ce sera une nouvelle forme de concurrence pour des médias comme l'affichage ou la radio, au plan local comme national. Les afficheurs s'y préparent car cela veut dire que l'affichage sera utilisé différemment comme cela a été le cas de la FM, de TF1 privatisée, ou des chaînes thématiques. »

 
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Léna Rose

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