Etudes on line : les grandes manœuvres
Selon Esomar, le on line représentait en 2004 environ 11 % du marché mondial des études. En France, selon Syntec Etudes Marketing et Opinion, il serait autour de 2 à 3 %. Des chiffres qui cachent une grande disparité entre pays et instituts et qui sont déjà obsolètes dès leur publication tant est rapide l'évolution du marché.
Je m'abonneÀ LIRE AUSSI
Enthousiasme, crise de confiance, scepticisme, regain d'intérêt, tels sont
les termes qui rythment le marché des études on line depuis dix ans. « La
pénétration croissante d'Internet dans la population et dans les foyers
explique le regain d'intérêt pour ce mode de collecte, remarque Guillaume
Weill, directeur général de crmmetrix. Les “seuils” nécessaires à une
représentativité acceptable des internautes (30 % des foyers équipés) sont
maintenant franchis dans la plupart des pays d'Europe,dont notamment la
France. » Et la progression de l'ADSL participe encore de ce mouvement. Résultat
: les grandes sociétés d'études “généralistes” se dotent d'access panels on
line de taille significative, les spécialisées du on line continuent d'agrandir
les leurs alors que de nouveaux acteurs apparaissent sur le marché. L'activité
au cours des douze derniers mois est significative de l'état d'esprit de
l'industrie des études.
1 an de grandes manœuvres
Pour GfK, l'expertise acquise par NOP dans les études on line et la taille de ses access panels aux Etats-Unis et en Grande-Bretagne figuraient en bonne place dans la liste des avantages que procurait son rachat (la fusion est effective depuis le 1er juin dernier). « Se développer sur le marché des études on line fait partie de notre business plan », explique Helen Zeitoun, directeur général de GfK Sofema. Stratégique également pour TNS, le rachat de NFO qui apportait dans la corbeille de mariée un access panel on line international et une somme d'expériences web notamment aux Etats-Unis, marché en avance dans ce domaine. Un an après la fusion, TNS Sofres annonçait cet été le lancement de 6th Dimension, l'access panel on line européen du groupe. « En 2004, nous avons conclu que le marché des études internet arrivait à maturité et qu'il était temps que nous soyons présents », se souvient Yannick Carriou, directeur général adjoint de TNS Sofres, pour qui l'année 2005 marque l'année 0 des études internet. Aujourd'hui, TNS Sofres met les bouchées doubles et son ambition est de devenir leader en études on line en Europe en prenant des initiatives majeures, mais aussi dans le reste du monde (le groupe travaille à un access panel en Asie). Le groupe a investi 2,5 % de son chiffre d'affaires en R&D, dont une grosse partie consacrée au développement des solutions internet et à la stratégie on line. « La partie access panel n'est que la partie visible de l'iceberg, souligne Yannick Carriou. Je ne suis pas loin de croire que TNS Sofres est déjà leader sur le marché des études on line en France ; nous sommes en très bonne place aux Etats-Unis et nous serons bientôt leader en Asie. Nous faisons grossir notre part de marché et le marché. » Investissement à sept chiffres pour Synovate, avec la récente création de son access panel international en ligne, ViewsNet, qui s'appuie sur Carat pour le recrutement. « Il y avait, historiquement, une tradition d'access panel et de on line dans les sociétés Synovate aux Etats-Unis, explique Adrian Chedore, CEO Monde de Synovate. Nous avons décidé d'exploiter cette offre dans d'autres régions, notamment en Europe. Nous avons monté une plate-forme à Chicago et engagé Michalis Michael en tant que responsable monde de Synovate ViewsNet. Mais Internet n'est qu'un mode de collecte parmi d'autres. L'important sera de choisir le meilleur en fonction de la problématique du client et avec la même qualité. » Et Tim Bowles, directeur général de Synovate Europe d'ajouter : « L'avenir des études passera par les panels, off comme on line. » Pour Roland Cayrol, directeur général de CSA, « on ne peut pas être un institut généraliste de taille et ne pas avoir d'access panel. » D'où la constitution d'un access panel de 300 000 panélistes en France. Le groupe Ipsos, qui fut le premier grand groupe d'études en France à croire au on line, continue ses investissements pour se doter d'expertises, de plates-formes (trois à ce jour : aux Etats-Unis, en Roumanie et au Japon), d'outils et poursuivre la croissance de son access panel, notamment en Europe du Sud avec bientôt un panel au Portugal. En France, le nombre de panélistes devrait doubler d'ici à un an. Quant au groupe Kantar, il a créé une filiale, Lightspeed Research, pour gérer l'activité d'access panel on line dans le monde, un panel qui sert à toutes les filiales du groupe WPP et notamment à ses sociétés d'études (Research International, TGI, The Added Value Icon, Millward Brown, qui vient d'acquérir Dynamic Logic, entreprise leader dans les études on line qui mesure et analyse l'efficacité du marketing).
L'attrait du marché européen
TNS Sofres réalise déjà en France 20 à 25 % de son activité “Etudes Consumer” on line et ambitionne de faire passer ce chiffre à 35 % en Europe d'ici à 2007. Chez Ipsos, le pourcentage est de 15 % en France et 25 % aux Etats-Unis ; chez GfK de 25 à 30 % en France pour les études NPD. Il est de 5 % pour d'autres sociétés comme IOD ou CSA et devrait progresser très vite. Depuis un an, Internet a séduit de plus en plus les annonceurs pour les études publicitaires, les études “loyalty”, les études de climat interne. La vitesse de pénétration d'Internet en Europe et l'accélération de la demande d'études on line attirent de nouveaux acteurs qui n'hésitent pas à franchir l'Atlantique pour se développer sur le continent. Ainsi, l'an dernier, Harris Interactive, un des leaders des études on line aux Etats-Unis, a racheté Novatris, société spécialisée française fondée il y a dix ans par Patrick Van Bloeme et Nathalie Perrio-Combeaux. Récemment, Greenfield On line, l'une des principales sociétés de terrain on line américaine a racheté Ciao Europe pour assurer son développement européen. Plus récemment encore, GMI, société américaine qui propose des logiciels et de la technologie d'enquêtes et qui dispose d'un des plus grands access panels on line mondiaux (GTM), a ouvert un bureau à Paris, placé sous la responsabilité de Michel Pélegrin. Pour assurer son développement, To Luna s'est introduit à la Bourse de Londres et a levé 7,25 ME. « Cinq ans après notre création, cette opération démontre la confiance des marchés dans notre expertise, nos équipes et nos technologies », commente Frédéric-Charles Petit, CEO de To Luna, dont 70 % des clients sont à l'international. Research Now, société britannique de terrain on line, créée en 2002, entrée en Bourse en 2005 avec un bureau à Londres et un en Australie, va bientôt s'installer en France, en Allemagne et à New York. Ces sociétés de terrain on line travaillent essentiellement pour les sociétés d'études. Jusqu'où ira cette course à l'access panel ? Y a-t-il de la place pour les panels d'instituts et de fournisseurs de terrain ? Les sociétés d'études n'utiliseront-elles pas à terme leurs panélistes pour des études à valeur ajoutée, des panels propriétaires, des études de niche et ne feront-elles pas appel aux “providers” pour les études plus simples ?
L'enjeu de la qualité
Pour les sociétés d'études, la question sera : faut-il monter un access panel en propre ou faire appel à des fournisseurs ? « A ce jour, personne n'a un access panel suffisant pour répondre à la demande », estime Mitch Eggers, Chief Operations Officer de GMI. FullSIX Research a tranché : « Le domaine s'est professionnalisé, constate Edouard Servan-Schreiber, son directeur général. Nous nous sommes dit que gérer un acess panel était un métier qui demandait beaucoup d'efforts. Or, notre métier de petit institut, c'est d'être un institut commando qui sait répondre à toutes les problématiques. Nous avons donc décidé de travailler avec des fournisseurs comme LightSpeed Research ou Greenfield/Ciao. » Mais la course à la taille ne devra pas faire oublier la qualité. « La taille n'est pas un argument de qualité ; ce n'est qu'une résultante de la demande étude. Ce qui l'est, c'est le mode de recrutement, de gestion, la façon d'administrer les panélistes, les incentives », souligne Yannick Carriou. Pour l'Ifop, il est important d'appliquer à ces “nouvelles études” le même souci de qualité, de rigueur et de savoir-faire méthodologique. « Les clients sont de plus en plus experts et nous devons être de plus en plus transparents », remarque Mitch Eggers. Laurent Sorbier, directeur général de Panels & Media, préconise un échantillonnage multipanel pour limiter les biais propres à chaque panel. Une commission de l'UDA, placée sous la responsabilité de François Laurent (TTE Europe), s'intéresse à la qualité dans le recueil de données, en particulier sur Internet. « Il y a de vraies questions à se poser sur les moyens d'améliorer le recrutement et la représentativité, constate Christian Delom, P-dg de Socio Logiciels. Il est important que ce métier du on line devienne un marché de qualité. » Et Yannick Carriou de conclure : « Quand on dit “je fais des études on line”, il faut placer l'accent tonique sur le mot “études”. C'est là notre métier et un métier qui repose sur la qualité. »
Qu'est-ce qui fait courir les panélistes ?
Par Van Terradot,
directrice générale de Novatest « La dernière conférence d'Esomar sur les access panels on line qui s'est déroulée à Budapest
en avril dernier montre l'effervescence et le dynamisme de cette activité dans le monde.
Des chiffres ont été avancés sur la proportion d'études on line conduites via les access panels : 80 % ! Suite sans doute aux récentes réglementations concernant le spamming, à la baisse attendue du taux de réponse aux enquêtes
en ligne, en particulier hors access panels. Mais qu'est-ce qui motive les internautes à s'inscrire dans les access panels et à répondre aux études ? Est-ce seulement l'intérêt pour les incentives, dédommagement en argent ou en cadeaux ? Apparemment non. De nombreuses études et plus précisément des analyses typologiques ont montré une large gamme de motivations et le segment des “chasseurs de primes” n'est pas le plus important ! Il semblerait que la motivation la plus fréquente soit celle d'être “influenceurs”, de vouloir donner son opinion pour participer et peser si possible sur les décisions économiques et sociales, qui impactent notre vie au quotidien. Et les décisions marketing en font partie. Il y a aussi les “altruistes”, qui aiment tout simplement rendre service en répondant aux demandes d'enquêtes. Et puis, ceux qui
y répondent comme ils le feraient pour n'importe quel “job” : mon temps contre votre argent, donnant-donnant. Il semblerait que ce profil de “professionnalistes” soit plus important en France que dans les autres
pays européens. Mais ce point mérite validation ! »
Les omnibus se déclinent aussi en ligne
Déjà décliné en face à face et téléphone, le marché de l'omnibus s'enrichit, depuis cette année, d'offres en ligne. Il y a deux ans, Ipsos lançait i-omnibus, un omnibus hebdomadaire en ligne sur neuf pays interrogeant 1 000 personnes de 15-54 ans.
Les résultats sont prêts une semaine après le lancement
du questionnaire. Derniers nés : l'Omnibus On line de RI (mensuel auprès de 1 000 individus). En septembre dernier, Ciao, la filiale européenne de Greenfield On line, lançait son omnibus on line en Grande-Bretagne, Allemagne et France, fonctionnant sur une base bimensuelle. « Nous appliquons à notre omnibus les mêmes standards de qualité et les mêmes procédures d'échantillonnage rigoureuses que pour nos études plus personnalisées », explique Nicolas Metzke, Dg de Ciao France. Presque en même temps, Panel
on the Web lançait un omnibus on line bimensuel sur 1 000 personnes (15 +). « Le mode de fonctionnement est souple, souligne Valérie Jourdan, Dg. Les questions sont acceptées jusqu'à 24 h avant le lancement de la collecte de données et l'insertion de visuels
est possible. » Ces nouvelles
offres viennent s'ajouter à celles de Research Now (OmniTaxi) et
Telder Research Data & Facilities.