Thierry Spencer Maxi-Livres
Vendeur de livres à prix discount, l'enseigne a entrepris de mettre en place une stratégie de marketing client, sous la houlette de Thierry Spencer, directeur marketing recruté notamment pour cette mission. Revue de détail des actions engagées.
Je m'abonneQuel est l'historique de Maxi-Livres ?
C'est une
enseigne qui est née au début des années 80. A l'origine soldeur (après les
deux ans de prix fixe, imposé par la loi Lang, le soldeur récupère les invendus
et fixe lui-même son prix), Maxi-Livres s'affiche désormais comme le
spécialiste du livre. Nous sommes les seuls à ne vendre que du livre.
Aujourd'hui, la moitié de notre offre est composée de livres dits de soldes et
l'autre de livres en coédition, par exemple avec La Martinière, L'Equipe ou
Taschen ou sous la marque Maxi-Livres. Notre offre est toujours la même, “Le
livre à la portée de tous”, c'est-à-dire que nous vendons nos livres 40 %
moins cher que le prix du marché. Notre prix moyen est de six euros pour les 5
univers que nous proposons : poche & littérature, art & passions, nature &
horizon, enfant jeunesse, art de vivre. Notre offre de livres doit être
finement appréciée dès lors que nous sommes éditeur ou non-éditeur. En fait,
nous ne vendons pas de nouveautés, c'est nous qui faisons notre actualité. Ce
qui nous guide, c'est l'innovation produit. Nous devons être au plus près des
besoins du client et apporter des tendances (le livre objet…).
Comment vous positionnez-vous ?
Le positionnement de Maxi Livres
s'inspire beaucoup de la façon de vendre les livres dans les pays anglo-saxons
: ils sont présentés en facing, avec des étiquettes prix très grosses, les
livres sont déballés… En fait, nous sommes des commerçants de proximité,
spécialisés dans le livre. Nicolas, Yves Rocher ou Weltbild en Allemagne font
partie de mes modèles d'animation commerciale. Pour le modèle d'animation sur
Internet et comme modèle de relation client, je pense plutôt à Amazon.com.
D'ailleurs, notre nouveau chef de produit vient de chez Amazon.
Quels sont vos derniers chantiers ?
Maxi-Livres s'est doté
d'outils au service de la performance : un ERP (un système de gestion intégré)
a été mis en place à Luisant (Chartres), notre plate-forme logistique. Ce qui
nous manquait, c'était une stratégie de “marketing client”, et c'est pour la
mettre en place que j'ai été embauché en décembre 2002. Le client doit être au
cœur des préoccupations vis-à-vis de l'offre. Il faut établir une grille de
besoins, connaître le client, ses attentes. N'étant pas dans l'actualité du
marché, nous nous devons d'être à son écoute. Je dirais même que nous sommes
condamnés à l'écouter lors des grands rendez-vous (Fête des Mères, Fêtes des
Pères, Saint-Valentin…). Le client doit également être au cœur des
préoccupations dans le magasin. Il faut des preuves de notre positionnement.
Nous théâtralisons nos nouveautés ; il y en a 1 000 par an. Tous les mercredi
à 10 heures, dans les 140 boutiques, 9 livres sont présentés sur un chariot
sous la bannière “C'est arrivé cette semaine”. Autre animation : “La bonne
affaire du livre” ; il y en a une très grosse par semaine. Mais tout cela doit
être organisé, démontré et analysé. Pour le mesurer, Maxi-Livres a fait appel à
100 % Satisfaction, qui a mené une étude de satisfaction en novembre 2003. Nous
avons décidé d'en faire un baromètre annuel. Il en ressort que, si nous
disposons d'un capital sympathie, c'est sur le prix que les clients sont le
plus exigeants. Il faut faire en sorte que l'information remonte vers la
direction produits. Le magasin envoie une fiche sur les suggestions et
remarques des clients : elles sont analysées, triées, hiérarchisées, suivies
et restituées au magasin. Ma mission a été de renforcer ces outils : qu'ils
soient inscrits dans la durée, et suivis scrupuleusement. Nous avons la
“culture du commerçant”. La direction marketing, la logistique, la direction
produits rencontrent tous les magasins 2 fois par an.
Comment se compose votre clientèle ?
En fait, notre client est une cliente à
75 %. Nous avons deux grands segments de clientèle. Le premier, les “mamans
poussettes”, comprend des femmes actives avec enfants. Elles viennent passer un
bon moment dans nos magasins pour feuilleter et acheter des livres pour
enfants, des livres de cuisine, des romans, des livres de poche. Pour nous, il
s'agit d'un segment bien identifié, sur lequel nous communiquons par des outils
de masse. Deuxième segment : les “écharpes rouges”, composé de bibliophiles,
d'amateurs de livres, du dénicheur de bonnes affaires. Il s'agit d'un client
“multifidèle”, c'est-à-dire qu'il se rend à la fois dans les librairies, dans
les hypermarchés, chez les bouquinistes, et surfe sur Internet. En fait, il
s'agit de notre clientèle d'origine. Elle doit être traitée différemment.
Quels outils avez-vous mis en place pour fidéliser la clientèle ?
Maxi-Livres possède une carte de fidélité, la Carte Chouette, qui
existe sous sa forme actuelle depuis trois ans. Nous avons réussi à recruter 1
130 000 porteurs de carte.
Avec quels agences et conseils collaborez-vous ?
Avec Eccla depuis le mois de janvier, que nous
avons choisie après compétition et qui réalise notre programme de relation
client, et Inbox, qui effectue le score client, détecte les segments de
clientèle. Nous accordons une très grande importance au “savoir-être” des
prestataires.
Comment se décline votre stratégie de marketing client ?
Comme outil de masse, nous diffusons un catalogue de 16
pages en toutes boîtes 4 fois par an, à 1,5 million d'exemplaires.
Parallèlement, nous développons des outils plus relationnels. Notre stratégie
étant de trouver la bonne combinaison entre le relationnel et le
transactionnel. Ce que l'on retrouve dans notre actualité : une opération qui
se déroule du 12 mars au 23 avril et qui combine tous ces éléments vis-à-vis de
toutes nos populations. Maxi-Livres s'est associé à la 9e Journée Mondiale du
Livre Unesco, dans l'optique de mettre le livre à la portée de tous. Outre le
catalogue, un mailing est adressé à une sélection de nos clients (50 000
personnes), à qui Maxi-Livres annonce la sortie de ce catalogue et le principe
de l'opération. Avec 5 euros de réduction immédiate offerts sur une sélection
de livres. Pour chaque livre acheté, un euro sera reversé à une association
désignée par l'Unesco. Jusqu'à présent, Maxi-Livres a toujours été très
discret sur son positionnement caritatif ; nous donnons des livres deux fois
par an aux antennes locales du Secours Populaire. De façon générale, une
communication est envoyée sur les porteurs de carte dans les deux grands
segments.
Quelle est la fréquence de vos communications ?
De une à trois fois par an vers les clients les plus
occasionnels et au moins 10 fois par an vers nos meilleurs clients. Soit près
d'un million de contacts par an sur les porteurs de carte. Le principe est de
valoriser les porteurs de carte en magasin avec des offres spécifiques. Chez
Maxi-Livres, le marketing direct a d'abord pour objectif de développer le
trafic vers le point de vente.
Et en matière d'e-mailing ?
Nous envoyons un e-mail par semaine à ceux qui nous ont
communiqué leur adresse électronique, soit lorsqu'ils remplissent le formulaire
pour recevoir leur carte de fidélité, ou alors via le site. A vrai dire, le
taux de remplissage ne fait qu'augmenter, beaucoup de “mamans-poussettes” nous
donnent leur adresse e-mail (soit au bureau, soit à la maison). Nos clients
sont très demandeurs d'information. Nous leur devons une information sur notre
offre, car elle n'est pas évidente à cerner. Par exemple, le 3 décembre 2003,
nous n'avions pas Harry Potter dans nos rayons.
Qu'en est-il de votre site ?
Nous avons fait faire un audit de notre site,
maxilivres.com, par la société CVFM et sa refonte est imminente. Dans ma
mission, j'avais des priorités : le développement des magasins, l'image… Le
site fait partie des prochains chantiers.
Avez-vous expérimenté l'e-commerce ?
J'ai participé à la décision de son arrêt
provisoire. Cette expérience a démarré il y a 2 ans et a duré 6 mois. Elle
avait plus des allures de test. Sur Internet, il faut arriver à trouver un
élément différenciant. Maxi-Livres va y revenir avec un service réellement
différent pour une clientèle différenciée. Car il est bien évident que l'on ne
peut rivaliser avec la Fnac, Alapage, Amazon…
A quand la VPC chez Maxi-Livres ?
Cela semble logique, mais il faut que cela ait un
sens par rapport à nos clients. Et que cela soit accepté et compris par nos
points de vente. Je regarde plutôt du côté de Weltbild, qui a plutôt bien
réussi son mix catalogue/magasins. Ou Cyrillus en France. Mais Maxi-Livres est
d'abord au service du magasin. Si en matière de multicanal, l'âge des pionniers
est définitivement révolu, comme le souligne Jean-Marie Boucher, responsable du
e-commerce de La Redoute (voir Marketing Direct, n° 82, p. 36, ndlr), il faut
maintenant le gérer, ce qui est le plus difficile. D'autant que l'on ne peut
pas imposer tous les canaux à tous les clients.
Comment se compose votre équipe ?
La direction marketing, que je coiffe, est
composée de 4 personnes : une responsable des études, un responsable du plan
d'action commerciale et deux responsables marketing seniors, l'une spécialisée
dans le merchandising et l'autre dans l'animation commerciale. C'est une équipe
d'experts enthousiastes. Ce que j'ai pu leur apporter, c'est mon expérience de
la mesure, acquise notamment chez France Abonnements. Nous sommes capables de
mettre une action commerciale sur pied en 10 jours. Et ce, en collaboration
avec le directeur commercial. Sans son soutien et son accord, je n'aurais
jamais pu faire tout ce que nous avons réalisé en un an et demi.
Quelles vont être vos prochaines actions ?
Nous préparons la
valorisation d'un élément fort de notre saisonnalité, les fêtes de fin
d'année. Nous voulons, à cette occasion, apporter un plus. Car à cette époque,
Maxi-Livres est en concurrence avec Jeff de Bruges, Nicolas, Interflora… Nous
nous attelons à la préparation dès maintenant car nos opérations doivent être
anticipées toujours très à l'avance. Certes, entre-temps, il y aura la Fête
des Mères, la Fête des Pères, le dixième anniversaire de notre collection
Maxi-Poche (une collection à 2 euros, sachant que le prix de vente moyen du
livre de poche à 6 euros).
L'entreprise
Création en 1978. 550 salariés en France et en Belgique. 50 ME de chiffre d'affaires en 2003. 140 boutiques en France et en Belgique. 12 millions de livres vendus par an en France et marchés francophones. 3 500 références. 300 000 clients acheteurs par mois dans les magasins. 1,1 million de porteurs de carte de fidélité. 6 millions de catalogues distribués par an.
Biographie
38 ans, ESC Compiègne, Thierry Spencer a débuté, sur les conseils de Jean-Louis Ferry, à la Camif, en tant que promoteur (1990-1993), puis il rejoint la Serap en tant que directeur marketing (1993-1998). Il est ensuite directeur marketing chez France Abonnements (1998-2000), où il a notamment en charge le call center. Il rejoint enfin Fi System, où il dirige la Business Unit marketing opérationnel interactif. Après des missions de conseil pour la Grande Récré, BNP Paribas, il devient directeur marketing de Maxi-Livres en décembre 2002. Thierry Spencer est l'auteur du livre “Les 100 erreurs à éviter lors d'un entretien d'embauche”.