Les produits frais, nouveau fer de lance des cybermarchés
Bien plus qu'une problématique économique et une plus value incontournable pour faire face à la concurrence, le rayon frais bénéficie d'une organisation spécifique qui repose avant tout sur le respect de la chaîne du froid. Plongée au coeur des stratégies de c-mescourses.com, houra.fr et telemarket.fr.
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Lorsque les premiers cybermarchés sont apparus sur Internet, l'un de leurs
principaux arguments promotionnels était leur capacité à faciliter la vie de la
maîtresse de maison. Finie la corvée des courses hebdomadaires dans l'enfer des
hypermarchés, avec leurs lots de fatigue physique et surtout nerveuse. Grâce à
c-mescourses. com, houra.fr ou telemarket.fr, la commande arrivait directement
sur le palier du client. Le délai de livraison s'est, par la suite, substitué à
la simplification d'usage dans l'échelle des valeurs ajoutées des cybermarchés.
Aujourd'hui, bien que les difficultés de transport soient en partie réduites,
assurer la continuité de la chaîne sur le dernier kilomètre est devenu capital,
et principalement celle de la chaîne du froid, dont dépend la survie des
produits frais. Car, c'est désormais ce rayon qui est le principal enjeu
stratégique pour tous les acteurs du marché. Comme l'indique Gérard Gallo,
directeur général de Télémarket, « le rayon frais est devenu l'un des
principaux indicateurs de confiance pour un cybermarché. C'est lui qui nous
indique si nos clients sont satisfaits ou non de la qualité de service du site,
d'une part, et surtout de la qualité des produits proposés ». Il est donc, par
la force des choses, un facteur de fidélisation. La présence de produits frais
dans les commandes de Télémarket est de 80 % (50 % pour les surgelés), et est
passée de 65 à 85 % chez C-mescourses. Qu'entend-on par produits frais ? Cette
famille de produits est relativement large et regroupe principalement la
crémerie (yaourts, fromages, desserts...), la viande, les fruits et légumes, la
charcuterie et les produits "traiteur", les plats cuisinés, les jus de fruits
frais, les sauces et les condiments frais. Auxquels s'ajoutent, bien entendu,
les produits surgelés. Leur date limite de consommation (DLC) étant beaucoup
plus courte que le reste de l'assortiment, et leur conditionnement étant
beaucoup plus sensible, ils bénéficient systématiquement d'un entreposage et
d'un emballage spécifiques. Ainsi, chez houra.fr, tous les produits frais sont
stockés à 2° C et transportés dans des bacs équipés de housse isotherme
réfrigérée qui garantissent la continuité de la température. La DLC du produit,
qui sera réellement livré, est indiquée au client sur le site web avant la
sélection dudit produit. Les DLC des lots de tous les produits vendus par
houra.fr sont informatisés, permettant ainsi de retirer automatiquement de la
vente les produits bien avant l'expiration de cette date. Pour ce qui est de
l'emballage, Houra joue la carte des codes couleurs. Les produits sont classés
et rangés dans trois bacs différents : les produits frais sont placés dans un
bac réfrigéré de couleur bleue contenant une housse isotherme, dans laquelle
est inséré un pain de carboglace (- 70° C) quelques minutes avant de quitter la
chambre froide pour le camion de livraison. Les fruits et légumes sont placés
dans un bac ambiant de couleur verte et calés afin de ne pas être écrasés lors
du transport. Enfin, les produits ambiants sont placés dans des bacs rouges par
type de produits : alimentation, hygiène, entretien... Lancée sur la région
parisienne en mars 2001, l'offre de produits frais de houra.fr a été étendue à
Lille, Strasbourg, Lyon, Grenoble, Toulouse, Bordeaux, Marseille et Nice en
avril 2001, puis sur Montpellier, Nîmes, Toulon, Colmar et Mulhouse, en
décembre 2001. Pour Pierre Bouriez, P-dg du site, cette expansion de la
livraison des produits frais sur l'ensemble des régions françaises confirme la
volonté du groupe d'être « un cybermarché généraliste proposant au meilleur
prix une gamme très large de produits ». Il ne pouvait de toute façon pas en
être autrement, la moitié des commandes enregistrées sur le site comprenant des
fruits et légumes, et 80 % au moins un produit frais. Chez C-mescourses, qui a
annoncé mi-février l'arrêt de ses activités en avril prochain, le rayon frais
représentait près de 24 % du chiffre d'affaires global du site, c'est-à-dire 1
200 références de produits frais sur 6 000 (dont plus de 5 % pour les
surgelés). Les dirigeants du site considéraient les produits frais comme des
produits d'appel. Mais les consommateurs ne les ont visiblement pas assez
plébiscités. La filiale des groupes Casino et Rallye avait réalisé en 2000 un
chiffre d'affaires situé entre 7,5 et 9 millions d'euros pour un volume de 80
000 commandes et un panier moyen de 106 euros. Les deux groupes de distribution
précisent que « c-mescourses.com a connu en 2001 une progression importante de
ses ventes et du panier moyen, sans pour autant que le potentiel d'évolution du
marché des ventes alimentaires sur Internet ou ses perspectives de rentabilité
à court ou moyen terme ne justifient son maintien dans le portefeuille du
groupe. » L'assortiment des différents sites concurrents étant aujourd'hui
sensiblement le même, il ne reste guère que sur ce type de références que la
distinction peut se faire. Mais l'autre atout du rayon frais, c'est sa forte
rentabilité, son niveau de marge étant supérieur au niveau de marge du Sec ou
du Liquide. Contrairement à Houra, qui dispose de la couverture de livraison la
plus étendue, le champ d'action de C-mescourses se limitait essentiellement à
Paris et Lyon, villes dans lesquelles le site dispose d'entrepôts dédiés. Dans
ces entrepôts, les produits frais étaient stockés en chambre froide, et toutes
les commandes préparées directement à l'intérieur de ces chambres et placées à
l'intérieur d'armoires isothermes. De la neige carbonique les enveloppait pour
les maintenir à la bonne température jusqu'à la fin de la tournée de livraison.
Mais, pour optimiser la gestion de la chaîne, le site s'est doté d'une
technologie particulière. Grâce à des boîtiers "d'intelligence électronique"
installés dans les camions, C-mescourses suivait à la fois les conditions de
livraison et le strict respect de toute la chaîne du froid. Ce système est non
seulement peu coûteux, mais ne nécessite pas l'utilisation de camions de
livraison tri-température. Chez Télémarket, comme le rappelle Gérard Gallo,
cela fait plus de dix ans, « bien avant la création du site web, que nous avons
fait du rayon frais notre priorité, stratégiquement et commercialement ». Le
site propose une sélection de 800 produits frais et de 400 produits surgelés.
Leur stockage est, là aussi, réparti sur deux chambres froides, situées dans
l'entrepôt central de Pantin, à Paris : une à 4° C de 1 200 m2 pour les
produits frais, et une deuxième à 10° C pour les fruits et légumes. Le surgelé
est, quant à lui, stocké à une température de - 30° C dans des bacs ou des
armoires réfrigérés. Les camions de livraison suivent le même ordonnancement et
contiennent trois compartiments à trois températures différentes. Une zone à 4
° C, une deuxième à 10 ° C, et une dernière qui est maintenue au sec. La
commande type d'un client de Télémarket, d'un montant de 121,96 euros (800 F),
comporte au moins cinq cartons de sec, un carton de frais et un carton de
surgelés ; le rayon frais représentant, à lui seul, 38 % des ventes du site.