Supports de création
Le service "créa" peut-il se passer du papier du même nom ? Lucas Mongiello, directeur de création chez OgilvyOne, cultive des positions plutôt originales sur la question.
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Lucas Mongiello (OgilvyOne) : « Pas de papier spécial pour la création ! »
Quel rapport entre la création et les papiers de création ? Ce support est-il incontournable ?
Il n'y a pas de papier spécial
pour la création ! Tous les supports sont créatifs. Et, quand on dit "papier de
création", pour moi, c'est une manière de justifier la rareté, le prix du
produit et le fait qu'il soit plus difficile à manipuler. Le support doit
apporter quelque chose de différent. Un ticket de caisse peut être un support
de création, il a une matière originale.
Le papier de création peut-il augmenter le taux de transformation ?
Oui, car c'est une
façon simple d'attirer l'attention du client et peut-être transformer un peu
plus. Mais, on ne doit pas l'utiliser à tort et à travers. L'erreur est
d'instaurer un trop grand décalage avec le contenu. Cela donne l'impression
d'être prétentieux. Par exemple, utiliser une boîte sophistiquée pour quelque
chose de basique. Le client la gardera sur son bureau, pour mettre des
trombones. Il se souviendra de l'envoi et pas du produit. Parfois, on fait
porter beaucoup trop de choses à la boîte. C'est une tentative de manipulation
en quelque sorte. Attention, les gens aiment bien se faire manipuler mais avec
un peu de finesse. La justesse, l'équation n'est pas facile à décrire. Ça
marche au coup par coup. J'achète des gants chez Hermès, je les reçois dans une
petite boîte bien finie avec un bolduc, etc. C'est trop ? Mais les gants sont
finis main, et leur prix n'est pas ordinaire. Je pense que si Hermès les
envoyait dans un carton ordinaire, cela ne serait pas bien perçu.
Et, quand il faut réduire le budget, cela vous arrive-t-il de couper en priorité dans les postes papier ?
C'est inscrit dans notre
structure. Dès que les budgets sont un peu tirés, on coupe dans les supports,
on fait imprimer sur des rotatives, le résultat n'est pas beau. On n'utilise
plus le papier de création, on passe à la manipulation automatique. Et, quand
les budgets sont plus importants, on retourne de suite vers le haut de gamme.
Il nous manque des règles d'équation pour telle marque tel produit, plutôt
telle manière de communiquer. Manque aussi la formation et l'information des
créatifs. Les responsables "créa" n'ont qu'une faible connaissance des
supports. Les papetiers ont l'habitude de voir des chefs de fabrication, pas
nous. Les créatifs ne maîtrisent pas l'offre pléthorique du marché.
Il paraît que le fait d'avoir une charte graphique peut vous protéger contre les coupes sombres ?
Oui, cela n'est pas idiot. Si
le papier fait partie intégrante de l'image de la marque, il sera difficile de
couper dedans quand on réduit les budgets. D'ailleurs, quand on passe à un
papier moins cher, cela ne signifie pas toujours un changement. Ces choses-là
dépendent de la perception plus que de la réalité économique. Un annonceur
comme Dior se préoccupe naturellement du papier et de la qualité des messages.
Il est entrain de faire évoluer son code graphique y compris dans les matières
utilisées.
Le calque, un support étonnant
« J'utilise les calques Cromatico pour les enveloppes de mailing, témoigne Katia Laroque, directrice de l'agence Punk. Une telle enveloppe dans une boîte aux lettres sort du lot. Elle sera remarquée. Je veux créer le mystère dans le mailing car, avec le calque, on arrive à distinguer ce qu'il y a dedans sans vraiment deviner... C'est un support étonnant qui correspond bien à des créations suggérées. » La transparence, les capacités du calque sont ici détournées de manière élégante pour obtenir des couleurs très vives et profondes. « Techniquement parlant, ce support offre une manipulation facile, contrairement à l'idée reçue qui stipule qu'il est difficile d'imprimer sur du calque », poursuit Katia Laroque. Pour elle, le calque permet tout type de façonnage, tout format d'enveloppe, tout type d'impression. Parmi les créations de Punk, un portfolio avec des photos sur du papier classique et du texte superposé en Cromatico. A quels secteurs le calque est-il destiné ? « Ce n'est pas vraiment pour la grande consommation, mais pas seulement pour le luxe non plus. Des industriels s'en servent pour des invitations, des cartes de voeux ou encore pour des coupons-réponse », répond Katia Laroque. Et, quand le même papier doit aussi servir pour des enveloppes, l'agence le fait valider systématiquement par La Poste pour les besoins de la lecture optique. Et jusque là, il n'y a jamais eu de problème. Mais ce papier est aussi fragile, ce qui ne permet pas de l'utiliser pour des coffrets par exemple. Quant à son prix supérieur, Katia Laroque le trouve justifié par la singularité de ce papier, par sa valeur ajoutée.