Réconcilier l'homme avec ses machines
L'homme a confondu bonheur avec technologie et richesse. A-t-il compris que ces technologies favorisaient la solitude, l'enfermement, le stress, le chômage, l'exclusion. Cette prise de conscience va faire basculer la technologie.
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Avec l'apparition et le développement des technologies, le temps s'est
accéléré, la production aussi et l'espace s'est réduit. Aujourd'hui, la notion
même d'activité, que ce soit loisir, travail ou éducation, est en mutation
constante. Les besoins réels, créés ou anticipés, découlent d'une recherche peu
scrupuleuse le plus souvent. Là encore, l'urgence du profit est prééminente. Du
côté scientifique, les bénéfices promis par les résultats de la recherche
transgénique déclenchent une ruée qui n'est pas “saine”. Nos chercheurs, grands
sorciers du futur, ont commencé à greffer des neurones sur des puces
électroniques. L'homme bionique de demain est déjà présent. Tout n'est
évidemment pas à rejeter, mais demanderait une plus grande prudence, pour la
raison simple que chaque invention porte en elle-même son côté négatif. Il faut
donc prévoir cet aspect et les moyens de le contrer. C'est le premier argument
qui fera changer la perception des technologies. Et l'Homme dans tout ça ?
Comme l'enfant qu'il est, il s'est passionné pour toute cette technologie qui
ouvrait les portes de la richesse, de tous les pouvoirs, de nouveaux loisirs,
de la virtualité, formule technologique du rêve, de la communication facile, du
jeu ! L'outil technologique s'est simplifié, paré de couleurs et de
transparences, redesigné, il s'est installé partout.
Invisible mais envahissante
Très vite dans les années 90, on a étudié comment
utiliser la technologie en l'oubliant. Ainsi est née la technologie intuitive.
C'est l'idée simple qui consiste à employer cette technologie le plus
naturellement possible sans avoir à se poser de questions, comme un enfant. Un
principe assez couramment utilisé aujourd'hui qui peut même rendre la
technologie invisible. L'initiateur de ces principes, c'est évidemment James
Bond ! Nous dépassons là, la notion de technologie intuitive ou invisible pour
voir apparaître une technologie à visage humain. La technologie va évoluer,
elle n'est déjà plus seule, elle ne vit qu'accompagnée. Mais bien plus, demain,
elle ne sera pas accompagnée n'importe comment. C'est une nouvelle évolution.
La vague de personnalisation à laquelle nous assistons depuis la fin des années
90 a pu passer pour une mode, mais ce n'est pas l'indice d'un changement en
profondeur. Il s'agit plutôt de la partie émergée de l'iceberg. La réalité plus
profonde, c'est le besoin d'authenticité, de vérité, d'une réalité plus
conforme aux souhaits des individus. L'homme est en train de comprendre. Des
mouvements contestataires se développent : anti-pub, anti-OGM, anti-vaccins,
anti-produits chimiques, anti-ondes, nouvelles solidarités, consom'acteurs,
adeptes des médecines douces ou dites alternatives… Qui sont-ils ? Ils
appartiennent à une frange mal évaluée car elle n'intéressait personne, aucun
pouvoir politique, mais qui pourrait à terme, représenter le pouvoir montant.
Construire une autre société
On les regroupe
aujourd'hui sous l'appellation “Créateurs de Culture”, une dénomination qui
nous vient des Etats-Unis où ce mouvement, en fort développement, a été
identifié dans les années 80 par le sociologue Paul.H.Ray. Encore morcelé,
atomisé, il se développe et grâce à Internet, se fédère peu à peu. Les liens se
font de plus en plus visibles. Que veulent-ils ? Un monde viable, vivable,
équitable, un monde dont ils pourront profiter longtemps. Ils veulent faire
renaître de vraies valeurs, changer la société de consommation, construire une
autre société. Ils veulent utiliser les technologies, mais “autrement”, leur
but premier ne sera pas le profit, mais de vivre en accord avec eux-mêmes, avec
les autres et leur planète. Ces nouvelles valeurs sociales sont d'ores et déjà
en émergence et les entreprises leur prêtent l'oreille. C'est aussi un nouveau
marché qui pourrait se révéler à terme être le marché de pointe. Un marché où
l'on créerait des packs technologiques qui rassembleront des services humains
associés à une technologie ultra-sophistiquée. Toute médaille ayant son
revers, il nous aura fallu un siècle pour constater les effets pervers de la
technologie, effets qui n'avaient pas été envisagés. C'est ce que nous appelons
“l'effet antibiotique” : tout nouveau, tout beau. Usage à outrance sans avoir
validé les possibilités de “retour sur investissement”. Et quand le mal est
fait, retour à la position raisonnable et recherche des solutions. Nous
estimons que la prospective permet d'éviter l'effet antibiotique. Elle est
indispensable dans la démarche innovation des entreprises d'aujourd'hui, car
elle apporte la dimension humaine nécessaire pour demain.