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Obésité : à quand des industriels responsables ?

L'obésité risque de devenir la norme en France à la fin du siècle. Pour l'OMS, il est urgent de mettre fin à cette pandémie de kilos tueurs. Les industriels refusent toute diabolisation et montent au créneau pour ne pas être mis sur le banc des accusés.

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En 1999, le journaliste Eric Schlossberg publiait un pamphlet qui fit grand bruit : “Fast Food Nation” donnait de l'Amérique l'image d'une nation devenue obèse et accusait les IAA (industries agroalimentaires) de prendre délibérément les enfants pour cible de leurs campagnes publicitaires. Un phénomène américain ? Pas si sûr. Six ans après, dans l'Hexagone, on ne peut plus passer à côté, ni même faire semblant de ne pas savoir. 15 millions de Français sont en surpoids, plus de 11 % sont obèses et, si cela continue, l'obésité sera la norme à la fin du XXIe siècle.

Les raisons sont multiples mais toutes ont en commun les évolutions de rythme de vie et la sédentarité, ajoutées à une alimentation toujours plus riche. Déplacements de plus en plus fréquents en automobile, offre télévisuelle exponentielle, travail tertiaire, bref déclin de l'activité, vont de pair avec une surconsommation d'aliments très denses en énergie accompagnée de messages nutritionnels parfois aberrants. Du coup, « ce sont tous les opérateurs de santé, mais aussi les industriels et les pouvoirs publics qui sont concernés », note le Professeur Bernard Guy-Grand, consultant du service de nutrition de l'Hôtel-Dieu.

« C'est un vrai problème de société. Nous nous activons à faire prendre conscience à tous les opérateurs de l'urgence du problème. Il est important de créer une nouvelle demande davantage orientée sur la santé », poursuit le Dr Marie-Aline Charles, directeur de recherche à l'Inserm U 258. « Avant, on mourait de maladies infectieuses. Aujourd'hui, l'obésité est la cause directe ou indirecte de maladies cardio-vasculaires, de diabète, et, dans le futur, de maladies dégénératives du système nerveux », martèle Daniel Tomé, professeur de nutrition humaine à l'Institut national Agronomique de Paris-Grignon (Ina P-G).

Les IAA sur le banc des accusés ?


« Mangez moins, bougez plus », répètent les pouvoirs publics, l'industrie et les médecins, mais rien ne change. Car voilà, prendre au sérieux l'obésité, c'est s'attaquer à un problème sérieux : l'alimentation. Montrée du doigt par les nutritionnistes et les associations de consommateurs, l'industrie alimentaire pourrait se retrouver plus tôt que prévu sur le banc des accusés si elle ne se penche pas sur cette nouvelle donne. « Les grands problèmes de santé publique auxquels nous sommes actuellement confrontés doivent faire évoluer la relation à l'alimentation des consommateurs », souligne le Professeur Serge Hercberg, médecin nutritionniste et directeur de recherche à l'Inserm. Une consommation excessive de produits snacky ou encore une plus grande sédentarité (qui n'existait pas chez les générations précédentes) font que l'on voit se développer un certain nombre de phénomènes, dont l'obésité infantile. »

L'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (Afssa), dans son rapport “Glucides et Santé” rendu public en octobre 2004, tire la sonnette d'alarme et révèle que 19 % des enfants sont obèses. L'Afssa et le PNNS, Programme national nutrition-santé (voir encadré p. 8) ne diabolisent pas pour autant les IAA : il s'agit juste de faire en sorte que la France ne tombe pas dans la même courbe ascendante de l'obésité qu'aux Etats-Unis. « Ce ne sont pas du tout des agressions envers l'industrie, renchérit Daniel Tomé. Reste qu'il est urgent d'établir des règles évidentes. » C'est ce qu'a fait le projet de loi relatif à la santé publique adopté en août dernier. Cette loi vient d'interdire les distributeurs de confiseries et de sodas dans les écoles à compter du 1er septembre 2005.

Marketing contre messages scientifiques


Taxer la mal-bouffe, subventionner les bons aliments, réduire les teneurs en sucre, en sel et en gras, mais aussi mieux encadrer les publicités et les informations destinées aux consommateurs… Pour combattre l'épidémie de l'obésité qui ronge l'Hexagone, l'OMS, Organisation mondiale de la Santé, en appelle désormais à la responsabilisation des pouvoirs publics et de l'industrie agroalimentaire. L'Afssa souhaite notamment que l'industrie réduise les “glucides simples ajoutés”, particulièrement dans l'alimentation des enfants. La collation matinale à l'école a ainsi été mise à l'index. L'avis de l'agence préconise donc de distribuer un petit déjeuner aux seuls enfants qui ne l'ont pas pris et ce, dès l'arrivée à l'école.

Autres propositions : supprimer l'offre de sucreries diverses au niveau des caisses des grandes surfaces et revoir la publicité sur l'alimentation des enfants. « L'obésité est une maladie difficilement curable, rappelle le Dr Marie-Aline Charles. Il est donc urgent de prévenir, puisque nous ne pouvons pour l'instant guérir. Notre devoir à nous, scientifiques, est d'alerter. Celui des IAA est de modifier l'offre. »

Pour le Docteur Marie-Aline Charles, qui vient d'être récompensée du prix de recherche en nutrition Ajinomoto 2004 pour ses travaux centrés sur les déterminants du développement du surpoids et de l'obésité chez l'enfant, il faudrait que l'eau revienne, par exemple, au goût du jour : « C'est l'alimentation de base. Aux industriels d'opter pour un discours santé et de mieux communiquer dessus. » Une proposition à laquelle l'Ania (Association nationale de l'industrie alimentaire) adhère : « Nous avons un rôle actif à jouer dans la prévention de l'obésité et dans l'information. Il faut que les IAA comprennent que c'est dans leur intérêt global de montrer ce qu'elles font pour avancer. » L'Ania a d'ailleurs mis au point un module de formation sur la nutrition pour impliquer tous les opérateurs, de la PME aux gros groupes. « Aucun aliment n'est mauvais en soi. Ce sont les modes de vie qui changent », ajoutent les industriels qui refusent toute « diabolisation ».

Pour éviter ces accusations, les IAA ont deux fers au feu. D'une part, rectifier le tir et trouver de nouvelles recettes pour conjurer l'obésité et, d'autre part, surfer sur la vague pour proposer des aliments fonctionnels (voir encadré p. 16). Nouvelles recettes, nouveaux discours, nouvelle communication, les industriels ne peuvent en effet rester les bras croisés. Face à la montée de ce fléau, et surtout à la volonté d'agir des pouvoirs publics, les IAA planchent toutes sur de nouvelles gammes pour ne pas être montrées du doigt comme les fabricants de cigarettes l'ont été outre-Atlantique. Reste que, pour la plupart des scientifiques, le marketing des IAA vide de sens leurs messages. Pour Dominique Turck, Professeur de pédiatrie à Lille et président du Comité de nutrition de la Société française de pédiatrie, deux pistes s'offrent aux industriels : travailler sur une taille de portions raisonnable et sur la composition nutritionnelle des produits pour qu'ils ne soient « ni trop sucrés, ni trop salés, ni trop gras ».

Les IAA réagissent…


Sans reconnaître leurs erreurs, ni même leur responsabilité, les IAA changent doucement leur façon de faire. « Auparavant, l'aspect marketing était bien séparé des intérêts des scientifiques. On remarque depuis quatre ans une évolution des structures et une place largement occupée par la nutrition. Ce qui montre que les mentalités au sein des entreprises changent », confirme Amélie Pinot, chargé de mission chez Alcimed, cabinet de conseil en stratégie spécialisé en sciences de la vie. Si, dans un premier temps, les marques ont développé des produits à vocation santé, elles planchent toutes aujourd'hui sur des produits allégés en sel, en sucre et en matière grasse. Nestlé, Danone, Unilever et autres mastodontes de l'alimentaire se sont tous dotés de spécialistes en nutrition (voir encadré p. 12) et font appel régulièrement aux grands pontes de la santé pour cautionner leurs produits. « Notre recentrage en 1996 sur les produits laitiers frais, l'eau et les biscuits prouve l'importance accordée à la nutrition et à la santé », se défend Anne-Sophie Bourhis, responsable des questions nutrition au groupe Danone.

Le groupe a aussi lancé, lors des derniers Entretiens de Bichat en septembre dernier, Danone Santé, une structure qui coordonne les informations destinées au monde de la santé à partir des données de Vitapole, son centre de recherche. La multinationale travaille également à limiter la teneur en sucre de ses produits : Actimel Ananas vient de sortir en version allégée en sucre et 0 % de matière grasse, et Blédina veille à utiliser le moins de sucre possible dans ses recettes. « On ne peut parler aujourd'hui d'opportunisme, puisque nous avons toujours eu un discours santé et nutrition. Face au développement de l'obésité, on doit être encore plus vigilant en termes de communication », ajoute Anne-Sophie Bourhis. Si Danone ne va pas changer fondamentalement les choses, le groupe est conscient qu'il a un rôle à jouer.

… et lancent de nouvelles gammes


Idem chez Nestlé, qui planche sur de nouvelles recettes de céréales ou qui lance, début février, une nouvelle gamme Yoco entièrement repensée pour répondre aux besoins nutritionnels des 3-10 ans. Avec Yoco, Nestlé adopte une nouvelle signature qui se déclinera peut-être sur d'autres familles de produits : le “Contrat enfance et nutrition”, mis en avant sur le packaging. « Nous avons totalement repensé la gamme, justifie Laure Vacarie, chef de groupe Children Nutrition. Nous avons également rectifié les doses de sucre, revu la sélection du lait mais aussi introduit des Omega 3 ou de la vitamine D. » Ainsi, la nouvelle gamme affichera 10 % de sucre en moins par rapport à l'ancienne. « Nous avons beaucoup travaillé sur cette diminution de sucre, explique Simone Prigent, responsable du pôle nutrition de Nestlé. Réduire le dosage en sucre est très complexe car il ne faut pas altérer le goût, la texture, la nature du produit. » Avant d'ajouter : « Nous avons une double démarche : apporter du plaisir tout en garantissant un produit sain sur le plan nutritionnel. »

Tous s'empressent également de respecter les recommandations du BVP (Bureau de vérication de la publicité) et du PNNS en matière de campagnes de communication : éviter les situations sédentaires et montrer les enfants en pleine activité physique. Du coup, Masterfoods affiche sa barre chocolatée Mars Classique dans les magazines tout en préconisant de bouger à travers un pictogramme. Prince, de son côté, fait courir des enfants dans une cour de récréation tout en conseillant d'accompagner ses biscuits d'une pomme et d'une activité physique. Quant à Ferrero, la marque insiste bien sur l'autorité parentale puisque, dans ses pubs TV, les enfants passent par leurs parents pour obtenir un Kinder.

Joane Husson, porte-parole du confiseur, précise : « Jusqu'en janvier 2004, la diffusion de nos publicités TV autour des émissions enfants s'élevaient à hauteur de 5 % de nos investissements publicitaires. Depuis, toutes nos diffusions se font sur une plage horaire adulte. » Encourageant mais peut encore mieux faire, clament en chœur les scientifiques. Ainsi, si Ferrero a arrêté de parler du chocolat pour son apport en magnésium, se limitant à son aspect plaisir, le lancement d'un Nutella allégé n'est pas du tout à l'ordre du jour, pour « des contraintes techniques », explique Joane Husson, avant d'ajouter : « Il est plus pertinent de travailler sur la portion. » Mais voilà, le Nutella en portion n'existe pas en GMS.

Trop de court terme pour satisfaire les scientifiques


Alors, ces initiatives, qu'elles soient issues de nouveaux produits ou de la création d'aliments fonctionnels, sont-elles crédibles et suffisantes pour effacer certaines dérives, certaines communications exagérées ? Pour le Pr Bernard Guy-Grand, les directeurs marketing ont une approche à court terme et ne prennent pas suffisamment en compte les enjeux scientifiques (voir interview p. 14). Un avis que partage Daniel Tomé, qui regrette que les industriels aient encore une approche trop commerciale : « Il s'agit de crédibiliser un discours cohérent de l'ensemble d'une filière et de le faire sur le long terme par des partenariats. » Et de souligner le caractère paradoxal de ce partenariat entre les IAA et les pouvoirs publics : « On ne peut pas faire de prévention santé sans l'industrie. Mais cette dernière doit accepter que les maîtres du jeu soient les pouvoirs publics. »

Pour Olivier Andrault, directeur scientifique à l'association de consommateurs CLCV (Consommation, Logement et Cadre de Vie), seuls les pouvoirs publics devraient pouvoir communiquer en matière de nutrition, « car ce sont les seuls à maîtriser le sujet ». D'autant que les IAA ont eu ces dernières années trop tendance à communiquer sur des faux problèmes, tels que le manque de calcium ou de vitamines. « Il y a cacophonie de messages, ajoute la CLCV. Il est important qu'un fabricant communique sur des aspects où il y a une véritable problématique. » Et pour cause, selon l'Afssa, il n'y a aucune raison de communiquer sur le fait qu'il y a de la vitamine B dans les céréales puisque qu'il n'existe pas ou peu de carence en vitamine B. Olivier Andrault martèle : « On observe qu'une très grande partie des modifications de composition des produits visent à justifier la communication. Nous demandons que les fabricants s'engagent globalement à baisser leur composition en sucre et matière grasse. La communication aurait alors un sens. »

Communication et prévention ne font pas bon ménage


Après avoir été confrontées au nutritionnellement correct (notamment avec Epode - Ensemble prévenons l'obésité des enfants -, implanté en 2003 dans dix villes et découlant du programme Fleurbaix-Laventie), les entreprises doivent donc clairement adhérer au “communiquer correct”. « Les matraquages publicitaires et les messages marketing vont souvent à l'encontre des recommandations scientifiques », note le Professeur Bernard Guy-Grand. « Ce qui n'est pas bon pour la santé, ce ne sont pas les produits, c'est leur communication, insiste le Professeur Serge Hercberg. Tout ce que lancent les IAA est acceptable, c'est la promotion qui est inacceptable. Les enfants ne devraient pas voir un tel matraquage de publicités. A moins qu'il aille dans le bons sens pour leur santé. » Dominique Turck s'emporte : « L'Ania, cet énorme bazar qui gère 5 000 entreprises aux intérêts divers, a soutenu l'idée stupide que la publicité n'incite pas les enfants à la consommation. » Et d'ajouter : « Actuellement, on ne fait plus la différence entre les publicités et les dessins animés proposés aux enfants le matin. Il faut aussi expliquer aux parents que l'on peut vivre avec moins de télévision. »

Au-delà des problèmes de dosage de produits, il semblerait, en effet, que le véritable problème réside dans la communication via l'étiquetage ou la publicité. Ce dernier domaine a suscité déjà de nombreux efforts. Le BVP a ainsi mis à jour des recommandations sur les enfants, invitant les annonceurs à arrêter de promouvoir le grignotage. Reste un gros travail à fournir sur l'information au consommateur. Par la loi du 9 août 2004, relative à la politique de santé publique, la France a marqué la volonté du gouvernement de lutter contre l'obésité. Elle propose ainsi aux annonceurs d'informer les consommateurs sur les ajouts de sucre ou de payer une taxe. Aujourd'hui, le droit dispose de tous les éléments nécessaires pour contrôler ou sanctionner ce type d'information.

La véritable difficulté consiste à apprécier l'équilibre entre la vérité du message et la nécessité de la sanction. Quant à l'étiquetage, c'est sans doute là que les marques ont le plus de travail à faire, les objectifs purement marketing venant perturber le consommateur. A l'unanimité, les étiquettes sont incompréhensibles pour un consommateur noyé dans tant d'informations abstraites. Seule est obligatoire la quantité pour 100 g ou 100 ml. « Il faut absolument instituer une information à la portion et dénoncer les abus de sucre ou de matière grasse », insistent, unanimes, les scientifiques. A Bruxelles et dans les Etats Membres, les efforts se déploient pour que le droit de l'alimentation concourre à la santé publique, mais, là encore, tout reste à faire. Le temps sera long avant que l'équilibre général soit modifié. Seule lueur d'espoir : les conclusions plutôt rassurantes du colloque “Des aliments et des Hommes”, organisé par l'Institut français pour la Nutrition en décembre dernier. Au fil des millénaires, malgré des bouleversements majeurs, l'humain a toujours su s'adapter et construire son identité alimentaire. Reste à savoir s'il en sera de même pour l'obésité.

Le PNNS en six points :


Le Programme National Nutrition Santé (PNNS) vise à améliorer l'état de santé de l'ensemble de la population en agissant sur l'un de ses déterminants majeurs qu'est la nutrition ou l'activité physique. Il comporte six axes stratégiques :

Informer et orienter les consommateurs vers des choix alimentaires et un état nutritionnel satisfaisant.

Eduquer les jeunes et créer un environnement favorable à une consommation alimentaire et un état nutritionnel satisfaisant.

Prévenir, dépister et prendre en charge les troubles nutritionnels dans le système de soins.

Impliquer les industriels de l'agroalimentaire et la restauration collective ainsi que les consommateurs au travers des associations de consommateurs et de leurs structures techniques Mettre en place des systèmes de surveillance alimentaire et nutritionnelle de la population.

Développer la recherche en nutrition humaine : recherches épidémiologiques, comportementales et cliniques.

Engager des mesures et actions de santé publique complémentaires destinées à des groupes spécifiques de population.


Selon l'Afssa, la consommation de certains aliments et boissons a explosé en cinq ans : viennoiseries : + 84 % biscuits sucrés : + 24 % sodas et jus de fruits : + 17 %

La montée de l'obésité, véritable problème de santé publique


Les maladies cardio-vasculaires souvent liées à l'obésité deviennent un problème de santé publique. En France, le coût direct du traitement de l'obésité est de 8 milliards d'euros, celui des maladies cardio-vasculaires de 6 milliards d'euros. Des chiffres qui seront certainement à revoir à la hausse dans les prochaines années. Outre le coût de plus en plus important pour la société, une obésité sévère multiplie par douze le risque de mortalité de l'homme entre 25 et 35 ans. La France comptait l'an dernier 14,4 millions de personnes en “surcharge pondérale”. Quant aux obèses (augmentant de 6 % par an), ils sont déjà 11,3 % de la population, soit 5,3 millions de Français. A cela, ajoutez 19 % d'enfants qui ont des problèmes de poids. Si la tendance ne s'infléchit pas, l'Hexagone aura rejoint en 2020 la situation américaine actuelle, avec 20 % d'obèses. Outre-Atlantique, elle est même en passe de devenir la première cause de mortalité.

Services nutrition, les nouveaux boucliers des IAA


Les services nutrition font désormais partie du paysage des IAA. L'institut Fruit d'Or voit le jour dès les années 70. Le groupe fait le choix de décliner son concept d'allégement en matières grasses sur deux axes : la minceur (marque Effi, par exemple) et la diététique (Fruit d'or équilibre). Idem chez Lesieur qui avait créé un service nutrition en 1984, alors que les fabricants d'huile commençaient à frémir de la vague “anti corps gras”. Nestlé, après s'être investi dans l'étude Fleurbaix-Laventie, évolue également pour passer d'une entreprise de transformation de matières premières agricoles à une entreprise “de nutrition, santé et bien-être”. La modification des recettes existantes, le lancement permanent de nouveaux produits ainsi que le soutien à l'étude épidémiologique Epode (Ensemble prévenons l'obésité des enfants) accompagnent ces nouveaux développements. En 1991, Danone a créé son propre institut, recentrant ces derniers temps sa réflexion sur l'alimentation et la santé autour du thème du “développement harmonieux de l'enfant”. A l'instar d'autres groupes, comme Ajinomoto ou Nestlé, l'Institut Danone décerne chaque année des Prix récompensant de jeunes chercheurs. Même Bonduelle a récemment créé sa Fondation.

Aliments fonctionnels : des avis partagés


Hippocrate l'a dit en son temps : « La nourriture est ton premier médicament. » Aujourd'hui, les IAA le répètent à l'envi. Si certains aliments fonctionnels ont obtenu la caution de grands pontes, ces lancements ont des limites. Depuis 2000, la margarine ProActiv de Fruit d'Or a fait ses preuves. En 2004, forte de son expertise anti-cholestérol et avec l'autorisation du Règlement européen NovelFood, ProActiv a développé une nouvelle gamme enrichie en stérols végétaux. « C'est un produit qui peut assumer la promesse de réduction du mauvais cholestérol, mais attention, ce n'est pas un produit magique. Il est important d'établir une régularité de prise et de bien préciser que ce produit s'adresse aux hypercholestérolémiques », avertit le Pr Bernard Guy-Grand, consultant du service de nutrition de l'Hôtel-Dieu.

Pour les IAA, les aliments ayant des vertus médicales sont un bouclier. Or, les scientifiques restent sceptiques. « Il y a urgence à arrêter de délirer sur des allégations santé farfelues, lance Dominique Turck, président du Comité de nutrition de la Société française de pédiatrie. Il faut des règles du jeu précises, contrairement aux messages troubles d'aujourd'hui. » Pour l'association CLCV (Consommation, Logement et Cadre de Vie), « un état de santé se conçoit dans un ensemble. Un produit ne peut avoir qu'un aspect minime. L'étude est valable s'il améliore l'état de santé de moitié. » Pour le Pr Guy-Grand, « les industriels ne doivent pas trop flirter avec l'univers des médicaments. » A l'unanimité, les scientifiques avertissent : si les médicaments sont soumis à des contrôles et réglementations, ce n'est pas le cas pour les produits alimentaires.

62 %


62 % C'est, en moyenne, la proportion de spots alimentaires destinés aux enfants en France, le mercredi. La moitié de ces publicités concerne les produits sucrés, chocolatés, les bonbons et les boissons.

Ava Eschwège et Aurélie Charpentier

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