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Non, le marketing n'est pas mort

«Les consommateurs décryptent tout ; ils n'aiment rien ; le marketing est mort!» Ipsos est allé vérifier ces idées reçues. Résultats de l'étude exclusive présentée aux Trophées Marketing Magazine.

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L'étude intitulée «Les (gros) mots du marketing décryptés par le consommateur français» et réalisée par Ipsos, en exclusivité pour les Trophées Marketing Magazine, tend à remettre les choses à leur place. «Nous avons voulu répondre à trois questions essentielles, explique Dominique Lévy. Les consommateurs sont-ils aussi experts qu'ils le paraissent? Ont-ils l'impression d'être piégés? Le marketing est-il mort?» Les réponses sont éloquentes: les consommateurs sont moins experts que l'on ne croit et qu'ils ne le pensent eux-mêmes; oui, ils ont parfois l'impression de se faire piéger; non, le marketing n'est pas mort: seulement 1 % des Français le rejette en bloc (marketing, publicité...). 40 % sont négatifs envers la publicité ou le marketing. Les fans sont surtout des femmes de plus de 35 ans, plutôt CSP- («j'adore la pub, des fois»). Et les réfractaires sont des hommes plus jeunes (de moins de 35 ans, plutôt CSP+) . On dénombre autant de vrais fans (21 %) que de détracteurs (19 %). Cinq mots ont été évalués: «marketing», «publicité», «promotions», «marques» et «innovation». 54 % des interviewés déclarent savoir réellement ce qu'est une marque, seulement 26 % savent définir le marketing, 36 % l'innovation, 57 % la publicité et 63 % la promotion. Ipsos relève quelques verbatims significatifs pour illustrer ces termes. Pour décrire les promotions, les consommateurs citent les expressions «moins cher», «bonnes affaires», «se faire plaisir». Quant à la publicité, elle est appréhendée comme la «promotion d'un produit en insistant sur les qualités supposées, sans en souligner les défauts». La marque est définie comme «quelque chose de connu et que tout le monde veut». L'innovation suscite de nombreux items: «nouveautés», «essayer», «voir», «goûter», «risques», «effets indésirables», «santé», «recherche», «concours Lépine», «Foire de Paris», «domotique», «avenir».

Enfin, les consommateurs ne sont pas tendres envers le marketing: «Tous les moyens employés pour faire acheter des produits.» Une chose est sûre, et l'étude le prouve: les répondants sont sélectifs dans leur amour et leur perception de l'utilité. En gros, plus la notion est concrète, plus elle est, logiquement, appréciée. C'est le cas des promotions, mais aussi de l'innovation, des mots doux qui s'opposent aux gros mots que sont le marketing et la publicité.

Méthodologie

1 048 répondants, issus de l'access panel d'Ipsos. Hommes et femmes de 18 à 65 ans. Ne travaillant pas dans des secteurs directement liés à la problématique. Terrain réalisé du 9 au 14 mai 2012, après l'élection présidentielle.

« Des consommateurs intéressés et non hostiles »

3 questions à... Dominique Lévy, directrice générale d'Ipsos Marketing, revient sur cette défiance envers le marketing et la publicité qui épargne (en partie) les marques.


Marketing Magazine: Qu'est ce qui vous a le plus surpris dans les résultats de l 'étude?
Dominique Lévy: Le capital «désir» dont bénéficie toujours la notion de marque, malgré une cote d'amour ambiguë: elle fait autant envie qu'elle suscite la méfiance. Soulignons aussi les valeurs très positives (progrès, modernité, bénéfice) associées au mot «innovation», dont je craignais qu'il ne se soit galvaudé, mais dont l'étude montre qu'il reste synonyme à la fois de plaisir et d'utilité.


Les résultats auraient-ils été différents il y a dix ans?
Si l'on en juge par les baromètres dont nous pouvons disposer, les positions extrêmes de rejet ont tendance à se radicaliser. Je pense cependant que c'est le niveau de familiarité avec ces termes qui a le plus évolué. Même si l'«expertise» des consommateurs ne résiste pas, la plupart du temps, à une analyse un peu approfondie, le sentiment d'expertise, lui, a réellement progressé.


Quel profil risque de prendre de l'importance: les fans, les «contre»?
Probablement ni l'un ni l'autre! A mon sens, le groupe de consommateurs que nous risquons de voir progresser est celui des «intéressés non hostiles». Même s'il est politiquement correct de pourfendre les méfaits de la société de consommation et de son bras armé, la publicité, cela n'entraîne de vrais changements que chez une minorité de consommateurs. En revanche, la défiance, alliée au désir - toujours vivace - et au besoin de continuer à consommer pousse de plus en plus de gens à se comporter en «fans» ou «contre» sélectifs: toujours intéressés (voire experts) mais pas systématiquement hostiles.

Catherine Heurtebise

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