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Les nouveaux territoires du bien-être

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La notion de bien-être est très ancienne, voire antérieure à la pensée judéo-chrétienne. A l'époque, elle recouvrait une dimension spirituelle qui a été plus ou moins abandonnée par la société de consommation, le bien-être devenant matériel. Aujourd'hui, on assiste à un retour du balancier de l'Histoire, avec une prise en compte plus importante d'un équilibre entre corps et esprit, érigeant le bonheur en principe de vie, comme le souligne Pascal Bruckner dans son ouvrage "L'Euphorie perpétuelle, essai sur le devoir de bonheur".

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Les années 2000 marquent un tournant important pour les marques. S'adressant à un consommateur pris entre mondialisation (besoin d'appartenance) et personnalisation (besoin d'individualisation), les marques et les enseignes rivalisent d'ingéniosité pour générer une relation plus chaude, moins abstraite avec le consommateur en tentant de créer une communauté autour des valeurs qui la composent. Deux approches ont pour le moment été identifiées au sein des produits de grande consommation : - Le "consommateur partenaire" : en dehors de la relation marchande, le consommateur est associé à la vie de la marque. C'est l'exemple de Kookaï qui invite ses clientes à poser comme mannequin dans son magazine trimestriel ; - La "marque amie" : de plus en plus personnifiée, la marque revendique une place quotidienne dans la vie du consommateur, y compris en dehors de l'utilisation des produits. Une proximité qui passe de plus en plus par Internet, un support de communication qui autorise une plus grande interactivité (exemples de Diesel créant de toute pièce la rock star Joanna Zychowicz et animant sur le Web un journal à scandale relatant les dernières frasques de la chanteuse).

Les nouveaux produits du bien-être et le réenchantement


En ce début du troisième millénaire, la nouvelle génération de produits intègre une charge émotionnelle forte, puisant sa source essentiellement dans trois registres : - De la magie à la mystique : il s'agit d'une approche holistique de la consommation. L'aromathérapie, qui en constitue pour le moment le courant dominant, n'est en fait que la première étape d'un mouvement plus profond qui s'étend peu à peu l'ensemble des biens de grande consommation. Les exemples hors beauté les plus connus ont été initiés par SoBe pour les boissons sans alcool (Karma étant la dernière référence) et par Aromasoft pour les produits d'entretien. - De l'hédonisme à la polysensorialité : l'emballage, du produit, son contenu et son mode d'utilisation, qui participent tous de la décision d'achat, sont de plus en plus amenés à se remodeler autour d'une perception sensorielle multiple afin de satisfaire un consommateur en quête de plaisirs diversifiés. Parmi les dernières initiatives des industriels, on note un effort particulier relatif aux : - effets thermiques : collant Body Sensor de Mark & Spencer (régule la température du corps selon la température extérieure ; réchauffe quand il fait froid et rafraîchit quand il fait chaud) ; - effets visuels : Mood Changing Color de Toma (vernis à ongle japonais qui change de couleur selon l'intensité de la lumière) ; - effets tactiles : l'effervescence : Fizz Greetings de Good Fortune (boule effervescente pour le bain délivrant un message) ; les picotements : les Secrets d'Angel de Thierry Mugler ; le pétillement : Crazy Shakes de Dairy Crest (boisson contenant des bonbons qui pétillent quand on l'agite). - De la régression à la transgression : en réaction à la morosité dominante des années 90, le consommateur du troisième millénaire cherche à réenchanter sa vie au travers d'une consommation lui offrant un supplément d'âme ou des sensations fortes qu'il ne s'autorise plus dans une société devenue trop angoissante. Certains se réfugient dans une consommation de réconfort. On note à ce propos le grand retour du cadeau Bonux (doublement des ventes depuis sa réintroduction) et le succès outre-Atlantique des "pyjamas-party" (soirée entre copines pour prendre soin de soi). D'autres préfèrent laisser leur violence intérieure s'exprimer en vivant par produit interposé leur attirance pour l'interdit. Plusieurs marques ont investi cette niche, comme Demeter avec son parfum Dirt.

La distribution bien-être et le "retailtainment"


Le bien-être ne serait pas total si la distribution n'avait pas intégré cette notion pour donner naissance à un nouveau concept : le "retailtainment", contraction des mots "retail" et "entertainment". Qualifiés "d'espaces d'aventure" ou encore de "lieux de vie", ces nouveaux points de vente essaient à réintroduire une dimension humaine dans l'acte d'achat. Plus conviviaux, voire interactifs, ils se transforment en laboratoires d'essai où la relation marchande est proscrite (exemple de Décathlon) ou en lieux de rencontre et de divertissement comme la Casa Armani (beauty center, salle de gym, cours de décoratio...) et Etam (salon de coiffure, garderie, espace de restauration diététique). Si le bien-être apparaît déjà comme un acquis, restent deux questions : toutes les marques ont-elles vocation à véhiculer un message de bien-être au risque de le banaliser ? Y a-t-il déjà un après-bien-être pour les marques les plus innovantes ?

 
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Catherine Dupuis

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