Les agences en pleine réorganisation
Lorsque les annonceurs mettent en place des schémas d'optimisation des ressources, leurs prestataires suivent à l'unisson. Et la création dans tout ça ?
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«Plus la maturité des annonceurs s'affirme en marketing services, plus leur
demande va dans le sens d'une véritable expression créative », affirme François
Joret, directeur de création et cofondateur d'Ebb & Flow. Les directions
marketing ne seraient donc pas sujettes à cette frilosité dont elles se
reconnaissent parfois les victimes. Et le poids relatif des marketing services
dans les investissements des entreprises ne serait que l'expression d'un
épanouissement créatif généralisé, d'une perméabilité gagnée à l'innovation.
« L'audace est vendeuse », lance Christine Santarelli. Pour la coprésidente de
Duke, la montée en puissance des acheteurs dans les options communicantes des
entreprises ne constitue pas en soi un frein à l'audace. Tout est question de
culture et de confiance. « Une entreprise comme Nissan, où l'intervention de la
direction achats ne fait pas de doute, nous offre un territoire d'expression
créative de premier plan. » Dans ce concert de reconnaissance éperdue à la
puissance mécène des annonceurs, quelques voix discordantes détonnent avec
discrétion, émanant de directeurs de création et patrons d'agences (pas parmi
les plus petites ni dans les moins créatives). « Huit créations sur dix ne sont
pas retenues par les clients. On en est réduit, malgré tous les efforts
déployés, à sortir des choses d'une banalité effrayante », lance ce responsable
d'agence. Et un de ses homologues de renchérir?: « Il y a de quoi être affligé
par le niveau général de la création dans les marketing services. Notre rôle,
c'est d'aller chercher des idées et non de réduire la création à des
changements de formats, de typographie ou de couleurs. »
Organisation plus empirique que dogmatique
En cause?: la course à la rentabilité, le climat de crainte au sein des entreprises, la multiplication des niveaux de décision - et de frein - directement liée à la diversité des médias et techniques induits par les politiques de marketing services. Et cette fameuse intégration. « Il faut arrêter de raconter des histoires, lance Benoît Héry, vice-président de Grrrey !. L'intégration répond d'abord à une logique d'économies. On n'est pas là dans une recherche d'optimisation de la créativité. » Du coup, le management des agences cède à l'un de ses passe-temps favori?: la réorganisation. Sur la base de réflexions également dictées par ces mêmes logiques de rentabilité qui animent les entreprises clientes. Rapp Collins France, Rapp Digital, Brand & Business Management Services deviennent Rapp Collins Paris. Wunderman, qui a fondu ses deux entités off et on, devrait annoncer incessamment une nouvelle organisation de sa structure créative. Des teams de conception de trois personnes?: un DA issu de la sphère on line, un autre rodé aux techniques du print et un concepteur rédacteur formé aux deux cultures. L'agence devrait parallèlement mettre sur pied un studio de réalisation intégré web et print, ainsi qu'un pôle “contenu” de cinq six personnes (trois journalistes ont déjà été recrutés sur le budget Microsoft). C'est en fait l'ensemble des grandes agences qui se restructure. Avec un bémol chez Ogilvy, qui résiste encore et toujours à la tentation fusionnelle. Du côté des plus petits, ou des pure players, la question de l'organisation et des incidences sur la création relève davantage de l'empirique que du dogme. « Dans nos métiers, c'est l'expérience qui a force de loi. Notre organisation reste très empirique. Le fait de recruter des directeurs artistiques qui viennent de la production vidéo, par exemple, ne répond pas à un schéma théorique. Il reflète à la fois les évolutions de nos métiers et ce que nous projetons comme espoirs dans la manière de les exercer », explique Christine Santarelli. Au sein de l'agence spécialisée en marketing on line, le pôle création a toujours pesé de manière structurante dans l'organisation de l'agence. Les équipes créatives intégrées représentent un quart des troupes. Trois directeurs de création, six DA, un concepteur rédacteur britannique, un studio son, cinq flasheurs, des graphistes… Une vingtaine de personnes pour un effectif global de 80 salariés. Les projets sont partagés par les directeurs de création et l'affectation des DA repose sur un souci de diversité et de contraste. « Il faut éviter la sclérose », soutient Christine Santarelli.
La Bergerie?: et la créativité sera bien gardée…
Dans la lignée de ses expériences de prospective créative, l'agence Grrrey !, en partenariat avec le magazine Blast, lance la Bergerie, “laboratoire d'émergences créatives”. « Il ne s'agit pas d'un bureau de tendances, ni d'une simple ressource de réponses aux briefs. Notre souci est d'aider à définir ce en quoi la création peut faciliter l'émergence des marques », explique Benoît Héry, vice-président de Grrrey ! et coanimateur de la Bergerie avec Philippe Combres, directeur de la publication de Blast. Lieu d'expression pour une palette élargie de disciplines artistiques, cette pépinière de jeunes talents accueille à ce jour une quarantaine de signatures, photographes, DJ, stylistes, architectes, écrivains... La vocation de la Bergerie étant de rallier chaque mois de nouveaux artistes. Blast aura ici fonction de fournisseur de contenu. Un comité de consultants et de créatifs de l'agence publiera une newsletter dont le premier numéro doit sortir ce mois d'octobre. Par ailleurs, la Bergerie bénéficiera, dès le début de l'année 2006, d'un lieu d'exposition et d'échanges entre les différents publics (marques et consommateurs) autour de tendances créatives.