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Les Français et le travail, un divorce bien entamé

La relation au travail s'affaiblit et un sentiment d'insatisfaction s'accroît en France. C'est ce qui ressort de l'enquête menée par TNS Sofres et Eurogroup dans leur Observatoire International des Salariés.

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La crise a changé le regard des salariés sur leur entreprise. C'est ce qui se dégage de la dernière édition de l'Observatoire International des Salariés réalisée par les instituts TNS Sofres et Eurogroup. L'Observatoire révèle ainsi que la crise a nettement affaibli la relation au travail et durci les modes de management. Cependant, les menaces pesant sur l'emploi sont différemment ressenties selon les secteurs (30 % dans le privé contre 21% dans le public) et selon les pays. Si, en moyenne, 27 % des salariés éprouvent ce sentiment, ils ne sont que 15 % en Allemagne, contre 33 % en Grande-Bretagne, 30% aux Etats-Unis et 29 % en France. Signe que la culture influe sur les comportements au travail.

Ainsi, les Américains et les Britanniques assimilent le travail à un «simple gagne-pain». Au contraire, les Allemands y voient une source d'accomplissement de soi. Quant aux Français, ils mettent surtout en avant les contacts humains. Reste que, dans l'Hexagone, le travail est souvent perçu plus comme une contrainte que comme un moyen de s'épanouir. Selon Eurogroup et TNS Sofres, «les chutes de satisfaction s'observent surtout dans le secteur privé et portent, globalement, sur l'équilibre contribution/rétribution». Ainsi, en France, c'est sur l'intérêt même du travail demandé et la charge de travail que le bât blesse (le taux de satisfaction a baissé de 10%), contre la rémunération aux Etats-Unis (-8%), et la reconnaissance des efforts en Grande-Bretagne (-8%). Seule l'Allemagne échappe à ce phénomène. En outre, tous les salariés interrogés s'accordent à dire que les situations à gérer sont de plus en plus complexes. Il en résulte un arbitrage en faveur de la vie privée, puisque 65% confirment qu'ils ne veulent pas sacrifier leur vie personnelle. Seuls les Etats-Unis font exception à la règle.

Un lien affectif dégradé

Cependant, si la relation au travail s'est détériorée, la relation à l'entreprise s'est, à l'inverse, améliorée. «La crise semble avoir renforcé tant le lien affectif vis-à-vis d'employeurs qui résistent dans la tourmente, que l'adhésion à la stratégie poursuivie et la confiance dans les dirigeants», observent TNS Sofres et Eurogroup. Toutefois en France, le lien affectif à l'entreprise tout comme la confiance se sont détériorés. Ainsi seulement 32% des Français ont confiance en leur entreprise et 52% en l'équipe dirigeante! Alors qu'en 2007, les sentiments positifs prédominaient, en 2009 ce sont les sentiments négatifs qui prennent le dessus, tels la déception (37%), la lassitude (35%), et la méfiance (32%). Et seuls 62% pensent que leur employeur a pris les bonnes décisions face à la crise.

Pour expliquer cette «différence» française, TNS Sofres et Eurogroup avancent plusieurs pistes. A commencer par la méfiance bien française envers les élites, le capitalisme libéral et la globalisation. Par ailleurs, les deux instituts remarquent un manque de communication dans les entreprises françaises, qui contribue à un déficit d'adhésion des salariés. Pour preuve, seuls 35% des Français estiment que l'information circule bien dans leur société. Pas de doute, les entreprises françaises ont de gros efforts à fournir pour reconquérir la confiance de leurs salariés. Notamment sur l'attention aux efforts individuels, aux souhaits d'évolution et sur la vision de ce que sera leur métier demain.

@ Phovoir/LD

Méthodologie Enquête TNS Sofres / Eurogroup menée en ligne en juin et juillet 2009 auprès d'un échantillon de 2000 salariés de grandes entreprises ou d'administrations, dans quatre pays (France, Allemagne, Grande-Bretagne, et Etats-Unis), soit 500 salariés par pays.

Aurélie CHARPENTIER

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