Le géomarketing devient stratégique pour la distribution
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C'est davantage sous la pression d'événements extérieurs que sous leur
propre impulsion que les choses ou les disciplines évoluent. Prenez la
distribution et le géomarketing. Pour les enseignes, il semblait logique, sinon
évident, d'utiliser de façon massive des données qui pouvaient leur permettre
d'optimiser, ici une distribution de prospectus, là un emplacement ou une
taille de magasin. Tout semblait si complémentaire que l'on aurait pu croire
que le géomarketing a été inventé pour elles ! On est pourtant assez loin du
compte. « La distribution n'est pas un marché emblématique du géomarketing
comme peuvent l'être les assurances, les télécoms, voire certains secteurs de
l'industrie, estime Guillaume Beauregard, directeur commercial et marketing de
GeoConcept SA, l'un des acteurs majeurs sur ce marché. Non pas que les
distributeurs s'en désintéressent. Dans la mesure où il s'agit d'un marché très
concentré constitué de grandes entreprises, toutes touchent au géomarketing
d'une façon ou d'une autre. Mais à des degrés et à des niveaux stratégiques
très différents, et souvent insuffisants. » Néanmoins, les distributeurs
semblent de plus en plus intéressés. Quelle en est la raison ? Engouement
soudain ? Véritable révélation ? On aurait plutôt tendance à répondre :
environnement concurrentiel et pression extérieure. Les distributeurs ont vécu
quelques belles années sous la protection de la Loi Galland. Affaires
prospères, résultats confortables, dividendes substantiels… pas besoin d'aller
chercher à la marge des sources de développement complémentaires quand le
robinet principal coule à flot. Mais le cycle touche à sa fin. Avant même que
la commission Canivet ne change la donne, Nicolas Sarkozy a tapé du point sur
la table et exigé des distributeurs qu'ils baissent leurs prix, et cela devrait
continuer en 2005. Autant de résultats en moins. Quant à la consommation, elle
est en berne. À ce contexte global, il convient d'ajouter un élément plus
ponctuel, mais ô combien stratégique dès lors que l'on évoque le géomarketing :
la distribution de prospectus. Les notions d'écologie et de développement
durable sont de plus en plus importantes. Qu'elle vienne des pouvoirs publics,
des associations écologiques ou encore des simples citoyens, la pression sur
les distributeurs augmente. Aux de-mandes timides ont succédé de véritables
injonctions, qui seront suivies de mesures touchant les distributeurs au
portefeuille, avec l'instauration d'une taxe sur le papier. Ces deux exemples
le montrent : nous sommes en présence d'un faisceau d'éléments convergents
poussant les enseignes à être plus compétitives, à optimiser leurs
assortiments, leur communication, leur implantation… « Les magasins ont un réel
intérêt à travailler plus qu'ils ne le font aujourd'hui sur la dimension
spatiale de leur activité pour optimiser leurs résultats, estime Anne Catherine
Vianès, directeur de IMDS (Iri Marketing de Site), filiale d'Iri France. Dans
un contexte morose, ils doivent aller chercher de la performance jusqu'aux
confins de leur zone d'attraction. »
Le géomarketing n'est plus réservé à quelques professionnels
Si les utilisateurs changent
d'état d'esprit, les outils changent quant à eux de forme, et d'une certaine
façon, de nature. En la matière, les évolutions vont dans deux directions :
d'une part, une plus grande simplicité, une plus grande accessibilité, qui va
de pair avec une diffusion au local plus large. D'autre part, au plan
stratégique, l'outil prend la direction inverse en remontant vers les centres
de décision des enseignes. Côté simplification, les progrès sont indéniables. «
Rendre les outils plus accessibles est totalement prioritaire pour nous,
explique Guillaume Beauregard. En matière de géomarketing, il existe toujours
deux phases distinctes. La première est celle des études, de la production et
de l'analyse de l'information. La seconde est la phase de diffusion. C'est elle
qui connaît des changements profonds depuis quelques années, notamment depuis
que le prix des licences cartographiques a fondu, il y a trois-quatre ans. Aux
approches “monoposte” réservées à quelques initiés ont succédé des solutions
diffusées à grande échelle, destinées à des utilisateurs qui ne sont pas des
experts, mais plutôt des opérationnels et des hommes de terrain. Ce qui
implique, naturellement, une adaptation des outils, très simples et très
interactifs, à travers des intranets et des extranets permettant l'utilisation
du géomarketing par tout un chacun. Aujourd'hui, c'est en bonne partie
là-dessus que se fait la différence. » Outre les systèmes proposés par les
sociétés leaders sur ce marché (GeoConcept en fait partie, mais aussi Experian,
Asterop…) qui donc intègrent de plus en plus des fonctionnalités permettant aux
non initiés de faire du géomarketing, on voit se développer des outils
privilégiant souplesse, simplicité… et moindre coût. C'est ainsi que Mediapost
propose des petits tableaux tenant sur… une disquette (« Il s'agit d'une
succession de cartes avec préconisation de ciblage, pour des enseignes et des
points de vente qui n'ont ni budget études, ni connaissance marketing ou
géographiques approfondie », affirme Didier Robert, responsable du pôle
géomarketing de Mediapost). Qu'Asterop, en partenariat avec LSA propose un
outil très simple d'emploi à travers le Focus - Atlas de la Distribution. Ou
que TNS Direct se lance dans des études au local, elles aussi destinées à des
enseignes n'ayant pas forcément de gros budgets. L'enjeu ? « Donner aux points
de vente, c'est-à-dire à l'adhérent d'un groupement, au directeur de magasin,
voire à un chef de rayon, des outils compréhensibles et interactifs permettant
de faire évoluer sa zone, d'optimiser son assortiment ou sa distribution de
tracts, » explique Sylvia Alcover, Business Consultant Micromarketing chez
Experian.
Il reste encore beaucoup à faire
Car cette
évolution n'est pas seulement due aux outils et au bon vouloir des opérateurs
de géomarketing. Elle s'appuie sur un constat : le marketing des distributeurs
est de plus en plus local. Après une longue période de forte centralisation,
les enseignes ont laissé plus de liberté au “terrain”, dans un souci
d'adaptabilité et de réactivité. Désormais, responsables marketing et autres
chefs de produits ne doivent plus être les seuls capables de mener une
réflexion marketing. Si l'évolution est amorcée, le chemin est encore long. «
Beaucoup d'enseignes, et non des moindres, s'appuient sur des outils qui ne
sont pas arrivés à maturité. Ou qui ne “redescendent” pas au local, estime
Guillaume Beauregard. Le marché de la distribution est loin d'être saturé et le
potentiel reste considérable. D'autant que les solutions ne sont pas figées et
évoluent constamment. » Quant à la remontée du géomarketing dans les centres de
décision de l'entreprise… disons que le mouvement s'amorce, preuves à l'appui
(voir ci-dessus l'encadré Asterop / Les Mousquetaires). « Aujourd'hui il est
temps de dépasser la question de la représentation cartographique pour créer de
la valeur sur des problématiques plus globales, affirme Christophe Girardier,
directeur général d'Asterop. La Géo intelligence, puisque cette définition me
paraît bien mieux adapté que celle de géomarketing, est véritablement
stratégique et décisionnelle. L'accord que nous avons passé avec les
Mousquetaires, et les investissements que ce groupement a consenti, le
démontrent. Désormais nous sommes entrés dans l'ère des grands projets, pour
lesquels on ne doit plus parler de géomarketing, mais de nouveaux outils
décisionnels. »
IMDS : au plus près des préoccupations des magasins
Filiale d'Iri France, IMDS (Iri Marketing de Site) bénéficie de sa parfaite connaissance de la grande distribution, notamment alimentaire. « Nous la côtoyons chaque jour à travers nos relevés dans 3 700 magasins hypers et supers, explique Anne Catherine Vianès, son directeur. Nous sommes parfaitement au fait de leurs problématiques. » La filiale d'Iri France a développé des applications opérationnelles, tant à l'usage des centrales que des magasins. « C'est un gros travail en R & D, insiste Anne-Catherine Vianès. Nous ne travaillons pas sur la notion de zone de chalandise, au sens de la clientèle actuelle, mais sur la zone d'action du magasin. Il s'agit de la zone légitime et potentielle dans laquelle celui-ci espère drainer des consommateurs. » La délimitation de cette zone s'appuie notamment sur deux composantes fondamentales : le temps d'accès et l'attractivité du magasin. « La définition de cette zone est l'étape la plus difficile. Il est aisé, ensuite, de qualifier et de quantifier la demande à l'intérieur de celle-ci, en fonction de multiples critères. » Sans jamais perdre de vue la logique opérationnelle. « Par rapport aux outils et au savoir-faire qui sont les nôtres, je pense que chaque responsable de magasin doit avoir dans son bureau trois représentations géographiques : celle de sa zone d'action potentielle, celle des clients actuels du magasin et celle des porteurs de la carte de fidélité de l'enseigne. Sachant que notre credo est le suivant : il est insuffisant de travailler sur sa seule zone de chalandise, et a fiortiori sur la zone de ses porteurs de carte si l'on veut réaliser tout son potentiel. » A noter l'intérêt tout particulier que le magasin doit porter aux zones dites “de bascule”, zones sur lesquelles il est en conflit frontal avec un concurrent, et sur lesquelles les consommateurs sont des zappeurs permanents qui passent d'une enseigne à l'autre. « Ces zones sont trop souvent négligées au profit de zones plus “confortables”. Pourtant, le potentiel de chiffre d'affaires peut y être très intéressant », conclut Anne-Catherine Vianès.
TNS Direct joue la complémentarité
Géomarketing ? Oui et non… TNS Direct, filiale fraîchement créée de TNS, se caractérise par un positionnement “décalé” par rapport aux acteurs de ce marché. « Nous mettons en place des études en nous appuyant sur le savoir-faire de TNS, mais avec une organisation plus légère et une forte réactivivité, explique Damien Desport, directeur général. D'où un triptyque qualité / prix / délais très performant. » Hard-discounter de l'étude ? Le terme n'effraie pas TNS Direct. « A la condition que l'on admette que les hard-discounters proposent des produits de qualité… », insiste Damien Desport. Avec AreaFlsh, l'outil proposé par TNS Direct, le géomarketing n'est jamais très loin, même si ça n'en est pas directement. Ne serait-ce que parce qu'il n'y a pas d'application cartographique. TNS Direct se veut complémentaire par rapport aux démarches globales des enseignes en la matière. « D'une part, les grandes enseignes mènent toutes sortes d'études complémentaires au niveau local aux côtés des outils qu'elles ont mis en place : notoriété et image, satisfaction clientèle, etc. C'est précisément notre positionnement, note Damien Desport. D'autre part, nous apportons à des enseignes qui n'ont pas forcément les moyens des grandes enseignes - par exemple des réseaux spécialisés ou des franchisés - une connaissance approfondie de leur zone. »
Les Mousquetaires choisissent Asterop
C'est donc Asterop que les Mousquetaires (huit enseignes, trois mille adhérents, cinquième distributeur européen), ont choisi pour la mise en œuvre de leur système de géomarketing décisionnel, au terme d'un appel d'offres de huit mois. L'offre s'articule autour de trois composants : un système d'Information décisionnel, un référentiel de données cartographiques et statistiques, et enfin, des prestations d'études et d'assistance méthodologique. Pour l'heure, l'outil couvre le déploiement au niveau du siège et des directions régionales. « La prochaine étape prévoit l'équipement, via un réseau intranet, de l'ensemble des directeurs de magasins qui auront dynamiquement accès aux données, explique Christophe Girardier, directeur général d'Asterop. Ce qui me paraît important dans ce contrat, c'est que les Mousquetaires n'ont pas choisi un outil à la place d'un autre. Ils ont bel et bien changé de dimension dans leur approche géomarketing, grâce à un outil qui cumulera une approche résolument métier au niveau du terrain et une approche stratégique de haut niveau pour l'enseigne. » Analyse des zones de chalandise, estimation de potentiels théoriques de vente, simulation de stratégies de développement, analyse prospective, optimisation des opérations de marketing opérationnelles, voilà ce que permettra ce système. « Il sera également très utile pour la mise en œuvre de nouveaux concepts point de vente », conclut Christophe Girardier. Asterop aurait par ailleurs signé un contrat avec un autre opérateur majeur, cette fois dans le domaine de la banque, le Crédit Lyonnais.