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La fonction marketing sous la pression du court terme

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La seconde édition de l'enquête de Strategic Research menée auprès des directeurs marketing, pour Marketing Magazine, indique leurs priorités actuelles et leurs suggestions en matière de prise de décision.

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La pression du court terme est aujourd'hui la contrainte qui a le plus d'impact sur la pratique du marketing. La précédente vague de l'étude (voir Le Guide du Directeur marketing 2008) avait pointé le poids excessif de la direction financière qui pousse le marketing dans une logique de court terme. Les directeurs marketing ne sont pas, par principe, opposés à l'idée de produire des résultats trimestriels, mais certains enjeux s'inscrivent dans un temps plus long: construire une marque ou la repositionner, développer des innovations radicales (par opposition à des rénovations ou des extensions de gamme).

La deuxième tendance lourde concerne les nouveaux médias. Ils ouvrent des possibilités non encore parfaitement explorées par les directeurs marketing. On sait que des pratiques ancrées ne se renouvellent pas aisément, d'autant plus qu'elles reposent sur des arguments encore valides: les nouveaux médias n'ont pas tué la télévision. Les audiences et durées d'écoute restent à des niveaux très élevés qui justifient des investissements. Mais la multiplication des médias et la fragmentation des cibles impliquent un changement profond des pratiques du marketing, notamment vis-à-vis de cibles plus stratégiques.

La baisse du pouvoir d'achat des consommateurs, thème d'actualité en Europe et en France en particulier, oblige les directions marketing à adapter leur offre, leur communication... et les prix de leurs produits et services. Mais cette préoccupation revêt un caractère plus conjoncturel que les deux premières. En lien avec ce thème, la croissance du hard discount n'est pas au coeur de leurs préoccupations.

Améliorer l'efficacité des actions marketing

Quels sont les sujets prioritaires pour les patrons du marketing? D'abord, et avant tout, améliorer l'efficacité des actions marketing (à 61%). On voit ici clairement à quel point cette fonction a définitivement intégré l'impératif de rendement. Désormais, les directeurs marketing doivent rendre des comptes sur leurs budgets. Leurs actions doivent déboucher sur des résultats tangibles. Cela devrait sans doute favoriser un retour à une culture plus quantitative, pour faire suite à une bonne décennie de règne du qualitatif.

Dans un contexte de concurrence forcenée, la fidélisation des clients apparaît comme la seconde priorité pour 53% des professionnels interrogés. La grande majorité des marchés de la grande consommation sont en croissance zéro ou en légère décroissance. La réflexion du marketing porte davantage aujourd'hui sur comment conserver les clients actuels et accroître leur niveau de consommation ou de dépense que sur la mise en place de stratégies de conquête ambitieuses (seule la croissance géographique fait encore rêver). Une posture plus défensive donc, mais orientée sur la maximisation de la valeur. Un marketing moins conquérant, peut-être pour le plus grand bien des consommateurs: on garde à l'esprit les déboires de certains FAI qui ont tout capitalisé sur une croissance effrénée de nouveaux clients au mépris de la qualité du service rendu aux clients existants.

Les autres sujets prioritaires sont: compréhension des marchés et des consommateurs, efficacité de la communication, innovation, optimisation des produits et services. Les problématiques de gestion du portefeuille de marque et la politique de prix semblent plus secondaires, même si elles restent importantes.

Objectiver la décision marketing

Un des résultats les plus surprenants de l'enquête tient dans une (auto) évaluation parfois sévère des décisions prises en matière de marketing: 35% des directeurs marketing reconnaissent que leur entreprise ne prend pas toujours les bonnes décisions marketing. Seuls 52% d'entre eux sont réellement satisfaits des processus de décision marketing, 38% les jugent simplement acceptables et 10% défaillants.

Que suggèrent-ils pour améliorer la situation? Le «time to market» devient décisif pour prendre un avantage concurrentiel: il convient donc de raccourcir les délais de prise de décision. Derrière cette critique, on peut percevoir l'ombre d'autres acteurs de la décision qui n'interviennent pas toujours à bon escient sur un terrain dont ils n'ont pas forcément l'expertise.

Un deuxième axe suggéré est de mieux connecter la stratégie marketing à celle de l'entreprise. Les directeurs marketing ont parfois le sentiment que les arbitrages rendus en marketing ne sont pas en cohérence avec les objectifs stratégiques affichés.

Enfin, et c'est l'argument qui pèse le plus, les directeurs marketing souhaiteraient que les décisions soient plus objectives, plus «fact-based». Cet argument peut a priori surprendre. Alors que les sommes investies dans les systèmes d'information sont conséquentes, les directeurs marketing indiquent que le feeling ou l'émotionnel jouent un rôle persistant dans la décision. Ils militent pour un retour du rationnel. C'est un vieux débat qui refait surface depuis peu, aux Etats-Unis. Dans son ouvrage C'est vraiment moi qui décide?, Dan Ariely, professeur d'économie comportementale au MIT, apporte la démonstration empirique que les décideurs font preuve de moins de rationalité que ne le prétend la théorie économique standard. Ian Ayres, dans Super Crunchers, prétend, exemples à l'appui, que les décisions fondées sur des données chiffrées donnent de meilleures décisions que les jugements d'experts.

Une influence limitée des prestataires extérieurs

Pour 57% des directeurs marketing, les prestataires extérieurs (agences de communication, instituts d'études, consultants) ont un apport important dans la prise de décision. Seuls 4% précisent que ces prestataires jouent un rôle déterminant.

Bien que la décision finale soit du ressort de l'entreprise et de ses dirigeants, il serait légitime d'attendre une contribution plus décisive des prestataires externes. D'autant plus que les directeurs marketing reconnaissent un certain flottement dans leurs propres décisions. Cette contradiction apparente - entre les attentes et la pratique - s'explique par une évaluation mitigée des prestataires extérieurs, notamment dans leur capacité à délivrer des messages opérationnels.

Les instituts d'études, jugés comme ayant l'apport le plus significatif dans la décision, sont de fait sollicités le plus souvent pour ce motif, la satisfaction globale approche 80% (en progression sensible par rapport à 2007). Mais seuls 7% des directeurs marketing sont très satisfaits de leurs instituts. Le taux de «très satisfait» est de 6% sur leur valeur ajoutée, de 6% sur leur capacité à aider à la décision, de 4% sur la pertinence des recommandations et... de 3% sur la capacité à délivrer des messages opérationnels.

La balle est dans le camp des instituts, des agences et des consultants pour recouvrer une crédibilité forte auprès de ces décideurs. Le développement d'outils formalisés permettant une plus grande objectivation de la décision est sans aucun doute un des axes de développement à privilégier. Ces approches doivent être mises en oeuvre par des équipes déterminées à peser sur les problèmes opérationnels des clients plus que sur la fourniture de masse de données brutes ou médiocrement analysées.

Enfin, 49% des responsables marketing estiment que leur fonction pèsera de plus en plus dans les décisions stratégiques de l'entreprise (et 43% qu'elle pèsera autant). Ils étaient 57% l'an dernier à parier sur une influence croissante. Une baisse de confiance donc qui renforce l'urgence pour les prestataires à approcher les directeurs marketing avec des solutions adaptées à la complexité des problématiques actuelles.

Méthodologie

Enquête réalisée on line par Strategic research, du 27 août au 1er septembre 2008, auprès de responsables marketing issus de la base de données nomination (directeurs marketing centraux, directeurs marketing, directeurs marketing & commercial, directeurs...). en tout, 246 questionnaires ont été complétés.

MICHAEL BEN DAVID, DIRECTEUR GENERAL DE STRATEGIC RESEARCH - WWW.STRATEGICRESEARCH.FR

 
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