Home sweet home
Casaniers les Français? En tout cas très attachés au confort et à l'embellissement de leur habitat. Nos compatriotes y consacrent, en effet, 31% de leur budget. Une tendance lourde sur laquelle misent les médias dédiés à ce secteur.
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Valérie Damidot (D&Co):
«Je crois que l'émission est arrivée au bon moment, à une époque où Ton a besoin de rêver, où tout ne va pas très bien dehors et où Ton préfère se recentrer sur son foyer, sa maison.»
Caroline Munoz (Déco 8):
«Notre émission, Déco 8, joue sur les atouts du direct autour d'un thème choisi en recevant les grands noms de la déco et du design mais aussi des artisans et des artistes en devenir.»
Elle accumule les succès d'audience, les marques et les enseignes de bricolage- décoration lui font une cour effrénée, mais Valérie Damidot affirme résister au tourbillon qui l'entoure. Pas question pour elle de se poser en grande prêtresse de la décoration, même si l'énergie qu'elle insuffle à l'émission D&Co qu'elle présente depuis un an sur M6 a clairement permis d'installer un nouveau style sur le petit écran. «Nous n'avons rien inventé mais ce qui différencie D&Co des concepts de décoration avant-après proposés ailleurs en Europe, c'est le fait de travailler avec les gens chez qui nous allons, dans la bonne humeur et sans poudre aux yeux, explique-t-elle. Par ailleurs, je crois que l'émission est arrivée au bon moment, à une époque où tout ne va pas très bien dehors et où Von préfère se recentrer sur son foyer.» Repartie pour une nouvelle saison d'émissions hebdomadaires et pour six prime time, D&Co fait des émules. France 2 a ainsi lancé en avril dernier Change ta chambre!, premier magazine de décoration destiné aux ados, qui, sous la houlette de Laurent Artufel, propose de relooker la chambre d'un adolescent en une journée. Sur Téva, l'émission Téva Déco s'est également mise à l'heure du grand chambardement en intégrant une deuxième partie baptisée «On change le décor» dans laquelle Cendrine Dominguez s'installe chez un téléspectateur pour relooker son intérieur avec lui.
Pas de grands chantiers, en revanche, au programme de Déco 8 qui entame sa deuxième saison sur les écrans de Direct 8. «Tout d'abord, nous n'avons pas les moyens pour investir dans un nouveau concept. Mais surtout, l'idée est déjouer sur les atouts du direct autour d'un thème choisi en recevant les grands noms de la déco et du design, mais aussi des artisans et des artistes en devenir, explique Caroline Munoz, créatrice et présentatrice de l'émission. Une telle émission de déco manquait dans la grille. Aujourd'hui, c'est l'une de celles qui marchent le mieux car le concept est différent et le thème porteur.» Ainsi, la décoration et l'aménagement de la maison ne se limitent plus à une simple rubrique au sein d'une émission. Comme la presse magazine, la télévision entend bien surfer sur l'envie des Français d'investir dans leur cadre de vie.
«Nous n'avons pas augmenté nos budgets pour aller à la télévision»
Interview Premier distributeur de meubles (15,7% de parts de marché en 2006), Conforama a été parmi les premières enseignes spécialisées à investir en TV depuis l'ouverture des petits écrans à la distribution le 1er janvier dernier. Michèle Kerrad, directrice du marketing et de la communication, dresse un premier bilan.
Marketing Magazine: La campagne TV conçue par Draftfcb Paris revendique la meilleure performance de la catégorie distribution. Comment expliquez-vous ce résultat?
Michèle Kerrad: La campagne que nous avons mise à l'écran le 11 mars dernier a, en effet, recueilli un taux d'agrément de 92%. Il s'agit du meilleur score obtenu par une enseigne de distribution depuis que ce secteur est autorisé à communiquer à la télévision. La moyenne des autres campagnes testées étant, selon TNS Sofres, de 76%. Notre campagne a également 69% de taux de reconnaissance publicitaire, contre un standard de 60%. Même si ce score est à relativiser, au regard du peu de créativité de la plupart des campagnes TV de la distribution en général, il est clair que les téléspectateurs ont apprécié l'humour de cette saga qui suit le quotidien d'un Tanguy à l'envers.
MM: La télévision était-elle un passage obligé pour Conforama?
M. K.: C'est surtout un média qui a du sens pour nous. D'une part parce qu'en tant que leader, il était difficile de ne pas être présent la première année, période où l'on s'adresse autant aux consommateurs qu'à l'interne; et d'autre part, parce qu'avec un parc d'environ 180 magasins implantés sur le territoire national, nous avons la couverture suffisante pour communiquer sur toute la France.
MM: A quels objectifs répond cette campagne?
M. K.: Il s'agit d'abord de redonner du contenu à l'enseigne en remettant en avant la signature «Bien chez soi, bien moins cher» qui illustre nos valeurs, en insistant sur les notions de prix, de plaisir d'achat et de proximité. L'humour accessible est là pour gagner des parts de coeur auprès des consommateurs. La télévision est probablement plus facile à manier pour les grandes surfaces spécialisées que les grandes surfaces alimentaires, car il y a un peu plus d'histoire à raconter et plus de facilité à réaliser un film en accord avec nos produits. Les deux films de 20 secondes, diffusés en alternance avec le spot générique de 30 secondes, portent d'ailleurs sur nos deux plus importantes familles de produits: le siège et la literie.
MM: Avez-vous transféré vos budgets TV au détriment d'autres médias?
M. K.: Comme la plupart des distributeurs, nous n'avons pas augmenté nos budgets pour aller en TV. Nous n'avons effectivement pas investi en affichage et en presse magazine. Nous avons, en revanche, maintenu la presse TV pour des campagnes produits et promotionnelles car nous les travaillons un peu comme les catalogues. Nous avons également continué à prendre la parole: en radio, média de trafic par excellence. Par ailleurs, la dimension internet de la campagne a été renforcée avec le mini site de Gaspard, le héros de la série (http://www.conforama.fr/ gaspard/). Les spots de pub sont aussi diffusés sur notre site général.
MM: Avez-vous, comme d'autres distributeurs spécialisés, senti un impact des émissions de TV dédiées à la déco type D&CO?
M. K.: On ne sait pas le mesurer, mais c'est évident. Car, tout en étant du pur divertissement, ces émissions donnent des idées et des envies. Nos ventes de déco explosent, comme celles du marché en général. Ce boom a en plus l'avantage de faire vendre du meuble.
Mais si cette tendance s'est renforcée ces derniers mois, elle n'est pas totalement nouvelle. Téva Déco vient ainsi de fêter ses dix ans d'existence et le groupe M6 conseille également, depuis quelques années déjà, les accros des intérieurs design avec l'émission Intérieurs diffusée sur Paris Première. France Télévisions n'est pas non plus en reste. Le groupe diffuse depuis plusieurs saisons Question Maison et Côté Maison sur France 5. Ces deux programmes, parrainés par Leroy Merlin, figurent également dans la grille de Du Côté de Chez Vous TV, première chaîne thématique dédiée à l'univers de la maison. Cette chaîne, qui fête ce mois-ci son premier anniversaire de présence sur le câble et le satellite, est également la première à porter un nom que les téléspectateurs ne peuvent manquer d'associer à une marque de distribution. Car Du Côté de Chez Vous est aussi le nom du programme court diffusé sur TF1 chaque week- end depuis près de dix ans. Et l'enseigne de bricolage en est le sponsor. «Leroy Merlin est mon partenaire en tant que producteur. Je lui ai concédé la marque Du Côté de Chez Vous en droits dérivés pour l'exploiter dans les magasins, explique Jean-Marc Frantz, créateur et président du groupe Communication et Programme, qui détient 85% de la chaîne. Cette marque bénéficie d'un taux de notoriété de 83% autour de valeurs associées à la maison, c'est pourquoi nous n'avons pas hésité à l'exploiter sur le câble. Par ailleurs, l'univers de la maison est un domaine déjà largement traité en média. Je n'ai donc pas du tout l'impression de faire une chaîne de marque.»
Jean-Pierre Crestou (Option Media):
«Nous avons inséré des bulletins d'abonnement dans les coffrets DVD de rémission D&CO. L'opération a été un succès.»
Les partenariats TV-presse se multiplient
Cependant, cet intérêt accru pour l'art de vivre dans la maison laisse toujours la télévision loin derrière la presse, média à la fois historique et en perpétuel développement sur le sujet. Comme le note Loïc Guilloux, éditeur du pôle féminin de Prisma Presse, qui publie Prima Maison, «si incidence il y a, c'est une incidence positive car cela braque les sunlights sur une thématique porteuse. De plus, ajoute-t-il, il y a une vraie complémentarité entre la télévision où la décoration est traitée à la manière d'un conte de fée et la presse, qui donne envie de rêver mais aussi de réaliser un projet. C'est une source d'inspiration, comme le dit la signature de Prima.» Certains titres misent sur cette complémentarité et sur le poids du «Vu à la télé» en s'associant avec des émissions. Prima Maison est ainsi partenaire de Téva Déco. «Il s'agit d'un partenariat exclusif depuis la création du magazine quasiment», précise Loïc Guilloux. Maisons & Travaux a, pour sa part, souhaité profiter du boom de l'audience de D&Co et s'est s'associe avant l'été à la sortie des coffrets DVD de l'émission. «Nous avons été favorablement surpris par le succès de cette opération et avons dû rapidement réimprimer les bulletins d'abonnement que nous avions insérés dans les coffrets car les 70 000 premiers exemplaires se sont vendus en quelques semaines», indique Jean-Pierre Crestou, directeur de la publicité du titre chez Option Media, régie du magazine. Ce type d'associations fait florès, comme le montre la dernière en date réalisée entre Elle Décoration et l'émission Intérieurs de Paris Première. «Nous partageons les mêmes valeurs car il s'agit de l'une des émissions de décoration les plus haut de gamme, explique Sylvie de Chirée, nouvelle directrice de la rédaction du titre. Ce partenariat, noué en septembre, va monter en puissance à la fin de l'année pour les vingt ans d'Elle Décoration.»
Sylvie de Chirée (Elle Décoration):
«Le partenariat avec rémission Intérieurs de Paris Première que nous avons noué en septembre va monter en puissance à la fin de Tannée pour les 20 ans d'Elle Décoration.»
Une presse en chantier permanent
Cet anniversaire est également l'occasion de faire encore évoluer le magazine, qui avait déjà changé de formule il y a un an, «en développant notamment les productions pour aborder la pratique avec une exigence esthétique. Il faut que la lectrice sente l'amusement que l'on a pris à faire le journal», glisse Sylvie de Chirée. Partenaire pour sa part de l'émission Chic d'Arte, c'est quarante ans que fête Marie-Claire Maison, déjà couronné en juin meilleur magazine de décoration et de jardinage par le SPMI (Syndicat de la presse magazine et d'information) . Là aussi, cet événement est l'occasion de procéder à des aménagements éditoriaux, visibles dès le numéro d'octobre, qui renforcent notamment la partie interactive «Vous & nous» et accentuent la diversification des univers présentés en partie centrale pour développer un peu plus l'inspiration des lectrices.
Ce chantier permanent est à l'image de l'explosion et de la démocratisation de l'univers décoration lui-même. «On est dans le renouvellement là où, avant, on était dans l'héritage. La France est dans une phase de rattrapage de l'Europe du Nord, analyse Véronique Pican, directrice commerciale du pôle féminin au sein de la régie Express Roularta Services. La tendance est plus à l'éclectisme et à la personnalisation. La presse ne doit pas seulement faire rêver, mais aussi permettre de concrétiser ses envies.» D'après la directrice commerciale, c'est dans cette direction que va la nouvelle formule lancée à la rentrée par Maison Française.
Mais il n'est pas toujours simple de se démarquer dans un univers large de plus de 120 titres et qui attire toujours autant les vocations nouvelles. En avril dernier, par exemple, les éditions Larivière n'ont pas hésité à lancer simultanément deux magazines bimestriels consacrés à la décoration, Viva déco et Couleur Maison. «Leur positionnement est différent, confiait alors Holger Wiemann, éditeur du pôle féminin du groupe. Viva déco, vendu 1,90 euro, s'adresse aux 28-40 ans, aux primo-accédants ou aux personnes en seconde installation, adeptes de la décoration un peu expérimentale. Tandis que Couleur Maison, vendu 3 euros, cible les 30-45 ans qui s'installent définitivement, pour qui la décoration est un plaisir et qui aiment le mélange entre ancien et moderne.»
Déco en ligne: le conseil avant tout
- Des sites qui sont des déclinaisons de titres spécialisés, tels que marieclairemaison.com ou art-decoration.fr, en passant par les rubriques déco de AuFeminin.com ou Le Journal des Femmes, la déco est bien installée sur le Net. Quelles informations les internautes recherchent-ils?
Magic-maison.com, site consacré à l'organisation de la maison et aux loisirs créatifs, né des forums de discussion de magicmaman.com, les a interrogés. Il en ressort que 36,9% d'entre eux recherchent avant tout des conseils d'aménagement pour sélectionner les meilleures couleurs, avoir des avis sur l'éclairage ou l'agencement optimal des différentes pièces de la maison. 19,6% font appel aux conseils sur le bricolage et les travaux intérieurs pour rénover et améliorer le confort de leur habitat. 18,9% sont à l'affût d'idées pour créer et fabriquer eux- mêmes du mobilier ou des objets de décoration. Et 15% cherchent les adresses où se procurer des perles rares, avec des idées bien de ce qu'ils recherchent (collecter des années soixante-dix, mobilier professionnel, meubles design, etc.). Seuls 5,7% échangent avec les autres internautes et 3,9% utilisent le Web pour rechercher des contacts de professionnels spécialisés.
Marquer sa différence
Cette segmentation du contrat de lecture est d'ailleurs à l'image de celle dont se prévaut l'ensemble de la presse décoration. «L'hétérogénéité de cette famille fait qu'au premier abord tous les titres semblent se ressembler, confirme Jean-Christophe Gombeaud, directeur marketing du groupe Express-Expansion. C'est pourquoi nous avons réalisé un panorama de la presse déco qui vise à identifier les titres référents de cet univers de manière objective.» Cette étude montre notamment que pour les lectrices, la fonction première de ce type de presse est l'inspiration (91% des réponses) avant l'information (86%) et la détente (57%). «La question est de savoir s'il y a de la place pour autant de titres car si quelques marques fortes résonnent dans la tête du lectorat, je crains qu'il n'y ait aussi beaucoup de cacophonie», dénonce, de son côté, Eric Trousset, directeur du marketing de TNS Media Intelligence. Cette clarification est d'autant plus nécessaire que la famille est à son tour atteinte, même si c'est dans une moindre mesure, par la morosité des investissements en presse magazine. Selon TNS Media Intelligence, les investissements publicitaires réalisés sur le pôle bricolage-décoration étaient stables à +0,1% sur la période janvier-mai 2007 et la pagination en repli de 5,5%. Par comparaison, la presse déco avait terminé l'année 2006 en progression de 8,1% en chiffre d'affaires et de 3,9% en pagination publicitaire. L'arrivée de la distribution spécialisée en TV a-t-elle fait pencher la balance? Les investissements de la distribution en presse déco étaient, en effet, en progression de 15,5% en année complète 2006 mais en recul de 10,7% sur la période de janvier-mai derniers. Les plus de 6 millions d'euros bruts investis en TV par Ikea, comme les quelque 2,8 millions d'euros chacun dégagés par But et Conforama pour investir le petit écran ont forcément réduit leur présence dans les pages de la presse déco. «La distribution spécialisée ne représente pas encore le gros du bataillon des annonceurs, qui sont plutôt des marques qui ne vont pas en TV et n'ont pas, de ce fait, de problèmes d'arbitrage», tempère Loïc Guilloux (Prisma) .
Gagner en visibilité
Pour se démarquer de la concurrence, les titres dédiés à la décoration sont parmi ceux qui investissent le plus sur la visibilité de leur marque. «Nous avons un important budget publicitaire pour communiquer en affichage et en presse sur chaque numéro, explique, par exemple, Corinne Basset-Chercot, directrice de la publicité d'Art et Décoration. Avec une diffusion de neuf numéros par an, notre périodicité ne bénéficie pas d'une visibilité absolue.» Pour certains, la visibilité passe également par la déclinaison de la marque sous forme de produits dérivés dans l'univers de la maison. Aux DVD et produits d'édition de chaînes comme Du Côté de Chez Vous ou d'émissions comme D&Co, répondent les logiciels d'architecture de Maison Magazine ou les séries limitées Citroën C3 Pluriel labellisées Côté Sud et Côté Ouest. Les magazines de décoration sont également de plus en plus enclins à tenir salons. Le salon Vivre Côté Sud vient ainsi de tenir en juin sa neuvième édition. Marie Claire Idées s'est également lancé dans l'aventure l'an dernier pour fêter ses 15 ans et réitère l'opération ce mois-ci au Carrousel du Louvre.