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Etudes santé : plus globales et plus personnalisées à la fois

Tout en gardant leur spécificité, les études marketing médicales évoluent vers plus de maturité, adaptant, chaque fois que cela est possible, des méthodologies venant de la grande consommation. Toujours plus internationales, elles se veulent également plus personnalisées, alors que les laboratoires, à leur tour, découvrent le CRM.

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Avec quelque 30 millions d'euros consacrés aux études ad hoc, les laboratoires pharmaceutiques sont le deuxième client des instituts d'études. A ces investissements ad hoc, il convient d'ajouter 120 millions d'euros supplémentaires qui sont investis dans les panels. On retrouve là des sociétés comme IMS Health, le leader des sociétés de panels dans le médical, mais aussi ACNielsen, Icomed, ou encore des sociétés d'études comme CAM ou Indice Médical, qui ont une forte dimension quantitative.

Martine Croquet (CSA TMO)

: " Le besoin d'expertise internationale se fait d eplus en plus sentir dans les briefs".






Traditionnellement, les études ad hoc dans le domaine médical étaient réalisées par des sociétés d'études spécialisées, positionnées sur les études stratégiques ou tactiques ou les deux. Certaines pouvant être des filiales spécialisées de grands groupes d'études généralistes (Taylor Nelson Sofres Santé, Louis Harris Médical,...). La vingtaine d'adhérents de l'ASOCS (Association des sociétés d'études de l'opinion et du comportement dans le domaine de la santé), qui réalisent ensemble 70 % des études ad hoc des laboratoires, comprend surtout des instituts spécialisés dans le médical, mais aussi quelques généralistes, comme BVA ou Chetochine. C'est pour jouer dans la cour des grands, et entre autres être retenus dans les short lists des grands laboratoires mondiaux, dont les sièges sociaux (et donc les pouvoirs de décision études) se situent, au gré des fusions et acquisitions, de plus en plus aux Etats-Unis, que les instituts ACS et Altis (ex Isis Research) se sont rapprochés pour créer une nouvelle entité, A+A. « Avec un chiffre d'affaires de 10 millions d'euros, A+A est plus crédible à l'international », estime Alain Collomb, qui, au sein de la nouvelle entité, aura la responsabilité de la France ; Pierre Pigeon s'occupant, lui, de l'international avec une équipe dédiée à Lyon. Un bureau a été ouvert dans le New Jersey, au sein de ce que l'on peut appeler la Silicon Valley de l'industrie pharmaceutique. Le rachat par GfK de Custom Research Inc. aux Etats-Unis, de I+G en Allemagne et de Martin Hamblin en Grande-Bretagne, lui donne accès au marché international de l'ad hoc en milieu pharmaceutique. Même démarche pour l'Ifop au Canada. Démoscopie, qui a changé d'actionnaire principal l'an dernier et fait désormais partie du groupe Aegis Research, a créé un département Santé avec une réelle offre en la matière, placé sous la responsabilité de Patrice Meunier, Research Director Pharmaceutical and Healthcare. Au sein du groupe Aegis, Tandem, la filiale de Market Facts aux Etats-Unis est très spécialisée Santé alors qu'AMI en Asie a également une vraie expertise. De là, à monter une entité transversale santé, il n'y a peut-être qu'un pas.

Toujours plus d'études internationales


L'international est également l'un des points forts d'Harris Médical International. NFO Infratest France dispose également d'un département Santé. En revanche, chez RI, qui a pour clients, et depuis longtemps, des laboratoires pharmaceutiques, l'expertise est transversale. « Pour les multinationales, la dimension internationale est au minimum européenne », remarque Pierre Le Sourd, président de Bristol-Myers Squibb/Upsa France-Afrique.

Alain Flinois (Harris Médical)

: " Une fois lancés, les produits ont deux ans pour se faire une place".








A l'image du food ou du secteur automobile, les médicaments développés aujourd'hui disposent de stratégies marketing globales, qui s'appuient sur des études transversales multipays, développant des concepts de communication globaux même si leurs déclinaisons sont plus locales. Selon Pierre Pigeon, « 70 à 80 % des études avant lancement sont internationales » Et on peut estimer à plus de 30 % des études ad hoc des laboratoires celles qui intègrent une composante internationale. « Qu'il s'agisse de nouvelles spécialités, d'un positionnement ou d'un concept de communication globale, d'un retrait de molécule, d'une étude d'image ou d'une gestion de crise, fait remarquer Michel Murino, directeur de Taylor Nelson Sofres Santé, l'aspect international est important. » « Et, renchérit Martine Crocquet, directeur du département Santé chez CSA TMO, le besoin d'expertise internationale se fait de plus en plus sentir dans les briefs de nos clients. » Parce que les produits doivent être lancés dans un maximum de pays en un minimum de temps à un prix optimum, compte tenu des législations et réglementations en cours et de la maturité de chaque marché, les laboratoires n'ont plus droit à l'erreur. « Le retour sur investissements se fait en deux fois moins de temps qu'il y quelques années, souligne Alain Flinois, directeur général de Harris Médical International. Une fois lancés, les produits ont deux ans pour se faire une place. » Et ce, alors que les budgets R&D des laboratoires sont de plus en plus élevés. Le Boston Consulting Group, dans son étude "How genomics and genetics are transforming the biopharmaceutical industry", estime à 880 millions de dollars le ticket d'entrée d'un nouveau médicament. Le seul Bristol-Meyers Squibb/Upsa dispose d'un budget R&D de 2,5 milliards de dollars pour un chiffre d'affaires de 20 milliards de dollars. Le besoin de mesurer, de comparer entraîne une plus forte demande d'études ad hoc quanti, alors que les laboratoires pharmaceutiques étaient traditionnellement plus dans une culture d'ad hoc quali et de panel. « Ils découvrent des méthodologies comme l'analyse conjointe », constate Martine Crocquet. « Nous avons de plus en plus besoin de prendre des décisions fondées sur le rationnel », remarque Corinne Hardy, responsable des études marketing et Business Services chez Aventis Pasteur MSD.

La forte présence du patient


Une tendance de fond traverse les sociétés des pays dit développés, à savoir la montée en puissance de l'individu dans la gestion de la santé. Avec pour corollaire, un besoin toujours plus grand d'informations et une exigence toujours plus forte de transparence. Ce qui change fondamentalement le rapport du patient au médecin et au médicament. Longtemps concentrés sur les seules enquêtes auprès des médecins, les laboratoires se penchent de plus en plus sur le patient. Lors du dernier Semo, Harris Médical International a présenté une étude sur "Stratégie patients : quand le client final devient prescripteur", qui souligne l'influence du patient sur la prescription médicale. « Même si elle se fait indirectement, elle s'exprime au cours de trois périodes critiques : la demande de consultation, la première prescription, le renouvellement ou le traitement au long cours, explique Alain Flinois. Le patient est un acteur de plus en plus incontournable. » De plus en plus actif à l'égard de sa santé, le patient est aujourd'hui à même d'assurer le succès ou l'échec d'un médicament. Parce qu'un médicament aujourd'hui n'est plus seulement prescrit, mais aussi consommé, les études évoluent : plus de quali pour connaître le vécu et l'expérience, « avec des méthodologies et des pratiques venant de la grande consommation, ce qui permet d'avoir un autre regard sur le patient », précise Geneviève Reynaud, directrice adjointe de Research International France. Plus de quali, aussi, « parce que les attitudes et les prises de conscience sont en train d'évoluer, explique Martine Crocquet, et qu'il faut savoir ce qui se passe pour pouvoir mesurer derrière. » Davantage d'études, aussi, confrontant le discours du patient à celui du médecin. Démoscopie propose ainsi "Pathoscope", un outil quanti-qualifié. Il s'agit d'un entretien en face-à-face, sur une pathologie, destiné à interroger les patients chez eux pour connaître les répercussions de cette pathologie sur leur vie quotidienne. « Ce sont des entretiens type mode de vie d'une durée de 1 à 2 heures, complétés par un reportage photo réalisé par l'enquêteur selon un scénario prédéfini, précise Patrice Meunier. Il permet aux laboratoires de mieux connaître les patients et de fournir aux médecins des outils pour mieux les comprendre et donc rendre le traitement plus efficace. » Autre nouvelle étude : "Pharmacheck", qui consiste à aller analyser chez le patient la pharmacie familiale, voir où elle se trouve dans le foyer, qui y a accès, comment elle est renouvelée et, en parallèle, analyser la pharmacie du médecin dans son cabinet. Conséquence : les laboratoires qui, entre temps, ont appelé aux postes de responsables marketing ou études, des professionnels venant du food ou des services, commencent à interroger des sociétés d'études plus généralistes. A leur tour, et pour réduire les coûts dans des contraintes de temps toujours plus fortes, les études santé font appel à de nouveaux outils de recueil de l'information. L'access panel d'Ipsos est qualifié sur des pathologies (diabète, migraine, asthme, hypertension...) et sur une base européenne et américaine. Utilisant les ressources de cet access panel, Ipsos propose désormais des outils en partenariat avec IMS Health : Patientis (qualification de 15 500 individus sur 32 pathologies à des fins d'études ad hoc) ou ConsoNances, une analyse de 12 marchés multicircuit (pénétration, lieu d'achat, fréquence d'achat) et U&A à double entrée (le consommateur en officine d'un côté avec IMS Health, et le consommateur chez lui de l'autre, avec Ipsos Access Panel). Taylor Nelson Sofres dispose également d'un access panel, "Panel Access Santé" (postal), qui comprend 20 000 foyers et 53 000 individus-patients interrogés régulièrement en tant que patients (épidémiologie, satisfaction, qualité de vie). Stratégir, en partenariat avec Jean-Paul Tréguer, développe un Panel Patients Senior à partir de son access panel on line senior (plus de 35 000 personnes). Un défaut, pourtant, commun à tous les access panels, et que souligne Alain Flinois : les access panels, jusqu'à présent, n'incluent pas les individus en institutions.

Multiplication des panels on line


L'autre grande mutation provient d'Internet. D'abord parce que la Toile devient un formidable outil d'information, tout de suite international. Les sites des laboratoires sont légions, les portails santé de plus en plus nombreux. IMS qui avait lancé i-squared, un nouveau portail mondial à destination de l'industrie pharmaceutique, avec un enjeu, le conseil, est en train de préparer une nouvelle génération, plus conviviale. CAM propose depuis quelques mois une pige des bannières sur les sites destinés aux médecins et aux professionnels de la santé, et développe ce service à l'international ainsi qu'une pige éditoriale du Net médical avec moteur de recherche et mots clés (50 premiers produits, 50 premiers laboratoires). Novatest a lancé e-Monitory, un outil de veille de la communication médicale via Internet. Stratégir propose MediTrend, une mesure on line des tendances de prescriptions et valeurs explicatives de ces tendances. Qui dit sites corporate dit études de sites. Anacom, entre autres, réalise des analyses de sites internet-intranet. Et voilà qu'apparaissent dans les laboratoires pharmaceutiques des chefs de projets internet, qui travaillent soit de façon centralisée (Bayer, Sanofi,...) ou par gamme (Glaxo-Wellcome, Aventis, Pfizer). L'autre avantage d'Internet est de fournir un mode de recueil de l'information plus rapide, notamment quand on interroge des médecins. Les panels de médecins on line se multiplient et se veulent internationaux. « La réflexion sur Internet est une vraie réflexion », constate Alain Collomb qui estime qu'Internet n'est qu'un outil parmi d'autres. Si la grande majorité des médecins français est informatisée, tous ne possèdent pas une connexion à Internet et ne consultent pas le Net régulièrement. On est loin du triomphalisme de l'an dernier. « Les études on line se développent peu à peu, mais le volume d'études fait avec Internet est encore faible, souligne Michel Murino. Mais on se doit d'être présent pour répondre avec nos critères de qualité aux premières demandes. »

Les pharmaciens : une nouvelle cible


« Demain, les études auprès des pharmaciens seront incontournables », estime Michel Murino. Pour Pierre Le Sourd, « le marketing de distribution est fondamental », et c'est une problématique que les laboratoires pharmaceutiques découvrent : organisation du "spectacle produit" sur le lieu de vente, optimisation des linéaires, politique de merchandising, rôle du packaging... sont autant de thématiques où les méthodologies du food font merveille. « Les études de packaging, de merchandising et de linéaires se multiplient et se sophistiquent avec des linéaires d'officine reconstitués ou virtuels », constate Patrick Cru, P-dg de Market Audit. Les visites mystères sont désormais réalisées également en officine (Market Audit, A+A). Du fait du droit de substitution et de son rôle de conseil, le pharmacien pèse plus lourd dans la distribution du médicament. De nombreux outils cernent cette cible : ScanTrack Pharma (ACNielsen), PharmaTrend Micro (IMS Health), Baromètre de la substitution (IMS Health). « La problématique Category Management apparaît dans les officines », précise Florence Soyer, directrice de clientèle chez Research International France, en même temps que la fonction de Category Manager dans les laboratoires pharmaceutiques. Et ce, alors, que les officines se regroupent et créent leurs chaînes avec, en amont, des centrales d'achat et de services. Les deux premières enseignes de pharmacie ont pour noms Giphar et Giropharm, avec, à la clé, pourquoi pas, un jour, des marques propres. « Le marketing de distribution devient du trade marketing », souligne Pierre Le Sourd. Qui remarque que trop peu de laboratoires ont des réseaux de VM pour les pharmaciens. « Peu ont vraiment pris conscience du rôle du pharmacien. » Sans oublier le pharmacien hospitalier dont le rôle n'est plus à démontrer et qui nécessite, comme chez BMS, une force de vente spécifique, le plus souvent spécialisée par aire thérapeutique. Dans ce cadre, Démoscopie propose d'adapter VMScopie, entretiens quali en face à face, au travers d'une pathologie aux pharmaciens et aux pharmaciens hospitaliers. De plus en plus confrontés aux problématiques de marque, les laboratoires se rapprochent en cela de la grande consommation. Besoins de benchmarking, de monitoring, de tracking. Sous l'effet des fusions, ils se retrouvent avec des portefeuilles de molécules en concurrence, et se posent des questions d'optimisation de ceux-ci, de rebranding ou de repositionnement. Mais aussi de création de noms. Chez Ipsos Insight, la recherche de noms de produit, de gamme, et la gestion de portefeuilles de marques pour les laboratoires pharmaceutiques est un gros secteur d'activité. Les grandes sociétés d'études viennent avec leurs méthodologies et outils éprouvés en grande consommation (TNS, Ipsos-Novaction, NFO Infratest, BVA) et les adaptent au médical. La multiplication des fusions ont fait perdre aux laboratoires leur identité. « Ils ont besoin de reconstruire une identité et de la mesurer, explique Alain Collomb. De savoir quelle valeur mettre en avant, pour l'interne, pour le médecin, pour le patient, pour le pharmacien. » D'où le besoin de construire une image institutionnelle, là où il y avait surtout une image produit. « Tout cela fait des études complètement différentes », souligne Alain Collomb. Des études "Bilan d'image" apparaissent (IMS Health auprès des médecins mais aussi des pharmaciens, A+A, et l'institut Top qui vient de lancer Top Pharma, réalisée sur le site sécurisé du Quotidien du Médecin). Qui dit marque, dit études de communication, tracking ; qui dit concurrence dit études de satisfaction et même fidélité, un domaine que les sociétés d'études généralistes connaissent bien et peuvent adapter à l'univers des laboratoires pharmaceutiques (NFO Infratest, TNS, Ipsos, Démoscopie, INit Satisfaction, Research International...). Mais les sociétés d'études spécialisées disposent également d'outils propres : A+A propose ainsi Satisfaction 10 000, une analyse comparative de la satisfaction. Avec l'arrivée simultanée sur le marché de nouvelles molécules d'une même classe thérapeutique, avec un remboursement toujours plus difficile des produits éthiques, les laboratoires n'ont d'autres solutions, pour augmenter leur rentabilité, que de prendre en compte la satisfaction de leurs différents clients pour les fidéliser et passer d'une logique produit à une logique client. « La problématique des laboratoires est moins une problématique de conquête aujourd'hui que de fidélisation », remarque Véronique Bonrepaux, directeur clientèle en charge du département Santé chez NFO Infratest France. Améliorer la qualité de la relation client est à l'ordre du jour et le CRM commence à s'introduire dans les laboratoires pharmaceutiques. « Un de nos chantiers est le rapprochement des études marketing et du CRM. Et nous avons de gros projets en matière de segmentation, y compris grand public, sur de nombreux marchés, explique Corinne Hardy. Cela va énormément changer nos façons de travailler. »

Anika Michalowska

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